Douglas Harvey Barber v Guardian Royal Exchange Assurance Group.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1990:34
Docket NumberC-262/88
Celex Number61988CC0262
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date30 January 1990
EUR-Lex - 61988C0262 - FR 61988C0262

Conclusions de l'avocat général Van Gerven présentées le 30 janvier 1990. - Douglas Harvey Barber contre Guardian Royal Exchange Assurance Group. - Demande de décision préjudicielle: Court of appeal (England) - Royaume-Uni. - Politique sociale - Égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et féminins - Licenciement pour cause économique - Versement anticipé d'une pension de retraite. - Affaire C-262/88.

Recueil de jurisprudence 1990 page I-01889
édition spéciale suédoise page 00407
édition spéciale finnoise page 00425


Conclusions de l'avocat général

++++

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

1 . Les questions que la Court of Appeal a déférées à la Cour ont été soulevées dans le cadre d' un litige qui opposait M . Douglas Harvey Barber ( ci-après "Barber ") au Guardian Royal Exchange Assurance Group ( ci-après "Guardian "), à propos de la compatibilité des conditions dans lesquelles Barber avait été licencié avec le Sex Discrimination Act 1975 et avec le droit communautaire .

Situation du problème

2 . Barber est entré au service de la Car & General Insurance Corporation Limited ( ci-après "C & G ") en 1948 . La C & G a été par la suite absorbée par le Guardian . Depuis 1970, Barber était le chef-adjoint du bureau des sinistres du South Yorkshire à Sheffield . Ce bureau a été fermé par le Guardian . Le 31 décembre 1980, Barber a été licencié ainsi qu' un certain nombre d' autres travailleurs . Il était alors âgé de 52 ans .

3 . Barber avait d' abord été affilié au fonds de pension du groupe C & G et s' était affilié ensuite au Guardian Royal Exchange Pension Fund ( ci-après "fonds de pension "). Ce fonds fait partie du "pension scheme" ( ci-après "régime de pension ") que le Guardian a institué pour ses employés . Il s' agit d' un "non contributory occupational pension scheme", c' est-à-dire d' un régime de pension professionnel privé financé uniquement par les cotisations de l' employeur . Le régime de pension du Guardian a été reconnu par l' autorité britannique compétente ( l' "Occupational Pensions Board ") comme un régime "contracted out" ( c' est-à-dire un régime ayant conventionnellement été exclu du régime légal ), au sens de la troisième partie du Social Security Pensions Act 1975 . De ce fait, ce régime remplace la partie du régime national de pension qui est liée aux revenus ( 1 ).

4 . L' âge normal de la retraite pour les employés du Guardian qui ne relèvent pas d' une section particulière du régime de pension a été fixé à 65 ans pour les hommes et à 60 ans pour les femmes . Pour les affiliés au fonds de pension de retraite du Guardian qui, à l' instar de Barber, avaient été auparavant affiliés au fonds de pension du groupe C & G, l' âge normal de la retraite a cependant été fixé à 62 ans pour les hommes et à 57 ans pour les femmes . Le régime de pension dispose en outre que tous les travailleurs affiliés au fonds de pension ont droit à une pension immédiate non seulement lorsqu' ils atteignent l' âge normal de la retraite, mais également lorsqu' ils "sont mis à la retraite" par le Guardian à un moment quelconque au cours des dix années précédant la date à laquelle ils atteignent cet âge normal ( 2 ).

5 . Le manuel du personnel distribué par le Guardian à ses employés mentionne que des dispositions spéciales sont applicables en cas de cessation du contrat d' emploi avant la date normale de la retraite . Le manuel se réfère à cet égard à un document distinct intitulé "Guide to Severance Terms" ( ci-après "modalités de licenciement ") qui dispose que les modalités de licenciement qu' il énonce font partie du contrat de travail des membres du personnel régulier ayant accompli au moins dix années de service .

Les conditions particulières énoncées dans les modalités de licenciement s' appliquent à tous les membres du personnel concernés, dont les contrats d' emploi ont pris fin à la suite d' une mise à la retraite anticipée (" early retirement ") ou d' une suppression d' emploi (" redundancy ") et dont l' âge ne dépasse pas 65 ans ( pour les hommes ) ou 60 ans ( pour les femmes ). Deux catégories parmi ces conditions particulières nous intéressent dans la présente affaire : celles qui concernent le droit à la pension (" pension entitlement ") ( voir point 6 ci-après ) et celles qui concernent l' indemnité de licenciement (" terminal payment ") ( voir point 7 ci-après ).

6 . Les modalités de licenciement confèrent le droit à une pension immédiate, calculée conformément aux règles du fonds de pension, aux travailleurs qui sont affiliés au fonds de pension et qui ont atteint l' âge de 55 ans ( pour les hommes ) ou de 50 ans ( pour les femmes ) - c' est-à-dire aux travailleurs qui sont à dix ans, voire, dans le cas des anciens travailleurs du groupe C & G, à sept ans de l' âge normal du départ à la retraite . En cas de licenciement, ces travailleurs sont considérés par le Guardian comme ayant été "mis à la retraite ". La règle déjà mentionnée ( au point 4 ), qui confère aux employés le droit à une pension immédiate lorsqu' ils sont "mis à la retraite" à un moment quelconque au cours des dix années précédant l' âge normal de la retraite, oblige alors le fonds de pension à verser une pension aux employés concernés . Aux affiliés du fonds de pension qui ont été employés dix ans ou davantage par le Guardian, mais qui n' ont pas atteint l' âge de 55 ans ( pour les hommes ) ou de 50 ans ( pour les femmes ), les modalités de licenciement confèrent uniquement le droit à une pension différée, calculée conformément aux règles du fonds de pension . Conformément à cette disposition, le Guardian ne considère pas les employés licenciés concernés comme ayant été "mis à la retraite", de sorte qu' ils ne peuvent ( pourraient ) se prévaloir de la règle précitée, relative à la mise à la retraite à un moment quelconque au cours des dix années précédant l' âge normal de la retraite, pour obtenir par ce biais une pension immédiate du fonds de pension . C' est la raison pour laquelle ces employés licenciés ne reçoivent effectivement des prestations de pension que lorsqu' ils atteignent l' âge normal de la retraite .

7 . Les modalités de licenciement prévoient en outre le versement aux travailleurs licenciés d' une indemnité dont le montant varie selon qu' ils peuvent prétendre à une pension immédiate ou non . Lorsque le travailleur licencié a droit à une pension immédiate, il touche une indemnité de licenciement égale à l' indemnité de licenciement légale, majorée d' un pourcentage qui varie en fonction de son ancienneté . Lorsqu' il n' a pas droit à une pension immédiate, il touche, en plus de l' indemnité légale de licenciement, un montant égal à quatre ou à cinq semaines de traitement - selon son ancienneté - pour chaque année de service accomplie dans l' entreprise, avec un maximum de 104 semaines de traitement .

8 . Comme nous l' avons déjà signalé, Barber a été licencié par le Guardian à l' âge de 52 ans . Il ne lui a pas été accordé de pension immédiate . Le Guardian lui a versé une indemnité de licenciement nette de 18 597 livres sterling ( UKL ), somme dans laquelle est comprise l' indemnité légale de licenciement d' un montant de 3 060 UKL . Il pouvait en outre prétendre à une pension différée, payable dès l' instant où il atteindrait l' âge normal de la retraite, à savoir 62 ans . Dans l' hypothèse où Barber aurait été une femme de 52 ans, il aurait été considéré par le Guardian comme étant "mis à la retraite", ce qui lui aurait ouvert le droit à une pension immédiate . Le montant de son indemnité de licenciement aurait cependant été moindre .

9 . Barber a estimé qu' il avait été licencié dans des conditions discriminatoires . Il a assigné le Guardian devant un Industrial Tribunal pour violation du Sex Discrimination Act 1975 et du droit communautaire . Sa demande ayant été rejetée, il a assigné le Guardian devant l' Employment Appeal Tribunal . Ce dernier a fait observer que Barber pourrait peut-être réclamer le paiement immédiat d' une pension auprès des trustees du fonds de pension, parce qu' au moment de son licenciement il se trouvait à moins de dix ans de l' âge normal de la retraite ( voir point 4 ci-avant ) et parce que son cas pouvait être assimilé à celui d' un travailleur "mis à la retraite", bien qu' il eût été licencié . L' employment Appeal Tribunal a cependant estimé qu' il n' avait pas à se prononcer sur cette question dès lors que les trustees du fonds de pension n' avaient pas été assignés dans l' affaire dont il avait été saisi .

L' Employment Appeal Tribunal a jugé en outre que la demande de Barber n' était pas fondée, et cela pour les trois raisons suivantes : 1 ) même s' il y avait discrimination en l' espèce, la demande de Barber ne pourrait pas être fondée sur l' interdiction de discrimination énoncée par le Sex Discrimination Act 1975, parce que l' article 6(4 ) de cette loi exclut du champ d' application de cette interdiction les dispositions "relatives au décès ou à la retraite" (" provision in relation to death or retirement "); 2 ) dans l' affaire Burton ( 3 ), la Cour de justice aurait dit pour droit que la question de savoir si une personne a droit à une prestation payable au titre d' un régime de retraite est une question relative à l' accès aux prestations de retraite et qu' elle doit être tranchée non pas sur la base du principe se rapportant à l' égalité de rémunération, mais sur la base du principe se rapportant à l' égalité de traitement; 3 ) enfin, en ce qui concerne la directive 76/207 relative à l' égalité de traitement, l' Employment Appeal Tribunal a estimé que cette directive n' était pas directement applicable au Royaume-Uni et qu' en outre elle ne pouvait apporter aucun élément utile à l' interprétation de l' article 6(4 ) du Sex Discrimination Act, puisqu' on ne pourrait savoir quel est l' effet combiné de l' arrêt Burton...

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