Ryanair Ltd v The Revenue Commissioners.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:834
Docket NumberC-249/17
Celex Number62017CJ0249
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date17 October 2018
62017CJ0249

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

17 octobre 2018 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Notion d’assujetti – Société holding – Déduction de la taxe payée en amont – Dépenses liées à des prestations de services de conseil exposées aux fins de l’acquisition d’actions d’une autre société – Intention de la société acquéreur de fournir des services de gestion à la société cible – Absence de fourniture de tels services – Droit à déduction de la TVA ayant grevé les prestations engagées »

Dans l’affaire C‑249/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Supreme Court (Cour suprême, Irlande), par décision du 8 mai 2017, parvenue à la Cour le 12 mai 2017, dans la procédure

Ryanair Ltd

contre

The Revenue Commissioners,

LA COUR (première chambre),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta, vice-présidente, faisant fonction de président de la première chambre, MM. J.‑C. Bonichot, A. Arabadjiev, E. Regan et C. G. Fernlund (rapporteur), juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : Mme R. Şereş, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 14 mars 2018,

considérant les observations présentées :

pour Ryanair Ltd, par M. T. Mc Namara, solicitor, M. R. Aylward, BL, et M. M. Hayden, SC,

pour The Revenue Commissioners, par Mmes M. Browne et L. Williams ainsi que par M. A. Joyce, en qualité d’agents,

pour l’Irlande, par Mmes M. Browne et L. Williams ainsi que par M. A. Joyce, en qualité d’agents, assistés de Mme S. Davey, solicitor, de Mme Ú. Tighe, BL, et de Mme G. Clohessy, SC,

pour la Commission européenne, par Mme N. Gossement ainsi que par M. R. Lyal, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 3 mai 2018,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 4 et 17 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme (JO 1977, L 145, p. 1, ci-après la « sixième directive »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Ryanair Ltd aux Revenue Commissioners (administration fiscale, Irlande) au sujet du refus de cette dernière d’accorder à Ryanair la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) acquittée en amont afférente à des prestations de services de conseil auxquels elle a eu recours dans le cadre d’une offre publique d’achat (OPA) d’une autre société.

Le cadre juridique

3

L’article 2, paragraphe 1, de la sixième directive soumet à la TVA les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel.

4

L’article 4, paragraphes 1 et 2, de cette directive prévoit :

« 1. Est considéré comme assujetti quiconque accomplit, d’une façon indépendante et quel qu’en soit le lieu, une des activités économiques mentionnées au paragraphe 2, quels que soient les buts ou les résultats de cette activité.

2. Les activités économiques visées au paragraphe 1 sont toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées. Est notamment considérée comme activité économique une opération comportant l’exploitation d’un bien corporel ou incorporel en vue d’en retirer des recettes ayant un caractère de permanence. »

5

En vertu de l’article 10, paragraphe 2, premier alinéa, de ladite directive, « [l]e fait générateur de la taxe intervient et la taxe devient exigible au moment où la livraison du bien ou la prestation de services est effectuée ».

6

L’article 17 de cette même directive, intitulé « Naissance et étendue du droit à déduction », dispose, à son paragraphe 1, que le droit à déduction prend naissance au moment où la taxe déductible devient exigible.

7

L’article 17, paragraphe 2, sous a), de la sixième directive énonce que, dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées, l’assujetti est autorisé à déduire de la taxe dont il est redevable la TVA due ou acquittée pour les biens qui lui sont ou lui seront livrés et pour les services qui lui sont ou lui seront rendus par un autre assujetti.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

8

Au cours de l’année 2006, la compagnie aérienne Ryanair a lancé une OPA sur la totalité des actions d’une autre compagnie aérienne (ci-après la « société cible »). Elle a, à cette occasion, exposé des dépenses afférentes aux prestations de services de conseil et autres services en lien avec l’acquisition envisagée (ci-après les « prestations de services litigieuses »). Toutefois, cette opération n’a pu être pleinement réalisée pour des raisons tenant au respect du droit de la concurrence, de telle sorte que Ryanair n’a pu acquérir qu’une partie du capital social de la société cible.

9

Ryanair a demandé la déduction de la TVA acquittée en amont relative à ces dépenses en faisant valoir que son intention, après qu’elle a pris le contrôle de la société cible, était de s’immiscer dans la gestion de cette dernière en lui fournissant des prestations de services de gestion soumises à la TVA.

10

L’administration fiscale ayant refusé cette déduction, Ryanair a formé un recours devant la Tax Appeals Commission (commission des recours en matière fiscale, Irlande), laquelle a rejeté ce recours. Ryanair a formé un second recours devant le Circuit Court (tribunal itinérant, Irlande), lequel a également suivi la position défendue par l’administration fiscale. Le Circuit Court (tribunal itinérant) a néanmoins saisi la High Court (Haute Cour, Irlande) d’un renvoi pour avis. Cette dernière juridiction ayant approuvé la décision du Circuit Court (tribunal itinérant), Ryanair a interjeté appel devant la Supreme Court (Cour suprême, Irlande).

11

La juridiction de renvoi s’interroge, en substance, sur l’articulation de l’arrêt du 14 février 1985, Rompelman (268/83, EU:C:1985:74), portant sur la déductibilité de la TVA acquittée dans le cadre de la préparation d’une activité économique, avec l’arrêt du 27 septembre 2001, Cibo Participations (C‑16/00, EU:C:2001:495), portant sur le droit d’une société holding de déduire la TVA grevant des prestations de services qui lui ont été fournies en amont dans le cadre d’une prise de participation dans ses filiales.

12

C’est dans ces conditions que la Supreme Court (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

L’intention future de fournir des services de gestion à la société cible d’une acquisition (en cas de succès de l’acquisition concernée) est-elle suffisante afin d’établir que l’acquéreur potentiel exerce une activité économique aux fins de l’article 4 de la [sixième directive], de sorte que la TVA appliquée à cet acquéreur potentiel pour les biens ou les services fournis en vue de faciliter l’acquisition puisse éventuellement être traitée comme une TVA en amont de l’activité économique envisagée, consistant à fournir de tels services de gestion ?

2)

Peut-on considérer qu’il existe un “lien direct et immédiat” suffisant, conformément au prescrit identifié par la Cour dans [l’arrêt du 27 septembre 2001, Cibo Participations (C‑16/00, EU:C:2001:495)], entre des services professionnels fournis dans le cadre de cette acquisition potentielle et des services en aval, consistant dans la fourniture potentielle de services de gestion à la cible de l’acquisition (en cas de succès de l’acquisition concernée), permettant ainsi de déduire la TVA afférente aux services professionnels susmentionnés ? »

Sur les questions préjudicielles

13

Par ses questions, qu’il y a lieu d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 4 et 17 de la sixième directive doivent être interprétés en ce sens qu’ils confèrent à une société, telle que celle en cause au principal, qui a l’intention d’acquérir la totalité des actions d’une autre société, en vue d’exercer une activité économique consistant à fournir à cette dernière des prestations de services de gestion soumises à la TVA, le droit de déduire la TVA acquittée en amont afférente aux dépenses relatives à des prestations de services de conseil exposées dans le cadre d’une OPA, même s’il s’est avéré que cette activité économique n’a pas été réalisée.

14

À titre liminaire, il y a lieu d’indiquer que la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1), entrée en vigueur le 1er janvier 2007, a abrogé la sixième directive sans apporter de changements de fond par rapport à celle-ci. Il s’ensuit que les dispositions pertinentes de la sixième directive revêtant une portée en substance identique à celles de la directive 2006/112, la jurisprudence de la Cour relative à cette dernière directive est également applicable à la sixième directive.

15

Afin de répondre aux questions posées, il convient de déterminer si une société qui a l’intention d’acquérir la totalité des actions d’une autre société en vue d’exercer une activité économique consistant à fournir à cette dernière des prestations de services de gestion soumises à la TVA peut être considérée comme étant un assujetti, au sens de...

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