Commission of the European Communities v French Republic.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2001:467
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-1/00
Date20 September 2001
Procedure TypeRecours en constatation de manquement - non fondé
Celex Number62000CC0001
EUR-Lex - 62000C0001 - FR 62000C0001

Conclusions de l'avocat général Mischo présentées le 20 septembre 2001. - Commission des Communautés européennes contre République française. - Manquement d'Etat - Refus de mettre fin à l'embargo sur la viande bovine britannique. - Affaire C-1/00.

Recueil de jurisprudence 2001 page I-09989


Conclusions de l'avocat général

1. Détectée pour la première fois au Royaume-Uni en 1986, l'encéphalopathie spongiforme bovine (ci-après l'«ESB»), qui fait partie d'un groupe de maladies, les encéphalopathies spongiformes transmissibles, affectant tant différentes espèces animales, dont l'espèce ovine sous la forme de «la tremblante du mouton», que l'espèce humaine, sous la forme principalement de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, reste, jusqu'à aujourd'hui, mystérieuse sous beaucoup d'aspects, notamment en ce qui concerne son mode de transmission, et redoutable, en ce sens qu'aucune thérapie ne permet d'en venir à bout.

2. Les premières mesures de lutte contre cette maladie ont été naturellement prises au Royaume-Uni, en 1988. Elles ont été complétées par des mesures communautaires, intervenues à partir de 1990, lorsqu'a été prise la mesure de l'ampleur de l'épidémie et des risques dont elle était porteuse.

3. Inspirées par le principe de précaution, ces mesures communautaires ont gagné en sévérité au fil des années et des constats alarmants, opérés par les instances scientifiques qualifiées, pour culminer dans la décision 96/239/CE de la Commission, du 27 mars 1996, relative à certaines mesures d'urgence en matière de protection contre l'encéphalopathie spongiforme bovine , interdisant, à titre transitoire, les exportations de bovins, de viandes bovines et de produits dérivés à partir du Royaume-Uni vers les autres États membres et les pays tiers.

4. Cette décision s'appuyait sur la directive 90/425/CEE du Conseil, du 26 juin 1990, relative aux contrôles vétérinaires et zootechniques applicables dans les échanges intracommunautaires de certains animaux vivants et produits dans la perspective de la réalisation du marché intérieur , telle que modifiée en dernier lieu par la directive 92/118/CEE du Conseil, du 17 décembre 1992, définissant les conditions de police sanitaire ainsi que les conditions sanitaires régissant les échanges et les importations dans la Communauté de produits non soumis, en ce qui concerne lesdites conditions, aux réglementations communautaires spécifiques visées à l'annexe A chapitre Ier de la directive 89/662/CEE et, en ce qui concerne les pathogènes de la directive 90/425/CEE , et la directive 89/662/CEE du Conseil, du 11 décembre 1989, relative aux contrôles vétérinaires applicables dans les échanges intracommunautaires dans la perspective de la réalisation du marché intérieur, telle que modifiée en dernier lieu par la directive 92/118 . Elle intervenait après la révélation par les autorités du Royaume-Uni, et plus précisément par le Spongiform Encephalopathy Advisory Committee, d'un lien probable entre une nouvelle forme de la maladie de Creutzfeldt-Jakob et la consommation de viande bovine provenant d'animaux atteints d'ESB.

5. Le Royaume-Uni a contesté la décision 96/239, mais le recours en annulation qu'il avait intenté à son encontre a été rejeté par l'arrêt de la Cour du 5 mai 1998 .

6. Au fur et à mesure que progressaient les études scientifiques sur l'ESB, il est apparu possible à la Commission d'apporter des aménagements à l'embargo total qu'avait instauré la décision 96/239 à l'égard des produits de l'élevage bovin du Royaume-Uni.

7. C'est ainsi que, par la décision 98/256/CE du Conseil, du 16 mars 1998, concernant certaines mesures d'urgence en matière de protection contre l'encéphalopathie spongiforme bovine, modifiant la décision 94/474/CE et abrogeant la décision 96/239/CE , le Conseil a levé l'embargo, sous des conditions très strictes, pour certaines viandes et produits de viande provenant de bovins abattus en Irlande du Nord, dans le cadre d'un régime de certification des troupeaux pour l'exportation, désigné sous le nom «Export Certified Herds Scheme» (ECHS).

8. Après avoir procédé aux inspections prévues par l'article 6 de cette décision, la Commission a, par sa décision 98/351/CE , fixé au 1er juin 1998 la date à laquelle pourraient débuter lesdites exportations.

9. Quelques mois plus tard, au vu de nouveaux avis scientifiques et des résultats d'inspections effectuées par ses services au Royaume-Uni, la Commission a pris l'initiative de franchir une nouvelle étape dans le processus de levée de l'embargo frappant la viande bovine en provenance du Royaume-Uni.

10. Elle a, à cet effet, élaboré une proposition de modification de la décision 98/256, de manière à autoriser également l'exportation à partir du Royaume-Uni de viandes et de produits de viande provenant de bovins nés après le 1er août 1996 et éligibles au titre du régime d'exportation fondé sur la date, désigné sous le nom «Date-Based Export Scheme» (DBES).

11. Sa proposition n'a cependant pu obtenir l'avis favorable du comité vétérinaire permanent. Elle a, en conséquence, été soumise au Conseil, ainsi que le prévoit l'article 17 de la directive 89/662.

12. Le Conseil n'a pas statué dans le délai imparti, mais ne s'est pas non plus prononcé à la majorité simple contre les mesures proposées, de sorte que la Commission, par sa décision 98/692/CE, du 25 novembre 1998, modifiant la décision 98/256 , les a prises elle-même.

13. Le régime DBES, qui est venu ainsi s'ajouter au régime ECHS, est décrit en détail dans la nouvelle annexe III de la décision 98/256, introduite par la décision 98/692.

14. La définition des animaux éligibles au titre du DBES est donnée au point 3 de cette annexe, qui énonce que:

«Un animal de l'espèce bovine est éligible au titre du DBES s'il est né et a été élevé au Royaume-Uni et si, au moment de l'abattage, il apparaît que les conditions suivantes sont réunies:

a) l'animal est clairement identifiable tout au long de sa vie pour permettre de le tracer jusqu'à sa mère et au troupeau d'origine; son numéro de marque auriculaire unique, sa date et son exploitation de naissance et tous les mouvements après la naissance sont enregistrés soit dans le passeport officiel de l'animal soit sur un système officiel de traçabilité et d'identification informatisé; l'identité de sa mère est connue;

b) l'animal est âgé de plus de 6 mois mais de moins de 30 mois, fait établi par l'enregistrement informatique officiel de sa date de naissance, et dans le cas d'animaux originaires de Grande-Bretagne, le passeport officiel de l'animal;

c) l'autorité compétente a obtenu et vérifié une preuve concrète officielle attestant que la mère de l'animal a vécu pendant au moins 6 mois après la naissance de l'animal éligible;

d) la mère de l'animal n'a pas développé l'ESB et n'est pas suspecte d'avoir contracté l'ESB.»

15. En ce qui concerne les contrôles, il est prévu que l'abattage des animaux éligibles doit être effectué dans des abattoirs spécialisés, ne traitant pas d'animaux non éligibles, et que la traçabilité doit être parfaitement assurée, en ce sens que:

«Les viandes doivent être traçables jusqu'à l'animal éligible au titre du DBES, ou après la découpe, jusqu'aux animaux découpés appartenant au même lot, à l'aide d'un système officiel de traçabilité jusqu'au moment de l'abattage. Après l'abattage, les étiquettes doivent permettre de tracer les viandes fraîches et les produits visés à l'article 6, paragraphe 1, points b) et c), jusqu'à l'animal éligible pour permettre le rappel du lot concerné. En ce qui concerne les aliments pour carnivores domestiques, les documents et rapports d'accompagnement doivent en permettre le traçage» .

16. Par ailleurs, le Royaume-Uni doit

«établir des protocoles détaillés couvrant:

a) le traçage et les contrôles effectués avant l'abattage;

b) les contrôles effectués durant l'abattage;

c) les contrôles effectués durant la production d'aliments pour carnivores domestiques;

d) toutes les exigences en matière d'étiquetage et de certification après l'abattage jusqu'au point de vente» .

17. Après avoir procédé aux vérifications imposées par l'article 6, paragraphe 5, de la décision 98/256, telle que modifiée par la décision 98/692, les avoir jugées satisfaisantes et informé les États membres, la Commission a, le 23 juillet 1999, adopté la décision 1999/514/CE, fixant la date à laquelle l'expédition à partir du Royaume-Uni de produits bovins dans le cadre du régime d'exportation sur la base de la date peut commencer au titre de l'article 6, paragraphe 5, de la décision 98/256 . La date a été arrêtée au 1er août 1999.

18. C'est le refus de la République française d'adopter les mesures nécessaires pour se conformer aux décisions 98/256, telle que modifiée par la décision 98/692, et 1999/514 qui a conduit la Commission à introduire contre cet État membre le recours en manquement, enregistré sous le n° C-1/00, soumis à notre examen et dont nous commencerons par rappeler la genèse.

19. Après une période de prohibition totale des importations de viandes bovines originaires du Royaume-Uni, la République française connaissait, en 1999, un régime, fixé par l'arrêté ministériel du 28 octobre 1998, établissant des mesures particulières applicables à certains produits d'origine bovine expédiés du Royaume-Uni , d'interdiction de principe, assorti d'une exception visant les produits originaires d'Irlande du Nord, ainsi que l'exigeait la décision 98/256, dans sa rédaction initiale.

20. L'autorisation d'importer les produits DBES supposait donc une modification de cet arrêté ministériel. Le gouvernement français a, de ce fait, soumis un projet en ce sens à l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (ci-après l'«AFSSA»), organisme qu'il avait, selon les règles du droit français , l'obligation de consulter.

21. Le 30 septembre 1999, l'AFSSA, s'appuyant sur le rapport d'un groupe d'experts sur les...

To continue reading

Request your trial
1 practice notes
  • Opinion of Advocate General Kokott delivered on 5 March 2020.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 5 March 2020
    ...Commission v Belgium (293/85, EU:C:1988:40, paragraph 20). 37 See Opinion of Advocate General Mischo in Commission v France (C‑1/00, EU:C:2001:467, point 57). See also, to that effect, judgment of 10 July 1985, Commission v Netherlands (16/84, EU:C:1985:309, paragraph 38 Judgments of 2 Febr......
1 cases
  • Opinion of Advocate General Kokott delivered on 5 March 2020.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 5 March 2020
    ...Commission v Belgium (293/85, EU:C:1988:40, paragraph 20). 37 See Opinion of Advocate General Mischo in Commission v France (C‑1/00, EU:C:2001:467, point 57). See also, to that effect, judgment of 10 July 1985, Commission v Netherlands (16/84, EU:C:1985:309, paragraph 38 Judgments of 2 Febr......

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT