Republic of Poland v Council of the European Union.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2007:361
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-273/04
Date21 June 2007
Celex Number62004CC0273
Procedure TypeRecurso de anulación - infundado

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. M. Poiares Maduro

présentées le 21 juin 2007 (1)

Affaire C‑273/04

République de Pologne

contre

Conseil de l’Union européenne

«Politique agricole commune – Réforme – Élargissement de l’Union européenne»





1. La requête qui est déférée devant la Cour constitue le premier recours direct intenté par la République de Pologne. Elle soulève plusieurs questions juridiques d’importance inédites, qui justifient leur examen par la grande chambre. S’inscrivant dans le prolongement des difficiles négociations d’adhésion consacrées au volet agricole et de la réforme de la politique agricole commune (ci‑après la «PAC»), elle invite la Cour à préciser l’ampleur du pouvoir d’adaptation des dispositions des accords d’adhésion dont jouissent les institutions communautaires. Elle doit également conduire la Cour à déterminer l’étendue de la protection juridictionnelle dont bénéficient les futurs États membres à l’encontre d’actes adoptés entre la signature et l’entrée en vigueur des instruments d’adhésion.

I – Cadre juridique et factuel du recours

2. Le présent recours a pour objet l’annulation de l’article 1er, point 5, de la décision 2004/281/CE du Conseil, du 22 mars 2004, portant adaptation de l’acte relatif aux conditions d’adhésion à l’Union européenne de la République tchèque, de la République d’Estonie, de la République de Chypre, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la République de Hongrie, de la République de Malte, de la République de Pologne, de la République de Slovénie et de la République slovaque, et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l’Union européenne, à la suite de la réforme de la politique agricole commune (2).

3. La décision litigieuse a été adoptée conformément à l’article 2, paragraphe 3, du traité entre le Royaume de Belgique, le Royaume de Danemark, la République fédérale d’Allemagne, la République hellénique, le Royaume d’Espagne, la République française, l’Irlande, la République italienne, le Grand‑Duché de Luxembourg, le Royaume des Pays-Bas, la République d’Autriche, la République portugaise, la République de Finlande, le Royaume de Suède, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord (États membres de l’Union européenne) et la République tchèque, la République d’Estonie, la République de Chypre, la République de Lettonie, la République de Lituanie, la République de Hongrie, la République de Malte, la République de Pologne, la République de Slovénie, la République slovaque relatif à l’adhésion de la République tchèque, de la République d’Estonie, de la République de Chypre, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la République de Hongrie, de la République de Malte, de la République de Pologne, de la République de Slovénie et de la République slovaque à l’Union européenne (3), qui dispose que, «[par] dérogation au paragraphe 2, les institutions de l’Union peuvent arrêter avant l’adhésion les mesures visées […] aux articles 21 et 23 […]. Ces mesures n’entrent en vigueur que sous réserve et à la date d’entrée en vigueur du présent traité». Elle a été prise sur la base de l’article 23 de l’acte relatif aux conditions d’adhésion à l’Union européenne de la République tchèque, de la République d’Estonie, de la République de Chypre, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la République de Hongrie, de la République de Malte, de la République de Pologne, de la République de Slovénie et de la République slovaque, et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l’Union européenne (4), selon lequel «le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen, peut procéder aux adaptations des dispositions du présent acte relatives à la [PAC] qui peuvent s’avérer nécessaires du fait d’une modification des règles communautaires. Ces adaptations peuvent être faites avant la date d’adhésion».

4. La requérante se plaint que l’article 1er, point 5, de la décision litigieuse (ci‑après la «disposition attaquée») a étendu le mécanisme d’introduction par paliers des paiements directs (dit aussi mécanisme de «phasing in») dans les nouveaux États membres aux nouveaux paiements directs, réalisant ainsi une extension des dérogations au principe du paiement intégral. Cette extension du système des paiements partiels occasionnerait une diminution considérable des versements aux agriculteurs polonais comparativement à l’hypothèse du versement du montant intégral des paiements.

5. Cette requête n’est que l’avatar contentieux d’une contestation du mécanisme d’introduction par paliers des paiements directs élevée par la République de Pologne dès les négociations d’adhésion. Lors de celles‑ci, cet État a revendiqué à maintes reprises que l’accès aux paiements directs soit intégralement garanti à l’agriculture polonaise dès l’adhésion. En vain. Dans un document de réflexion du 30 janvier 2002 (5), la Commission avait préconisé l’introduction progressive au cours d’une période transitoire des paiements directs dans les nouveaux États membres pour plusieurs raisons, liées essentiellement à la nécessité de poursuivre la restructuration en cours dans le secteur agricole de ces États, à la situation du revenu des agriculteurs ainsi qu’à l’exigence d’éviter des déséquilibres par rapport à d’autres secteurs économiques ou la création de situations de rente spéculative. Épousant cette recommandation, la position des quinze États membres par rapport à la République de Pologne lors des négociations d’adhésion, fixée dans une position commune de l’Union européenne en date du 31 octobre 2002 (6), était de ne pas accéder à la demande de la Pologne visant à ce que les paiements directs soient accordés à ses agriculteurs après l’adhésion dans la même mesure qu’ils le sont aux agriculteurs de l’Union et d’introduire progressivement lesdits paiements en Pologne au cours d’une période transitoire. Les discussions sur ce point ont continué jusqu’à la conférence d’adhésion qui s’est tenue en marge du Conseil européen de Copenhague des 12 et 13 décembre 2002, dont les conclusions indiquent que la question de l’introduction progressive des paiements directs dans les nouveaux États membres a été résolue selon les termes établis dans la position commune du 31 octobre 2002. Quand, à la suite de la réforme de la PAC réalisée après la signature du traité d’adhésion, la Commission a présenté, le 27 octobre 2003, la proposition de décision litigieuse, le gouvernement polonais n’a pu, malgré une opposition exprimée à toutes les étapes du processus législatif, empêcher l’adoption de celle‑ci.

6. Pour une bonne compréhension de l’enjeu juridique du litige, un bref rappel du cadre législatif s’impose.

7. Les paiements directement octroyés aux agriculteurs dans le cadre des régimes de soutien à leur revenu avaient été initialement réglementés par le règlement (CE) n° 1259/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune (7), la liste de ces régimes d’aides directes figurant en annexe de ce règlement. Conformément à l’article 20 de l’acte d’adhésion qui dispose que «les actes énumérés dans la liste figurant à l’annexe II du présent acte font l’objet des adaptations définies dans ladite annexe», le mécanisme d’introduction par paliers des paiements directs dans les nouveaux États membres a, lui, été prévu à l’annexe II, chapitre 6, A, point 27, dudit acte, insérant l’article 1er bis dans le règlement n° 1259/1999. Selon cet article 1er bis, le mécanisme d’introduction par paliers vise les paiements directs «accordés au titre des régimes de soutien visés à l’article 1er». L’article 1er du règlement n° 1259/1999, quant à lui, donne une définition de ces paiements directs et, pour une énumération de ces derniers, renvoie à l’annexe dudit règlement (8).

8. Le 29 septembre 2003, le Conseil a en conséquence, par le règlement (CE) n° 1782/2003, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs et modifiant les règlements (CEE) n° 2019/93, (CE) n° 1452/2001, (CE) n° 1453/2001, (CE) n° 1454/2001, (CE) n° 1868/94, (CE) n° 1251/1999, (CE) n° 1254/1999, (CE) n° 1673/2000, (CEE) n° 2358/71 et (CE) n° 2529/2001 (9), abrogé le règlement n° 1259/1999 à compter du 1er mai 2004. Il résulte de son article 1er et de son annexe I que ledit règlement n° 1782/2003 ajoute à ceux déjà existants des régimes de soutien direct aux agriculteurs produisant des fruits à coque et des cultures énergétiques et prévoit des paiements supplémentaires dans le cadre du régime de soutien direct au secteur laitier.

9. Par la décision litigieuse du 22 mars 2004, le Conseil a, en son article 1er, point 5), remplacé les dispositions modifiant le règlement n° 1259/1999 qui figuraient à l’annexe II, chapitre 6, A, point 27, de l’acte d’adhésion par des dispositions qui modifient le règlement n° 1782/2003, afin de tenir compte des aménagements introduits dans la PAC par l’adoption de ce dernier règlement, survenue après la signature des instruments d’adhésion. Désormais, ledit point 27 insère un article 143 bis dans le règlement n° 1782/2003, lequel prévoit l’introduction, dans les nouveaux États membres, par paliers et selon un calendrier, des «paiements directs», c’est‑à‑dire non seulement des paiements qui figurent d’ores et déjà à l’annexe I de ce règlement, mais aussi de ceux qui seront ultérieurement insérés à ladite annexe.

10. Selon la République de Pologne, la disposition attaquée étend de manière illégale le système des paiements partiels. Celui‑ci ne s’applique plus seulement aux instruments de soutien qui étaient limitativement énumérés dans l’annexe du règlement n° 1259/1999. Il concerne désormais de manière générale les «paiements directs»...

To continue reading

Request your trial
1 practice notes
  • Opinion of Advocate General Hogan delivered on 20 January 2021.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 20 January 2021
    ...paragraph of Article 263 TFEU. 58 The General Court cited the Opinion of Advocate General Poiares Maduro in Poland v Council (C‑273/04, EU:C:2007:361, point 41). In that point, Advocate General Poiares Maduro considered that given that the Republic of Poland has legal personality under its ......
1 cases
  • Opinion of Advocate General Hogan delivered on 20 January 2021.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 20 January 2021
    ...paragraph of Article 263 TFEU. 58 The General Court cited the Opinion of Advocate General Poiares Maduro in Poland v Council (C‑273/04, EU:C:2007:361, point 41). In that point, Advocate General Poiares Maduro considered that given that the Republic of Poland has legal personality under its ......

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT