Hilde Schönheit v Stadt Frankfurt am Main (C-4/02) and Silvia Becker v Land Hessen (C-5/02).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2003:309
Date22 May 2003
Celex Number62002CC0004
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-4/02,C-5/02
EUR-Lex - 62002C0004 - FR 62002C0004

Conclusions de l'avocat général Geelhoed présentées le 22 mai 2003. - Hilde Schönheit contre Stadt Frankfurt am Main (C-4/02) et Silvia Becker contre Land Hessen (C-5/02). - Demandes de décision préjudicielle: Verwaltungsgericht Frankfurt am Main - Allemagne. - Politique sociale - Travailleurs masculins et travailleurs féminins - Égalité de rémunération - Applicabilité de l'article 119 du traité CE (les articles 117 à 120 du traité CE ont été remplacés par les articles 136 CE à 143 CE) et de l'article 141, paragraphes 1 et 2, CE, ainsi que de la directive 86/378/CEE ou de la directive 79/7/CEE - Notion de 'rémunération' - Régime de retraite des fonctionnaires - Calcul de la pension de vieillesse des fonctionnaires à temps partiel - Existence d'une inégalité de traitement par rapport aux travailleurs à temps plein - Existence d'une discrimination indirecte fondée sur le sexe - Conditions d'une justification éventuelle par des raisons objectives étrangères à toute discrimination fondée sur le sexe - Protocole sur l'article 119 du traité CE (devenu protocole sur l'article 141 CE) - Effets dans le temps. - Affaires jointes C-4/02 et C-5/02.

Recueil de jurisprudence 2003 page I-12575


Conclusions de l'avocat général

I - Introduction

1. Le Verwaltungsgericht de Francfort-sur-le-Main a saisi la Cour de onze questions préjudicielles concernant la compatibilité de la législation allemande sur le régime de retraite des fonctionnaires, et plus particulièrement de la réduction qu'elle prévoit pour les pensions des fonctionnaires qui ont travaillé à temps partiel, avec le principe de l'égalité de traitement des hommes et des femmes sur le marché du travail, qui est énoncé à l'article 141 CE et consacré dans le droit communautaire dérivé.

II - Le cadre juridique

A - Le droit communautaire

Le traité

2. L'article 119, premier et deuxième alinéas, du traité CE disposait ce qui suit:

«Chaque État membre assure au cours de la première étape, et maintient par la suite, l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins pour un même travail.

Par rémunération il faut entendre, au sens du présent article, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier.»

3. Le traité d'Amsterdam a entre temps remplacé l'article 119, premier et deuxième alinéas, du traité CE par l'article 141, paragraphe 1 et paragraphe 2, premier alinéa, CE. Le texte de cette nouvelle disposition est le suivant:

«1. Chaque État membre assure l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un même travail ou un travail de même valeur.

2. Aux fins du présent article, on entend par rémunération le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier.»

4. Le protocole sur l'article 119 du traité instituant la Communauté européenne (devenu le protocole sur l'article 141 CE, ci-après: le «protocole Barber») dispose quant à lui que:

«Aux fins de l'application de l'article 119, des prestations en vertu d'un régime professionnel de sécurité sociale ne seront pas considérées comme rémunération si et dans la mesure où elles peuvent être attribuées aux périodes d'emploi antérieures au 17 mai 1990, exception faite pour les travailleurs ou leurs ayants droit qui ont, avant cette date, engagé une action en justice ou introduit une réclamation équivalente selon le droit national applicable.»

La directive 79/7/CEE

5. Aux termes de l'article 3, paragraphe 1, sous a), de la directive 79/7/CEE du Conseil, du 19 décembre 1978, relative à la mise en oeuvre progressive du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière de sécurité sociale , celle-ci s'applique aux régimes légaux qui assurent une protection contre les risques liés à la vieillesse, notamment.

6. L'article 4, paragraphe 1, de la directive 79/7 dispose que:

«Le principe de l'égalité de traitement implique l'absence de toute discrimination fondée sur le sexe, soit directement, soit indirectement par référence, notamment, à l'état matrimonial ou familial, en particulier en ce qui concerne:

- le champ d'application des régimes et les conditions d'accès aux régimes,

- l'obligation de cotiser et le calcul des cotisations,

- le calcul des prestations, y compris les majorations dues au titre du conjoint et pour personne à charge et les conditions de durée et de maintien du droit aux prestations.»

La directive 86/378/CEE

7. L'article 2, paragraphe 1, de la directive 86/378/CEE du Conseil, du 24 juillet 1986, relative à la mise en oeuvre de l'égalité de traitement entre hommes et femmes dans les régimes professionnels de sécurité sociale , tel que modifié par la directive 96/97/CE du Conseil du 20 décembre 1996 dispose ce qui suit:

«Sont considérés comme régimes professionnels de sécurité sociale les régimes non régis par la directive 79/7/CEE qui ont pour objet de fournir aux travailleurs, salariés ou indépendants, groupés dans le cadre d'une entreprise ou d'un groupement d'entreprises, d'une branche économique ou d'un secteur professionnel ou interprofessionnel, des prestations destinées à compléter les prestations des régimes légaux de sécurité sociale ou à s'y substituer, que l'affiliation à ces régimes soit obligatoire ou facultative.»

8. Aux termes de l'article 4 de la directive 86/378,

«la présente directive s'applique:

a) aux régimes professionnels qui assurent une protection contre les risques suivants:

[...]

- vieillesse, y compris dans le cas de retraites anticipées,

[...]»

9. L'article 5, paragraphe 1, de la directive 86/378 est rédigé comme suit:

«1. Dans les conditions fixées dans les dispositions suivantes, le principe de l'égalité de traitement implique l'absence de toute discrimination fondée sur le sexe, soit directement, soit indirectement, notamment par référence à l'état matrimonial ou familial, en particulier en ce qui concerne:

- le champ d'application des régimes et les conditions d'accès aux régimes,

- l'obligation de cotiser et le calcul des cotisations,

- le calcul des prestations, y compris les majorations dues au titre du conjoint et pour personne à charge, et les conditions de durée et de maintien du droit aux prestations.»

10. L'article 6, paragraphe 1, de la directive 86/378, tel que modifié par la directive 96/97, dispose ce qui suit:

«Sont à classer au nombre des dispositions contraires au principe de l'égalité de traitement celles qui se fondent sur le sexe, soit directement, soit indirectement, notamment par référence à l'état matrimonial ou familial, pour:

[...]

h) fixer des niveaux différents pour les prestations, sauf dans la mesure nécessaire pour tenir compte d'éléments de calcul actuariel qui sont différents pour les deux sexes dans le cas de régimes à cotisations définies;

dans le cas de régimes à prestations définies, financées par capitalisation, certains éléments (dont des exemples figurent à l'annexe) peuvent être inégaux dans la mesure où l'inégalité des montants est due aux conséquences de l'utilisation de facteurs actuariels différents selon le sexe lors de la mise en oeuvre du financement du régime;

[...]»

La directive 97/80/CEE

11. L'article 2, paragraphe 2, de la directive 97/80/CE du Conseil, du 15 décembre 1997, relative à la charge de la preuve dans les cas de discrimination fondée sur le sexe dispose qu':

«Aux fins du principe de l'égalité de traitement visé au paragraphe 1, une discrimination indirecte existe lorsqu'une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre affecte une proportion nettement plus élevée de personnes d'un sexe, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit approprié(e) et nécessaire et ne puisse être justifié(e) par des facteurs objectifs indépendants du sexe des intéressés.»

12. Le texte de l'article 4 de la directive 97/80 est le suivant:

«1. Les États membres, conformément à leur système judiciaire, prennent les mesures nécessaires afin que, dès lors qu'une personne s'estime lésée par le non-respect à son égard du principe de l'égalité de traitement et établit, devant une juridiction ou une autre instance compétente, des faits qui permettent de présumer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, il incombe à la partie défenderesse de prouver qu'il n'y a pas eu violation du principe de l'égalité de traitement.

2. La présente directive n'empêche pas les États membres d'imposer un régime probatoire plus favorable à la partie demanderesse.

3. Les États membres peuvent ne pas appliquer le paragraphe 1 aux procédures dans lesquelles l'instruction des faits incombe à la juridiction ou à l'instance compétente.»

B - Le droit national

13. Dans son article 6, intitulé «Durée de service normale ouvrant droit à la pension», le Beamtenversorgungsgesetz (loi allemande sur les pensions de retraite des fonctionnaires), du 24 août 1976 (ci-après le «BeamtVG»), dans la version publiée le 16 mars 1999, dispose ce qui suit:

«(1) Ouvre droit à la pension la durée de service prenant cours le jour de la première nomination comme fonctionnaire auprès d'un employeur de droit public sur le territoire national. N'est pas pris en compte

[...]

5. le congé sans solde;

[...]

Les périodes de travail à temps partiel n'ouvrent droit à la pension qu'à concurrence du rapport existant entre l'horaire réduit et l'horaire de travail normal [...]»

14. Le Fünftes Gesetz zur Änderung dienstrechtlicher Vorschriften (cinquième loi modifiant le droit de la fonction publique), du 25 juillet 1984 (ci-après la «loi de modification de 1984») a introduit dans la seconde partie de la première phrase du paragraphe 1...

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