North Western Health Board v Margaret McKenna.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2004:767
Date02 December 2004
Celex Number62003CC0191
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-191/03
Conclusions
CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL
M. PHILIPPE LÉGER
présentées le 2 décembre 2004(1)



Affaire C-191/03

North Western Health Board
contre
Margaret McKenna



[demande de décision préjudicielle introduite par la Labour Court (Irlande)]

«Égalité de traitement entre hommes et femmes – État pathologique lié à la grossesse – Imputation de la période d'absence due à l'incapacité de travail causée par un état pathologique lié à la grossesse sur la durée des droits à congé de maladie – Conditions de travail – Directive 76/207/CEE – Discrimination»






1. Ce renvoi préjudiciel porte une nouvelle fois sur les droits de la femme, salariée et enceinte, dans l’ordre juridique communautaire. La problématique qui se trouve au centre de la présente affaire est de savoir si une incapacité de travail causée par un état pathologique lié à la grossesse et survenant pendant la durée de celle-ci peut, conformément au droit communautaire, être traitée comme une incapacité de travail due à n’importe quelle maladie et être imputée sur le nombre de jours durant lesquels, en vertu du régime de congé de maladie applicable en l’espèce, les salariés ont droit au maintien de leur rémunération en totalité, puis en partie. 2. Par ses questions préjudicielles, la Labour Court (Irlande) demande d’abord si le régime national en cause relève du champ d’application de l’article 141, paragraphes 1 et 2, CE et de la directive 75/117/CEE du Conseil (2) , ou bien de celui de la directive 76/207/CEE du Conseil (3) . La juridiction de renvoi cherche ensuite à savoir si, au regard des dispositions de droit communautaire applicables, un tel régime doit être considéré comme discriminatoire. 3. Cette affaire pose en substance la question de savoir si l’égalité de traitement dont bénéficient les femmes pendant leur grossesse est une égalité formelle ou bien une égalité substantielle. I – Le cadre juridique A – Le droit communautaire 4. L’article 141 CE consacre, à son paragraphe 1, le principe de l’égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un même travail ou un travail de même valeur. Aux termes de son paragraphe 2, la notion de «rémunération» recouvre le salaire ou le traitement ordinaire de base ou minimum, et tous les autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l’employeur au travailleur en raison de l’emploi de ce dernier. 5. La directive 75/117 a essentiellement pour but de faciliter l’application concrète du principe de l’égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins, énoncé à l’article 141 CE. Elle dispose, à son article 1 er , que ce principe implique, pour un même travail ou pour un travail auquel est attribuée une valeur égale, l’élimination, dans l’ensemble des éléments et conditions de rémunération, de toute discrimination fondée sur le sexe. 6. La même directive fait obligation aux États membres, à son article 3, de supprimer les discriminations entre les hommes et les femmes qui découlent de dispositions législatives, réglementaires ou administratives et qui sont contraires au principe de l’égalité des rémunérations. Elle leur impose, à son article 4, de prendre les mesures nécessaires pour que les dispositions qui figurent dans des conventions collectives et des contrats individuels de travail et qui sont contraires au principe de l’égalité des rémunérations puissent être déclarées nulles ou puissent être amendées. 7. La directive 76/207 vise quant à elle, aux termes de son article 1 er , à mettre en œuvre dans les États membres le principe de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l’accès à l’emploi, y compris à la promotion, et à la formation professionnelle ainsi que les conditions de travail. 8. L’article 2 de la directive 76/207 dispose: «1. Le principe de l’égalité de traitement au sens des dispositions ci‑après implique l’absence de toute discrimination fondée sur le sexe, soit directement, soit indirectement par référence, notamment, à l’état matrimonial ou familial. […] 3. La présente directive ne fait pas obstacle aux dispositions relatives à la protection de la femme, notamment en ce qui concerne la grossesse et la maternité.» 9. L’article 5 de la directive 76/207 régit l’égalité de traitement en ce qui concerne les conditions de travail dans les termes suivants: «1. L’application du principe de l’égalité de traitement en ce qui concerne les conditions de travail, y compris les conditions de licenciement, implique que soient assurées aux hommes et aux femmes les mêmes conditions, sans discrimination fondée sur le sexe. 2. À cet effet, les États membres prennent les mesures nécessaires afin que:
a)
soient supprimées les dispositions législatives, réglementaires et administratives contraires au principe de l’égalité de traitement;
b)
soient nulles, puissent être déclarées nulles ou puissent être amendées les dispositions contraires au principe de l’égalité de traitement qui figurent dans les conventions collectives ou dans les contrats individuels de travail, dans les règlements intérieurs des entreprises ainsi que dans les statuts des professions indépendantes […]»
10. Il convient encore d’ajouter que la condition juridique des travailleuses enceintes fait également l’objet d’une protection particulière, en vertu de la directive 92/85/CEE du Conseil (4) . Selon l’article 8 de cette directive, les travailleuses doivent bénéficier d’un congé de maternité d’au moins quatorze semaines continues, réparties avant et/ou après l’accouchement, et incluant au moins deux semaines obligatoires. Conformément à l’article 11, point 2, sous b), de ladite directive, ces travailleuses doivent bénéficier durant ce congé de maternité du maintien d’une rémunération ou d’une prestation adéquate ou encore des deux. Selon le même article, point 3, la prestation est jugée adéquate lorsqu’elle assure des revenus au moins équivalents à ceux que recevrait la travailleuse concernée dans le cas d’une interruption de ses activités pour des raisons liées à son état de santé, dans la limite d’un plafond éventuel déterminé par les législations nationales. B – Le droit national 11. Le régime de congé de maladie du North Western Health Board (5) prévoit, notamment, que les salariés ont droit à 365 jours de congés de maladie rémunérés par période de quatre ans. Il dispose également que 183 jours d’absence par période de douze mois sont intégralement payés et que, au-delà de ce total de 183 jours, les jours d’absence pour cause de maladie ne sont rémunérés que pour moitié, dans la limite de 365 jours sur quatre ans (6) . 12. Ce régime prévoit aussi que toute incapacité de travail résultant d’un état pathologique lié à la grossesse survenant avant les quatorze semaines du congé de maternité sera considérée comme relevant de son champ d’application (7) . 13. En vertu d’autres règlements du ministère de la Santé et de l’Enfance irlandais, les salariées ont également droit à un congé de maternité pendant lequel elles perçoivent l’intégralité de leur rémunération. II – Les faits et le litige au principal 14. M me McKenna est une employée du Board. Elle relève, à ce titre, du régime de congé de maladie de ce dernier. 15. M me McKenna s’est trouvée enceinte au mois de janvier 2000. Elle a dû prendre un congé de maladie sur avis médical, en raison d’un état pathologique imputable à sa grossesse et qui s’est poursuivi pendant presque toute la durée de celle-ci. Selon la décision de renvoi, les absences de la requérante pendant sa grossesse n’étaient dues qu’à cet état pathologique, et un certificat médical a attesté qu’elle se trouvait inapte au travail (8) . À compter du 6 juillet 2000 (9) , M me McKenna ayant épuisé ses droits à une rémunération complète pendant son congé de maladie, son salaire a été réduit de moitié. Du 3 septembre au 11 décembre 2000, M me McKenna a bénéficié d’un congé de maternité et a perçu sa rémunération à taux plein. À l’expiration de ce congé, M me McKenna étant toujours inapte au travail pour raisons médicales, sa rémunération a de nouveau été diminuée de moitié. 16. Devant l’Equality Officer de l’Office of the Director of Equality Investigations (bureau du directeur des enquêtes en matière d’égalité), M me McKenna a soutenu qu’elle avait fait l’objet d’une discrimination fondée sur le sexe en violation de la directive 76/207 en ce que son employeur avait assimilé l’état pathologique lié à sa grossesse à n’importe quelle maladie et imputé sa période d’incapacité de travail due à cet état sur ses droits à congé de maladie. Elle a exposé également que la réduction de moitié de sa rémunération alors que son absence était imputable à un état pathologique lié à sa grossesse constituait un traitement défavorable, contraire aux dispositions de l’article 141, paragraphes 1 et 2, CE et à la directive 75/117. 17. L’Equality Officer a jugé le recours de M me McKenna fondé. Il a estimé que, en traitant l’état pathologique lié à la grossesse comme n’importe quelle maladie, l’employeur s’était rendu coupable de discrimination fondée sur le sexe et que la directive 76/207 ainsi que la jurisprudence de la Cour en la matière imposaient au Board de prendre des dispositions spéciales aux fins de couvrir les absences dues à une incapacité de travail pour cause de grossesse. Il a considéré aussi que la réduction de moitié de la rémunération de l’intéressée avant le début de son congé de maternité était contraire aux dispositions de l’article 141, paragraphes 1 et 2, CE et de la directive 75/117. L’Equality Officer a donc ordonné au Board de modifier les dispositions de son régime de...

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