Mannesmannröhren-Werke AG v Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:T:2001:61
CourtGeneral Court (European Union)
Docket NumberT-112/98
Date20 February 2001
Celex Number61998TJ0112
Procedure TypeRecurso de anulación - infundado
EUR-Lex - 61998A0112 - FR 61998A0112

Arrêt du Tribunal de première instance (première chambre élargie) du 20 février 2001. - Mannesmannröhren-Werke AG contre Commission des Communautés européennes. - Recours en annulation - Concurrence - Décision de demande de renseignements - Astreintes - Droit de refuser de fournir une réponse impliquant la reconnaissance d'une infraction - Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. - Affaire T-112/98.

Recueil de jurisprudence 2001 page II-00729


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

1. Droit communautaire - Principes - Droits fondamentaux - Respect assuré par le juge communautaire - Prise en considération de la convention européenne des droits de l'homme

[Traité sur l'Union européenne, art. F, § 2 (devenu art. 6, § 2, UE)]

2. Concurrence - Procédure administrative - Demande de renseignements - Droits de la défense - Droit au silence absolu - Absence - Droit de refuser de fournir une réponse impliquant reconnaissance d'une infraction - Questions invitant une entreprise à décrire l'objet de certaines réunions ainsi que les décisions adoptées au cours de celles-ci - Violation des droits de la défense

[Traité CE, art. 89 (devenu, après modification, art. 85 CE); règlement du Conseil n° 17, art. 11, § 5]

Sommaire

1. Le juge communautaire n'est pas compétent pour apprécier la légalité d'une enquête en matière de droit de la concurrence au regard des dispositions de la convention européenne des droits de l'homme, dans la mesure où celles-ci ne font pas partie en tant que telles du droit communautaire. Cependant, les droits fondamentaux font partie intégrante des principes généraux du droit dont le juge communautaire assure le respect. À cet effet, la Cour et le Tribunal s'inspirent des traditions constitutionnelles communes aux États membres ainsi que des indications fournies par les instruments internationaux concernant la protection des droits de l'homme auxquels les États membres ont coopéré et adhéré. La convention européenne des droits de l'homme revêt, à cet égard, une signification particulière. Par ailleurs, aux termes de l'article F, paragraphe 2, du traité sur l'Union européenne (devenu article 6, paragraphe 2, UE), «l'Union respecte les droits fondamentaux, tels qu'ils sont garantis par la [convention européenne des droits de l'homme] et tels qu'ils résultent des traditions constitutionnelles communes aux États membres, en tant que principes généraux du droit communautaire».

( voir points 59-60 )

2. Un droit au silence ne peut être reconnu à une entreprise destinataire d'une décision de demande de renseignements au sens de l'article 11, paragraphe 5, du règlement n° 17 que dans la mesure où elle serait obligée de fournir des réponses par lesquelles elle serait amenée à admettre l'existence de l'infraction dont il appartient à la Commission d'établir l'existence. En effet, la reconnaissance d'un droit au silence absolu irait au-delà de ce qui est nécessaire pour préserver les droits de la défense des entreprises et constituerait une entrave injustifiée à l'accomplissement, par la Commission, de la mission de veiller au respect des règles de concurrence dans le marché commun, qui lui est dévolue par l'article 89 du traité (devenu, après modification, article 85 CE).

Par ailleurs, rien n'empêche en effet le destinataire de démontrer, plus tard dans le cadre de la procédure administrative ou lors d'une procédure devant le juge communautaire, en exerçant ses droits de la défense, que les faits exposés dans ses réponses ou les documents communiqués ont une autre signification que celle retenue par la Commission.

Sont de nature à obliger une entreprise à avouer sa participation à un accord illégal contraire aux règles communautaires de concurrence, et constituent partant une violation des droits de la défense, des questions par lesquelles la Commission invite une entreprise à décrire l'objet des réunions auxquelles elle aurait participé et les décisions adoptées au cours de celles-ci, alors qu'il est clair que la Commission soupçonne que l'objet de ces réunions a été d'obtenir des accords sur les prix de vente, de nature à empêcher ou à restreindre le jeu de la concurrence.

( voir points 66-67, 71, 73, 78 )

Parties

Dans l'affaire T-112/98,

Mannesmannröhren-Werke AG, établie à Mülheim an der Ruhr (Allemagne), représentée par Mes M. Klusmann et K. Moosecker, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. K. Wiedner, en qualité d'agent, assisté de M. M. Hilf, professeur, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision C(98)1204 de la Commission, du 15 mai 1998, relative à une procédure d'application de l'article 11, paragraphe 5, du règlement n° 17 du Conseil,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (première chambre élargie),

composé de MM. B. Vesterdorf, président, A. Potocki, A. W. H. Meij, M. Vilaras et N. J. Forwood, juges,

greffier: M. H. Jung,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 23 mai 2000,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

Cadre juridique

1 L'article 11, intitulé «Demande de renseignements», du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (JO 1962, 13, p. 204), prévoit, aux paragraphes 1, 4 et 5:

«1. Dans l'accomplissement des tâches qui lui sont assignées par l'article 89 et par les prescriptions arrêtées en application de l'article 87 du traité, la Commission peut recueillir tous les renseignements nécessaires auprès des gouvernements et des autorités compétentes des États membres, ainsi que des entreprises et associations d'entreprises.

[...]

4. Sont tenus de fournir les renseignements demandés les propriétaires des entreprises ou leurs représentants et, dans le cas de personnes morales, de sociétés ou d'associations n'ayant pas la personnalité juridique, les personnes chargées de les représenter selon la loi ou les statuts.

5. Si une entreprise ou association d'entreprises ne fournit pas les renseignements requis dans le délai imparti par la Commission ou les fournit de façon incomplète, la Commission les demande par voie de décision. Cette décision précise les renseignements demandés, fixe un délai approprié dans lequel les renseignements doivent être fournis et indique les sanctions prévues à l'article 15, paragraphe 1, [sous b)], et à l'article 16, paragraphe 1, [sous c)], ainsi que le recours ouvert devant la Cour de justice contre la décision.»

2 L'article 16, intitulé «Astreintes», du même règlement énonce:

«1. La Commission peut, par voie de décision, infliger aux entreprises et associations d'entreprises des astreintes à raison de cinquante à mille écus par jour de retard à compter de la date qu'elle fixe dans sa décision, pour les contraindre:

[...]

c) à fournir de manière complète et exacte un renseignement qu'elle a demandé par voie de décision prise en application de l'article 11, paragraphe 5,

[...]»

3 En outre, l'article 6, paragraphes 1 et 2, de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH) dispose:

«1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle [...]

2. Toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.»

Faits à l'origine du litige

4 La Commission a engagé une procédure d'enquête à l'encontre de la requérante ainsi que d'autres fabricants de tubes d'acier. Au cours de cette enquête, elle a procédé, à plusieurs reprises, à des vérifications, notamment auprès de la requérante.

5 Au terme de ces vérifications, la Commission a adressé à la requérante, le 13 août 1997, une demande de renseignements, dans laquelle étaient posées des questions relatives à des infractions présumées aux règles de la concurrence auxquelles la requérante aurait pris part.

6 Ladite demande de renseignements contenait, notamment, les quatre questions suivantes:

«1.6. Réunions entre producteurs européens et japonais

D'après les informations en possession de la Commission, votre entreprise a participé à des réunions entre des producteurs européens et des producteurs japonais de tubes sans soudure. Ces réunions se sont déroulées dans le cadre de ce que dans la profession l'on appelle Europe-Japan Club. Il y a eu des réunions au niveau des présidents (Presidents Meetings ou P-Meetings), au niveau des dirigeants (Managers Committee ou Managers Meetings ou M-Meetings), au niveau des experts (Experts Meetings ou E-meetings), et au niveau des groupes de travail (Working Group).

Veuillez nous communiquer pour la période allant de 1984 à aujourd'hui:

- les dates, les lieux et les entreprises participantes à chacune des réunions entre producteurs européens et japonais de tubes sans soudure au niveau des présidents, des dirigeants, des experts et des groupes de travail;

- le nom des personnes qui ont représenté votre entreprise aux réunions mentionnées ci-dessus et les documents de voyage (décompte de frais de voyage, billets d'avion, etc.) de ces personnes;

- copies de toutes les invitations, ordres du jour, procès-verbaux, notes internes, comptes rendus et de tout autre document en possession de votre entreprise et/ou de ses employés concernant les réunions mentionnées ci-dessus;

- pour les réunions pour lesquelles vous ne parviendriez pas à trouver les documents pertinents, veuillez décrire l'objet, les décisions adoptées, le type de documents reçus avant et après la réunion.

...

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