Franco Affatato v Azienda Sanitaria Provinciale di Cosenza.

JurisdictionEuropean Union
CourtCourt of Justice (European Union)
Date01 October 2010

ORDONNANCE DE LA COUR (sixième chambre)

1er octobre 2010 (*)

«Article 104, paragraphe 3, du règlement de procédure – Politique sociale – Directive 1999/70/CE – Clause 5 de l’accord‑cadre sur le travail à durée déterminée – Contrats de travail à durée déterminée dans le secteur public – Contrats successifs – Abus – Mesures de prévention – Sanctions – Transformation des contrats de travail à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée – Interdiction – Réparation du dommage – Principes d’équivalence et d’effectivité»

Dans l’affaire C‑3/10,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunale di Rossano (Italie), par décision du 21 décembre 2009, parvenue à la Cour le 22 décembre 2009, dans la procédure

Franco Affatato

contre

Azienda Sanitaria Provinciale di Cosenza,

LA COUR (sixième chambre),

composée de Mme P. Lindh, président de chambre, MM. A. Ó Caoimh (rapporteur) et A. Arabadjiev, juges,

avocat général: M. N. Jääskinen,

greffier: M. R. Grass,

la Cour se proposant de statuer par voie d’ordonnance motivée conformément aux articles 92, paragraphe 1, 103, paragraphe 1, et 104, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure,

l’avocat général entendu,

rend la présente

Ordonnance

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des clauses 2 à 5 de l’accord‑cadre sur le travail à durée déterminée, conclu le 18 mars 1999 (ci‑après l’«accord‑cadre»), qui figure en annexe de la directive 1999/70/CE du Conseil, du 28 juin 1999, concernant l’accord‑cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée (JO L 175, p. 43), ainsi que du principe de l’égalité de traitement.

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Affatato à son employeur, l’Azienda Sanitaria Provinciale di Cosenza, au sujet de la qualification des contrats de travail qui le liaient à celui-ci et du non-renouvellement de son dernier contrat de travail.

Le cadre juridique

La réglementation de l’Union

3 La directive 1999/70 est fondée sur l’article 139, paragraphe 2, CE et vise, aux termes de son article 1er, «à mettre en œuvre l’accord‑cadre […], figurant en annexe, conclu […] entre les organisations interprofessionnelles à vocation générale (CES, UNICE, CEEP)».

4 Aux termes de la clause 1 de l’accord‑cadre, celui‑ci:

«[…] a pour objet:

a) d’améliorer la qualité du travail à durée déterminée en assurant le respect du principe de non‑discrimination;

b) d’établir un cadre pour prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs.»

5 La clause 2, point 1, de l’accord‑cadre prévoit:

«Le présent accord s’applique aux travailleurs à durée déterminée ayant un contrat ou une relation de travail défini par la législation, les conventions collectives ou les pratiques en vigueur dans chaque État membre.»

6 La clause 3 du même accord‑cadre est ainsi libellée:

«Aux termes du présent accord, on entend par:

1. ‘travailleur à durée déterminée’, une personne ayant un contrat ou une relation de travail à durée déterminée conclu directement entre l’employeur et le travailleur où la fin du contrat ou de la relation de travail est déterminée par des conditions objectives telles que l’atteinte d’une date précise, l’achèvement d’une tâche déterminée ou la survenance d’un événement déterminé;

[...]»

7 La clause 4, point 1, de l’accord‑cadre dispose:

«Pour ce qui concerne les conditions d’emploi, les travailleurs à durée déterminée ne sont pas traités d’une manière moins favorable que les travailleurs à durée indéterminée comparables au seul motif qu’ils travaillent à durée déterminée, à moins qu’un traitement différent soit justifié par des raisons objectives.»

8 La clause 5 de l’accord‑cadre énonce:

«1. Afin de prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs, les États membres, après consultation des partenaires sociaux, conformément à la législation, aux conventions collectives et pratiques nationales, et/ou les partenaires sociaux, quand il n’existe pas des mesures légales équivalentes visant à prévenir les abus, introduisent d’une manière qui tienne compte des besoins de secteurs spécifiques et/ou de catégories de travailleurs, l’une ou plusieurs des mesures suivantes:

a) des raisons objectives justifiant le renouvellement de tels contrats ou relations de travail;

b) la durée maximale totale de contrats ou relations de travail à durée déterminée successifs;

c) le nombre de renouvellements de tels contrats ou relations de travail.

2. Les États membres, après consultation des partenaires sociaux et/ou les partenaires sociaux, lorsque c’est approprié, déterminent sous quelles conditions les contrats ou relations de travail à durée déterminée:

a) sont considérés comme ‘successifs’;

b) sont réputés conclus pour une durée indéterminée.»

9 Aux termes de l’article 2, premier alinéa, de la directive 1999/70:

«Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le 10 juillet 2001 ou s’assurent, au plus tard à cette date, que les partenaires sociaux ont mis en place les dispositions nécessaires par voie d’accord, les États membres devant prendre toute disposition nécessaire leur permettant d’être à tout moment en mesure de garantir les résultats imposés par la présente directive. Ils en informent immédiatement la Commission.»

La réglementation nationale

10 L’article 1er du décret législatif n° 368, relatif à la mise en œuvre de la directive 1999/70/CE concernant l’accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée (decreto legislativo n. 368, attuazione della direttiva 1999/70/CE relativa all’accordo quadro sul lavoro a tempo determinato concluso dall’UNICE, dal CEEP e dal CES), du 6 septembre 2001 (GURI n° 235, du 9 octobre 2001, p. 4, ci-après le «décret législatif n° 368/2001»), tel qu’en vigueur à l’époque des faits au principal, prévoit:

«1. Le contrat de travail d’un salarié peut comporter une date de fin pour des raisons de caractère technique, ou des raisons tenant à des impératifs de production, d’organisation ou de remplacement de salariés.

2. L’indication d’une date de fin de contrat est privée d’effet si elle ne résulte pas directement ou indirectement d’un acte écrit spécifiant les raisons indiquées au paragraphe 1.

[…]»

11 L’article 36 du décret législatif n° 165, du 30 mars 2001, portant règles générales relatives à l’organisation du travail dans les administrations publiques (supplément ordinaire à la GURI n° 106, du 9 mai 2001, ci-après le «décret législatif n° 165/2001»), dispose:

«1. Pour les exigences liées à leurs besoins ordinaires, les administrations publiques embauchent exclusivement par voie de contrats de travail salarié à durée indéterminée selon les procédures de recrutement prévues à l’article 35.

2. Pour répondre à des exigences temporaires et exceptionnelles, les administrations publiques peuvent recourir aux formes contractuelles flexibles de recrutement et d’emploi du personnel prévues par le code civil et par les lois relatives aux relations de travail dans l’entreprise, dans le respect des procédures de recrutement en vigueur. Sans préjudice de la compétence des administrations quant à la définition des besoins organisationnels en cohérence avec les dispositions législatives en vigueur, les conventions collectives nationales réglementent les contrats de travail à durée déterminée. […]

[…]

5. En tout état de cause, la violation de dispositions impératives en matière de recrutement ou d’emploi de travailleurs par les administrations publiques ne saurait conduire à l’établissement de contrats de travail à durée indéterminée avec lesdites administrations publiques, sans préjudice de la responsabilité et des sanctions qu’elles peuvent encourir. Le travailleur concerné a droit à la réparation du dommage découlant de la prestation de travail effectuée en violation de dispositions impératives. Les administrations sont tenues de récupérer les sommes payées à ce titre auprès des dirigeants responsables lorsque la violation est intentionnelle ou qu’elle résulte d’une faute grave […]

[…]»

Le litige au principal et les questions préjudicielles

12 Il ressort de la décision de renvoi que M. Affatato a conclu avec l’Azienda Sanitaria Locale n. 3 di Rossano, intégrée par la suite à l’Azienda Sanitaria Provinciale di Cosenza, chacune de ces entités relevant du secteur public, six contrats de travail à durée déterminée successifs en vertu desquels il a exercé l’activité d’auxiliaire sociosanitaire spécialisé. Ces contrats ont couru, respectivement, du 18 mars 1996 au 16 mai 1996, du 3 août 1996 au 2 octobre 1996, du 18 décembre 2000 au 17 février 2001, du 6 mars 2002 au 5 juillet 2002, du 20 août 2002 au 19 décembre 2002 et du 21 février 2003 au 20 juin 2003.

13 Estimant que cette activité satisfaisait en fait des besoins permanents et durables de son employeur, M. Affatato a saisi le Tribunale di Rossano en vue, à titre principal, de convertir ces contrats en un contrat de travail à durée indéterminée et d’obliger son employeur à le réintégrer en l’employant en vertu d’un tel contrat et à lui verser le montant des rémunérations échues depuis la date d’expiration du dernier contrat jusqu’à celle de sa réintégration effective. À titre subsidiaire, M. Affatato demande la condamnation de l’Azienda Sanitaria Provinciale di Cosenza au paiement des rémunérations pour les périodes chômées entre le premier et le dernier contrat de travail.

14 Dans sa décision de renvoi, le Tribunale di Rossano constate que les contrats de travail en cause ne comportent aucune indication quant aux raisons pour lesquelles ceux-ci ont été conclus à durée déterminée et que l’Azienda Sanitaria Provinciale di...

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