Frans Gschwind v Finanzamt Aachen-Außenstadt.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1999:132
Docket NumberC-391/97
Celex Number61997CC0391
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date11 March 1999
EUR-Lex - 61997C0391 - FR 61997C0391

Conclusions de l'avocat général Ruiz-Jarabo Colomer présentées le 11 mars 1999. - Frans Gschwind contre Finanzamt Aachen-Außenstadt. - Demande de décision préjudicielle: Finanzgericht Köln - Allemagne. - Article 48 du traité CE (devenu, après modification, article 39 CE) - Égalité de traitement - Non-résidents - Impôt sur le revenu - Barème d'imposition pour les couples mariés. - Affaire C-391/97.

Recueil de jurisprudence 1999 page I-05451


Conclusions de l'avocat général

1 La présente affaire a pour origine la demande, introduite en Allemagne par un travailleur employé dans cet État, de nationalité néerlandaise et résidant avec son épouse aux Pays-Bas, visant à se voir reconnaître le droit d'opter pour la méthode et le barème d'imposition du «splitting», aux fins de l'assujettissement à l'impôt sur le revenu des personnes physiques. Le Finanzgericht Köln (Allemagne) pose à cet égard, conformément à l'article 177 du traité CE, une question préjudicielle visant à savoir si les dispositions du droit communautaire qui régissent la libre circulation des travailleurs s'opposent à ce que ledit droit d'option, dont bénéficient dans tous les cas les couples résidant en Allemagne, soit subordonné, pour les couples non-résidents, à la condition que le revenu mondial du couple soit imposé en Allemagne à concurrence de 90 % au moins ou, à défaut, que le revenu du foyer perçu à l'étranger et non soumis à l'impôt dans cet État membre ne dépasse pas 24 000 DM par exercice fiscal.

I. La législation allemande en matière d'impôt sur le revenu

2 En vertu de l'article 1er, paragraphe 1, de la loi allemande relative à l'impôt sur le revenu (Einkommensteuergesetz), les personnes physiques qui ont leur domicile ou leur résidence habituelle sur le territoire allemand sont intégralement assujetties à l'impôt (quel que soit le lieu de perception de leurs revenus). Conformément au paragraphe 4 du même article, les personnes physiques qui n'ont pas de domicile ni de résidence habituelle en Allemagne sont partiellement assujetties (uniquement pour les revenus perçus dans cet État).

3 En règle générale, les revenus du travail font l'objet d'une retenue à la source opérée par la personne qui verse le salaire. Pour l'application de cette retenue, les contribuables intégralement assujettis sont répartis en plusieurs classes d'imposition. Les célibataires relèvent de la classe I. Les personnes mariées non séparées relèvent de la classe III et ont le droit d'opter pour l'imposition conjointe avec application de la méthode et du barème d'imposition du «splitting» s'ils résident l'un et l'autre en Allemagne. Les contribuables partiellement assujettis relèvent, indépendamment de leur état civil, de la classe I.

4 Par suite de la modification législative intervenue en 1996 en vue d'adapter le régime de l'impôt sur le revenu des assujettis non-résidents à la jurisprudence développée par la Cour dans ses arrêts Schumacker (1) et Wielockx (2), l'assujetti marié qui ne possède ni domicile ni résidence habituelle en Allemagne peut, indépendamment de sa nationalité, être traité, à sa demande, comme intégralement assujetti à condition qu'au moins 90 % de son revenu mondial perçu au cours de l'exercice fiscal soit imposé en Allemagne ou que le revenu perçu à l'étranger, non soumis à l'impôt dans cet État, ne dépasse pas la somme de 12 000 DM.

5 Toutefois, l'assujetti ressortissant d'un État membre de l'Union européenne ou d'un État auquel s'applique l'accord sur l'Espace économique européen (3), domicilié dans l'un de ces États, peut être assimilé au contribuable intégralement assujetti et, comme tel, avoir le droit d'opter pour l'imposition conjointe et de relever de la classe III aux fins de la retenue à la source, sous réserve que soient remplies les conditions suivantes:

- que son conjoint ait son domicile ou sa résidence habituelle sur le territoire d'un autre État membre de l'Union européenne ou d'un État auquel s'applique l'accord sur l'Espace économique européen;

- et qu'au moins 90 % du revenu mondial du couple perçu au cours de l'exercice fiscal soient soumis à l'impôt en Allemagne ou, à défaut, que le revenu perçu à l'étranger, non soumis à l'impôt dans cet État, ne dépasse pas, au cours de la même période, la somme de 24 000 DM.

Dans ce cas, le conjoint est lui aussi traité comme intégralement assujetti, avec application de la méthode et du barème d'imposition du «splitting» pour déterminer le montant de l'impôt. Cette méthode, dont l'application est limitée aux couples mariés, se fonde sur la fiction que chacun des conjoints a contribué pour moitié au revenu global soumis à l'impôt. Pour déterminer le montant de l'impôt, on additionne les bases imposables des deux époux, la somme ainsi obtenue est divisée par deux, la formule mathématique fixée par la loi est appliquée à la moitié et le résultat est multiplié par deux. Le total représente la somme que doivent verser les conjoints.

L'application de cette méthode entraîne la reconnaissance de certains avantages fiscaux relatifs à la déduction de frais liés à la situation personnelle et familiale du couple (par exemple, la déduction du double de la somme forfaitaire prévue au titre des dépenses de prévoyance sociale, la déduction des frais de consultation de conseils fiscaux et celle des frais de formation professionnelle), quel que soit le conjoint en ayant bénéficié ou les ayant supportés.

Lorsque seul l'un des conjoints perçoit des revenus ou qu'il existe une grande différence entre les revenus de l'un et de l'autre, cette méthode permet d'atténuer la progressivité des taux. En revanche, ses avantages sont pratiquement neutralisés lorsque les revenus des deux conjoints sont plus ou moins équivalents.

6 Cette méthode a été adoptée à la suite d'un arrêt du Bundesverfassungsgericht rendu en 1957 et se fonde sur la règle fondamentale énoncée à l'article 6 de la constitution allemande (Grundgesetz), qui place la famille sous la protection spéciale de l'État. Cet arrêt a jugé que les époux ne pouvaient être soumis, du seul fait du mariage, à une charge fiscale plus lourde que les célibataires. Étant donné que l'imposition conjointe implique que les revenus des époux soient additionnés, qu'ils fassent l'objet d'une imputation commune et qu'ils soient considérés comme soumis à l'impôt à titre d'entité fiscale, le caractère progressif du barème d'imposition aurait pour conséquence, à défaut d'application de la méthode du «splitting» - qui permet d'atténuer la progressivité des taux -, que la charge fiscale serait plus élevée que si les conjoints avaient fait l'objet d'une imposition séparée. C'est la raison pour laquelle le législateur allemand a reconnu aux époux un droit d'option entre l'imposition individuelle et l'imposition conjointe (4).

II. Les faits du litige au principal

7 M. Gschwind, demandeur au principal, a la nationalité néerlandaise et réside aux Pays-Bas, dans une commune proche de la frontière allemande, avec son épouse et un enfant né en 1992. En 1991 et 1992, qui sont les exercices fiscaux pour lesquels il attaque la liquidation de l'impôt sur le revenu que lui réclame l'administration défenderesse, le demandeur se rendait tous les jours ouvrables dans la ville d'Aix-la-Chapelle pour y travailler. Les revenus provenant de cette activité salariée, qui constituaient le seul revenu perçu à titre individuel par le demandeur au cours de ces deux exercices, ont été soumis à l'impôt en Allemagne en application de l'article 10, paragraphe 1, de la convention de double imposition conclue entre l'Allemagne et les Pays-Bas. Au cours de cette période, son épouse était employée aux Pays-Bas, où elle était intégralement assujettie.

8 Étant donné que les dispositions adoptées en 1996 sont applicables avec effet rétroactif aux liquidations en cours et permettent, à la demande de l'intéressé et dans certaines circonstances, que les contribuables mariés non-résidents soient traités comme intégralement assujettis, M. Gschwind a demandé à l'administration fiscale défenderesse d'imposer ses revenus conjointement avec ceux de son épouse en Allemagne pour les exercices 1991 et 1992, avec application de la méthode et du barème d'imposition du «splitting». Sa demande a été rejetée et il s'est vu appliquer le barème d'imposition de base au motif qu'il ne remplissait pas les conditions exigées par ces dispositions, à savoir qu'au moins 90 % du revenu mondial du couple soient soumis à l'impôt en Allemagne ou, à défaut, que le revenu global du couple de source étrangère, non soumis à l'impôt en Allemagne, ne dépasse pas le seuil absolu fixé à 24 000 DM par an.

9 Les réclamations formées par M. Gschwind ont été rejetées comme mal fondées par l'administration défenderesse, laquelle a déclaré que le texte de la loi s'opposait à ce que M. Gschwind et son épouse se voient reconnaître le droit d'opter pour la méthode et le barème d'imposition du «splitting». Par son recours devant le Finanzgericht Köln, le demandeur a repris sa demande (5).

III. La question préjudicielle

10 En vue de résoudre ce litige, la juridiction nationale a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour, à titre préjudiciel, la question suivante:

«L'article 48 du traité CE s'oppose-t-il à ce que, en application des dispositions combinées de l'article 1er, paragraphe 3, deuxième phrase, et de l'article 1a, paragraphe 1, point 2, de l'Einkommensteuergesetz (loi allemande relative à l'impôt sur le revenu), un ressortissant néerlandais qui perçoit sur le territoire allemand des revenus salariaux imposables sans y posséder ni domicile ni résidence habituelle ainsi que son épouse non durablement séparée de lui, qui ne possède pas davantage de domicile ni de résidence habituelle sur le territoire fédéral et perçoit des revenus à l'étranger, ne soient pas traités, pour l'application de l'article 26, paragraphe 1...

To continue reading

Request your trial
12 practice notes
  • Staatssecretaris van Financiën v X.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 4 September 2014
    ...in Schumacker (EU:C:1995:31, paragraph 34) and Commission v Estonia (EU:C:2012:282, paragraph 50). ( 10 ) See judgments in Gschwind (C‑391/97, EU:C:1999:409, paragraph 26) and Commission v Estonia (EU:C:2012:282, paragraph ( 11 ) See, in particular, judgments in X Holding (C‑337/08, EU:C:20......
  • European Commission v Republic of Hungary.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 9 December 2010
    ...22. 17 – Véanse, en este sentido, las sentencias Amurta, citada en la nota 14, apartado 33, y de 14 de septiembre de 1999, Gschwind (C‑391/97, Rec. p. I‑5451), apartado 26; véase también la sentencia de 16 de diciembre de 2008, Arcelor Atlantique y Lorraine y otros (C‑127/07, Rec. p. I‑9895......
  • Frans Gschwind v Finanzamt Aachen-Außenstadt.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 14 September 1999
    ...su modificación) - Igualdad de trato - No residentes - Impuesto sobre la renta - Baremo de imposición para las parejas casadas. - Asunto C-391/97. Recopilación de Jurisprudencia 1999 página I-05451 Índice Partes Motivación de la sentencia Decisión sobre las costas Parte dispositiva Palabras......
  • Arnoud Gerritse v Finanzamt Neukölln-Nord.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 13 March 2003
    ...p. I-2493), apartado 16; de 27 de junio de 1996, Asscher (C-107/94, Rec. p. I-3089), apartado 36; de 14 de septiembre de 1999, Gschwind (C-391/97, Rec. p. I-5451), apartado 20, y de 15 de enero de 2002, Gottardo (C-55/00, Rec. p. I-413), apartado 32. (11) - Véanse las sentencias de 28 de en......
  • Request a trial to view additional results
12 cases
  • Staatssecretaris van Financiën v X.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 4 September 2014
    ...in Schumacker (EU:C:1995:31, paragraph 34) and Commission v Estonia (EU:C:2012:282, paragraph 50). ( 10 ) See judgments in Gschwind (C‑391/97, EU:C:1999:409, paragraph 26) and Commission v Estonia (EU:C:2012:282, paragraph ( 11 ) See, in particular, judgments in X Holding (C‑337/08, EU:C:20......
  • European Commission v Republic of Hungary.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 9 December 2010
    ...22. 17 – Véanse, en este sentido, las sentencias Amurta, citada en la nota 14, apartado 33, y de 14 de septiembre de 1999, Gschwind (C‑391/97, Rec. p. I‑5451), apartado 26; véase también la sentencia de 16 de diciembre de 2008, Arcelor Atlantique y Lorraine y otros (C‑127/07, Rec. p. I‑9895......
  • Frans Gschwind v Finanzamt Aachen-Außenstadt.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 14 September 1999
    ...su modificación) - Igualdad de trato - No residentes - Impuesto sobre la renta - Baremo de imposición para las parejas casadas. - Asunto C-391/97. Recopilación de Jurisprudencia 1999 página I-05451 Índice Partes Motivación de la sentencia Decisión sobre las costas Parte dispositiva Palabras......
  • Arnoud Gerritse v Finanzamt Neukölln-Nord.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 13 March 2003
    ...p. I-2493), apartado 16; de 27 de junio de 1996, Asscher (C-107/94, Rec. p. I-3089), apartado 36; de 14 de septiembre de 1999, Gschwind (C-391/97, Rec. p. I-5451), apartado 20, y de 15 de enero de 2002, Gottardo (C-55/00, Rec. p. I-413), apartado 32. (11) - Véanse las sentencias de 28 de en......
  • Request a trial to view additional results

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT