Opinion of Advocate General Bobek delivered on 16 March 2016.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2016:169
Date16 March 2016
Celex Number62015CC0134
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
CourtCourt of Justice (European Union)
62015CC0134

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MICHAL BOBEK

présentées le 16 mars 2016 ( 1 )

Affaire C‑134/15

Lidl GmbH & Co. KG

contre

Freistaat Sachsen

[demande de décision préjudicielle formée par le Sächsisches Oberverwaltungsgericht (tribunal administratif supérieur du Land de Saxe, Allemagne)]

«Règlement (CE) no 543/2008 de la Commission — Normes de commercialisation pour la viande de volaille — Validité de l’article 5, paragraphe 4, sous b) — Viande fraîche de volaille préemballée — Obligation de faire figurer le prix total et le prix par unité de poids sur le préemballage ou sur une étiquette solidaire de ce dernier au niveau de la vente au détail — Article 15, paragraphe 1, et article 16 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne — Liberté d’exercer une profession librement choisie — Liberté d’entreprise — Proportionnalité — Article 40, paragraphe 2, TFUE — Non-discrimination»

1.

La présente demande de décision préjudicielle porte sur la validité de l’article 5, paragraphe 4, sous b), du règlement (CE) no 543/2008 ( 2 ) qui prévoit une obligation d’étiquetage pour la viande fraîche de volaille. Aux termes de cette disposition, concernant la viande fraîche de volaille, pour la vente au détail, le prix total et le prix par unité de poids doivent être indiqués soit sur le préemballage, soit sur une étiquette solidaire de ce dernier (ci-après l’« obligation d’étiquetage »).

2.

La juridiction de renvoi a demandé à la Cour si l’obligation d’étiquetage est compatible avec l’article 15, paragraphe 1, et l’article 16 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci‑après la « Charte »). En outre, étant donné que l’obligation d’étiquetage s’applique uniquement à la viande fraîche de volaille, et non pas à d’autres types de viandes, il est également demandé à la Cour de se prononcer sur la question de savoir si l’article 5, paragraphe 4, sous b), du règlement no 543/2008 est compatible avec le principe de non-discrimination consacré à l’article 40, paragraphe 2, TFUE.

I – Le cadre juridique

A – Le droit de l’Union

3.

L’article 121, sous e), iv), du règlement no 1234/2007 ( 3 ) dispose qu’en ce qui concerne la commercialisation de la viande de volaille, la Commission européenne est autorisée à arrêter des règles précises, notamment des « règles concernant les indications supplémentaires devant figurer sur les documents commerciaux d’accompagnement, l’étiquetage et la présentation de la viande de volaille destinée au consommateur final ainsi que la publicité faite à son égard, et la dénomination de vente au sens de l’article 3, paragraphe 1, point 1), de la directive 2000/13/CE » du Parlement européen et du Conseil, du 20 mars 2000, relative au rapprochement des législations des États membres concernant l’étiquetage et la présentation des denrées alimentaires ainsi que la publicité faite à leur égard (JO 2000, L 109, p. 29).

4.

Le règlement no 543/2008, qui est fondé sur l’article 121, sous e), et l’article 4 du règlement no 1234/2007, prévoit des règles détaillées pour l’application du règlement no 1234/2007 en ce qui concerne les normes de commercialisation pour la viande de volaille.

5.

Le considérant 10 du règlement no 543/2008 indique que « [p]our offrir au consommateur une information adéquate, claire et objective concernant les produits mis en vente et pour assurer la libre circulation de ces derniers dans la Communauté, il convient d’assurer que les normes de commercialisation des volailles tiennent compte autant que possible des dispositions de la directive 76/211/CEE du Conseil du 20 janvier 1976 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au préconditionnement en masse ou en volume de certains produits en préemballages [JO 1976, L 46, p. 1] ».

6.

L’article 5, paragraphe 2, du règlement no 543/2008 dispose qu’« [o]utre les règles nationales prises conformément à la Directive 2000/13/CE, l’étiquetage et la présentation des viandes de volailles destinées au consommateur final, ainsi que la publicité faite à leur égard, doivent être conformes aux exigences supplémentaires énoncées aux paragraphes 3 et 4 du présent article ».

7.

L’article 5, paragraphe 4, sous b), du règlement no 543/2008, qui intègre les dispositions de l’article 5, paragraphe 3, sous b), du règlement (CEE) no 1906/90 du Conseil ( 4 ), prévoit que « [d]ans le cas de la viande de volaille préemballée, les données suivantes doivent également figurer sur le préemballage ou sur une étiquette solidaire de ce dernier : […] dans le cas de la viande fraîche de volaille, le prix total et le prix par unité de poids au niveau de la vente au détail» ( 5 ).

8.

La directive 2000/13 ne comportait pas de dispositions concernant les obligations d’étiquetage en matière de prix.

9.

En vertu de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 98/6/CE relative à la protection des consommateurs en matière d’indication des prix des produits offerts aux consommateurs ( 6 ), « [l]e prix de vente et le prix à l’unité de mesure doivent être indiqués pour tous les produits visés à l’article 1er, l’indication du prix à l’unité de mesure relevant de l’article 5. Le prix à l’unité de mesure ne doit pas être indiqué s’il est identique au prix de vente ».

II – Faits, procédure et questions préjudicielles

10.

Lidl GmbH & Co. KG est une entreprise de vente au détail qui exploite des magasins de discompte alimentaire dans toute l’Allemagne. Dans certains de ses magasins de la région de Lampertswalde (Allemagne), elle offre à la vente, notamment, de la viande fraîche de volaille préemballée. Le prix de la viande fraîche de volaille ne figure pas directement sur l’étiquette solidaire du produit lui‑même. Au lieu de cela, les étiquettes de prix sont apposées sur les rayonnages.

11.

Ayant constaté cette pratique en matière d’étiquetage des prix à l’occasion de différents contrôles, le Sächsiches Landesanstalt für Landwirtschaft (Office de l’agriculture du Land de Saxe), devenu le Sächsisches Landesamt für Umwelt, Landwirtschaft und Geologie (Office de l’environnement, de l’agriculture et de la géologie du Land de Saxe), a considéré que cette pratique violait l’article 5, paragraphe 3, sous b), du règlement no 1906/90, applicable à la date des contrôles, qui correspond à l’actuel article 5, paragraphe 4, sous b), du règlement no 543/2008.

12.

En 2007, la requérante a introduit un recours visant à faire constater que sa pratique d’étiquetage des prix de la viande fraîche de volaille préemballée est conforme à l’obligation d’étiquetage prévue à l’article 5, paragraphe 3, sous b), du règlement no 1906/90 et, par la suite, l’article 5, paragraphe 4, sous b), du règlement no 543/2008. Elle a fait valoir que l’article 5, paragraphe 4, sous b), du règlement no 543/2008 était invalide, car contraire à l’article 6, paragraphe 1, TUE lu en combinaison avec l’article 15, paragraphe 1, de la Charte. Selon elle, l’obligation d’étiquetage constitue une atteinte disproportionnée au libre exercice d’une activité professionnelle. Le Verwaltungsgericht Dresden (tribunal administratif de Dresde, Allemagne) a rejeté le recours par un jugement de 2010.

13.

La requérante a maintenu sa demande en interjetant appel devant le Sächsisches Oberverwaltungsgericht (tribunal administratif supérieur du Land de Saxe, Allemagne). Dans sa décision de renvoi, la juridiction de renvoi émet des doutes quant à la validité de l’article 5, paragraphe 4, sous b), du règlement no 543/2008 pour deux raisons.

14.

Premièrement, la juridiction de renvoi n’est pas certaine que l’atteinte résultant de l’obligation d’étiquetage soit justifiée au regard de l’article 15, paragraphe 1, et de l’article 16 de la Charte. Elle est d’avis que l’obligation d’étiquetage ne porte pas atteinte à la substance même des droits et des libertés en cause, qu’elle répond effectivement à l’objectif de renforcer la protection des consommateurs, un objectif d’intérêt général reconnu par l’Union européenne, et qu’elle apparaît comme appropriée et nécessaire à cette fin. Toutefois, la juridiction de renvoi n’est pas certaine qu’une mise en balance appropriée des intérêts en cause ait été effectuée.

15.

Deuxièmement, la juridiction de renvoi émet des doutes quant à la validité de l’obligation d’étiquetage des viandes de volaille à la lumière du principe de non-discrimination prévu à l’article 40, paragraphe 2, TFUE. Il est souligné, dans la décision de renvoi, que, pour d’autres produits carnés préemballés, comme la viande de bœuf, de veau, de porc, de mouton ou de chèvre, pour lesquels le règlement no 1308/2013 prévoit également des règles en matière d’organisation commune des marchés, une telle obligation d’étiquetage n’est pas prévue. Par conséquent, la juridiction de renvoi estime que l’obligation d’étiquetage applicable à la viande fraîche de volaille implique une différence de traitement, car des situations comparables sont traitées de manière différente. Elle doute, notamment, qu’une telle inégalité de traitement soit objectivement justifiée par l’intérêt général de protection des consommateurs.

16.

Dans ces conditions, le Sächsisches Oberverwaltungsgericht (tribunal administratif supérieur du Land de Saxe) a sursis à statuer et a saisi la Cour à titre préjudiciel des questions suivantes :

« 1)

L’article 5, paragraphe 4, sous b), du règlement (CE) no 543/2008 de la Commission, du 16 juin 2008, portant modalités d’application du règlement (CE) no 1234/2007 du Conseil en ce qui concerne les normes de commercialisation pour la viande de volaille (JO 2008, L 157, p. 46) est-il compatible avec l’article 6...

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