Heinrich Wehrs v Hauptzollamt Lüneburg.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1992:231
Date21 May 1992
Celex Number61990CC0264
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-264/90
EUR-Lex - 61990C0264 - FR 61990C0264

Conclusions de l'avocat général Lenz présentées le 21 mai 1992. - Heinrich Wehrs contre Hauptzollamt Lüneburg. - Demande de décision préjudicielle: Finanzgericht Hamburg - Allemagne. - Prélèvement supplémentaire sur le lait. - Affaire C-264/90.

Recueil de jurisprudence 1992 page I-06285


Conclusions de l'avocat général

++++

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

A - Les faits

1. La demande préjudicielle du Finanzgericht Hamburg, dont nous avons à traiter aujourd' hui, porte sur la validité d' une modalité de l' article 3 bis du règlement (CEE) n 857/84 du Conseil, du 31 mars 1984, portant règles générales pour l' application du prélèvement visé à l' article 5 quater du règlement (CEE) n 804/68 dans le secteur du lait et des produits laitiers (1). Comme on le sait, le législateur communautaire a introduit cet article à la suite des arrêts Mulder (2) et Von Deetzen (3) dans le règlement relatif au prélèvement supplémentaire adopté auparavant pour combattre les excédents structurels du marché des produits laitiers (4), afin de tenir compte de la situation particulière des exploitants agricoles qui avaient rempli un engagement de non-commercialisation ou de reconversion suivant les dispositions du règlement (CEE) n 1078/77 (5) au cours de l' année de référence déterminante pour les quantités exemptes de prélèvement.

2. L' article 3 bis du règlement n 857/84, dont la version originale (6) fait l' objet de la question préjudicielle, contient, pour l' octroi des quantités de référence "spécifiques" qui y sont prévues, une série de conditions et de restrictions dont certaines ont déjà été soumises à l' examen de la Cour. Dans le cas d' espèce, le Finanzgericht Hamburg désire savoir si la disposition de l' article 3 bis, paragraphe 1, deuxième tiret, est valide. Aux termes de cette dernière, une quantité de référence spécifique n' est attribuée qu' au producteur

"qui n' a pas reçu de quantité de référence - s' agissant du cessionnaire de la prime - au titre de l' article 2 du présent règlement".

3. La formule "s' agissant du cessionnaire de la prime" renvoie aux articles 6 du règlement n 1078/77 et 3 bis, paragraphe 2, troisième alinéa, deuxième tiret, du règlement n 857/84. En ce qui concerne l' article 6 du règlement n 1078/77, il régit la possibilité pour un exploitant agricole ayant repris une exploitation ou une partie d' exploitation de poursuivre les engagements de non-commercialisation ou de reconversion souscrits par l' ancien propriétaire. Cet article stipule:

"1) Tout successeur à une exploitation agricole peut s' engager par écrit à poursuivre l' exécution des obligations souscrites par son prédécesseur.

Dans ce cas, les montants déjà payés restent acquis à ce dernier et le solde est versé à son successeur.

Dans le cas contraire, les montants déjà payés sont remboursés par le prédécesseur.

2) Dans le cas où seulement une partie d' une exploitation est cédée, le demandeur garde son droit à la prime si la personne à qui il l' a cédée s' engage par écrit à poursuivre l' exécution des obligations souscrites par son prédécesseur. Dans le cas contraire, une partie des montants déjà payés est remboursée par le prédécesseur, calculée en fonction de la superficie fourragère cédée."

4. L' article 3 bis, paragraphe 2, troisième alinéa, concerne les conséquences sur l' octroi de la quantité de référence spécifique de la cession par le producteur (dans le cadre de la disposition précitée) d' une partie de son exploitation au cours de la période de non-commercialisation ou de reconversion.

5. Dans ce cas:

"- la quantité de référence spécifique du cédant, telle qu' établie ci-dessus, est égale à 60 % de la quantité pour laquelle a été gardé le droit à la prime;

- la quantité de référence spécifique du cessionnaire, telle qu' établie ci-dessus, est égale à 60 % de la quantité pour laquelle a été acquis le droit à la prime".

6. Ces dispositions constituent la toile de fond de la situation factuelle qui est à la base de la présente demande de décision préjudicielle.

7. Le requérant au principal (ci-après "requérant") a produit du lait au cours de l' année de référence retenue par la République fédérale d' Allemagne (1983) sur certaines terres exploitées par lui. Il a donc, conformément à l' article 2 du règlement n 857/84, obtenu en 1984 une quantité de référence de 183 816 kg. Ayant acheté le 23 mars 1984 un terrain supplémentaire d' une surface agricole utile de 2,5 ha, il a demandé l' augmentation de cette quantité, et ce en application de l' article 3 bis du règlement n 857/84, en ce qui concerne le terrain acheté. Ce dernier faisait partie d' une exploitation ayant une surface agricole utile de 16,83 ha, sur laquelle il y avait en 1980 14 vaches laitières. L' exploitant avait arrêté la production de lait le 10 janvier 1981 pour une période de quatre ans, en exécution d' un engagement pris sur la base du règlement n 1078/77. Le requérant avait repris cet engagement en ce qui concerne le terrain acheté.

8. Après l' adoption du règlement n 764/89, la Landwirtschaftskammer Hannover a délivré au requérant une quantité de référence spécifique provisoire égale à 60 % de la quantité de lait qui, selon elle, avait été transférée au requérant du fait de la vente du terrain. C' est sur cette base que la laiterie à laquelle le requérant livre son lait a augmenté la quantité de référence de celui-ci de 6 820 kg, la faisant ainsi passer à un total de 190 636 kg.

9. Le Hauptzollamt Lueneburg a ordonné l' annulation du nouveau calcul de la quantité de référence au motif que, en vertu de l' article 3 bis, paragraphe 1, deuxième tiret, du règlement n 857/84, le requérant ne pouvait obtenir l' attribution d' une quantité de référence spécifique provisoire, étant donné qu' il en avait déjà une, calculée sur la base de ses livraisons de lait en 1983.

10. Le requérant a demandé l' annulation de cette décision devant le Finanzgericht Hamburg, lequel a alors saisi la Cour, conformément à l' article 177 du traité CEE, de la question préjudicielle suivante:

"L' article 3 bis, paragraphe 1, deuxième tiret, du règlement (CEE) n 857/84 du Conseil, tel que modifié par le règlement (CEE) n 764/89 du Conseil, est-il valide dans la mesure où les cessionnaires d' une prime octroyée en vertu du règlement (CEE) n 1078/77 du Conseil sont exclus de l' attribution d' une quantité de référence spécifique et provisoire lorsqu' ils ont reçu une quantité de référence au titre de l' article 2 du règlement (CEE) n 857/84?"

11. Se référant aux arrêts Mulder et Von Deetzen, précités, le Finanzgericht incline à répondre à cette question par l' affirmative, point de vue que partage d' ailleurs le Finanzgericht Duesseldorf, qui a saisi la Cour d' une question analogue dans l' affaire C-247/91 (7).

12. Nous aborderons, si nécessaire, d' autres détails concernant les faits et la réglementation applicable dans notre prise de position ci-après. Pour le reste, nous nous permettons de renvoyer au rapport d' audience.

B - Prise de position

13.I - La discussion menée devant la Cour pour répondre à la question de validité posée reposait sur une interprétation précise de la clause à examiner, interprétation sur laquelle le Finanzgericht Hamburg avait déjà basé la question posée et les motifs de son ordonnance de renvoi. Cette interprétation veut que les agriculteurs dans la situation du requérant soient exclus de l' attribution d' une quantité de référence spécifique, cette situation étant caractérisée par les éléments suivants:

- le demandeur a, conformément à l' article 3 bis, paragraphe 2, troisième alinéa, acheté à un tiers une partie de son exploitation, soumise à un engagement de non-commercialisation ou de reconversion, au cours de la période couverte par cet engagement;

- il a en outre obtenu en vertu de l' article 2 une quantité de référence pour une autre exploitation gérée par lui.

14. Bien qu' en soi le libellé de la disposition autorise également à l' interpréter en ce sens que l' interdiction de cumul de quantités de référence se rapporte à une seule et même exploitation - ce qui fait éventuellement apparaître sous un autre jour les doutes soumis à la Cour sur la validité de la disposition en cause -, il y a toutefois lieu de tirer de l' économie de l' article 3 bis que le législateur communautaire a voulu mettre en place les conséquences juridiques dont il est question en l' espèce. Comme l' a exposé récemment en détail l' avocat général M. Jacobs dans ses conclusions dans l' affaire Dowling, la Cour ne peut pas passer outre à l' intention claire du législateur ressortant objectivement de la disposition - même sous l' angle d' une interprétation conforme au traité et aux principes de droit de même rang (8). Les limites de l' interprétation ainsi comprises peuvent résulter non seulement des termes clairs de la disposition (9), mais également de son économie et de son objectif (10).

15. En ce qui concerne l' économie de l' article 3 bis du règlement n 857/84, les éléments suivants plaident pour l' interprétation défendue.

16. Selon le paragraphe 2, troisième alinéa, de cette disposition, le cessionnaire de la prime obtient - au cas où le producteur a cédé en partie son exploitation au cours de la période de non-commercialisation ou de reconversion - une quantité de référence spécifique partielle. Un exploitant agricole qui a repris l' ensemble de l' exploitation en s' engageant à poursuivre l' exécution des obligations de non-commercialisation ou de reconversion de son prédécesseur (et donc aussi en bénéficiant des primes afférentes à la période restant à courir - voir article 6, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement n 1078/77) avant qu' elles n' aient pris fin a droit, comme l' a souligné l' avocat général M. Mischo à juste titre (11), à la quantité de référence spécifique totale revenant à cette exploitation. Cette...

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