Asnef-Equifax, Servicios de Información sobre Solvencia y Crédito, SL v Asociación de Usuarios de Servicios Bancarios (Ausbanc).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2006:734
Date23 November 2006
Celex Number62005CJ0238
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-238/05

Affaire C-238/05

Asnef-Equifax, Servicios de Información sobre Solvencia y Crédito, SL

et

Administración del Estado

contre

Asociación de Usuarios de Servicios Bancarios (Ausbanc)

(demande de décision préjudicielle, introduite par le Tribunal Supremo)

«Concurrence — Article 81 CE — Système d'échange d'informations entre établissements financiers sur la solvabilité des clients — Demande de décision préjudicielle — Recevabilité — Incidence sur le commerce entre États membres — Restriction de la concurrence — Profit pour les utilisateurs»

Conclusions de l'avocat général M. L. A. Geelhoed, présentées le 29 juin 2006

Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 23 novembre 2006

Sommaire de l'arrêt

1. Questions préjudicielles — Compétence de la Cour

(Art. 234 CE)

2. Concurrence — Ententes — Accords entre entreprises

(Art. 81, § 1, CE)

3. Concurrence — Ententes — Pratique concertée — Notion

(Art. 81, § 1, CE)

4. Concurrence — Ententes — Atteinte à la concurrence

(Art. 81, § 1, CE)

5. Concurrence — Ententes — Interdiction — Exemption — Conditions

(Art. 81, § 1 et 3, CE)

1. Dans le cadre de la procédure prévue à l'article 234 CE, il n'appartient pas à la Cour, eu égard à la répartition des fonctions entre elle et les juridictions nationales, de vérifier si la décision par laquelle elle a été saisie a été prise conformément aux règles d'organisation et de procédure juridictionnelles de droit national.

Dans le cadre de la coopération entre la Cour et les juridictions nationales instituée par l'article 234 CE, il appartient au seul juge national qui est saisi du litige et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir d'apprécier, au regard des particularités de l'affaire, tant la nécessité d'une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu'il pose à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions préjudicielles posées portent sur l'interprétation du droit communautaire, la Cour est, en principe, tenue de statuer.

Toutefois, dans des hypothèses exceptionnelles, il appartient à la Cour d'examiner les conditions dans lesquelles elle est saisie par le juge national en vue de vérifier sa propre compétence. En effet, l'esprit de collaboration qui doit présider au fonctionnement du renvoi préjudiciel implique que, de son côté, le juge national ait égard à la fonction confiée à la Cour, qui est de contribuer à l'administration de la justice dans les États membres et non de formuler des opinions consultatives sur des questions générales ou hypothétiques.

À cet égard, le rejet d'une demande formée par une juridiction nationale n'est possible que s'il apparaît de manière manifeste que l'interprétation sollicitée du droit communautaire n'a aucun rapport avec la réalité ou l'objet du litige au principal ou encore lorsque le problème est de nature hypothétique ou que la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées.

Tel n'est pas le cas lorsque la solution du litige dont la juridiction de renvoi est saisie peut nécessiter l'application à la fois du droit communautaire et du droit national de la concurrence, et que, par sa demande de décision préjudicielle, le juge national vise, en substance, à garantir le respect de la règle de la primauté du droit communautaire.

(cf. points 14-17, 20-21)

2. L'interprétation et l'application de la condition figurant à l'article 81, paragraphe 1, CE relative à l'incidence des accords sur le commerce entre États membres doivent prendre comme point de départ la finalité de cette condition, qui est de déterminer, en matière de réglementation de la concurrence, le domaine du droit communautaire par rapport à celui des États membres. C'est ainsi que relèvent du domaine du droit communautaire toute entente et toute pratique susceptibles d'affecter le commerce entre États membres dans un sens qui pourrait nuire à la réalisation des objectifs d'un marché unique entre les États membres, notamment en cloisonnant les marchés nationaux ou en modifiant la structure de la concurrence dans le marché commun.

Pour être susceptibles d'affecter le commerce entre États membres, une décision, un accord ou une pratique doivent, sur la base d'un ensemble d'éléments objectifs de droit ou de fait, permettre d'envisager avec un degré de probabilité suffisant qu'ils exercent une influence directe ou indirecte, actuelle ou potentielle, sur les courants d'échanges entre États membres, et cela de manière à faire craindre qu'ils puissent entraver la réalisation d'un marché unique entre États membres. Il faut, en outre, que cette influence ne soit pas insignifiante.

Ainsi, une incidence sur les échanges intracommunautaires résulte en général de la réunion de plusieurs facteurs qui, pris isolément, ne seraient pas nécessairement déterminants. Pour vérifier si une entente affecte sensiblement le commerce entre États membres, il faut l'examiner dans son contexte économique et juridique.

À cet égard, d'une part, le simple fait que des opérateurs des autres États membres figurent parmi les participants à une entente nationale est un élément important dans l'appréciation à porter, mais il n'est pas déterminant en soi pour pouvoir en conclure que la condition relative aux effets sur le commerce entre États membres est remplie.

D'autre part, le fait qu'une entente n'a pour objet que la commercialisation des produits dans un seul État membre ne suffit pas pour exclure que le commerce entre États membres puisse être affecté. En effet, une entente s'étendant à l'ensemble du territoire d'un État membre a, par sa nature même, pour effet de consolider des cloisonnements de caractère national, entravant ainsi l'interpénétration économique voulue par le traité.

En outre, la circonstance qu'un accord ou une pratique favorisent une augmentation du volume du commerce entre États membres n'exclut pas que cet accord ou cette pratique puissent affecter ce commerce.

C'est ainsi que, s'agissant d'un système d'échange d'informations entre établissements financiers sur la solvabilité des clients, il appartient à la juridiction nationale de vérifier si, eu égard aux caractéristiques du marché en cause, il existe un degré suffisant de probabilité que la mise en oeuvre d'un tel système exerce une influence directe ou indirecte, actuelle ou potentielle, sur l'offre de crédit dans l'État membre concerné par des opérateurs d'autres États membres et que cette influence ne soit pas insignifiante.

Dans le cadre de cette appréciation, il appartient à la juridiction nationale de tenir compte de l'évolution prévisible des conditions de concurrence et du flux d'échanges entre États membres. Sur ce point, il lui faut prendre en considération, par exemple, le développement éventuel d'activités transfrontalières et l'incidence prévisible d'éventuelles initiatives politiques ou législatives visant à réduire les obstacles juridiques ou techniques au commerce.

(cf. points 33-39, 43-44)

3. Il est inhérent aux dispositions du traité relatives à la concurrence que tout opérateur économique doit déterminer de manière autonome la politique qu'il entend suivre sur le marché commun. Ainsi, une telle exigence d'autonomie s'oppose à toute prise de contact directe ou indirecte entre des opérateurs économiques de nature soit à influencer le comportement sur le marché d'un concurrent actuel ou potentiel, soit à dévoiler à un tel concurrent le comportement que l'on est décidé à tenir soi-même sur le marché ou que l'on envisage d'adopter sur celui-ci, lorsque ces contacts ont pour objet ou pour effet d'aboutir à des conditions de concurrence qui ne correspondraient pas aux conditions normales du marché en cause, compte tenu de la nature des produits ou des prestations fournies, de l'importance et du nombre des entreprises ainsi que du volume dudit marché.

Toutefois, ladite exigence d'autonomie n'exclut pas le droit des opérateurs économiques de s'adapter intelligemment au comportement constaté ou à escompter de leurs concurrents.

Dès lors, la compatibilité d'un système d'échange d'informations entre établissements financiers sur la solvabilité des clients avec les règles communautaires de concurrence ne peut être appréciée de façon abstraite. Elle est fonction des conditions économiques sur les marchés concernés et des caractéristiques propres au système en cause, telles que, notamment, sa finalité, les conditions d'accès et de participation à l'échange, ainsi que la nature des informations échangées - celles-ci pouvant, par exemple, être publiques ou confidentielles, agrégées ou détaillées, historiques ou actuelles - leur périodicité et leur importance pour la fixation des prix, des volumes ou des conditions de la prestation.

(cf. points 52-54)

4. Un système d'échange d'informations entre établissements financiers sur la solvabilité des clients, en réduisant le taux de défaillance des emprunteurs, est en principe de nature à améliorer le fonctionnement de l'offre de crédit. En effet, si les établissements financiers, en raison d'un manque d'informations sur le risque de défaillance des emprunteurs, ne peuvent distinguer, parmi ces derniers, ceux dont la probabilité de défaillance est plus importante, le risque supporté de ce fait par ces établissements s'en trouvera nécessairement augmenté et ceux-ci auront tendance à l'intégrer dans le calcul du coût du crédit pour tous les emprunteurs, y compris ceux qui présentent le risque de défaillance le plus faible, ces derniers devant alors supporter un coût plus élevé que si lesdits établissements étaient en mesure d'évaluer plus précisément la probabilité de remboursement, tendance qu'un système d'échange d'informations tel que précité est précisément de nature à atténuer.

En outre, un système d'échange d'informations entre établissements financiers sur la solvabilité des clients, en diminuant...

To continue reading

Request your trial
48 practice notes
14 cases

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT