Procedimento penal entablado contra RH.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2019:110
Docket NumberC-8/19
Celex Number62019CO0008
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypePetición de decisión prejudicial - procedimiento de urgencia
Date12 February 2019
62019CO0008

ORDONNANCE DE LA COUR (première chambre)

12 février 2019 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Procédure préjudicielle d’urgence – Coopération judiciaire en matière pénale – Directive (UE) 2016/343 – Article 4 – Références publiques à la culpabilité – Décision de détention provisoire – Voies de recours – Procédure de contrôle de la légalité de cette décision – Respect de la présomption d’innocence – Article 267 TFUE – Article 47, deuxième alinéa, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Droit d’être entendu dans un délai raisonnable – Réglementation nationale restreignant la faculté des juridictions nationales de saisir la Cour d’une demande de décision préjudicielle ou les obligeant à statuer sans attendre la réponse à cette demande – Sanctions disciplinaires en cas de non-respect de cette réglementation »

Dans l’affaire C‑8/19 PPU,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Spetsializiran nakazatelen sad (tribunal pénal spécialisé, Bulgarie), par décision du 27 décembre 2018, parvenue à la Cour le 7 janvier 2019, dans la procédure pénale contre

RH,

LA COUR (première chambre),

composée de M. J.–C. Bonichot, président de chambre, Mme C. Toader (rapporteure), MM. A. Rosas, L. Bay Larsen et M. Safjan, juges,

avocat général : M. Y. Bot,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la demande de la juridiction de renvoi du 27 décembre 2018, parvenue à la Cour le 7 janvier 2019, de soumettre le renvoi préjudiciel à la procédure d’urgence, conformément à l’article 107 du règlement de procédure de la Cour,

vu la décision du 16 janvier 2019 de la première chambre de faire droit à ladite demande,

rend la présente

Ordonnance

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 267 TFUE, de l’article 47, premier et deuxième alinéas, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), et de l’article 4, paragraphe 1, de la directive (UE) 2016/343 du Parlement européen et du Conseil, du 9 mars 2016, portant renforcement de certains aspects de la présomption d’innocence et du droit d’assister à son procès dans le cadre des procédures pénales (JO 2016, L 65, p. 1), lu en combinaison avec le considérant 16 de celle-ci.

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’une procédure pénale contre RH au sujet de son maintien en détention provisoire.

Le cadre juridique

La CEDH

3

Sous l’intitulé « Droit à la liberté et à la sûreté », l’article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »), dispose :

« 1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales :

[...]

c)

s’il a été arrêté et détenu en vue d’être conduit devant l’autorité judiciaire compétente, lorsqu’il y a des raisons plausibles de soupçonner qu’il a commis une infraction ou qu’il y a des motifs raisonnables de croire à la nécessité de l’empêcher de commettre une infraction ou de s’enfuir après l’accomplissement de celle–ci ;

[...]

4. Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d’introduire un recours devant un tribunal, afin qu’il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale.

[...] »

4

L’article 6 de la CEDH, intitulé « Droit à un procès équitable », énonce, à son paragraphe 1 :

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. [...] »

Le droit de l’Union

5

Le considérant 16 de la directive 2016/343 est libellé comme suit :

« La présomption d’innocence serait violée si des déclarations publiques faites par des autorités publiques, ou des décisions judiciaires autres que des décisions statuant sur la culpabilité, présentaient un suspect ou une personne poursuivie comme étant coupable, aussi longtemps que la culpabilité de cette personne n’a pas été légalement établie. De telles déclarations et décisions judiciaires ne devraient pas refléter le sentiment que cette personne est coupable. Ceci devrait s’entendre sans préjudice des actes de poursuite qui visent à établir la culpabilité du suspect ou de la personne poursuivie, tels que l’acte d’accusation, et sans préjudice des décisions judiciaires à la suite desquelles une condamnation avec sursis devient exécutoire, pour autant que les droits de la défense soient respectés. Ceci devrait s’entendre également sans préjudice des décisions préliminaires de nature procédurale, qui sont prises par des autorités judiciaires ou d’autres autorités compétentes et qui se fondent sur des soupçons ou des éléments de preuve à charge, telles que les décisions de détention provisoire, pourvu que ces décisions ne présentent pas le suspect ou la personne poursuivie comme étant coupable. Avant de prendre une décision préliminaire de nature procédurale, l’autorité compétente pourrait être d’abord tenue de vérifier qu’il existe suffisamment d’éléments de preuve à charge à l’égard du suspect ou de la personne poursuivie pour justifier ladite décision, et celle-ci pourrait contenir une référence à ces éléments. »

6

L’article 4 de cette directive, intitulé « Références publiques à la culpabilité », dispose, à son paragraphe 1 :

« Les États membres prennent les mesures nécessaires pour veiller à ce que les déclarations publiques des autorités publiques, ainsi que les décisions judiciaires, autres que celles statuant sur la culpabilité, ne présentent pas un suspect ou une personne poursuivie comme étant coupable aussi longtemps que sa culpabilité n’a pas été légalement établie. Cette disposition s’entend sans préjudice des actes de poursuite qui visent à prouver la culpabilité du suspect ou de la personne poursuivie et sans préjudice des décisions préliminaires de nature procédurale qui sont prises par des autorités judiciaires ou par d’autres autorités compétentes et qui sont fondées sur des soupçons ou sur des éléments de preuve à charge. »

7

Aux termes de l’article 6 de ladite directive, intitulé « Charge de la preuve » :

« 1. Les États membres veillent à ce que l’accusation supporte la charge de la preuve visant à établir la culpabilité des suspects et des personnes poursuivies. Cette disposition s’entend sans préjudice de toute obligation incombant au juge ou à la juridiction compétente de rechercher des éléments de preuve tant à charge qu’à décharge, et sans préjudice du droit de la défense de présenter des éléments de preuve conformément au droit national applicable.

2. Les États membres veillent à ce que tout doute quant à la question de la culpabilité profite au suspect ou à la personne poursuivie, y compris lorsque la juridiction apprécie si la personne concernée doit être acquittée. »

Le droit bulgare

8

En application de l’article 22 du Nakazatelno protsesualen kodeks (code de procédure pénale, ci-après le « NPK »), toute affaire pénale doit être examinée et jugée dans un délai raisonnable, surtout lorsque la personne poursuivie est en détention.

9

Conformément à l’article 56, paragraphe 1, et à l’article 63, paragraphe 1, du NPK, une mesure de détention provisoire peut être adoptée et prolongée lorsqu’il existe des « raisons plausibles de supposer » que la personne poursuivie a commis une infraction.

10

En vertu de l’article 65, paragraphe 4, du NPK, lorsque la personne poursuivie conteste devant une juridiction que toutes les conditions légales de prolongation de sa détention provisoire sont réunies, y compris qu’il existe toujours des raisons plausibles de supposer qu’elle a commis l’infraction en cause, la juridiction est tenue de répondre à ses arguments et d’apprécier si ces raisons existent toujours ou non.

11

Selon l’article 489, paragraphe 2, du NPK, en cas de renvoi préjudiciel, bien que la procédure devant la juridiction de renvoi soit suspendue, les parties peuvent faire une demande de modification de la mesure de détention provisoire et la juridiction est tenue de se prononcer sur cette demande par une décision au fond.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

12

RH est suspecté d’avoir participé à un groupe criminel organisé afin de commettre des meurtres, crime réprimé par l’article 321, paragraphe 3, du Nakazatelen kodeks (code pénal), lu en combinaison avec l’article 321, paragraphe 2, de ce code. Cette infraction est punie d’une peine privative de liberté de 3 à 10 ans.

13

Le 22 octobre 2018, une mesure de détention provisoire a été prise à l’encontre de RH, les juridictions de première instance et d’appel ayant considéré qu’il existait des raisons plausibles de supposer que ce dernier avait commis l’infraction reprochée.

14

Le 20 décembre 2018, l’avocat de RH a saisi la juridiction de renvoi d’une demande de libération de son client en contestant, en application de l’article 56, paragraphe 1, et de l’article 63, paragraphe 1, du NPK, l’existence de raisons plausibles de supposer sa participation à ladite infraction.

15

En ce qui concerne la légalité de la décision de détention provisoire, la juridiction de renvoi indique que la question de la libération de RH dépend seulement de l’existence de raisons plausibles de supposer qu’il est l’auteur de l’infraction en cause.

16

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