European Commission v Hungary.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2021:930
Date16 November 2021
Docket NumberC-821/19
Celex Number62019CJ0821
CourtCourt of Justice (European Union)
62019CJ0821

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

16 novembre 2021 ( *1 )

« Recours en manquement – Espace de liberté, de sécurité et de justice – Politique d’asile – Directives 2013/32/UE et 2013/33/UE – Procédure d’octroi d’une protection internationale – Motifs d’irrecevabilité – Notions de “pays tiers sûr” et de “premier pays d’asile” – Aide fournie aux demandeurs d’asile – Incrimination – Interdiction d’entrée dans la zone frontalière de l’État membre concerné »

Dans l’affaire C‑821/19,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 8 novembre 2019,

Commission européenne, représentée initialement par MM. J. Tomkin et A. Tokár ainsi que par Mme M. Condou-Durande, puis par MM. J. Tomkin et A. Tokár, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

Hongrie, représentée par Mmes K. Szíjjártó et M. M. Tátrai ainsi que par M. M. Z. Fehér, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président, MM. A. Arabadjiev, C. Lycourgos (rapporteur), E. Regan, N. Jääskinen, Mme I. Ziemele et M. J. Passer, présidents de chambre, MM. M. Ilešič, J.‑C. Bonichot, A. Kumin et N. Wahl, juges,

avocat général : M. A. Rantos,

greffier : M. I. Illéssy, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 23 novembre 2020,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 25 février 2021,

rend le présent

Arrêt

1

Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que la Hongrie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 8, paragraphe 2, de l’article 12, paragraphe 1, sous c), de l’article 22, paragraphe 1, et de l’article 33, paragraphe 2, de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale (JO 2013, L 180, p. 60), ainsi que de l’article 10, paragraphe 4, de la directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale (JO 2013, L 180, p. 96) :

en introduisant un nouveau motif d’irrecevabilité des demandes d’asile s’ajoutant aux motifs expressément établis par la directive 2013/32 et

en érigeant en infraction pénale l’activité d’organisation visant à permettre l’ouverture d’une procédure de demande d’asile par des individus ne remplissant pas les critères du droit d’asile établis par le droit national et en prenant des mesures entraînant des restrictions à l’égard des personnes poursuivies ou sanctionnées pour une telle infraction.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 2013/32

2

L’article 6 de la directive 2013/32, intitulé « Accès à la procédure », prévoit :

« 1. Lorsqu’une personne présente une demande de protection internationale à une autorité compétente en vertu du droit national pour enregistrer de telles demandes, l’enregistrement a lieu au plus tard trois jours ouvrables après la présentation de la demande.

Si la demande de protection internationale est présentée à d’autres autorités qui sont susceptibles de recevoir de telles demandes, mais qui ne sont pas, en vertu du droit national, compétentes pour les enregistrer, les États membres veillent à ce que l’enregistrement ait lieu au plus tard six jours ouvrables après la présentation de la demande.

Les États membres veillent à ce que ces autres autorités qui sont susceptibles de recevoir des demandes de protection internationale, par exemple les services de police, des gardes-frontières, les autorités chargées de l’immigration et les agents des centres de rétention, disposent des informations pertinentes et à ce que leur personnel reçoive le niveau de formation nécessaire à l’accomplissement de leurs tâches et responsabilités, ainsi que des instructions, pour qu’ils puissent fournir aux demandeurs des informations permettant de savoir où et comment la demande de protection internationale peut être introduite.

2. Les États membres veillent à ce que les personnes qui ont présenté une demande de protection internationale aient la possibilité concrète de l’introduire dans les meilleurs délais. Si les demandeurs n’introduisent pas leur demande, les États membres peuvent appliquer l’article 28 en conséquence.

3. Sans préjudice du paragraphe 2, les États membres peuvent exiger que les demandes de protection internationale soient introduites en personne et/ou en un lieu désigné.

4. Nonobstant le paragraphe 3, une demande de protection internationale est réputée introduite à partir du moment où un formulaire est présenté par le demandeur ou, si le droit national le prévoit, un rapport officiel est parvenu aux autorités compétentes de l’État membre concerné.

[...] »

3

L’article 8 de cette directive, intitulé « Information et conseil dans les centres de rétention et aux points de passage frontaliers », dispose :

« 1. S’il existe des éléments donnant à penser que des ressortissants de pays tiers ou des apatrides placés en rétention dans des centres de rétention ou présents à des points de passage frontaliers, y compris les zones de transit aux frontières extérieures, peuvent souhaiter présenter une demande de protection internationale, les États membres leur fournissent des informations sur la possibilité de le faire. Dans ces centres de rétention et points de passage, les États membres prennent des dispositions en matière d’interprétation dans la mesure nécessaire pour faciliter l’accès à la procédure d’asile.

2. Les États membres veillent à ce que les organisations et les personnes qui fournissent des conseils et des orientations aux demandeurs puissent accéder effectivement aux demandeurs présents aux points de passage frontaliers, y compris aux zones de transit, aux frontières extérieures. Les États membres peuvent prévoir des règles relatives à la présence de ces organisations et de ces personnes à ces points de passage et, en particulier, soumettre l’accès à un accord avec les autorités compétentes des États membres. Des restrictions à cet accès ne peuvent être imposées que, lorsqu’en vertu du droit national, elles sont objectivement nécessaires à la sécurité, l’ordre public ou la gestion administrative des points de passage, pour autant que ledit accès n’en soit pas alors considérablement restreint ou rendu impossible. »

4

L’article 9 de ladite directive, intitulé « Droit de rester dans l’État membre pendant l’examen de la demande », précise, à son paragraphe 2 :

« Les États membres ne peuvent prévoir d’exception à cette règle que si une personne présente une demande ultérieure visée à l’article 41 ou si une personne est, le cas échéant, livrée à ou extradée vers, soit un autre État membre en vertu des obligations découlant d’un mandat d’arrêt européen ou pour d’autres raisons, soit un pays tiers, soit une cour ou un tribunal pénal(e) international(e). »

5

L’article 12 de la même directive, intitulé « Garanties accordées aux demandeurs », énonce :

« 1. En ce qui concerne les procédures prévues au chapitre III, les États membres veillent à ce que tous les demandeurs bénéficient des garanties suivantes :

[...]

c)

la possibilité de communiquer avec [l’Agence des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR)] ou toute autre organisation qui fournit des conseils juridiques ou d’autres orientations aux demandeurs conformément au droit de l’État membre concerné ne leur est pas refusée ;

[...]

2. En ce qui concerne les procédures prévues au chapitre V, les États membres veillent à ce que tous les demandeurs bénéficient de garanties équivalentes à celles visées au paragraphe 1, [sous] b) à e). »

6

Aux termes de l’article 22, paragraphe 1, de la directive 2013/32, intitulé « Droit à l’assistance juridique et à la représentation à toutes les étapes de la procédure » :

« La possibilité effective est donnée aux demandeurs de consulter, à leurs frais, un conseil juridique ou un autre conseiller, reconnu en tant que tel ou autorisé à cette fin en vertu du droit national, sur des questions touchant à leur demande de protection internationale, à toutes les étapes de la procédure, y compris à la suite d’une décision négative. »

7

L’article 23, paragraphe 2, de cette directive, intitulé « Portée de l’assistance juridique et de la représentation », énonce :

« Les États membres veillent à ce que le conseil juridique ou un autre conseiller qui assiste ou représente un demandeur ait accès aux zones réservées, telles que les lieux de rétention ou les zones de transit, afin de consulter ledit demandeur, conformément à l’article 10, paragraphe 4, et à l’article 18, paragraphe 2, [sous] b) et c), de la directive 2013/33. »

8

Le chapitre III de cette directive, intitulé « Procédures en première instance », prévoit, à ses articles 31 à 43, les règles relatives à la procédure d’examen des demandes de protection internationale.

9

Aux termes de l’article 31, paragraphe 8, de ladite directive, intitulé « Procédure d’examen » :

« Les États membres peuvent décider, dans le respect des principes de base et des garanties fondamentales visés au chapitre II, d’accélérer une procédure d’examen et/ou de mener cette procédure à la frontière ou dans les zones de transit conformément à l’article 43 lorsque :

a)

le demandeur n’a soulevé, en soumettant sa demande et en exposant les faits, que des questions sans pertinence au regard de l’examen visant à déterminer s’il remplit les conditions requises pour obtenir le statut de bénéficiaire d’une protection internationale en vertu de la directive 2011/95/UE [du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2011, concernant les normes relatives aux...

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