Antonio Crispoltoni v Fattoria autonoma tabacchi di Città di Castello.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1991:125
Date19 March 1991
Celex Number61989CC0368
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-368/89
EUR-Lex - 61989C0368 - FR 61989C0368

Conclusions de l'avocat général Mischo présentées le 19 mars 1991. - Antonio Crispoltoni contre Fattoria autonoma tabacchi di Città di Castello. - Demande de décision préjudicielle: Pretura circondariale di Perugia - Italie. - Organisation commune des marchés dans le secteur du tabac brut - Validité des règlements (CEE) n. 1114/88 et n. 2268/88. - Affaire C-368/89.

Recueil de jurisprudence 1991 page I-03695


Conclusions de l'avocat général

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Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

1 . Les présentes conclusions concernent la question préjudicielle qui nous est posée dans le cadre d' un litige opposant M . Antonio Crispoltoni, planteur de tabac en Ombrie, à une société d' exploitants agricoles dont il est membre, la Fattoria autonoma tabacchi di Città di Castello ( ci-après "Fattoria ").

2 . M . Crispoltoni ayant livré du tabac en feuilles de la variété Bright à l' organisme défendeur, il a perçu, à titre d' avance et contre paiement d' une caution, la prime prévue à l' article 3, paragraphe 1, du règlement ( CEE ) n 727/70 du Conseil, du 21 avril 1970, portant établissement d' une organisation commune des marchés dans le secteur du tabac brut ( 1 ) ( ci-après "règlement de base "). Toutefois, suite à l' entrée en vigueur des règlements ( CEE ) n 1114/88 ( 2 ) et ( CEE ) n 2268/88 ( 3 ), cette prime a été diminuée de 5 %, et l' organisme d' intervention italien en a demandé la restitution partielle à la Fattoria qui a répercuté cette demande sur ses membres . M . Crispoltoni a alors saisi le pretore di Perugia pour faire constater qu' il n' était pas obligé de payer la somme en cause à la Fattoria .

3 . Le juge de renvoi nous demande de statuer sur la "validité des règlements du Conseil n 1114/88, du 24 avril 1988, et n 2268/88, du 19 juillet 1988 ".

4 . Le premier de ces règlements a modifié le règlement de base en mettant en place dans le secteur du tabac le régime dit "des quantités maximales garanties" en vertu duquel, si la production dépasse un certain seuil, les prix d' intervention et les primes relatives aux différentes variétés de tabac sont automatiquement diminués en proportion du dépassement . Il a aussi fixé la quantité maximale garantie pour l' ensemble des variétés de tabac à 385 000 t pour chacune des récoltes de 1988, 1989 et 1990 .

5 . Le second règlement a arrêté, pour la récolte 1988, les prix et les autres éléments prévus par le règlement de base, y compris les quantités maximales garanties relatives à chacune des variétés de tabac . En ce qui concerne la variété Bright, ce chiffre a été fixé à 38 000 t . La production de l' année 1987 s' était élevée à 40 802 t, et il s' est avéré par la suite ( 4 ) que la production effective de 1988 a atteint le niveau de 42 105 t .

6 . Nous voudrions signaler à titre liminaire que nous partageons le point de vue du Conseil selon lequel il résulte de l' ordonnance de renvoi que la question posée vise en réalité à savoir si les deux règlements sont valides pour autant qu' ils portent sur la fixation d' une quantité maximale garantie en ce qui concerne le tabac de la variété Bright pour la récolte 1988 ( 38 000 t ).

7 . Le Conseil doute, toutefois, de la réalité du litige au principal et souligne, à cet égard, le caractère particulier du contexte dans lequel il est survenu . Il fait état de l' existence d' une délibération du conseil régional d' Ombrie qui mentionne l' existence des procédures engagées devant les tribunaux nationaux et communautaires pour faire constater l' illégalité de certains règlements . Le Conseil attache également une certaine importance au fait que la partie défenderesse dans le litige au principal soit la Fattoria, dont le requérant est membre, plutôt que l' organisme d' intervention italien .

8 . A cet égard, il suffit de rappeler la jurisprudence constante de la Cour selon laquelle

"il appartient aux seules juridictions nationales qui sont saisies du litige et doivent assumer la responsabilité de la décision judiciaire à intervenir d' apprécier, au regard des particularités de chaque affaire, tant la nécessité d' une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre leur jugement que la pertinence des questions qu' elles posent à la Cour" ( 5 ).

9 . Les circonstances évoquées par le Conseil ne nous paraissent pas de nature à permettre à la Cour de faire exception à cette jurisprudence en contestant l' usage fait par le juge national de son pouvoir de poser une question préjudicielle .

10 . Venons-en maintenant au fond du problème . La juridiction de renvoi doute de la validité des deux règlements concernés au motif qu' ils seraient contraires aux principes de la confiance légitime, de la non-rétroactivité des actes juridiques et de la sécurité juridique .

11 . Or, à travers une longue série d' arrêts, la Cour a confirmé que,

"si, en règle générale, le principe de la sécurité des situations juridiques s' oppose à ce que la portée dans le temps d' un acte communautaire voie son point de départ fixé à une date antérieure à sa publication, il peut en être autrement, à titre exceptionnel, lorsque le but à atteindre l' exige et lorsque la confiance légitime des intéressés est dûment respectée" ( 6 ).

12 . Puisqu' il résulte de cette jurisprudence que le principe de la sécurité juridique interdit l' application rétroactive d' un acte sauf dans les cas exceptionnels où les deux conditions définies par la Cour sont remplies, nous n' avons pas besoin de consacrer d' autres développements à ce principe, mais nous pouvons nous limiter à examiner si l' application rétroactive du nouveau régime était indispensable et si la confiance légitime des intéressés a été respectée .

13 . Il est vrai qu' en l' espèce les deux règlements du Conseil n' ont pas formellement vu "leur point de départ fixé à une date antérieure à leur publication ". Le règlement n 1114/88 a, en effet, été adopté le 25 avril 1988, et il est entré en vigueur le jour de sa publication, à savoir le 29 avril 1988 . Le règlement n 2268/88, quant à lui, est daté du 19 juillet 1988; il est également entré en vigueur le jour de sa publication, soit le 26 juillet 1988 .

14 . Le fait est cependant qu' à la date du 29 avril 1988 les producteurs de tabac avaient fait leurs choix de production pour 1988 et qu' à la date du 26 juillet 1988 la récolte était en cours . Il est, en effet, constant, ainsi que le pretore nous le signale, que le tabac de la variété Bright est semé dans les lits de semence spéciaux au cours du mois de février et que la transplantation en champ des jeunes plantes a lieu avant la fin du mois d' avril . C' est cette transplantation qui semble être l' opération entraînant les plus grandes dépenses et déterminant les superficies cultivées . Il n' est pas contesté non plus que la récolte commence en juillet .

15 . Le principe de la limitation de la garantie ayant donc été...

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