Air France-KLM and Hop!-Brit Air SAS v Ministère des Finances et des Comptes publics.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2015:841
Date23 December 2015
Celex Number62014CJ0250
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-250/14
62014CJ0250

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

23 décembre 2015 ( * )

«Taxe sur la valeur ajoutée — Fait générateur et exigibilité — Transport aérien — Billet acheté mais non utilisé — Exécution de la prestation de transport — Délivrance du billet — Moment du versement de la taxe»

Dans les affaires jointes C‑250/14 et C‑289/14,

ayant pour objet des demandes de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduites par le Conseil d’État (France), par décisions du 21 mai 2014, parvenues respectivement à la Cour le 26 mai 2014 et le 12 juin 2014, dans les procédures

Air France‑KLM, anciennement Air France (C‑250/14),

Hop!‑Brit Air SAS, anciennement Brit Air (C‑289/14)

contre

Ministère des Finances et des Comptes publics,

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Tizzano, vice‑président de la Cour, faisant fonction de président de la première chambre, MM. F. Biltgen, A. Borg Barthet (rapporteur), E. Levits et S. Rodin, juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées:

pour Air France‑KLM et Hop!‑Brit Air SAS, par Me A. Beetschen, avocate,

pour le gouvernement français, par MM. D. Colas et J.‑S. Pilczer ainsi que par Mme S. Ghiandoni, en qualité d’agents,

pour l’Irlande, par Mmes E. Creedon et J. Quaney ainsi que par M. A. Joyce, en qualité d’agents, assistés de Mme A. Keirse, BL,

pour le gouvernement grec, par Mmes K. Nasopoulou et S. Lekkou, en qualité d’agents,

pour le gouvernement portugais, par MM. L. Inez Fernandes et R. Campos Laires ainsi que par Mme A. Cunha, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mmes C. Soulay et L. Lozano Palacios, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

Les demandes de décision préjudicielle portent sur l’interprétation des articles 2, point 1, et 10, paragraphe 2, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1), telle que modifiée par la directive 1999/59/CE du Conseil, du 17 juin 1999 (JO L 162, p. 63, ci‑après la «sixième directive»), puis par la directive 2001/115/CE du Conseil, du 20 décembre 2001 (JO L 15, p. 24, ci‑après la «sixième directive modifiée»).

2

Ces demandes ont été présentées dans le cadre de litiges opposant, d’une part, Air France‑KLM, anciennement Air France, et, d’autre part, Hop!‑Brit Air SAS, anciennement Brit Air, au ministère des Finances et des Comptes publics au sujet de l’assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) d’un titre de transport non utilisé et des sommes versées par une compagnie de transport aérien à une entreprise de même nature en contrepartie de la vente de billets de transport non utilisés.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Aux termes de l’article 2, point 1, de la sixième directive et de la sixième directive modifiée:

«Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée:

1. les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel».

4

L’article 10 de la sixième directive prévoyait:

«1. Sont considérés comme:

a)

fait générateur de la taxe: le fait par lequel sont réalisées les conditions légales, nécessaires pour l’exigibilité de la taxe;

b)

exigibilité de la taxe: le droit que le Trésor peut faire valoir aux termes de la loi, à partir d’un moment donné, auprès du redevable pour le paiement de la taxe, même si le paiement peut en être reporté.

2. Le fait générateur de la taxe intervient et la taxe devient exigible au moment où la livraison du bien ou la prestation de services est effectuée. [...]

Toutefois, en cas de versements d’acomptes avant que la livraison de biens ou la prestation de services ne soit effectuée, la taxe devient exigible au moment de l’encaissement à concurrence du montant encaissé.

Par dérogation aux dispositions ci‑dessus, les États membres ont la faculté de prévoir que la taxe devient exigible pour certaines opérations ou certaines catégories d’assujettis:

soit au plus tard lors de la délivrance de la facture ou du document en tenant lieu,

soit au plus tard lors de l’encaissement du prix,

soit, en cas de non‑délivrance ou de délivrance tardive de la facture ou du document en tenant lieu, dans un délai déterminé à compter de la date du fait générateur.

[...]»

5

À l’article 10, paragraphe 2, troisième alinéa, premier et troisième tirets, de la sixième directive modifiée, la référence au document tenant lieu de facture avait été supprimée. Cette disposition ne faisait ainsi plus référence qu’à la délivrance de la facture.

6

L’article 11 de la sixième directive et de la sixième directive modifiée, relatif à la base d’imposition disposait:

«A. À l’intérieur du pays

1. La base d’imposition est constituée:

a)

pour les livraisons de biens et les prestations de services autres que celles visées sous b), c) et d), partout ce qui constitue la contrepartie obtenue ou à obtenir par le fournisseur ou le prestataire pour ces opérations de la part de l’acheteur, du preneur ou d’un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations;

[...]»

Le droit français

7

Aux termes de l’article 256, point I, du code général des impôts (ci‑après le «CGI»):

«Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel.»

8

Aux termes de l’article 269 du CGI:

«1. Le fait générateur de la taxe se produit:

a)

au moment où la livraison, l’acquisition intracommunautaire du bien ou la prestation de services est effectuée;

[...]

2. La taxe est exigible:

[...]

c)

pour les prestations de services, lors de l’encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération.»

Les litiges au principal et les questions préjudicielles

L’affaire C‑250/14

9

Air France‑KLM, qui est venue aux droits d’Air France en 2004, est une société établie en France exerçant une activité de transport aérien. Dans le cadre de cette activité, Air France‑KLM effectue des services de transport aérien de passagers à l’intérieur du territoire français. Ces vols intérieurs étant soumis à la TVA, les billets d’avion afférents à ceux‑ci sont vendus à des prix incluant cette taxe.

10

À compter de l’année 1999, Air France n’a plus versé au Trésor la TVA perçue sur le prix de vente des billets émis qui n’ont pas été utilisés par les passagers de ses vols intérieurs. Il s’agit, d’une part, des billets périmés non échangeables, en raison du fait que les passagers ne se sont pas présentés à l’embarquement, ainsi que, d’autre part, des billets périmés échangeables qui n’ont pas été utilisés dans le délai de leur validité.

11

À la suite d’une vérification de comptabilité, l’administration fiscale a estimé que les sommes afférentes à ces «billets émis et non utilisés» auraient dû être soumises à la TVA au taux réduit de 5,5 % applicable aux prestations domestiques de transport aérien de voyageurs. En conséquence, elle a notifié à Air France‑KLM des rappels de TVA portant sur la période allant du 1er avril 2000 au 31 mars 2003 pour un montant de 4066607 euros, assortis d’intérêts de retard pour un montant de 1226584 euros.

12

Le tribunal administratif de Cergy‑Pontoise a, par un jugement du 9 juin 2011, rejeté la demande introduite par Air France‑KLM tendant à la décharge de ces rappels de TVA. La cour administrative d’appel de Versailles a, par un arrêt du 13 novembre 2012, confirmé ce jugement et a considéré que, conformément aux dispositions des articles 256 et 269 du CGI, lus en combinaison avec l’article 1234 du code civil, les sommes conservées à la suite de l’inexécution définitive de la prestation de transport devaient être soumises à la TVA. Air France‑KLM a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt.

13

Le Conseil d’État, éprouvant des doutes quant à l’assujettissement à la TVA d’un titre de transport non utilisé, a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)

Les dispositions des articles 2, point 1, et 10, paragraphe 2, de la [sixième directive et de la sixième directive modifiée] doivent‑elles être interprétées en ce sens que la délivrance du billet peut être assimilée à l’exécution effective de la prestation de transport et que les sommes conservées par une compagnie aérienne lorsque le titulaire du billet d’avion n’a pas utilisé son billet et que celui‑ci est devenu périmé sont soumises à la TVA?

2)

Dans cette hypothèse, la taxe collectée doit‑elle être reversée au Trésor dès l’encaissement du prix, alors même que le voyage peut ne pas avoir lieu du fait du client?»

L’affaire C‑289/14

14

Il ressort de la décision de renvoi dans l’affaire C‑289/14, que Brit Air, devenue Hop!‑Brit Air SAS, effectuait des services de transport aérien de passagers dans le cadre d’un contrat de franchise conclu avec Air France‑KLM. Cette dernière était chargée de la commercialisation et de la gestion de la billetterie pour les lignes exploitées en franchise par Brit Air.

15

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