Egon Schempp v Finanzamt München V.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2005:446
Date12 July 2005
Celex Number62003CJ0403
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-403/03

Affaire C-403/03

Egon Schempp

contre

Finanzamt München V

(demande de décision préjudicielle, introduite par le Bundesfinanzhof)

«Citoyenneté de l'Union — Articles 12 CE et 18 CE — Impôt sur le revenu — Déductibilité du revenu imposable d'une pension alimentaire versée par un contribuable résidant en Allemagne à son ex-épouse résidant en Autriche — Preuve de l'imposition de la pension alimentaire dans cet État membre»

Conclusions de l'avocat général M. L. A. Geelhoed, présentées le 27 janvier 2005

Arrêt de la Cour (grande chambre) du 12 juillet 2005

Sommaire de l'arrêt

1. Citoyenneté de l'Union européenne — Dispositions du traité — Champ d'application matériel — Exclusion des situations purement internes — Réglementation fiscale nationale relative à la déductibilité des pensions alimentaires du revenu imposable — Prise en compte du traitement fiscal des pensions versées à un bénéficiaire résidant dans un autre État membre — Absence de situation purement interne

(Art. 17 CE)

2. Citoyenneté de l'Union européenne — Égalité de traitement — Discrimination en raison de la nationalité — Droit de libre circulation et de libre séjour sur le territoire des États membres — Réglementation nationale subordonnant la déductibilité du revenu imposable des pensions alimentaires versées à un bénéficiaire résidant dans un autre État membre à leur imposition dans celui-ci — Admissibilité

(Art. 12 CE et 18, § 1, CE)

1. La citoyenneté de l'Union, prévue à l'article 17 CE, n'a pas pour objectif d'étendre le champ d'application matériel du traité à des situations internes n'ayant aucun rattachement au droit communautaire. La situation du ressortissant d'un État membre qui n'a pas fait usage du droit à la libre circulation ne saurait toutefois, de ce seul fait, être assimilée à une situation purement interne.

S'agissant d'une réglementation fiscale nationale qui, aux fins de déterminer le caractère déductible d'une pension alimentaire versée par un contribuable résidant dans l'État membre concerné à un bénéficiaire résidant dans un autre État membre, tient compte du traitement fiscal de ladite pension dans l'État membre de la résidence de ce bénéficiaire, l'exercice, par celui-ci, de son droit de circuler et de séjourner librement dans un autre État membre en vertu de l'article 18 CE a une incidence sur le droit à déduction du contribuable dans l'État membre de sa résidence.

Une telle situation ne saurait dès lors être considérée comme étant une situation interne n'ayant aucun rattachement au droit communautaire.

(cf. points 20, 22, 24-25)

2. Les articles 12, premier alinéa, CE et 18, paragraphe 1, CE doivent être interprétés en ce sens qu'ils ne s'opposent pas à ce qu'un contribuable résidant dans un État membre ne puisse pas, en vertu de la réglementation nationale, déduire de son revenu imposable dans cet État membre la pension alimentaire versée à son ex-conjoint résidant dans un autre État membre dans lequel ladite pension n'est pas imposable, alors qu'il en aurait le droit si son ex-conjoint résidait dans le même État membre.

En effet, l'article 12 CE ne vise pas les éventuelles disparités de traitement qui peuvent résulter, pour les personnes et entreprises soumises à la juridiction de la Communauté, des divergences existant entre les différents États membres, dès lors que celles-ci affectent toutes personnes tombant sous leur application, selon des critères objectifs et sans égard à leur nationalité.

Par ailleurs, le traité ne garantit pas à un citoyen de l'Union que le transfert de ses activités dans un État membre autre que celui dans lequel il résidait jusque-là est neutre en matière d'imposition. Compte tenu des disparités des réglementations des États membres en la matière, un tel transfert peut, selon les cas, être plus ou moins avantageux ou désavantageux pour le citoyen sur le plan de l'imposition indirecte. Le même principe s'applique a fortiori à une situation dans laquelle la personne concernée n'a pas exercé elle-même son droit de circulation, mais se prétend la victime d'une différence de traitement à la suite du transfert de la résidence de son ex-conjoint dans un autre État membre.

(cf. points 34, 45-47 et disp.)




ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

12 juillet 2005 (*)

«Citoyenneté de l’Union – Articles 12 CE et 18 CE – Impôt sur le revenu – Déductibilité du revenu imposable d’une pension alimentaire versée par un contribuable résidant en Allemagne à son ex‑épouse résidant en Autriche – Preuve de l’imposition de la pension alimentaire dans cet État membre»

Dans l’affaire C‑403/03,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Bundesfinanzhof (Allemagne), par décision du 22 juillet 2003, parvenue à la Cour le 29 septembre 2003, dans la procédure

Egon Schempp

contre

Finanzamt München V,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, MM. P. Jann, C. W. A. Timmermans et A. Rosas, présidents de chambre, MM. C. Gulmann, J.‑P. Puissochet, A. La Pergola, R. Schintgen, Mme N. Colneric, MM. J. Klučka, U. Lõhmus, E. Levits et A. Ó Caoimh (rapporteur), juges,

avocat général: M. L. A. Geelhoed,

greffier: M. R. Grass,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées:

– pour M. Schempp, par Me J. Seest, Rechtsanwalt,

– pour le gouvernement allemand, par M. W.‑D. Plessing et Mme A. Tiemann, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement néerlandais, par Mmes H. G. Sevenster et C. A. H. M. ten Dam, en qualité d’agents,

– pour la Commission des Communautés européennes, par MM. K. Gross et R. Lyal, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 27 janvier 2005,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 12 CE et 18 CE.

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Schempp au Finanzamt München V (ci‑après le «Finanzamt»), à propos du refus de ce dernier de considérer comme dépenses spéciales déductibles au titre de l’impôt sur les revenus la pension alimentaire versée par M. Schempp à son ex‑épouse résidant en Autriche.

Le cadre juridique

3 En vertu de l’article 10, paragraphe l, point l, de la loi relative à l’impôt sur le revenu (Einkommensteuergesetz, ci‑après l’«EStG»), les dépenses suivantes constituent des «dépenses spéciales» lorsqu’elles ne sont ni des charges ni des frais professionnels:

«Les pensions alimentaires versées au conjoint séparé ou à l’ex‑conjoint et soumis à une obligation fiscale illimitée, si le prestataire en fait la demande avec l’accord du bénéficiaire, jusqu’à concurrence de 27 000 DEM dans l’année civile. La demande ne peut être présentée que pour une année civile et ne peut être retirée [...]»

4 En vertu de l’article 22, point 1a, de l’EStG, les montants qui peuvent être déduits par le débiteur d’aliments entrent dans le revenu imposable du bénéficiaire, selon le principe dit de «correspondance». La déduction que peut opérer ledit débiteur n’est pas subordonnée à la condition que le bénéficiaire soit effectivement imposé sur ces sommes. Toutefois, dans l’hypothèse où le bénéficiaire doit payer des impôts sur les aliments qu’il perçoit, c’est au débiteur d’aliments qu’il incombe, en vertu du droit civil, d’en supporter la charge.

5 Aux termes de l’article 1a, paragraphe 1, point 1, de l’EStG:

«Les dépenses d’aliments versées à l’ex‑époux ou à l’époux séparé (article 10, paragraphe 1, point 1) sont également déductibles au titre de dépenses spéciales si le bénéficiaire n’est pas soumis à une obligation fiscale illimitée. Pour autant...

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