Gestoras Pro Amnistía, Juan Mari Olano Olano and Julen Zelarain Errasti v Council of the European Union.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2007:115
CourtCourt of Justice (European Union)
Date27 February 2007
Docket NumberC-354/04
Procedure TypeRecurso de casación - inadmisible
Celex Number62004CJ0354

Affaire C-354/04 P

Gestoras Pro Amnistía e.a.

contre

Conseil de l'Union européenne

«Pourvoi — Union européenne — Coopération policière et judiciaire en matière pénale — Positions communes 2001/931/PESC, 2002/340/PESC et 2002/462/PESC — Mesures relatives aux personnes, groupes et entités impliqués dans des actes de terrorisme — Recours en indemnité — Compétence de la Cour de justice»

Conclusions de l'avocat général M. P. Mengozzi, présentées le 26 octobre 2006

Arrêt de la Cour (grande chambre) du 27 février 2007

Sommaire de l'arrêt

1. Pourvoi — Moyens — Recevabilité — Conditions

(Art. 225 CE; statut de la Cour de justice, art. 58, al. 1; règlement de procédure de la Cour, art. 112, § 1, c))

2. Pourvoi — Moyens — Moyen présenté pour la première fois dans le cadre du pourvoi — Irrecevabilité

3. Recours en indemnité — Compétence du juge communautaire — Recours dans le cadre du titre VI du traité de l'Union européenne — Exclusion

(Art. 235 CE et 288, al. 2, CE; art. 35 UE, 41, § 1, UE et 46 UE)

4. Union européenne — Coopération policière et judiciaire en matière pénale — Droit à une protection juridictionnelle effective

(Art. 34 UE et 35, § 1 et 6, UE)

5. Union européenne — Actes de l'Union européenne — Interprétation

1. Il résulte des articles 225 CE, 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice et 112, paragraphe 1, sous c), de son règlement de procédure qu'un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l'arrêt ou de l'ordonnance dont l'annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande.

(cf. point 22)

2. Permettre à une partie de soulever pour la première fois devant la Cour un moyen qu'elle n'a pas soulevé devant le Tribunal reviendrait à lui permettre de saisir la Cour, dont la compétence en matière de pourvoi est limitée, d'un litige plus étendu que celui dont a eu à connaître le Tribunal. Dans le cadre d'un pourvoi, la compétence de la Cour est limitée à l'appréciation de la solution légale qui a été donnée aux moyens débattus devant les premiers juges.

(cf. point 30)

3. Il résulte de l'article 46 UE que les dispositions des traités CE et CEEA relatives à la compétence de la Cour ne sont applicables au titre VI du traité UE que dans les conditions prévues à l'article 35 UE. Or, ce dernier article n'attribue à la Cour aucune compétence pour connaître d'un quelconque recours en indemnité. En outre, l'article 41, paragraphe 1, UE ne fait pas figurer, parmi les articles du traité CE qui sont applicables dans les domaines visés au titre VI du traité UE, l'article 288, deuxième alinéa, CE, selon lequel la Communauté doit réparer, conformément aux principes généraux communs aux droits des États membres, les dommages causés par ses institutions ou par ses agents dans l'exercice de leurs fonctions, ni l'article 235 CE, aux termes duquel la Cour est compétente pour connaître des litiges relatifs à la réparation des dommages visés à l'article 288, deuxième alinéa, CE.

Il en résulte qu'aucun recours en responsabilité n'est prévu dans le cadre du titre VI du traité UE. Une déclaration du Conseil relative au droit à réparation, inscrite en annexe du procès-verbal lors de l'adoption d'un acte de l'Union européenne, ne suffit pas à créer une voie de droit qui n'est pas prévue par les textes applicables et ne saurait donc suffire à attribuer à la Cour compétence à cet égard.

(cf. points 44, 46-48, 60-61)

4. S'agissant de l'Union européenne, les traités ont établi un système de voies de recours dans lequel les compétences de la Cour sont, en vertu de l'article 35 UE, moins étendues dans le cadre du titre VI du traité sur l'Union européenne qu'elles ne le sont au titre du traité CE. Si un système de voies de recours, et notamment un régime de responsabilité extracontractuelle, autre que celui mis en place par les traités est certes envisageable, il appartient, le cas échéant, aux États membres, conformément à l'article 48 UE, de réformer le système actuellement en vigueur.

Les requérants qui veulent contester en justice la légalité d'une position commune adoptée sur le fondement de l'article 34 UE ne sont toutefois pas privés de toute protection juridictionnelle. En effet, en ne prévoyant pas la possibilité, pour les juridictions nationales, de saisir la Cour d'une question préjudicielle portant sur une position commune mais seulement d'une question portant sur les actes énumérés à l'article 35, paragraphe 1, UE, celui-ci envisage comme actes susceptibles de faire l'objet d'un tel renvoi préjudiciel toutes dispositions prises par le Conseil et visant à produire un effet juridique vis-à-vis des tiers. Dès lors que la procédure qui permet à la Cour de statuer à titre préjudiciel tend à assurer le respect du droit dans l'interprétation et l'application du traité, il serait contraire à cet objectif d'interpréter restrictivement l'article 35, paragraphe 1, UE. La possibilité de saisir la Cour à titre préjudiciel doit donc être ouverte à l'égard de toutes les dispositions prises par le Conseil, quelles qu'en soient la nature ou la forme, qui visent à produire des effets de droit vis-à-vis des tiers. Par voie de conséquence, une position commune qui aurait, du fait de son contenu, une portée qui dépasse celle assignée par le traité UE à ce type d'acte doit pouvoir être soumise au contrôle de la Cour. Dès lors, une juridiction nationale, saisie d'un litige qui, de manière incidente, poserait la question de la validité ou de l'interprétation d'une position commune adoptée sur le fondement de l'article 34 UE et qui aurait un doute sérieux sur la question de savoir si cette position commune viserait en réalité à produire des effets de droit vis-à-vis des tiers, pourrait demander à la Cour de statuer à titre préjudiciel, dans les conditions posées à l'article 35 UE. Il appartiendrait alors à la Cour de constater, le cas échéant, que la position commune vise à produire des effets de droit vis-à-vis des tiers, de lui restituer sa véritable qualification, et de statuer à titre préjudiciel.

La Cour serait également compétente pour contrôler la légalité de tels actes lorsqu'un recours a été formé par un État membre ou par la Commission dans les conditions posées à l'article 35, paragraphe 6, UE.

Enfin, il appartient aux États membres et, notamment, à leurs juridictions, d'interpréter et d'appliquer les règles internes de procédure gouvernant l'exercice des recours d'une manière qui permette aux personnes physiques et morales de contester en justice la légalité de toute décision ou de toute autre mesure nationale relative à l'élaboration ou à l'application à leur égard d'un acte de l'Union européenne et de demander réparation du préjudice le cas échéant subi.

(cf. points 50-51, 53-56)

5. Une déclaration du Conseil inscrite en annexe du procès-verbal lors de l'adoption d'un acte de l'Union européenne ne peut se voir reconnaître aucune portée juridique ni être retenue pour l'interprétation du droit issu du traité UE lorsque le contenu de la déclaration ne trouve aucune expression dans le texte de la disposition en cause.

(cf. point 60)




ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

27 février 2007 (*)

«Pourvoi – Union européenne – Coopération policière et judiciaire en matière pénale – Positions communes 2001/931/PESC, 2002/340/PESC et 2002/462/PESC – Mesures relatives aux personnes, groupes et entités impliqués dans des actes de terrorisme – Recours en indemnité – Compétence de la Cour de justice»

Dans l’affaire C-354/04 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 17 août 2004,

Gestoras Pro Amnistía, établie à Hernani (Espagne),

Juan Mari Olano Olano, demeurant à Madrid (Espagne),

Julen Zelarain Errasti, demeurant à Madrid (Espagne),

représentés par Me D. Rouget, avocat,

parties requérantes,

les autres parties à la procédure étant:

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme E. Finnegan et M. M. Bauer, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

Royaume d’Espagne, représenté par l’Abogacía del Estado,

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord,

parties intervenantes en première instance,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, MM. P. Jann, C. W. A. Timmermans, A. Rosas, K. Lenaerts et R. Schintgen, présidents de chambre, MM. A. Tizzano, J. N. Cunha Rodrigues, Mme R. Silva de Lapuerta, M. L. Bay Larsen, Mme P. Lindh, MM. J.‑C. Bonichot (rapporteur) et T. von Danwitz, juges,

avocat général: M. P. Mengozzi,

greffier: M. R. Grass,

vu la procédure écrite,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 26 octobre 2006,

rend le présent

Arrêt

1 Par leur pourvoi, Gestoras Pro Amnistía ainsi que MM. Olano Olano et Zelarain Errasti demandent l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 7 juin 2004, Gestoras Pro Amnistía e.a./Conseil (T-333/02, non publiée au Recueil, ci‑après l’«ordonnance attaquée»), par laquelle celui-ci a rejeté leur recours tendant à l’obtention d’indemnités en réparation du préjudice qu’ils prétendent avoir subi du fait de l’inscription de Gestoras Pro Amnistía sur la liste des personnes, groupes et entités visés à l’article 1er de la position commune 2001/931/PESC du Conseil, du 27 décembre 2001, relative à l’application de mesures spécifiques en vue de lutter contre le terrorisme (JO L 344, p. 93), à l’article 1er de la position commune 2002/340/PESC du Conseil, du 2 mai 2002, portant mise à jour de la position commune 2001/931 (JO L 116, p. 75), ainsi qu’à l’article 1er de la position commune 2002/462/PESC du Conseil, du 17 juin 2002, portant mise à jour de la position commune 2001/931 et abrogeant la position commune 2002/340 (JO L 160, p. 32).

Les antécédents du litige

2 Les antécédents du litige ont été exposés aux points 1 à 11 de l’ordonnance attaquée dans les termes suivants:

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