Mobistar SA v Commune de Fléron (C-544/03) and Belgacom Mobile SA v Commune de Schaerbeek (C-545/03).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2005:203
Docket NumberC-545/03,C-544/03
Celex Number62003CC0544
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date07 April 2005

CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL

M. PHILIPPE LÉGER

présentées le 7 avril 2005 (1)

Affaires jointes C-544/03

Mobistar SA

contre

Commune de Fléron

et C-545/03

Belgacom Mobile SA

contre

Commune de Schaerbeek

[demandes de décision préjudicielle formées par le Conseil d'État (Belgique)]

«Télécommunications – Directive 97/13/CE – Réglementation communale instituant une taxe sur les infrastructures de téléphonie mobile – Illégalité»





1. Dans les présentes affaires, le Conseil d’État (Belgique) demande à la Cour de justice d’interpréter les articles 49 CE et 3 quater de la directive 90/388/CEE de la Commission, du 28 juin 1990, relative à la concurrence dans les marchés des services de télécommunications (2), telle que modifiée par la directive 96/2/CE (3) (ci‑après la «directive»). Il demande si ces dispositions s’opposent à une réglementation communale instituant une taxe annuelle sur les antennes, les mâts et les pylônes de diffusion pour GSM («Global system for mobile communications»).

I – La réglementation nationale en cause et les procédures au principal

2. Deux règlements sont en cause dans les litiges au principal. Le premier a été adopté par le conseil communal de Schaerbeek lors de sa séance du 8 octobre 1997. Il établit, pour les exercices fiscaux 1997 à 1999 inclus, une taxe annuelle sur les «antennes extérieures», c’est-à-dire sur les antennes paraboliques et les antennes relais GSM. Le montant de la taxe, due par le propriétaire de l’antenne, est fixé à 100 000 BEF (soit 2 478,94 euros) pour les antennes relais GSM et à 5 000 BEF (soit 123,95 euros) pour les antennes paraboliques.

3. Le second règlement a été adopté par le conseil communal de Fléron le 27 janvier 1998. Il institue, à compter du 1er janvier 1998 et pour une période de trois ans, une taxe annuelle sur les antennes, les mâts et les pylônes de diffusion pour GSM. Le montant de la taxe, qui est également due par le propriétaire de l’antenne, s’élève, ici aussi, à 100 000 BEF (soit 2 478,94 euros) par antenne.

4. Ces deux règlements font l’objet, devant le Conseil d’État, de recours introduits par des opérateurs de téléphonie mobile établis en Belgique, en l’occurrence la société Mobistar SA (ci-après «Mobistar») et la société Belgacom Mobile SA (ci-après «Belgacom Mobile»). Ces deux opérateurs demandent l’annulation des taxes litigieuses en faisant valoir, notamment, qu’elles sont contraires aux articles 49 CE et 3 quater de la directive, dans la mesure où elles constituent des restrictions illicites au développement de leur réseau de télécommunications et à la libre prestation de services de téléphonie mobile.

II – La réglementation communautaire

5. La directive vise à réaliser la libéralisation du secteur des télécommunications. Adoptée sur le fondement de l’article 90, paragraphe 3, du traité CE (devenu article 86, paragraphe 3, CE), elle exigeait, dans un premier temps, l’abolition des droits exclusifs ou spéciaux pour la fourniture des services de télécommunications autres que les communications par satellite, la téléphonie mobile et la téléphonie vocale.

6. Elle a ensuite été modifiée à plusieurs reprises pour inclure dans son champ d’application les communications par satellite, en 1994 (4), les services et les systèmes de communications mobiles et personnelles, en 1996 (5), puis, en 1996 également, l’ensemble des services de téléphonie vocale et de télécommunication, en ce compris la mise en place et l’exploitation des réseaux nécessaires à la prestation de ces services (6).

7. S’agissant plus spécifiquement de la téléphonie mobile, la première modification intervenue en 1996 visait à permettre aux opérateurs d’exploiter et de développer leur réseau de téléphonie en vue d’exercer les activités couvertes par leurs licences ou autorisations, y compris le libre choix de l’infrastructure sous-jacente (7). Cette démarche était considérée comme essentielle pour surmonter les distorsions de concurrence existantes et, notamment, pour permettre aux opérateurs de maîtriser leurs coûts (8). C’est ainsi que l’article 3 quater de la directive, inséré par la directive 96/2, exigeait:

«Les États membres assurent la levée de toutes les restrictions imposées aux opérateurs de systèmes de communications mobiles et personnelles en ce qui concerne la création de leur propre infrastructure, l’utilisation d’infrastructures tierces et le partage d’infrastructures, d’autres installations et de sites, sous réserve qu’ils limitent l’utilisation de ces infrastructures aux activités couvertes par leur licence ou autorisation.»

8. Une partie du cadre normatif établi par ces textes a ensuite été amendée et remplacée par la directive 2002/77/CE de la Commission, du 16 septembre 2002, relative à la concurrence dans les marchés des réseaux et des services de communications électroniques (9). Cette dernière directive n’est cependant pas applicable en l’espèce rationae temporis.

III – Les renvois préjudiciels

9. Saisi des recours formés par Belgacom Mobile et Mobistar, le Conseil d’État explique que la question de la compatibilité des règlements litigieux avec la directive 96/2, en tant que celle-ci interdit les restrictions au développement des réseaux de communications mobiles, implique une interprétation de la notion de «restriction».

10. Il expose que, si ce terme n’est défini ni à l’article 1er ni à l’article 3 quater de la directive, les considérants figurant dans le préambule de la directive 96/2 semblent indiquer que les restrictions visées sont uniquement d’ordre technique: c’est ainsi que sont évoquées, par exemple, «l’élimination des restrictions à la liberté pour les opérateurs de réseaux mobiles d’exploiter et de développer leur réseau» (premier considérant) et la circonstance que «l’octroi de licences reste […] soumis à des restrictions techniques telles que l’interdiction d’utiliser une infrastructure différente» (quatrième considérant).

11. Le Conseil d’État souligne que rien ne permet cependant de conclure que les restrictions devant être levées par les États membres soient exclusivement d’ordre technique ni que l’énumération des restrictions techniques figurant au préambule de la directive 96/2 soit exhaustive: en effet, l’article 3 quater de la directive vise expressément «toutes» les restrictions à l’infrastructure, de sorte qu’un doute raisonnable subsiste quant au point de savoir si cet article est également susceptible de viser des mesures d’ordre fiscal s’appliquant à des infrastructures de communications mobiles.

12. Le Conseil d’État ajoute que la question de la compatibilité des taxes litigieuses avec le droit communautaire primaire, en l’occurrence l’article 49 CE, se pose également.

13. Dans ces conditions, il a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les deux questions préjudicielles suivantes:

«1) L’article 49 [...] CE doit-il être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’une réglementation d’une autorité nationale ou d’une collectivité locale instaure une taxe sur les infrastructures de communications mobiles et personnelles utilisées dans le cadre de l’exploitation des activités couvertes par les licences et autorisations?

2) L’article 3 quater de la directive [...], en tant que cet article vise la levée de ‘toutes les restrictions’, s’oppose-t-il à ce qu’une réglementation d’une autorité nationale ou d’une collectivité locale instaure une taxe sur les infrastructures de communications mobiles et personnelles...

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