A.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2009:39
Docket NumberC-523/07
Celex Number62007CC0523
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date29 January 2009

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

Mme Juliane Kokott

présentées le 29 janvier 2009 (1)

Affaire C‑523/07

A

[demande de décision préjudicielle formée par le Korkein hallinto-oikeus (Finlande)]

«Coopération judiciaire en matière civile – Compétence, reconnaissance et exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale – Règlement (CE) nº 2201/2003 – Notion de ‘matières civiles’ – Compétence pour l’adoption de décisions en matière de responsabilité parentale – Résidence habituelle d’un enfant – Mesures provisoires»





I – Introduction

1. Avant même que ne fût rendu l’arrêt dans l’affaire C (C‑435/06)(2), le Korkein hallinto-oikeus (Cour administrative suprême, Finlande), a une nouvelle fois saisi la Cour de questions relatives à l’interprétation du règlement (CE) n° 2201/2003 du Conseil, du 27 novembre 2003, relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale abrogeant le règlement (CE) n° 1347/2000 (3).

2. La première question posée par la juridiction de renvoi est celle à laquelle l’arrêt C répond par l’affirmative de savoir si le règlement n° 2201/2003 est applicable à des mesures de prise en charge immédiate et de placement d’enfants relevant, en droit national, du droit public. En revanche, les autres questions portant sur l’interprétation des dispositions relatives à la détermination des juridictions compétentes aux fins de l’adoption de telles mesures sont inédites. Il sera plus particulièrement nécessaire de préciser la notion de «résidence habituelle» d’un enfant, qui constitue le principal critère de détermination de la compétence internationale. D’autres questions concernent la possibilité d’adoption de mesures conservatoires par une juridiction qui n’est pas compétente pour connaître du fond.

II – Cadre juridique

Droit communautaire

3. Le douzième considérant du règlement n° 2201/2003 énonce les considérations qui sous-tendent les règles pertinentes de répartition des compétences dans les termes suivants:

«Les règles de compétence établies par le présent règlement en matière de responsabilité parentale sont conçues en fonction de l’intérêt supérieur de l’enfant et en particulier du critère de proximité. Ce sont donc en premier lieu les juridictions de l’État membre dans lequel l’enfant a sa résidence habituelle qui devraient être compétentes, sauf dans certains cas de changement de résidence de l’enfant ou suite à un accord conclu entre les titulaires de la responsabilité parentale.»

4. Les dispositions suivantes du règlement n° 2201/2003 revêtent une importance particulière aux fins de la présente affaire:

«Article premier

Champ d’application

Le présent règlement s’applique, quelle que soit la nature de la juridiction, aux matières civiles relatives:

[…]

b) l’attribution, à l’exercice, à la délégation, au retrait total ou partiel de la responsabilité parentale.

[…]»

«Article 8

Compétence générale

1. Les juridictions d’un État membre sont compétentes en matière de responsabilité parentale à l’égard d’un enfant qui réside habituellement dans cet État membre au moment où la juridiction est saisie.

2. Le paragraphe 1 s’applique sous réserve des dispositions des articles 9, 10 et 12.»

«Article 13

Compétence fondée sur la présence de l’enfant

1. Lorsque la résidence habituelle de l’enfant ne peut être établie et que la compétence ne peut être déterminée sur base de l’article 12, les juridictions de l’État membre dans lequel l’enfant est présent sont compétentes.

2. Le paragraphe 1 s’applique également aux enfants réfugiés ainsi qu’aux enfants qui, par suite de troubles prévalant dans leur pays, sont internationalement déplacés.»

«Article 17

Vérification de la compétence

La juridiction d’un État membre saisie d’une affaire pour laquelle sa compétence n’est pas fondée aux termes du présent règlement et pour laquelle une juridiction d’un autre État membre est compétente en vertu du présent règlement se déclare d’office incompétente.»

«Article 20

Mesures provisoires et conservatoires

1. En cas d’urgence, les dispositions du présent règlement n’empêchent pas les juridictions d’un État membre de prendre des mesures provisoires ou conservatoires relatives aux personnes ou aux biens présents dans cet État, prévues par la loi de cet État membre même si, en vertu du présent règlement, une juridiction d’un autre État membre est compétente pour connaître du fond.

2. Les mesures prises en exécution du paragraphe 1 cessent d’avoir effet lorsque la juridiction de l’État membre compétente en vertu du présent règlement pour connaître du fond a pris les mesures qu’elle estime appropriées.»

III – Cadre factuel et questions préjudicielles

5. Selon la description figurant dans l’ordonnance de renvoi, les circonstances de fait à l’origine de l’affaire au principal sont les suivantes.

6. A est la mère de C, D et E. Celle-ci et les enfants habitaient initialement avec F, le beau-père des enfants, en Finlande. Du fait de la violence du beau-père, les enfants avaient déjà fait l’objet d’une mesure de prise en charge par leur commune de résidence. La prise en charge avait ultérieurement été suspendue. En 2001, la famille a déménagé en Suède. Durant l’été 2005, la famille s’est rendue en Finlande, au départ dans l’intention d’y passer des vacances. En Finlande, elle a habité dans des caravanes de différents campings et chez des membres de la famille. Les enfants n’ont pas été scolarisés. Le 30 octobre 2005, la famille a déposé une demande de logement auprès des services sociaux de la commune finlandaise d’Y.

7. Par décisions du 16 novembre 2005 de la perusturvalautakunta (commission de garantie des droits sociaux fondamentaux), C, D, et E ont été pris en charge de manière urgente et ont été placés dans une famille d’accueil en vertu de l’article 18 de la loi finlandaise sur la protection des enfants (lastensuojelulaki, ci-après la «loi sur la protection des enfants»), au motif qu’ils auraient été abandonnés. Cette prise en charge avait également pour but d’éclaircir la situation des enfants.

8. A et F ont demandé l’annulation des décisions relatives à la prise en charge urgente. Par décision du 15 décembre 2005, la perusturvalautakunta a rejeté la demande de réformation, a pris en charge les enfants sur le fondement de l’article 16 de la loi sur la protection des enfants et a ordonné leur placement en foyer d’accueil. A et F ont saisi le hallinto-oikeus (tribunal administratif) d’un recours contre cette décision, qui a été rejeté.

9. Saisi d’un recours contre cette décision, le Korkein hallinto-oikeus a déféré à la Cour, par ordonnance du 22 novembre 2007, les questions préjudicielles suivantes:

«1) a) Le règlement (CE) n° 2201/2003 du Conseil du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale abrogeant le règlement (CE) n° 1347/2000 (règlement Bruxelles II a) est-il applicable à l’exécution, dans tous ses éléments, d’une décision comme celle prise en l’espèce, qui ordonne la prise en charge immédiate et le placement d’un enfant en dehors de son foyer d’origine dans une famille d’accueil, lorsque cette décision prend la forme d’une décision unique adoptée dans le cadre des règles de droit public relatives à la protection de l'enfance?

b) À défaut, le règlement n’est-il applicable, eu égard à son article premier, paragraphe 2, point d), qu’à la partie de la décision relative au placement en dehors du foyer d’origine dans une famille d’accueil?

2) De quelle manière convient-il d’interpréter, en droit communautaire, la notion de ‘résidence habituelle’ visée à l’article 8, paragraphe 1, du règlement ainsi que l’article 13, paragraphe 1, qui y est lié, en particulier au regard d’une situation dans laquelle l’enfant a une résidence permanente dans un État membre mais séjourne dans un autre État membre où il mène une vie sans habitation fixe?

3) a) Si l’on considère que la résidence habituelle de l’enfant ne se trouve pas dans cet autre État membre, à quelles conditions une mesure conservatoire urgente (une mesure de prise en charge) peut-elle néanmoins être adoptée sur le fondement de l’article 20, paragraphe 1, du règlement, dans ledit État membre?

b) La mesure conservatoire visée à l’article 20, paragraphe 1, du règlement est-elle uniquement une mesure pouvant être mise en œuvre conformément au droit national et les dispositions du droit national relatives à ladite mesure sont-elles contraignantes lors de l’application de l’article concerné?

c) À la suite de la mise en œuvre de la mesure conservatoire, l’affaire doit-elle être déférée d’office à la juridiction de l’État membre compétent?

4) Si la juridiction de l’État membre n’a aucune compétence, doit-elle conclure à l’irrecevabilité de l’affaire ou la déférer à la juridiction d’un autre État membre?»

10. Au cours de la procédure devant la Cour, les gouvernements finlandais, allemand, grec et italien, le gouvernement du Royaume-Uni, ainsi que la Commission des Communautés européennes ont déposé des observations.

IV – Appréciation juridique

A – Sur la première question préjudicielle

11. La première question est en substance identique à la première question dans l’affaire C (C‑435/06). La Cour a répondu à cette question dans les termes suivants, dans son arrêt (4), rendu cinq jours après l’adoption de la décision de renvoi:

«L’article 1er, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 2201/2003 du Conseil, du 27 novembre 2003, relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale abrogeant le règlement (CE) n° 1347/2000, tel que modifié par le règlement (CE) n° 2116/2004 du Conseil, du 2 décembre 2004, doit être interprété en ce sens que relève de la notion de ‘matières civiles’, au sens de cette...

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