Commission of the European Communities v Italian Republic.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2006:646
CourtCourt of Justice (European Union)
Date05 October 2006
Docket NumberC-110/05
Procedure TypeRecours en constatation de manquement - non fondé
Celex Number62005CC0110

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PHILIPPE LÉger

présentées le 5 octobre 2006 (1)

Affaire C‑110/05

Commission des Communautés européennes

contre

République italienne


«Manquement d’État – Article 28 CE – Libre circulation des marchandises – Réglementation nationale interdisant aux cyclomoteurs de tirer une remorque – Restrictions quantitatives – Mesures d’effet équivalent – Justification – Sécurité routière – Proportionnalité»





1. Par le présent recours, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que la République italienne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 28 CE, en maintenant une réglementation qui interdit aux cyclomoteurs de tirer une remorque.

I – Le cadre juridique

A – Le droit communautaire

1. Le traité instituant la Communauté européenne

2. L’article 28 CE dispose que:

«Les restrictions quantitatives à l’importation, ainsi que toutes mesures d’effet équivalent, sont interdites entre les États membres.»

3. Aux termes de l’article 30 CE, les interdictions ou restrictions à l’importation entre les États membres qui sont justifiées, notamment, par des raisons de sécurité publique et de protection de la santé et de la vie des personnes sont autorisées, pourvu qu’elles ne constituent ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée dans le commerce intracommunautaire.

2. La réglementation relative aux procédures de réception et d’homologation des véhicules à moteur à deux ou trois roues

4. La directive 92/61/CEE du Conseil (2) a été adoptée afin d’établir une procédure de réception communautaire (3) des véhicules à moteur à deux ou trois roues.

5. Ainsi qu’il ressort clairement de l’exposé des motifs de cette directive, cette procédure a pour but de garantir le fonctionnement du marché intérieur en éliminant les entraves techniques aux échanges dans le secteur des véhicules à moteur (4). Elle vise également à contribuer à l’amélioration de la sécurité routière ainsi qu’à la protection de l’environnement et des consommateurs (5).

6. Afin de permettre la mise en œuvre de cette procédure de réception communautaire, ladite directive prévoit une harmonisation totale des exigences techniques auxquelles ces véhicules doivent satisfaire (6). Elle prévoit aussi que les prescriptions techniques applicables aux différents éléments et caractéristiques desdits véhicules soient harmonisées dans le cadre de directives particulières (7).

7. Aux termes de son article 1er, paragraphe 1, premier alinéa, la directive 92/61 s’applique «à tout véhicule à moteur à deux ou trois roues, jumelées ou non, destiné à circuler sur la route, ainsi qu’à ses composants ou entités techniques».

8. Conformément à l’article 1er, paragraphes 2 et 3, de cette même directive, les véhicules visés sont les cyclomoteurs (8), les motocycles, les tricycles ainsi que les quadricycles.

9. Les prescriptions relatives aux masses et dimensions des véhicules à moteur à deux ou trois roues ont été harmonisées dans le cadre de la directive 93/93/CEE du Conseil (9).

10. D’autres exigences techniques relatives, notamment, aux dispositifs d’attelage et de fixation desdits véhicules ont fait l’objet d’une harmonisation dans le cadre de la directive 97/24/CE du Parlement européen et du Conseil (10).

11. Les directives 93/93 et 97/24 énoncent chacune, dans le cadre de leur préambule, que les prescriptions qu’elles édictent ne peuvent pas avoir pour objet ou pour effet d’obliger les États membres qui ne permettent pas, sur leur territoire, que des véhicules à moteur à deux roues tirent une remorque à modifier leurs réglementations (11).

B – Le droit national

12. L’article 53 du décret législatif n° 285 (decreto legislativo n. 285), du 30 avril 1992 (12), définit les cyclomoteurs comme «tout véhicule à moteur à deux, trois ou quatre roues», ces derniers constituant la catégorie des «quadricycles à moteur».

13. Aux termes de l’article 54 du code de la route, les véhicules automobiles sont des véhicules à moteur comptant au moins quatre roues, à l’exclusion des cyclomoteurs.

14. Conformément à l’article 56 dudit code, seuls sont autorisés à tirer une remorque les véhicules automobiles, les trolleybus (13) et les tracteurs automobiles.

II – La procédure précontentieuse

15. À la suite d’un échange de correspondance entre la République italienne et la Commission, cette dernière, estimant que cet État membre avait manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 28 CE en édictant la réglementation en cause, a, par lettre du 3 avril 2003, mis celui-ci en demeure de présenter ses observations.

16. Dans sa lettre en réponse, en date du 13 juin 2003, la République italienne s’engageait à procéder aux modifications de la réglementation nationale nécessaires et à éliminer l’obstacle mis aux importations signalé par la Commission. Cet État membre précisait, en outre, que ces modifications concernaient non seulement la réception des véhicules, mais également l’immatriculation, la circulation et les contrôles sur la route des remorques (révisions).

17. La Commission n’a toutefois reçu aucune autre communication relative à l’adoption desdites modifications et a donc adressé à la République italienne, le 19 décembre 2003, un avis motivé l’invitant à prendre les mesures nécessaires pour se conformer aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 28 CE dans un délai de deux mois à compter de la notification de cet avis. Celui-ci étant resté sans réponse, la Commission a introduit le présent recours sur le fondement de l’article 226 CE, par requête déposée au greffe de la Cour le 4 mars 2005.

III – Le recours

18. La Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

– constater que la République italienne, en interdisant aux cyclomoteurs de tirer des remorques, a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 28 CE;

– condamner la République italienne aux dépens de l’instance.

19. La République italienne demande à la Cour de rejeter le recours.

IV – Sur le manquement

A – Les principaux arguments des parties

20. La Commission reproche à la République italienne de méconnaître le principe de la libre circulation des marchandises édicté à l’article 28 CE en interdisant aux cyclomoteurs de tirer une remorque.

21. À l’appui de ce grief, la Commission rappelle tout d’abord que, en l’absence de législation communautaire harmonisée relative à l’homologation, à l’immatriculation et à la circulation des remorques pour cyclomoteurs, les articles 28 CE et 30 CE s’appliquent.

22. La Commission souligne, ensuite, que la mesure en cause a pour effet d’empêcher l’utilisation des remorques légalement produites et commercialisées dans les autres États membres, ce qui entraverait leur importation et leur vente en Italie. Selon elle, une telle mesure, qui constituerait un obstacle aux importations au sens de l’article 28 CE, ne pourrait être jugée compatible avec le traité que si elle était justifiée par l’une des raisons d’intérêt général énumérées à l’article 30 CE ou par l’une des exigences impératives consacrées par la jurisprudence de la Cour.

23. À cet égard, la Commission relève que le fait que la République italienne autorise des cyclomoteurs immatriculés dans d’autres États membres et tirant des remorques à circuler sur son territoire prouve que l’interdiction de remorquage en cause ne répond à aucune exigence en matière de sécurité routière.

24. Enfin, la Commission note que les considérants des directives 93/93 et 97/24, invoqués par la République italienne au soutien de la réglementation en cause, n’ont aucun caractère obligatoire et ne sauraient avoir pour objet ou pour effet de rendre compatibles avec le droit communautaire des réglementations nationales telles que celle en cause dans le présent litige. À cet égard, la Commission rappelle la jurisprudence constante de la Cour relative à la primauté du droit primaire sur le droit dérivé.

25. En réponse à ces arguments, la République italienne rétorque que l’infraction qui lui est reprochée concerne l’interdiction pour les cyclomoteurs immatriculés en Italie de tirer des remorques et non le refus d’immatriculation d’un cyclomoteur et d’une remorque fabriqués dans un autre État membre et destinés à être commercialisés sur le territoire italien.

26. La République italienne soutient, en outre, que la réserve figurant aux derniers considérants des directives 93/93 et 97/24 autorise la mesure litigieuse. Selon elle, une telle réserve s’explique en raison des différences de reliefs qui existent entre les territoires nationaux. Celle-ci ne pourrait être levée que si les règles techniques relatives à l’homologation, à...

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