Opinion of Advocate General Sharpston delivered on 3 September 2015.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2015:530
Docket NumberC-235/14
Celex Number62014CC0235
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date03 September 2015
62014CC0235

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME ELEANOR SHARPSTON

présentées le 3 septembre 2015 ( 1 )

Affaire C‑235/14

Safe Interenvios, SA

contre

Liberbank, SA

Banco de Sabadell, SA

et

Banco Bilbao Vizcaya Argentaria, SA

[demande de décision préjudicielle formée par l’Audiencia Provincial de Barcelona (Espagne)]

«Prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme — Directive 2005/60/CE — Mesures de vigilance à l’égard de la clientèle — Directive 95/46/CE — Protection des données à caractère personnel — Directive 2007/64/CE — Services de paiement dans le marché intérieur»

1.

Le litige oppose trois établissements de crédit (Banco Bilbao Vizcaya Argentaria, S.A. (ci-après «BBVA»), Banco de Sabadell, S.A. (ci-après «Sabadell») et Liberbank, S.A. (ci-après «Liberbank») (ci‑après, prises ensemble, «les banques») à un établissement de paiement (Safe Interenvios, S.A., ci-après «Safe») ( 2 ). Les banques ont résilié des comptes dont Safe était le titulaire car elles avaient des suspicions de blanchiment d’argent. Safe soutient qu’il s’est agi d’une pratique commerciale déloyale.

2.

Cela a conduit à se demander si le droit de l’Union, notamment la directive 2005/60/CE ( 3 ), interdit à un État membre d’autoriser un établissement de crédit à appliquer des mesures de vigilance à l’égard de la clientèle à un établissement de paiement. Cette directive prévoit trois types de mesures de vigilance à l’égard de la clientèle (normales, simplifiées et renforcées), selon le risque de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme. Les mesures de vigilance normales à l’égard de la clientèle prévues à l’article 8 comprennent, notamment, l’identification d’un client, ainsi que l’obtention d’informations sur l’objet et la nature envisagée d’une relation d’affaires. L’article 11, paragraphe 1, prévoit que des obligations simplifiées de vigilance s’appliquent lorsque les clients d’un établissement ou d’une personne soumis à cette directive (ci-après les «personnes soumises à la directive») sont eux-mêmes un établissement de crédit ou financier (y compris de paiement) lui-même soumis à la directive. L’article 13 impose des obligations de vigilance renforcées à l’égard de la clientèle dans des situations présentant un risque plus élevé de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme. De surcroit, l’article 5 autorise les États membres à imposer des obligations plus strictes que celles prévues dans d’autres dispositions de la directive sur le blanchiment de capitaux.

3.

Si un établissement de crédit peut être autorisé à appliquer des mesures de vigilance (renforcées) à un établissement de paiement lui-même soumis à la directive sur le blanchiment de capitaux, il est demandé à la Cour dans quelles conditions les États membres peuvent prévoir une telle vigilance renforcée. L’application de ces mesures est-elle subordonnée à une analyse du risque et ces mesures peuvent-elles impliquer d’exiger d’un établissement de paiement qu’il transmette à un établissement de crédit des données concernant ses propres clients et les destinataires des fonds transférés à l’étranger? Ces questions invitent également la Cour à examiner les directives 95/46/CE ( 4 ), 2005/29/CE ( 5 ) et 2007/64/CE ( 6 ).

Le droit de l’Union

Le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

4.

En vertu de l’article 16, paragraphe 1, TFUE, «[t]oute personne a droit à la protection des données à caractère personnel la concernant».

La charte des droits fondamentaux de l’Union européenne

5.

L’article 8, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la «Charte») dispose que «[t]oute personne a droit à la protection des données à caractère personnel la concernant». Conformément à l’article 8, paragraphe 2, «[c]es données doivent être traitées loyalement, à des fins déterminées et sur la base du consentement de la personne concernée ou en vertu d’un autre fondement légitime prévu par la loi».

6.

L’article 52, paragraphe 1, prévoit que «[t]oute limitation de l’exercice des droits et libertés reconnus par la présente Charte doit être prévue par la loi et respecter le contenu essentiel desdits droits et libertés. Dans le respect du principe de proportionnalité, des limitations ne peuvent être apportées que si elles sont nécessaires et répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union ou au besoin de protection des droits et libertés d’autrui».

La directive sur le blanchiment de capitaux

7.

Au considérant 5 de la directive sur le blanchiment de capitaux, il est expliqué que les mesures prises en matière de blanchiment de capitaux et financement du terrorisme devraient être compatibles avec toute autre action engagée dans d’autres enceintes internationales et, en particulier, tenir compte des recommandations du Groupe d’action financière internationale (GAFI) ( 7 ), qui est le principal organisme international de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. La directive sur le blanchiment de capitaux devrait être compatible avec les recommandations du GAFI telles que modifiées de façon significative et étendues en 2003 (ci-après les «recommandations du GAFI de 2003») ( 8 ).

8.

Le considérant 10 indique que les personnes soumises à la directive devraient identifier et vérifier l’identité du bénéficiaire effectif. Pour satisfaire à cet impératif, lesdites personnes devraient être libres de recourir aux registres publics des bénéficiaires effectifs, de demander à leurs clients toute donnée utile ou d’obtenir autrement des informations, tout en tenant compte du fait que l’importance de ces mesures en matière d’obligation de vigilance dépend du risque de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme, lequel varie en fonction du type de client, de relation d’affaires, de produit ou de transaction.

9.

Au considérant 22, il est reconnu que le risque de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme n’est pas toujours le même. Selon une approche fondée sur le risque, le principe devrait être que des obligations simplifiées de vigilance à l’égard de la clientèle peuvent s’appliquer dans des cas appropriés.

10.

Par ailleurs, aux termes du considérant 24, la législation de l’Union devrait reconnaître que certaines situations comportent un risque plus élevé. C’est pourquoi, même si l’identité et le profil commercial de tous les clients devraient être établis, il existe des cas où des procédures d’identification et de vérification de l’identité particulièrement rigoureuses sont nécessaires.

11.

Le considérant 33 indique que la divulgation d’informations visées à l’article 28 ( 9 ) devrait se conformer aux règles régissant le transfert de données à caractère personnel vers des pays tiers telles que définies dans la directive relative aux données à caractère personnel et que, en outre, l’article 28 ne peut pas interférer avec la législation nationale applicable en matière de protection des données et de secret professionnel.

12.

Aux termes du considérant 37, les États membres sont censés adapter les modalités de mise en œuvre de ces dispositions en fonction des spécificités des différentes professions et des différences d’échelle et de taille présentées par les personnes soumises à la directive.

13.

Le considérant 48 indique que la directive sur le blanchiment de capitaux respecte les droits fondamentaux, observe les principes reconnus notamment par la Charte et ne devrait pas faire l’objet d’une interprétation ou d’une mise en œuvre qui ne serait pas conforme à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950.

14.

L’article 1er, paragraphe 1, prévoit: «[l]es États membres veillent à ce que le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme soient interdits». L’article 1er, paragraphe 2, identifie quatre types d’agissements qui, s’ils sont commis intentionnellement, doivent être considérés comme blanchiment de capitaux:

«[…]

a)

la conversion ou le transfert de biens, dont celui qui s’y livre sait qu’ils proviennent d’une activité criminelle ou d’une participation à une telle activité, dans le but de dissimuler ou de déguiser l’origine illicite desdits biens ou d’aider toute personne qui est impliquée dans cette activité à échapper aux conséquences juridiques de ses actes;

b)

la dissimulation ou le déguisement de la nature, de l’origine, de l’emplacement, de la disposition, du mouvement ou de la propriété réels de biens ou des droits y relatifs dont l’auteur sait qu’ils proviennent d’une activité criminelle ou d’une participation à une telle activité;

c)

l’acquisition, la détention ou l’utilisation de biens en sachant, au moment de la réception de ces biens, qu’ils proviennent d’une activité criminelle ou d’une participation à une telle activité;

d)

la participation à l’un des actes visés aux points précédents, l’association pour commettre ledit acte, les tentatives de le perpétrer, le fait d’aider, d’inciter ou de conseiller quelqu’un en vue de le commettre ou le fait d’en faciliter l’exécution».

15.

Conformément à l’article 2, paragraphe 1, la directive sur le blanchiment de capitaux s’applique 1) aux établissements de crédit, 2) aux établissements financiers et 3) aux diverses personnes morales ou physiques suivantes, dans l’exercice de leur activité professionnelle. Ailleurs dans la directive sur le blanchiment de capitaux, ces catégories sont appelées «les...

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