Staatssecretaris van Economische Zaken and Staatssecretaris van Financiën v Q.
Jurisdiction | European Union |
ECLI | ECLI:EU:C:2014:2255 |
Docket Number | C-133/13 |
Celex Number | 62013CC0133 |
Court | Court of Justice (European Union) |
Procedure Type | Reference for a preliminary ruling |
Date | 02 October 2014 |
CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
MME JULIANE KOKOTT
présentées le 2 octobre 2014 ( 1 )
Affaire C‑133/13
Staatssecretaris van Economische Zaken
et
Staatssecretaris van Financiën
contre
Q
[demande de décision préjudicielle
formée par le Raad van State (Pays‑Bas)]
«Législation fiscale — Liberté des mouvements de capitaux (article 63, paragraphe 1, TFUE) — Droits de donation nationaux — Exonération des ‘domaines ruraux’ sis sur le territoire national — Préservation du patrimoine naturel et culturel national — Efficacité des contrôles fiscaux — Coopération administrative entre États membres dans le domaine fiscal — Champ d’application des directives 2010/24/UE et 2011/16/UE — Notion d’«enquête administrative» visée à l’article 5, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 2010/24 et à l’article 3, point 7, de la directive 2011/16 — Limites de l’obligation d’enquêter»
I – Introduction
1. |
L’imposition éventuelle par les États membres de la transmission d’un patrimoine par voie de succession ou de donation peut, le cas échéant, être à ce point élevée que le bénéficiaire doive en vendre une partie pour pouvoir acquitter les droits dus. Pour certains patrimoines, les États membres font machine arrière face à ces conséquences et accordent des dégrèvements pour que le patrimoine transmis soit recueilli dans son intégralité. |
2. |
Tel est le cas en l’espèce où le Royaume des Pays-Bas veut préserver l’intégrité de certains biens fonciers alors que leur transmission est passible de droits. Si un bien foncier est un «site naturel», les droits peuvent être réduits de moitié voire même totalement si le nouveau propriétaire le préserve à long terme. Le Royaume des Pays-Bas ne considère toutefois que ses propres sites naturels. Si un résident néerlandais soumis aux droits de donation transmet un bien sis à l’étranger, aucun dégrèvement n’est accordé. |
3. |
Il appartient à présent à la Cour de préciser si un tel régime est conforme aux libertés fondamentales. Elle ne devra pas seulement examiner à ce titre la conformité d’un incitant fiscal limité à des objectifs strictement nationaux. Il existe à cet égard certains parallèles avec l’affaire pendante C‑87/13 dans laquelle nous venons de présenter des conclusions ( 2 ). La présente affaire soulève en outre des questions juridiques touchant aux limites de l’assistance administrative des États membres au cas où les biens sis à l’étranger doivent eux aussi bénéficier des incitants. Aux fins de l’avantage fiscal, il faudra en effet vérifier la préservation à long terme du site naturel que renferme le bien foncier. |
II – Cadre juridique
A – Droit de l’Union
4. |
L’article 2, paragraphe 1, de la directive 2010/24/UE du Conseil, du 16 mars 2010, concernant l’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures ( 3 ) (ci-après la «directive 2010/24 sur le recouvrement»), définit son champ d’application comme suit: «La présente directive s’applique aux créances afférentes:
|
5. |
L’article 5, paragraphe 1, de la directive 2010/24 sur le recouvrement permet d’adresser une «demande d’informations»: «À la demande de l’autorité requérante, l’autorité requise fournit toute information vraisemblablement pertinente pour le recouvrement, par l’autorité requérante, de ses créances au sens de l’article 2. En vue de la communication de ces informations, l’autorité requise fait effectuer toute enquête administrative nécessaire à l’obtention de ces dernières.» |
6. |
En plus de la directive 2010/24 sur le recouvrement, une autre directive vise également l’assistance administrative entre États membres en matière fiscale, à savoir la directive 2011/16/UE du Conseil, du 15 février 2011, relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE ( 4 ) (ci-après la «directive 2011/16 sur la coopération»). Son article 1er, paragraphe 1, en définit l’«objet»: «La présente directive établit les règles et procédures selon lesquelles les États membres coopèrent entre eux aux fins d’échanger les informations vraisemblablement pertinentes pour l’administration et l’application de la législation interne des États membres relative aux taxes et impôts visés à l’article 2.» |
7. |
Le «champ d’application» de la directive 2011/16 sur la coopération ressort de son article 2: «1. La présente directive s’applique à tous les types de taxes et impôts prélevés par un État membre […]. 2. Nonobstant le paragraphe 1, la présente directive ne s’applique pas à la taxe sur la valeur ajoutée et aux droits de douane, ni aux droits d’accises couverts par d’autres textes de législation de l’Union relatifs à la coopération administrative entre États membres. La présente directive ne s’applique pas non plus aux cotisations sociales obligatoires […]. […]» |
8. |
L’article 5 de la directive 2011/16 sur la coopération met en place une assistance administrative entre les États membres: «À la demande de l’autorité requérante, l’autorité requise communique à l’autorité requérante les informations visées à l’article 1er, paragraphe 1, dont elle dispose ou qu’elle obtient à la suite d’enquêtes administratives.» |
9. |
L’article 3, point 7, de la directive 2011/16 sur la coopération définit aux fins de la directive l’expression «enquête administrative» comme étant «l’ensemble des contrôles, vérifications et actions réalisés par les États membres dans l’exercice de leurs responsabilités en vue d’assurer la bonne application de la législation fiscale». |
B – Législation néerlandaise
10. |
Aux termes de l’article 1er, paragraphe 1, point 2, de la loi néerlandaise sur les droits de succession (Successiewet), de 1956, le Royaume des Pays-Bas prélève des droits de donation «sur la valeur de tout ce qui est recueilli par voie de donation d’une personne résidant aux Pays-Bas au moment de la donation». |
11. |
L’article 7, paragraphe 1, première phrase, de la loi néerlandaise sur la protection des sites naturels (Natuurschoonwet), de 1928 (ci‑après la «Nsw»), prévoit l’avantage fiscal suivant: «Si une succession ou une donation visée par la Successiewet 1956 inclut un bien foncier classé comme domaine rural […], la différence entre les droits de donation ou de succession dus au titre de l’avis d’imposition et les droits théoriquement dus sur la moitié de la valeur vénale qui devrait être attribuée au bien foncier, à la date à laquelle il a été recueilli, s’il était grevé de la charge de le conserver intact pendant 25 ans et de ne pas abattre plus de bois de futaie que nécessaire ou usuel dans une gestion normale des forêts, ne sera pas mise en recouvrement. […]» |
12. |
La deuxième phrase de cette même disposition ajoute que la valeur vénale retenue au paragraphe 1 sera réduite à zéro si le domaine rural est ouvert au public. Aucun droit de donation n’est alors prélevé. |
13. |
L’article 1er, paragraphe 1, sous a), de la Nsw entend par «domaine rural»«un bien foncier sis aux Pays-Bas, constitué en tout ou partie de zones naturelles, de bois ou autres bois de futaie, y compris un bien foncier comportant une maison de campagne ou un autre bâtiment intégré au caractère du domaine rural, dans la mesure où la conservation de ce bien foncier dans son aspect caractéristique est souhaitable pour la préservation du site naturel». |
14. |
Aux termes de l’article 1er, paragraphe 2, de la Nsw, un arrêté d’exécution précisera les conditions que doit remplir un bien foncier pour être classé comme domaine rural. L’article 2, paragraphe 1, de cet arrêté d’exécution (Rangschikkingsbesluit Natuurschoonwet), de 1928, impose quatre conditions: le domaine rural doit avoir une superficie de cinq hectares au moins, les terrains et zones d’eau du domaine rural doivent être d’un seul tenant, 30 % au moins de la superficie du domaine rural doivent être couverts de bois ou d’espaces naturels, l’usage du domaine rural ne peut pas porter atteinte au site naturel. L’article 1er, point 1, de l’arrêté d’exécution définit notamment plus avant les bois et autres espaces naturels. |
15. |
Aux termes de l’article 2 de la Nsw, un propriétaire peut demander au ministre compétent de classer son bien foncier comme domaine rural au sens de la loi. |
III – Litige au principal
16. |
Le litige au principal concerne la demande de la partie en cause, Q, de classer comme «domaine rural» au sens de la Nsw un bien foncier dont elle est propriétaire au Royaume-Uni. La demande s’explique par son intention d’en faire donation à son fils qui réside au Royaume-Uni. Q résidant en revanche aux Pays‑Bas, cette donation est passible des droits de donation néerlandais. |
17. |
L’administration néerlandaise a rejeté la demande au seul motif que la propriété ne se trouve pas aux Pays-Bas comme le requiert la Nsw. C’est contre cette décision que Q a introduit un recours. |
IV – Procédure devant la Cour
18. |
Le Raad van State (Pays-Bas), saisi en appel dans l’intervalle, a adressé à la Cour le 13 mars 2013 les questions préjudicielles suivantes au titre de l’article 267 TFUE:
|
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