Bouygues SA and Bouygues Télécom SA v Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2009:223
CourtCourt of Justice (European Union)
Date02 April 2009
Docket NumberC-431/07
Celex Number62007CJ0431
Procedure TypeRecurso de anulación

Affaire C-431/07 P

Bouygues SA
et
Bouygues Télécom SA

contre

Commission des Communautés européennes

«Pourvoi — Aides d'État — Article 88, paragraphe 2, CE — Conditions d'ouverture d'une procédure formelle d'examen — Difficultés sérieuses — Critères constitutifs d'une aide d'État — Ressources d'État — Principe de non-discrimination»

Sommaire de l'arrêt

1. Pourvoi — Moyens — Insuffisance de motivation — Recours par le Tribunal à une motivation implicite — Admissibilité — Conditions

(Art. 225 CE; statut de la Cour de justice, art. 36 et 53, al. 1)

2. Aides accordées par les États — Projets d'aides — Examen par la Commission — Phase préliminaire et phase contradictoire — Compatibilité d'une aide avec le marché commun — Difficultés d'appréciation

(Art. 88, § 2 et 3, CE)

3. Rapprochement des législations — Secteur des télécommunications — Cadre commun pour les autorisations générales et les licences individuelles — Directive 97/13 — Procédures d'octroi

(Directive du Parlement européen et du Conseil 97/13)

4. Rapprochement des législations — Secteur des télécommunications — Cadre commun pour les autorisations générales et les licences individuelles — Directive 97/13 — Procédures d'octroi — Interdiction de discrimination

(Directive du Parlement et du Conseil 97/13)

1. L'obligation de motiver les arrêts qui incombe au Tribunal en vertu des articles 36 et 53, premier alinéa, du statut de la Cour de justice n'impose pas au Tribunal de fournir un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements articulés par les parties au litige. La motivation peut donc être implicite, à condition qu'elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles les mesures en question ont été prises et à la Cour de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle juridictionnel.

(cf. point 42)

2. La procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, CE revêt un caractère indispensable dès lors que la Commission éprouve des difficultés sérieuses pour apprécier si une aide est compatible avec le marché commun. La Commission ne peut donc s'en tenir à la phase préliminaire d'examen visée à l'article 88, paragraphe 3, CE pour prendre une décision favorable à une aide que si elle est en mesure d'acquérir la conviction, au terme d'un premier examen, que cette aide est compatible avec le marché commun. En revanche, si ce premier examen a conduit la Commission à acquérir la conviction contraire, ou même n'a pas permis de surmonter toutes les difficultés soulevées par l'appréciation de la compatibilité de cette aide avec le marché commun, la Commission a le devoir de s'entourer de tous les avis nécessaires et d'ouvrir, à cet effet, la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, CE.

La notion de difficultés sérieuses revêtant un caractère objectif, l'existence de celles-ci doit être recherchée non seulement dans les circonstances de l'adoption de l'acte attaqué, mais également dans les appréciations sur lesquelles s'est fondée la Commission.

(cf. points 61, 63)

3. La directive 97/13, relative à un cadre commun pour les autorisations générales et les licences individuelles dans le secteur des services de télécommunications, laisse aux États membres une marge d'appréciation quant au choix de la procédure d'octroi des licences, dès lors que sont respectés les principes de libre concurrence et d'égalité de traitement. Ainsi, l'attribution de licences Universal Mobile Telecommunications System (UMTS) au moyen d'une procédure de sélection comparative est admissible, pour autant que les opérateurs se voient appliquer le même traitement, notamment en matière de redevances.

S'agissant plus précisément d'une mesure nationale réduisant les redevances dues par les deux premiers opérateurs ayant obtenu des licences UMTS en vue d'aligner les conditions d'octroi de toutes les licences, une telle procédure permet d'exclure que ces opérateurs subissent une discrimination lorsque cet alignement a pour but précis de prendre en compte la circonstance que, au moment de l'attribution de la licence à un nouvel opérateur, aucun des trois opérateurs n'avait encore, pour des raisons indépendantes de leur volonté, accédé au marché, de sorte que leur situation était, de ce fait, comparable.

(cf. points 90-91, 97)

4. La valeur économique d'une licence Universal Mobile Telecommunications System (UMTS) résulte, en particulier, de la possibilité dont dispose l'attributaire de celle-ci de se prévaloir des droits qui sont attachés à cette licence, à savoir, notamment, la possibilité d'occuper le domaine public hertzien en vue de l'exploitation de la technologie de l'UMTS.

Une discrimination ne peut consister que dans l'application de règles différentes à des situations comparables ou bien dans l'application de la même règle à des situations différentes. S'agissant de l'attribution de licences UMTS, l'antériorité de licences attribuées à certains opérateurs ne peut justifier, voire exiger, la fixation des redevances y afférentes à un montant supérieur à celui de la redevance due par un nouvel opérateur que si la valeur économique de ces licences peut être considérée, du seul fait de cette antériorité, comme supérieure à celle de la licence attribuée à ce nouvel opérateur.

Ainsi, le fait que des licences ont été attribuées à des dates différentes ne permet pas de considérer que les premiers attributaires, à la date de l'attribution de la licence à un nouvel opérateur, se trouvaient dans une situation différente au regard de l'objectif de la directive 97/13, relative à un cadre commun pour les autorisations générales et les licences individuelles dans le secteur des services de télécommunications, à savoir celui d'assurer que les opérateurs accèdent au marché de l'UMTS dans les mêmes conditions.

(cf. points 114-115, 119, 122)







ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

2 avril 2009 (*)

«Pourvoi – Aides d’État – Article 88, paragraphe 2, CE – Conditions d’ouverture d’une procédure formelle d’examen – Difficultés sérieuses – Critères constitutifs d’une aide d’État – Ressources d’État – Principe de non-discrimination»

Dans l’affaire C‑431/07 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 18 septembre 2007,

Bouygues SA, établie à Paris (France),

Bouygues Télécom SA, établie à Boulogne-Billancourt (France),

représentées par Mes F. Sureau, D. Théophile, S. Perrotet, A. Bénabent, J. Vogel et L. Vogel, avocats,

parties requérantes,

les autres parties à la procédure étant:

Commission des Communautés européennes, représentée par M. C. Giolito, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse en première instance,

République française, représentée par M. G. de Bergues ainsi que par Mmes O. Christmann et A.-L. Vendrolini, en qualité d’agents,

Orange France SA, représentée par Mes S. Hautbourg, S. Quesson et L. Olza Moreno, avocats,

Société française du radiotéléphone – SFR, représentée par Me A. Vincent, avocat, et par M. C. Vajda, QC,

parties intervenantes en première instance,

LA COUR (première chambre),

composée de M. P. Jann, président de chambre, MM. M. Ilešič, A. Tizzano (rapporteur), A. Borg Barthet et J.-J. Kasel, juges,

avocat général: Mme V. Trstenjak,

greffier: M. M.-A. Gaudissart, chef d’unité,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 11 septembre 2008,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 8 octobre 2008,

rend le présent

Arrêt

1 Par leur pourvoi, Bouygues Télécom SA (ci-après «Bouygues Télécom») et Bouygues SA demandent à la Cour d’annuler l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 4 juillet 2007, Bouygues et Bouygues Télécom/Commission (T‑475/04, Rec. p. II‑2097, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté leur recours tendant à l’annulation de la décision de la Commission du 20 juillet 2004, relative à la modification des redevances dues par Orange et SFR au titre des licences UMTS (Universal Mobile Telecommunications System) (Aide d’État NN 42/2004 – France) (ci-après la «décision litigieuse»).

Le cadre juridique communautaire

2 La directive 97/13/CE du Parlement européen et du Conseil, du 10 avril 1997, relative à un cadre commun pour les autorisations générales et les licences individuelles dans le secteur des services de télécommunications (JO L 117, p. 15), en vigueur à l’époque des faits du litige, prévoyait à son article 8, paragraphe 4:

«Les États membres peuvent modifier les conditions attachées à une licence individuelle dans des cas objectivement justifiés et de manière proportionnée. Ce faisant, les États membres notifient leur intention de manière appropriée et permettent aux parties intéressées de faire connaître leur point de vue sur les modifications proposées.»

3 L’article 9, paragraphe 2, premier tiret, de la même directive était ainsi libellé:

«Lorsqu’un État membre a l’intention d’octroyer des licences individuelles:

– il les octroie selon des procédures ouvertes, non discriminatoires et transparentes et, à cette fin, soumet tous les candidats aux mêmes procédures, à moins qu’il n’existe une raison objective de leur appliquer un traitement différencié».

4 L’article 10, paragraphe 3, premier alinéa, de ladite directive disposait:

«Les États membres octroient ces licences individuelles sur la base de critères de sélection objectifs, non discriminatoires, transparents, proportionnés et détaillés. Lors de toute sélection, ils tiennent dûment compte de la nécessité de faciliter le développement de la concurrence et de maximiser les avantages pour les utilisateurs.»

5 L’article 11 de la directive 97/13 énonçait:

«1. Les États membres veillent à ce que les taxes imposées aux entreprises au titre des procédures d’autorisation aient uniquement pour objet de couvrir les frais administratifs afférents à la délivrance, à la gestion, au contrôle et à l’application des licences...

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