M.D. v Országos Idegenrendészeti Főigazgatóság Budapesti és Pest Megyei Regionális Igazgatósága.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2023:341
Date27 April 2023
Docket NumberC-528/21
Celex Number62021CJ0528
CourtCourt of Justice (European Union)
62021CJ0528

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

27 avril 2023 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Politique d’immigration – Article 20 TFUE – Jouissance effective de l’essentiel des droits conférés par le statut de citoyen de l’Union – Article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Directive 2008/115/CE – Normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier – Articles 5, 11 et 13 – Effet direct – Droit à un recours juridictionnel effectif – Décision d’interdiction d’entrée et de séjour adoptée à l’égard d’un ressortissant d’un pays tiers, membre de la famille d’un citoyen européen mineur – Menace pour la sécurité nationale – Absence de prise en compte de la situation individuelle de ce ressortissant d’un pays tiers – Refus d’exécuter une décision juridictionnelle suspendant les effets de cette décision d’interdiction – Conséquences »

Dans l’affaire C‑528/21,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Fővárosi Törvényszék (cour de Budapest-Capitale, Hongrie), par décision du 19 juillet 2021, parvenue à la Cour le 26 août 2021, dans la procédure

M.D.

contre

Országos Idegenrendészeti Főigazgatóság Budapesti és Pest Megyei Regionális Igazgatósága,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. C. Lycourgos (rapporteur), président de chambre, M. L. Bay Larsen, vice-président de la Cour, faisant fonction de juge de la quatrième chambre, Mme L. S. Rossi, M. S. Rodin et Mme O. Spineanu‑Matei, juges,

avocat général : M. M. Campos Sánchez-Bordona,

greffier : M. I. Illéssy, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 21 septembre 2022,

considérant les observations présentées :

pour le gouvernement hongrois, par M. M. Z. Fehér et Mme M. M. Tátrai, en qualité d’agents, assistés de M. K. A. Jáger, en qualité d’expert,

pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek et J. Vláčil, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mmes C. Cattabriga, A. Katsimerou, E. Montaguti, Zs. Teleki et M. A. Tokár, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 24 novembre 2022,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 20 TFUE, de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») ainsi que des articles 5, 11 et 13 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (JO 2008, L 348, p. 98).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M.D. à l’Országos Idegenrendészeti Főigazgatóság Budapesti és Pest Megyei Regionális Igazgatósága (direction régionale de Budapest et du comitat de Pest de la direction principale de l’organisme national des étrangers, Hongrie) (ci-après l’« autorité de police des étrangers ») au sujet de la légalité de la décision par laquelle cette autorité a adopté une décision d’interdiction d’entrée et de séjour à l’égard de M.D.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La CAAS

3

L’article 25 de la convention d’application de l’accord de Schengen, du 14 juin 1985, entre les gouvernements des États de l’Union économique Benelux, de la République fédérale d’Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 19 juin 1990 et entrée en vigueur le 26 mars 1995 (JO 2000, L 239, p. 19), telle que modifiée par le règlement (UE) no 265/2010 du Parlement européen et du Conseil, du 25 mars 2010 (JO 2010, L 85, p. 1) (ci-après la « CAAS »), dispose :

« 1. Lorsqu’un État membre envisage de délivrer un titre de séjour, il interroge systématiquement le système d’information Schengen. Lorsqu’un État membre envisage de délivrer un titre de séjour à un étranger qui est signalé aux fins de non-admission, il consulte au préalable l’État membre signalant et prend en compte les intérêts de celui-ci ; le titre de séjour n’est délivré que pour des motifs sérieux, notamment d’ordre humanitaire ou résultant d’obligations internationales.

Lorsque le titre de séjour est délivré, l’État membre signalant procède au retrait du signalement, mais peut cependant inscrire cet étranger sur sa liste nationale de signalement.

[...]

2. Lorsqu’il apparaît qu’un étranger titulaire d’un titre de séjour en cours de validité délivré par l’une des Parties Contractantes est signalé aux fins de non-admission, la Partie Contractante signalante consulte la Partie qui a délivré le titre de séjour afin de déterminer s’il y a des motifs suffisants pour retirer le titre de séjour.

Si le titre de séjour n’est pas retiré, la Partie Contractante signalante procède au retrait du signalement, mais peut cependant inscrire cet étranger sur sa liste nationale de signalement.

[...] »

Le règlement (CE) no 1987/2006

4

L’article 34 du règlement (CE) no 1987/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 2006, sur l’établissement, le fonctionnement et l’utilisation du système d’information Schengen de deuxième génération (SIS II) (JO 2006, L 381, p. 4), dispose :

« 1. Un État membre signalant est responsable de l’exactitude et de l’actualité des données, ainsi que de la licéité de leur introduction dans le SIS II.

2. Seul l’État membre signalant est autorisé à modifier, compléter, rectifier, mettre à jour ou effacer les données qu’il a introduites.

[...]»

La directive 2008/115

5

Les considérants 2, 22 et 24 de la directive 2008/115 énoncent :

« (2)

Le Conseil européen de Bruxelles des 4 et 5 novembre 2004 a recommandé la mise en place d’une politique efficace d’éloignement et de rapatriement basée sur des normes communes, afin que les personnes concernées soient rapatriées d’une façon humaine et dans le respect intégral de leurs droits fondamentaux et de leur dignité.

[...]

(22)

Conformément à la convention des Nations unies de 1989 relative aux droits de l’enfant, [adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 20 novembre 1989,] l’“intérêt supérieur de l’enfant” devrait constituer une considération primordiale pour les États membres lorsqu’ils mettent en œuvre la présente directive. Conformément à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, [signée à Rome le 4 novembre 1950,] le respect de la vie familiale devrait constituer une considération primordiale pour les États membres lorsqu’ils mettent en œuvre la présente directive.

[...]

(24)

La présente directive respecte les droits fondamentaux et observe les principes reconnus, en particulier, par la [Charte]. »

6

L’article 2, paragraphe 2, de cette directive dispose :

« Les États membres peuvent décider de ne pas appliquer la présente directive aux ressortissants de pays tiers :

a)

faisant l’objet d’une décision de refus d’entrée conformément à l’article 13 du code frontières Schengen, ou arrêtés ou interceptés par les autorités compétentes à l’occasion du franchissement irrégulier par voie terrestre, maritime ou aérienne de la frontière extérieure d’un État membre et qui n’ont pas obtenu par la suite l’autorisation ou le droit de séjourner dans ledit État membre ;

b)

faisant l’objet d’une sanction pénale prévoyant ou ayant pour conséquence leur retour, conformément au droit national, ou faisant l’objet de procédures d’extradition. »

7

L’article 3, points 3 et 6, de ladite directive prévoit :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

3)

“retour” : le fait, pour le ressortissant d’un pays tiers, de rentrer – que ce soit par obtempération volontaire à une obligation de retour ou en y étant forcé – dans :

son pays d’origine, ou

un pays de transit conformément à des accords ou autres arrangements de réadmission communautaires ou bilatéraux, ou

un autre pays tiers dans lequel le ressortissant concerné d’un pays tiers décide de retourner volontairement et sur le territoire duquel il sera admis ;

[...]

6)

“interdiction d’entrée” : une décision ou un acte de nature administrative ou judiciaire interdisant l’entrée et le séjour sur le territoire des États membres pendant une durée déterminée, qui accompagne une décision de retour ».

8

L’article 5 de la même directive est libellé comme suit :

« Lorsqu’ils mettent en œuvre la présente directive, les États membres tiennent dûment compte :

a)

de l’intérêt supérieur de l’enfant,

b)

de la vie familiale,

c)

de l’état de santé du ressortissant concerné d’un pays tiers,

et respectent le principe de non-refoulement. »

9

L’article 6 de la directive 2008/115 dispose :

« 1. Les État membres prennent une décision de retour à l’encontre de tout ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 à 5.

2. Les ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d’un État membre et titulaires d’un titre de séjour valable ou d’une autre autorisation conférant un droit de séjour délivrés par un autre État membre sont tenus de se rendre immédiatement sur le territoire de cet autre État membre. En cas de non-respect de cette obligation par le ressortissant concerné d’un pays tiers ou lorsque le départ immédiat du ressortissant...

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