J. van der Weerd and Others (C-222/05), H. de Rooy sr. and H. de Rooy jr. (C-223/05), Maatschap H. en J. van ’t Oever and Others (C-224/05) and B. J. van Middendorp (C-225/05) v Minister van Landbouw, Natuur en Voedselkwaliteit.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2007:124
Docket NumberC-222/05,C-225/05
Celex Number62005CC0222
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date01 March 2007

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. M. Poiares Maduro

présentées le 1er mars 2007 (1)

Affaires jointes C‑222/05 à C‑225/05

J. van der Weerd

Maatschap Van der Bijl

J. W. Schoonhoven

et

H. de Rooy sr.

H. de Rooy jr.

et

Maatschap H. en J. van ‘t Oever

Maatschap F. van ‘t Oever en W. Fien

B. van ‘t Oever

Maatschap A. en J. Fien

Maatschap K. Koers en J. Stellingwerf

H. Koers

Maatschap K. en G. Polinder

G. van Wijhe

et

B. J. van Middendorp

contre

Minister van Landbouw, Natuur en Voedselkwaliteit

[demande de décision préjudicielle formée par le College van Beroep voor het bedrijfsleven (Pays-Bas)]

«Agriculture – Lutte contre la fièvre aphteuse – Directive 85/511/CEE – Obligation des juridictions nationales de soulever des moyens d’office – Principe d’effectivité – Principe d’équivalence»





I – Introduction

1. Les questions de fond dont le College van Beroep voor het bedrijfsleven (Pays-Bas) a saisi la Cour dans la présente série d’affaires sont identiques à celles qu’il lui avait soumises dans l’affaire Dokter e.a. (2). Elles portent sur l’interprétation de la directive 85/511/CEE du Conseil, du 18 novembre 1985, établissant des mesures communautaires de lutte contre la fièvre aphteuse (3). Dans le cas présent, toutefois, la juridiction de renvoi sollicite l’avis de la Cour concernant un problème qui relève moins de la fièvre aphteuse que des règles de procédure.

2. Dans l’affaire Dokter e.a., les requérants au principal contestaient la légalité de la décision d’abattre les animaux leur appartenant, au motif que la décision était fondée sur une analyse menée par un laboratoire qui n’était pas inscrit à l’annexe B de la directive. Dans les affaires présentes, les requérants au principal ont aussi attaqué la décision d’abattre leurs animaux. Toutefois, dans leurs conclusions devant la juridiction nationale, ils ne se sont pas fondés sur l’argument selon lequel le laboratoire n’était pas inscrit à l’annexe B de la directive, bien que ces affaires concernent exactement le même laboratoire. La juridiction de renvoi demande donc si le droit communautaire lui impose de soulever ce moyen d’office, malgré des règles de procédure internes qui excluraient normalement cette option.

3. J’ai déjà fait part de mes vues sur les questions de fond concernant la directive dans les conclusions que j’ai présentées dans l’affaire Dokter e.a. Je me concentrerai ici sur la question de procédure que soulève la juridiction de renvoi et m’attacherai à replacer les présentes affaires dans l’architecture de la jurisprudence qui s’est mise en place avec les arrêts Peterbroeck (4) et van Schijndel et van Veen (5). On me permettra de relever, cependant, qu’il est difficile de ne pas avoir le sentiment que l’intérêt de cette question pour la solution des litiges au principal n’est qu’incident. En fait, la demande d’avis de la juridiction de renvoi semble découler pour l’essentiel d’un besoin plus général de clarification de la jurisprudence rendue par la Cour dans ce domaine.

II – Les faits et les questions préjudicielles posées par la juridiction de renvoi

4. La procédure devant le College van Beroep voor het bedrijfsleven a pour origine l’épidémie de fièvre aphteuse apparue en 2001, qui a affecté un certain nombre d’États membres. En réponse à l’apparition de cette maladie, les autorités néerlandaises ont pris des mesures pour empêcher qu’elle ne s’étende (6). Ces mesures comprenaient l’abattage préventif des biongulés se trouvant dans les exploitations situées à proximité d’une exploitation contaminée.

5. Sur la base des résultats des tests effectués par le laboratoire ID-Lelystad BV (ci-après «ID-Lelystad»), le Rijksdienst voor de keuring van Vee en Vlees (le service national d’inspection du bétail et de la viande, ci-après le «RVV») a conclu que les exploitations des parties requérantes au principal se trouvaient à proximité d’une exploitation contaminée. Le RVV a par conséquent ordonné l’abattage préventif des animaux se trouvant dans les exploitations des parties requérantes.

6. Devant la juridiction de renvoi, les parties requérantes ont contesté la légalité des décisions d’abattage de leurs animaux pour plusieurs raisons. La juridiction de renvoi a rejeté ces arguments. Toutefois, dans une série d’affaires similaires elles aussi pendantes devant la Cour, les requérants avaient attaqué la légalité de décisions similaires au motif supplémentaire qu’ID-Lelystad n’était pas inscrit à l’annexe B de la directive 85/511. Cet argument est à l’origine de la demande de décision préjudicielle qui a donné lieu à l’arrêt rendu dans l’affaire Dokter e.a. (7).

7. Les questions posées dans l’affaire Dokter e.a. concernaient les articles 11 et 13 de la directive 85/511. Conformément aux articles 11, paragraphe 1, premier tiret, et 13, paragraphe 1, deuxième tiret, les États membres veillent à ce que la manipulation du virus aphteux aux fins de diagnostic ne s’effectue que dans des établissements agréés énumérés sur la liste figurant à l’annexe B de la directive. Le laboratoire indiqué pour les Pays-Bas était CDIC-Lelystad. ID-Lelystad a été créé à partir de CDIC-Lelystad à la suite d’une série de fusions et de reprises, mais n’a jamais été inscrit à l’annexe B. La juridiction de renvoi a donc demandé l’avis de la Cour quant aux conséquences de la désignation de laboratoires de référence dans la directive. Elle pose en outre la question de savoir si, en vertu du droit communautaire, il doit être considéré que les autorités nationales sont liées par les résultats fournis par le laboratoire ayant effectué les analyses.

8. Alors que la demande de décision préjudicielle était toujours pendante devant la Cour, le College van Beroep voor het bedrijfsleven a décidé de poser à la Cour exactement les mêmes questions dans le cadre des présentes affaires. Toutefois, dans le cas présent, il demande aussi si le droit communautaire l’obligeait à soulever d’office la question relative au statut d’ID-Lelystad.

9. La Cour a rendu son arrêt dans l’affaire Dokter e.a. le 15 juin 2006. À la lumière de cet arrêt, la Cour a demandé à la juridiction nationale si elle entendait maintenir sa demande de décision préjudicielle dans les présentes affaires. Par lettre du 27 juillet 2006, la juridiction de renvoi a répondu affirmativement.

10. Dans les présentes conclusions, je traiterai uniquement la question de savoir si le droit communautaire oblige la juridiction nationale à aller au-delà des limites du litige, tel qu’il a été circonscrit par les parties afin d’examiner, d’office, des moyens fondés sur la directive 85/511. Pour ce qui est des autres questions posées, j’invite une fois de plus la Cour à bien vouloir se reporter aux conclusions que j’ai présentées dans l’affaire Dokter e.a. et, inutile de le préciser, à l’arrêt qu’elle a rendu dans cette affaire.

III – Appréciation

Sur la recevabilité

11. Les règles nationales qui interdisent à une juridiction de soulever d’office un moyen ne sauraient faire obstacle à une saisine à titre préjudiciel de la Cour destinée à lui permettre d’apprécier si ces règles sont compatibles avec le droit communautaire (8). Néanmoins, cette saisine serait irrecevable si la demande n’était pas nécessaire à la solution du litige au principal (9).

12. On pourrait être pardonné de penser que la question à laquelle la juridiction de renvoi cherche en l’espèce une réponse est à la limite de l’hypothétique. En effet, la Commission des Communautés européennes a soutenu à l’audience que, vu l’arrêt rendu dans l’affaire Dokter e.a., la réponse à cette question n’aura pas d’influence sur la solution du litige au principal. Bien que je nourrisse une certaine sympathie pour cette analyse, cet argument ne me paraît pas suffisamment convaincant pour conclure que la question posée par la juridiction de renvoi est irrecevable. En principe, il appartient à la juridiction de renvoi «d’apprécier tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu’elle pose à la Cour» (10). Qui plus est, les effets que produira l’arrêt rendu dans l’affaire Dokter e.a. ne sont pas encore tout à fait certains, dans la mesure où il laisse une marge d’appréciation à la juridiction de renvoi. Pour ces raisons, j’estime que la question posée est recevable.

Les exigences du droit communautaire en ce qui concerne les règles nationales de procédure

13. La Cour a insisté à plusieurs reprises sur le «principe de l’autonomie procédurale», qui signifie que les juridictions nationales, lorsqu’elles appliquent le droit communautaire, doivent le faire à la lumière de leurs propres règles nationales de procédure. Ainsi, en l’absence d’harmonisation de ces règles, «il appartient à l’ordre juridique interne de chaque État membre de désigner les juridictions compétentes et de régler les modalités procédurales des recours destinés à assurer la sauvegarde des droits que les justiciables tirent de l’effet direct du droit communautaire» (11).

14. Cela n’exonère toutefois pas totalement les règles nationales de procédure des obligations qu’impose le droit communautaire. Selon une jurisprudence constante, les règles de procédure internes doivent respecter le principe d’équivalence et d’effectivité (12).

15. Le principe d’équivalence impose que les mêmes règles de procédure s’appliquent aux recours fondés sur le droit communautaire et aux recours comparables fondés sur le droit national (13).

16. Le principe d’effectivité implique que l’attribution de droits par l’ordre juridique communautaire ait une signification en pratique. Il...

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