Arriva Italia Srl and Others v Ministero delle Infrastrutture e dei Trasporti.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2019:1121
Date19 December 2019
Docket NumberC-385/18
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Celex Number62018CJ0385
CourtCourt of Justice (European Union)
62018CJ0385

ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

19 décembre 2019 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Aides d’État – Notion – Entreprise publique ferroviaire en difficulté – Mesures d’aides – Allocation d’une aide financière – Objectif – Poursuite des activités de l’entreprise publique ferroviaire – Allocation et participation au capital de cette entreprise publique – Transfert dans le capital d’une autre entreprise publique – Critère de l’investisseur privé – Obligation de notification préalable des aides nouvelles »

Dans l’affaire C‑385/18,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Consiglio di Stato (Conseil d’État, Italie), par décision du 5 avril 2018, parvenue à la Cour le 11 juin 2018, dans la procédure

Arriva Italia Srl,

Ferrotramviaria SpA,

Consorzio Trasporti Aziende Pugliesi (CO.TRA.P)

contre

Ministero delle Infrastrutture e dei Trasporti,

en présence de :

Ferrovie dello Stato Italiane SpA,

Gestione Commissariale per Le Ferrovie del Sud Est e Servizi Automobilistici Srl a socio unico,

Autorità Garante della Concorrenza e del Mercato,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. A. Arabadjiev, président de chambre, M. K. Lenaerts, président de la Cour, faisant fonction de juge de la deuxième chambre, MM. P. G. Xuereb (rapporteur), C. Vajda et A. Kumin, juges,

avocat général : M. E. Tanchev,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 8 mai 2019,

considérant les observations présentées :

pour Arriva Italia Srl, Ferrotramviaria SpA et Consorzio Trasporti Aziende Pugliesi (CO.TRA.P), par Mes G. L. Zampa et T. Salonico, avvocati,

pour Ferrovie dello Stato Italiane SpA, par Mes A. Zoppini, G. M. Roberti, G. Bellitti et I. Perego, avvocati,

pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de Mme P. Palmieri, avvocatessa dello Stato,

pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par Mmes D. Recchia et F. Tomat, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 29 juillet 2019,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 107 et de l’article 108, paragraphe 3, TFUE.

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Arriva Italia Srl, Ferrotramviaria SpA et Consorzio Trasporti Aziende Pugliesi (CO.TRA.P) (ci-après « Arriva Italia e.a. ») au Ministero delle Infrastrutture e dei Trasporti (ministère des Infrastructures et des Transports, Italie) au sujet du transfert, par ce dernier, de sa participation à 100 % au capital de Ferrovie del Sud Est e Servizi Automobilistici Srl a socio unico (ci-après « FSE ») à Ferrovie dello Stato Italiane SpA (ci-après « FSI »).

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Le point 188 de la communication de la Commission européenne relative à la notion d’« aide d’État », visée à l’article 107, paragraphe 1, [TFUE] (JO 2016, C 262, p. 1, ci-après la « communication de 2016 »), prévoit :

« Le fait que les autorités confient un service public à un prestataire interne (même si elles étaient libres de confier ce service à des tiers) n’exclut pas en soi une possible distorsion de la concurrence. Toutefois, une telle distorsion est exclue si les conditions cumulatives suivantes sont remplies :

a)

un service est soumis à un monopole légal (établi conformément au droit de l’Union européenne) [...]

b)

le monopole légal exclut non seulement la concurrence sur le marché, mais aussi pour le marché, en ce sens qu’il exclut toute concurrence potentielle pour devenir le prestataire exclusif du service en question [...]

c)

le service n’est pas en concurrence avec d’autres services ; et

d)

si le prestataire de services exerce des activités sur un autre marché (géographique ou de produit) ouvert à la concurrence, les subventions croisées doivent être exclues. Cela requiert de recourir à une comptabilité séparée, de répartir les coûts et les revenus de manière appropriée et de faire en sorte que les financements publics fournis pour les services soumis au monopole légal ne puissent bénéficier à d’autres activités. »

4

Les points 211 et 212 de la communication de 2016 sont ainsi libellés :

« 211.

Il existe des circonstances dans lesquelles certaines infrastructures ne sont pas soumises à la concurrence directe d’autres infrastructures du même type ou d’un type différent proposant des services présentant un degré important de substituabilité, ou de tels services directement [...] L’absence de concurrence directe entre les infrastructures caractérise vraisemblablement les infrastructures de réseau complètes [...] qui sont des monopoles naturels, c’est-à-dire des infrastructures dont la reproduction ne serait pas rentable. De même, dans certains secteurs, il arrive que le financement privé de la construction d’infrastructures soit insignifiant [...] La Commission estime que l’affectation des échanges entre États membres ou une distorsion de la concurrence est généralement exclue en matière de construction d’infrastructures dans les cas où les conditions cumulatives suivantes sont réunies : i) l’infrastructure n’est habituellement pas confrontée à une concurrence directe, ii) le financement privé est insignifiant dans le secteur et l’État membre concernés et iii) l’infrastructure n’est pas conçue pour favoriser de manière sélective une entreprise ou un secteur donnés, mais procure des avantages à la société dans son ensemble.

212.

Pour que l’intégralité du financement public d’un projet donné ne relève pas des règles en matière d’aides d’État, les États membres doivent veiller à ce que le financement fourni pour la construction des infrastructures dans les situations visées au point 211 ne puisse être utilisé pour subventionner de façon croisée ou indirecte d’autres activités économiques, notamment l’exploitation de l’infrastructure. [...] »

5

Le point 219 de la communication de 2016 dispose :

« Si l’exploitation d’infrastructures ferroviaires [...] peut constituer une activité économique [...], la construction d’infrastructures ferroviaires mises à disposition des utilisateurs potentiels à des conditions égales et non discriminatoires – contrairement à l’exploitation de l’infrastructure – remplit généralement les conditions énoncées au point 211 et son financement n’affecte généralement pas les échanges entre États membres, pas plus qu’il ne fausse la concurrence. [...]

(*) [Note officielle en bas de page] Cette observation ne préjuge en rien la question de savoir si tout avantage octroyé à l’exploitant de l’infrastructure par l’État constitue une aide d’État. Par exemple, si l’exploitation de l’infrastructure est soumise à un monopole légal et si la concurrence sur le marché de l’exploitation de l’infrastructure est exclue, un avantage octroyé à l’exploitant de l’infrastructure par l’État ne peut fausser la concurrence et ne constitue donc pas une aide d’État. [...] Comme expliqué au point 188, si le propriétaire ou le gestionnaire est présent sur un autre marché libéralisé, il doit, pour éviter toute subvention croisée, tenir une comptabilité séparée, répartir les coûts et les revenus de manière appropriée et faire en sorte que le financement public ne bénéficie pas à d’autres activités. »

Le droit italien

6

L’article 1er, paragraphe 867, de la legge n. 208 – Disposizioni per la formazione del bilancio annuale e pluriennale dello Stato (legge di stabilità 2016) [loi no 208, portant dispositions pour la formation du budget annuel et pluriannuel de l’État (loi de 2016 sur la stabilité)] du 28 décembre 2015 (supplément ordinaire à la GURI no 15, du 20 janvier 2016, ci-après la « loi de 2016 sur la stabilité »), prévoyait la mise sous tutelle de FSE, compte tenu de la « grave situation financière » de cette dernière. Cette mise sous tutelle devait être mise en œuvre par un décret du ministère des Infrastructures et des Transports.

7

Les deuxième et cinquième phrases de l’article 1er, paragraphe 867, de la loi de 2016 sur la stabilité imposaient au commissaire extraordinaire, en charge de la tutelle de FSE, d’une part, de « préparer un plan de redressement industriel » visant à réduire les coûts de fonctionnement de celle-ci et, d’autre part, d’adresser des propositions au ministre des Infrastructures et des Transports pour que FSE soit transférée ou cédée suivant des critères et des modalités définis par un décret adopté par ce ministre. En outre, la sixième et dernière phrase de l’article 1er, paragraphe 867, de la loi de 2016 sur la stabilité disposait que, dans l’attente de la mise en œuvre du plan de redressement susmentionné, une dépense de 70 millions d’euros était autorisée pour l’année 2016 « afin d’assurer la poursuite des activités de [FSE] ».

8

En application de cette disposition de la loi de 2016 sur la stabilité, le ministre des Infrastructures et des Transports a adopté le décret no 9 du 12 janvier 2016 (ci-après le « décret du 12 janvier 2016 »), qui prévoyait la mise sous tutelle de FSE. Selon l’article 6 de ce décret, la somme de 70 millions d’euros, allouée à FSE en vertu de l’article 1er, paragraphe 867, de la loi de 2016 sur la stabilité, était destinée à augmenter progressivement le capital de cette dernière et pouvait être utilisée par le commissaire extraordinaire sans l’autorisation de l’associé public « afin de garantir la poursuite et la régularité du service géré par la société ».

9

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