Commission of the European Communities v Kingdom of Spain.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2008:567
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-88/07
Date16 October 2008
Procedure TypeRecours en constatation de manquement - fondé
Celex Number62007CC0088

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. J. Mazák

présentées le 16 octobre 2008 (1)

Affaire C‑88/07

Commission des Communautés européennes

contre

Royaume d’Espagne

«Mesures d’effet équivalent – Mesures nationales dérogeant au principe de libre circulation des marchandises à l’intérieur de la Communauté»





I – Introduction

1. Dans la présente procédure, la Commission des Communautés européennes a saisi la Cour d’un recours en vertu de l’article 226 CE, tendant à faire constater que,

– en retirant du marché de nombreux produits élaborés à base d’espèces végétales, fabriqués et/ou commercialisés légalement dans un autre État membre, en vertu d’une pratique administrative consistant à retirer du marché tout produit contenant des espèces végétales qui ne sont pas incluses dans l’annexe de l’arrêté ministériel du 3 octobre 1973 en le considérant comme un médicament commercialisé sans autorisation obligatoire,

– et en ne communiquant pas cette mesure à la Commission,

le Royaume d’Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 28 CE et 30 CE ainsi que des articles 1er et 4 de la décision n° 3052/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 1995, établissant une procédure d’information mutuelle sur les mesures nationales dérogeant au principe de libre circulation des marchandises à l’intérieur de la Communauté(2).

2. La Cour est, en substance, invitée à se prononcer sur la méthode de classement d’un produit dans le groupe des médicaments. Dans ce cas, il s’agit non pas de vérifier le bien-fondé de la classification d’un produit concret en tant que médicament(3), mais d’examiner le mode de classement.

3. Dans tous les cas, la décision de classement d’un produit relève du domaine de l’État membre. Cependant, la voie qui mène à cette décision découle de la jurisprudence de la Cour.

4. Le classement d’un produit en tant que médicament est le point crucial pour la décision de la Cour sur le présent recours de la Commission. Si l’État soumet un produit non médicamenteux au régime qui est destiné à des médicaments, il s’agit en principe d’une mesure d’effet équivalent qui est interdite entre les États membres.

5. En conséquence, je considère qu’il convient de répondre aux trois questions suivantes. Premièrement, les autorités espagnoles classent-elles d’une façon correcte les produits à base d’espèces végétales dans la catégorie des médicaments? Deuxièmement, un tel comportement des autorités représente-t-il une pratique administrative qui constitue une entrave à la libre circulation des marchandises au sens de la jurisprudence de la Cour? Troisièmement, une entrave éventuelle peut-elle être justifiée au sens de l’article 30 CE ?

II – Le cadre juridique

A – Le droit communautaire

6. Le traité instituant la Communauté européenne prévoit la libre circulation des marchandises entre les États membres. Les obstacles à la libre circulation ne peuvent être justifiés que par des raisons qui découlent de l’article 30 CE et de la jurisprudence de la Cour.

7. En vertu de la décision n° 3052/95, les États membres sont obligés de notifier les mesures faisant obstacle à la libre circulation ou à la mise sur le marché d’un certain modèle ou d’un certain type de produit légalement fabriqué ou commercialisé dans un autre État membre dans un délai de 45 jours à compter du jour où cette mesure est prise.

8. Les médicaments représentent une catégorie spéciale de marchandises. La directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 novembre 2001, instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain(4), est l’une des mesures pour la réalisation de l’objectif de la libre circulation des médicaments.

9. La définition de la notion de médicament figure à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2001/83 telle que modifiée par la directive 2004/27/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004(5). Selon cette définition, on entend par médicament:

«i) toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines; ou

ii) toute substance ou composition pouvant être utilisée chez l’homme ou pouvant lui être administrée en vue soit de restaurer, de corriger ou de modifier des fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique, soit d’établir un diagnostic médical.»

10. Il découle de cette définition que le classement d’un produit comme médicament peut être effectué par rapport à sa présentation telle qu’énoncée au point i) de la définition ou par rapport à ses fonctions telles que énoncées au point ii) de la définition.

11. La directive 2004/24/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004(6) a inséré dans l’article 1er de la directive 2001/83 de nouvelles définitions qui concernent les notions de «médicament traditionnel à base de plantes», de «médicament à base de plantes», de «substances végétales» et de «préparations à base de plantes».

12. Il découle de l’article 6, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2001/83, tel que modifié par le règlement (CE) n° 1901/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006(7), que la mise d’un médicament sur le marché est soumise à une autorisation préalable.

13. En revanche, l’article 16 bis de la directive 2001/83, qui était inséré par la directive 2004/24, prévoit une procédure d’enregistrement simplifiée pour les médicaments traditionnels à base de plantes.

B – La réglementation nationale

1. La loi n° 29/2006

14. La réglementation essentielle des médicaments se trouve dans la loi n° 29/2006, du 26 juillet 2006, sur les garanties et l’utilisation rationnelle des médicaments et produits sanitaires, qui a abrogé la loi n° 25/1990, du 20 décembre 1990 sur les médicaments.

15. Selon l’article 8, sous a), de la loi n° 29/2006, un médicament à usage humain est toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines ou pouvant être utilisée chez l’homme ou pouvant lui être administrée en vue soit de restaurer, de corriger ou de modifier des fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique, soit d’établir un diagnostic médical.

16. Le classement d’un produit en tant que médicament a pour conséquence qu’un produit ne peut être mis sur le marché qu’après autorisation préalable.

17. En ce qui concerne les médicaments à base de plantes médicinales, il découle de l’article 51, paragraphe 1, de la loi n° 29/2006 qu’ils sont soumis, en principe, au même régime que les autres médicaments. Un régime différent est prévu pour les plantes toxiques, dont la vente au public est restreinte ou interdite, et pour les plantes traditionnellement considérées comme médicinales(8),dont la vente au public est libre, à condition qu’elles soient présentées sans référence à des propriétés thérapeutiques, diagnostiques ou préventives.

18. Les plantes considérées comme toxiques sont énumérées à l’arrêté SCO/190/2004, du 28 janvier 2004, établissant la liste des plantes dont la vente au public est interdite ou restreinte en raison de leur toxicité.

19. En ce qui concerne les plantes traditionnellement considérées comme médicinales, la liste établie en application de l’article 51, paragraphe 3, de la loi n° 29/2006 n’existe pas. Les autorités espagnoles utilisent, selon le point 42 de leur mémoire, «comme un instrument utile» la liste des 119 plantes qui figure dans l’annexe de l’arrêté du 3 octobre 1973 portant sur la création du registre de préparations à base d’espèces végétales médicinales. Aux termes de cet arrêté, les produits contenant une seule espèce végétale médicinale mentionnée en annexe et indiquée clairement sur l’emballage extérieur du produit sont exemptés de l’obligation d’enregistrement.

III – Procédure précontentieuse et procédure devant la Cour

20. Les trois plaintes des entreprises espagnoles Ynsadiet, S.A., Laboratorios Tegor, S.L. et Laboratorios Taxón, S.L. de l’année 2004 ont donné lieu au...

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