Aventis Pasteur SA v OB.
Jurisdiction | European Union |
Celex Number | 62008CC0358 |
ECLI | ECLI:EU:C:2009:524 |
Docket Number | C-358/08 |
Court | Court of Justice (European Union) |
Procedure Type | Reference for a preliminary ruling |
Date | 08 September 2009 |
CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
Mme VERICA TRSTENJAK
présentées le 8 septembre 2009 1(1)
Affaire C‑358/08
Aventis Pasteur SA
contre
OB
[demande de décision préjudicielle formée par la House of Lords (Royaume-Uni)]
«Directive 85/374/CEE – Responsabilité du fait des produits défectueux – Article 3 – Producteur – Qualification d’un fournisseur comme producteur – Article 11 – Prescription décennale – Mise en circulation d’un produit – Mesures interrompant la prescription – Action introduite par erreur contre une autre entreprise que le producteur – Substitution de la partie défenderesse»
Table des matières
I – Introduction
II – Cadre juridique
A – Droit communautaire
B – Droit national
III – Faits et demande de décision préjudicielle
A – Faits
B – Première demande de décision préjudicielle et arrêt O’Byrne
C – Demande de décision préjudicielle de la House of Lords
IV – Procédure devant la Cour
V – Arguments des parties
VI – Appréciation en droit
A – Première demande de décision préjudicielle et arrêt O’Byrne
1. Première question préjudicielle: date de mise en circulation d’un produit
2. Analyse de la réponse de la Cour à la première question préjudicielle
a) Notion de producteur à plusieurs niveaux au titre de l’article 3 de la directive 85/374
b) Point de départ de la prescription en vertu de l’article 11 de la directive 85/374 à la lumière de l’interprétation fonctionnelle de la notion de producteur
3. Deuxième et troisième questions préjudicielles: mise en cause d’un producteur dans une procédure en cours par le biais de la substitution de partie défenderesse
4. Analyse de la réponse de la Cour aux deuxième et troisième questions préjudicielles
B – Demande de décision préjudicielle de la House of Lords
1. Remarques liminaires
2. Impossibilité d’une substitution de partie défenderesse au détriment d’un producteur après l’expiration du délai de prescription au titre de l’article 11 de la directive 85/374
3. Analyse de la prémisse dans la question préjudicielle de la House of Lords et ses conséquences pour l’application de la directive 85/374
a) Prescription en vertu de l’article 11 de la directive 85/374 et substitution de partie défenderesse avant l’expiration du délai de prescription
i) Cours du délai de prescription en vertu de l’article 11 de la directive 85/374 dans un cas comme celui de la procédure au principal
ii) Possibilité d’une substitution de partie au détriment du producteur avant l’expiration du délai de prescription au titre de l’article 11 de la directive 85/374
b) Conséquences de la qualification d’un fournisseur comme producteur au sens de l’article 3 de la directive 85/374
i) Qualification d’un fournisseur comme producteur au sens de l’article 3, paragraphe 1, première partie, ou de l’article 3, paragraphe 3, de la directive 85/374
ii) Conséquences d’une qualification d’un fournisseur comme producteur au sens de l’article 3, paragraphe 1, première partie, ou de l’article 3, paragraphe 3, de la directive 85/374
4. Résumé
VII – Conclusion
I – Introduction
1. La présente demande de décision préjudicielle de la House of Lords (Royaume-Uni) concerne l’interprétation de l’article 11 de la directive 85/374/CEE du Conseil, du 25 juillet 1985, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux (2). La juridiction de renvoi demande à la Cour des éclaircissements en particulier sur la question de savoir si et à quelles conditions le producteur d’un produit peut, par le biais d’une substitution de partie, être mis en cause comme défendeur dans une procédure dans laquelle la victime a fait valoir par erreur ses droits découlant de la directive contre un fournisseur du produit, lorsque la procédure est introduite avant l’expiration du délai de prescription de dix ans prévu à l’article 11 de la directive 85/374, mais que la demande de substitution de partie défenderesse n’a été présentée qu’après l’expiration de ce délai de dix ans.
2. Cette demande de décision préjudicielle est marquée par la particularité que cette question – bien que formulée autrement – avait déjà été déférée une première fois à la Cour par la High Court of Justice (England & Wales), Queen’s Bench Division, en tant qu’instance précédente dans le même litige et que la Cour y avait répondu dans son arrêt du 9 février 2006, O’Byrne (3). Dans la mesure où la House of Lords en tant qu’instance de pourvoi dans ce litige a des doutes quant à la portée exacte de la solution offerte par la Cour, elle a de nouveau déféré cette question à titre préjudiciel à la Cour.
II – Cadre juridique
A – Droit communautaire
3. L’article 1er de la directive 85/374 prévoit que «[l]e producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit».
4. L’article 3 de la directive 85/374 dispose:
«1. Le terme ‘producteur’ désigne le fabricant d’un produit fini, le producteur d’une matière première ou le fabricant d’une partie composante, et toute personne qui se présente comme producteur en apposant sur le produit son nom, sa marque ou un autre signe distinctif.
[…]
3. Si le producteur du produit ne peut être identifié, chaque fournisseur en sera considéré comme producteur, à moins qu’il n’indique à la victime, dans un délai raisonnable, l’identité du producteur ou de celui qui lui a fourni le produit. Il en est de même dans le cas d’un produit importé, si ce produit n’indique pas l’identité de l’importateur visé au paragraphe 2, même si le nom du producteur est indiqué.»
5. Aux termes de l’article 11 de la directive 85/374:
«Les États membres prévoient dans leur législation que les droits conférés à la victime en application de la présente directive s’éteignent à l’expiration d’un délai de dix ans à compter de la date à laquelle le producteur a mis en circulation le produit, même qui a causé le dommage, à moins que durant cette période la victime n’ait engagé une procédure judiciaire contre celui-ci.»
B – Droit national
6. Le Royaume-Uni a transposé la directive 85/374 par la partie I de la loi de 1987 de protection des consommateurs (Consumer Protection Act 1987), entrée en vigueur le 1er mars 1988.
7. Cette loi a en outre introduit dans la loi de 1980 sur la prescription (Limitation Act 1980) une nouvelle section 11 A, dont la sous-section 3 dispose:
«Aucune action à laquelle cet article s’applique ne peut être intentée après l’expiration du délai de dix ans à compter de la date pertinente […]; le présent paragraphe a pour effet d’éteindre le droit d’action à l’expiration du délai de dix ans prévu ci-dessus et ce, que ce droit d’action soit échu ou non, ou que les délais prévus par les dispositions suivantes de la présente loi aient commencé à courir ou non.»
8. En vertu de la section 35 de la loi de 1980 sur la prescription (Limitation Act 1980), une substitution de partie défenderesse dans le cadre d’une procédure en cours est en principe interdite après l’expiration du délai de prescription. À titre exceptionnel, des dispositions de procédure peuvent cependant accorder aux juridictions le droit d’accepter une telle substitution de partie après l’expiration du délai de prescription.
9. L’article 19.5, point 3, sous a), du code de procédure civile (Civile Procedure Rules) pose une telle possibilité de substitution de partie après l’expiration du délai de prescription en cas d’introduction erronée d’une action contre la mauvaise personne. Les juridictions nationales disposent d’un large pouvoir d’appréciation pour l’application de cette disposition. Elles tiennent compte, à cette occasion, du fait que la partie défenderesse perd l’effet libératoire de la prescription de sorte qu’il n’est fait droit à la demande de substitution de partie, même en cas de respect de toutes les conditions matérielles, que lorsque cela s’avère juste eu égard aux circonstances de l’affaire.
III – Faits et demande de décision préjudicielle
A – Faits
10. M. Declan O’Byrne, défendeur au pourvoi dans la procédure au principal, a été vacciné lorsqu’il était enfant dans un cabinet médical au Royaume-Uni avec le vaccin HIB dont le fabricant était la société française Pasteur Mérieux Sérums et Vaccins SA, qui a plus tard changé de nom pour devenir Aventis Pasteur SA (ci‑après «APSA»). Le vaccin a été commercialisé au Royaume-Uni par la société britannique Mérieux UK Limited, une filiale à 100 % d’APSA. En 1994, APSA a créé une société commune avec la société Merck Inc. Mérieux UK Limited a été transformée en une filiale de cette entreprise commune et a par la suite changé son nom pour devenir Aventis Pasteur MSD (ci-après «APMSD»).
11. Le vaccin administré au défendeur au pourvoi faisait partie d’un lot de plusieurs doses du vaccin HIB, que APSA avait envoyées à APMSD le 18 septembre 1992. Le 22 septembre 1992, cet envoi est parvenu à APMSD qui a correctement payé la facture établie à cet effet.
12. À une date inconnue – vraisemblablement fin septembre 1992 ou début octobre 1992 –, une partie du lot, dont le vaccin administré au défendeur au pourvoi, a été vendue par APMSD au Department of Health (ministère de la Santé) et livrée à un hôpital désigné par celui-ci, qui a à son tour livré le vaccin au cabinet médical dans lequel le défendeur au pourvoi a été vacciné le 3 novembre 1992.
13. Le défendeur au pourvoi a, quelque temps plus tard, souffert de graves lésions cérébrales. Ces lésions ont été provoquées, selon lui, par le vaccin qui aurait été défectueux.
14. Le 2 novembre 2000, le défendeur au pourvoi a introduit un recours contre APMSD. Dans la requête notifiée le 1er août 2001, il a fait valoir que le vaccin aurait été produit par APMSD et serait défectueux. APMSD y a répondu dans son mémoire en défense notifié le 29 novembre 2001, qu’il serait simplement le distributeur du vaccin administré au défendeur au pourvoi. Le 17 avril 2002, APMSD a désigné sur...
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