Bosal Holding BV v Staatssecretaris van Financiën.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2002:528
Docket NumberC-168/01
Celex Number62001CC0168
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date24 September 2002
EUR-Lex - 62001C0168 - FR 62001C0168

Conclusions de l'avocat général Alber présentées le 24 septembre 2002. - Bosal Holding BV contre Staatssecretaris van Financiën. - Demande de décision préjudicielle: Hoge Raad der Nederlanden - Pays-Bas. - Liberté d'établissement - Fiscalité - Impôts sur les bénéfices des sociétés - Limitation de la déductibilité dans un État membre des frais liés aux participations d'une société mère dans ses filiales établies dans d'autres États membres - Cohérence du système fiscal. - Affaire C-168/01.

Recueil de jurisprudence 2003 page I-09409


Conclusions de l'avocat général

I - Introduction

1. Dans la présente procédure préjudicielle, le Hoge Raad der Nederlanden (Pays-Bas) a posé deux questions concernant l'interprétation des dispositions combinées des articles 43 CE et 48 CE et de la directive 90/435/CEE du Conseil, du 23 juillet 1990, concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d'États membres différents (ci-après la «directive mère-filiale»). La juridiction de renvoi souhaite savoir si ces dispositions s'opposent à un régime dans la loi néerlandaise sur l'impôt des sociétés selon lequel lors de l'imposition de la société mère les frais de la participation dans des sociétés filiales (ayant, dans le cas d'espèce, leur siège dans un État membre) sont déductibles si ces frais servent indirectement à réaliser aux Pays-Bas des bénéfices imposables. Selon la directive mère-filiale, les États membres sont libres de disposer que les frais de participation dans une société filiale ne peuvent (de façon générale) être déduits des bénéfices de la société mère.

II - Cadre juridique

A - Droit communautaire

2. La directive mère-filiale a été adoptée dans l'objectif de ne pas entraver les regroupements de sociétés de différents États membres par des restrictions, des désavantages ou des distorsions particuliers découlant des dispositions fiscales des États membres, afin d'assurer l'établissement et le fonctionnement du marché commun. Cet objectif doit être réalisé par des règles fiscales neutres applicables à ces regroupements et finalement par la mise en place d'un système fiscal commun .

3. Le troisième considérant de la directive énonce :

«que les dispositions fiscales actuelles régissant les relations entre sociétés mères et filiales d'États membres différents varient sensiblement d'un État membre à l'autre et sont, en général, moins favorables que celles applicables aux relations entre sociétés mères et filiales d'un même État membre; que la coopération entre sociétés d'États membres différents est, de ce fait, pénalisée par rapport à la coopération entre sociétés d'un même État membre; qu'il convient d'éliminer cette pénalisation par l'instauration d'un régime commun et de faciliter ainsi les regroupements de sociétés à l'échelle communautaire».

4. L'article 4 de la directive mère-filiale dispose ce qui suit.

«1. Lorsqu'une société mère reçoit, à titre d'associée de sa société filiale, des bénéfices distribués autrement qu'à l'occasion de la liquidation de celle-ci, l'État de la société mère:

- soit s'abstient d'imposer ces bénéfices,

- soit les impose, tout en autorisant cette société à déduire du montant de son impôt la fraction de l'impôt de la filiale afférente à ces bénéfices et, le cas échéant, le montant de la retenue à la source perçue par l'État membre de résidence de la filiale en application des dispositions dérogatoires de l'article 5, dans la limite du montant de l'impôt national correspondant.

2. Toutefois, tout État membre garde la faculté de prévoir que des charges se rapportant à la participation et des moins-values résultant de la distribution des bénéfices de la société filiale ne sont pas déductibles du bénéfice imposable de la société mère. Si, dans ce cas, les frais de gestion se rapportant à la participation sont fixés forfaitairement, le montant forfaitaire ne peut excéder 5 % des bénéfices distribués par la société filiale.»

B - Droit national

5. La réglementation néerlandaise relative à la détermination des bénéfices de sociétés de participation dispose à l'article 13, paragraphe 1, de la Wet op de vennootschapsbelasting 1969 (dans la version de 1993) ce qui suit.

«Pour la détermination du bénéfice, il n'est tenu compte ni des avantages ni des frais liés à une participation à moins qu'il n'apparaisse que ces frais servent indirectement à la réalisation de bénéfices imposables aux Pays-Bas (exonération des participations). Sont toujours censés être des frais liés à une participation, les intérêts et frais des emprunts contractés dans les six mois qui précèdent l'acquisition de la participation, à moins qu'il n'apparaisse que ces emprunts ont été contractés dans un autre but.»

III - Faits et procédure nationale

6. La Bosal Holding BV, requérante au principal (ci-après «Bosal»), une société à responsabilité limitée établie aux Pays-Bas, détient des participations dans différentes sociétés néerlandaises et étrangères tant dans l'Union européenne qu'à l'extérieur de celle-ci. Ces participations vont de 50 à 100 % du capital. Elle poursuit des activités de holding, de financement et de licences/royalties.

7. En 1993, Bosal a exposé des frais s'élevant à 3 969 339 NLG en relation avec le financement de ses participations dans des sociétés établies à l'extérieur des Pays-Bas mais à l'intérieur de l'Union européenne. Elle a demandé auprès des services fiscaux compétents aux Pays-Bas une déduction à hauteur du même montant de ses bénéfices imposables en invoquant le fait que l'article 13 de la loi néerlandaise sur l'impôt des sociétés doit être écarté pour violation de l'article 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE) dans la mesure où seuls les frais liés à des participations peuvent être déduits qui servent à réaliser des bénéfices imposables aux Pays-Bas.

8. Par l'avis d'imposition pour l'impôt des sociétés pour l'exercice 1993, la déduction du montant a été refusée. Tant la réclamation introduite par Bosal contre ce refus que le recours judiciaire contre le rejet de la réclamation ont été sans succès et Bosal s'est finalement pourvue en cassation.

IV - Questions préjudicielles

9. Le Hoge Raad der Nederlanden, saisi de ce pourvoi, a déféré à la Cour les questions préjudicielles suivantes.

«1) Les dispositions combinées des articles 52 et 58 du traité CE (devenus, après modification, articles 43 et 48 CE) ou toute autre règle du droit communautaire s'opposent-elles à ce qu'un État membre n'accorde à une société mère soumise à l'impôt dans cet État membre une déduction de frais liés à une participation qu'elle possède dans une filiale que si celle-ci réalise des bénéfices soumis à impôt dans l'État membre d'établissement de la société mère?

2) Est-il pertinent pour la réponse à la première question de savoir si, dans le cas où la filiale est soumise à l'impôt sur les bénéfices dans l'État membre concerné alors que la société mère ne l'est pas, cet État membre tient compte ou non des frais susmentionnés lors de la taxation de la filiale?»

10. Devant la Cour, la requérante Bosal, le royaume des Pays-Bas, la Commission, ainsi que le Royaume-Uni ont formulé des observations.

V - Appréciation en droit

A - Sur la première question

1) Exposé des parties

11. Toutes les parties à l'exception de Bosal estiment que l'article 13, paragraphe 1, de la Wet op de vennootschapsbelasting néerlandaise n'est pas contraire au droit communautaire, soit parce qu'il ne contient pas une restriction à la liberté d'établissement, soit parce qu'une restriction existante est justifiée.

12. Bosal estime que l'exercice de la liberté d'établissement par voie d'acquisition de sociétés filiales est restreint de manière illicite par la loi néerlandaise. Selon elle, le fait de ne pas permettre la déduction des frais entraîne une double imposition. La raison de cette double imposition n'est pas, poursuit-elle, imputable au manque d'harmonisation dès lors que les désavantages fiscaux qui résultent de ce régime ne disparaîtraient pas si tous les États introduisaient un régime comme celui des Pays-Bas.

13. La possibilité offerte par la directive de déclarer non déductibles les frais de participation ne peut être exercée par un État membre, selon Bosal, que pour l'ensemble des différents types de frais de participation et non pas pour les seules participations étrangères. C'est dans ce sens que la réglementation précédente, le Besluit Vennootschapsbelasting 1942, qui ne connaissait pas de possibilité de déduction, n'était pas discriminatoire. Bosal déduit des travaux préparatoires que la modification dans la loi de 1969 a eu lieu afin d'éviter des effets indésirables de l'interdiction internationale de la double imposition sur le budget des Pays-Bas.

14. Ainsi, selon Bosal, le royaume des Pays-Bas n'a adopté ce régime que par crainte de pertes fiscales et d'abus. À défaut de lien direct entre la déductibilité des frais de participation de la société mère et les bénéfices imposables de la filiale, une société mère et sa filiale ne formant pas une seule entité fiscale, le principe de cohérence ne saurait servir de justification. Bosal ajoute que le principe de cohérence n'est pas appliqué uniformément dans tout le système néerlandais.

15. Le gouvernement néerlandais estime que cette réglementation ne constitue déjà pas une restriction à la liberté d'établissement. Selon lui, cela découle du seul fait qu'elle est conforme à l'article 4, paragraphe 2, de la directive mère-filiale, puisque celle-ci laisse même la liberté aux États membres de déclarer les frais de participations non déductibles dans tous les cas.

16. Selon ce gouvernement, il n'y a, par ailleurs, aucune discrimination en fonction de la forme juridique ou du siège. Le régime, explique-t-il, ne prend pas pour critère le droit selon lequel la filiale a été constituée et des sociétés mères ayant des filiales à l'étranger peuvent en...

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