Jégo-Quéré & Cie SA v Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:T:2002:112
CourtGeneral Court (European Union)
Date03 May 2002
Docket NumberT-177/01
Procedure TypeRecurso de anulación - resolución interlocutoria
Celex Number62001TJ0177
EUR-Lex - 62001A0177 - FR 62001A0177

Arrêt du Tribunal de première instance (première chambre élargie) du 3 mai 2002. - Jégo-Quéré & Cie SA contre Commission des Communautés européennes. - Pêche - Règlement (CE) nº 1162/2001 - Reconstitution du stock de merlu - Société d'armement à la pêche - Recours en annulation - Personne individuellement concernée - Recevabilité. - Affaire T-177/01.

Recueil de jurisprudence 2002 page II-02365


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

1. Droit communautaire - Principes - Droit à un recours effectif - Appréciation - Voies de recours permettant aux justiciables de contester la légalité des dispositions communautaires de portée générale affectant directement leur situation juridique - Recours devant le juge national avec renvoi préjudiciel devant la Cour et recours en responsabilité non contractuelle de la Communauté - Insuffisance de ces recours pour garantir aux justiciables une protection juridictionnelle effective - Absence d'incidence sur le système des voies de recours et sur les conditions de recevabilité des recours en annulation

(Art. 230, alinéa 4, CE, 234 CE, 235 CE, et 288, alinéa 2, CE; charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, art. 47; convention européenne des droits de l'homme, art. 6 et 13)

2. Recours en annulation - Personnes physiques ou morales - Actes les concernant directement et individuellement - Notion de personne individuellement concernée par une disposition de portée générale - Interprétation - Disposition devant affecter, de manière certaine et actuelle, sa situation juridique en restreignant ses droits ou en lui imposant des obligations - Prise en compte du nombre et de la situation d'autres personnes également affectées par la disposition ou susceptibles de l'être - Absence de pertinence

(Art. 230, alinéa 4, CE)

Sommaire

1. Les procédures prévues aux articles 234 CE, d'une part, et 235 CE et 288, deuxième alinéa, CE, d'autre part, ne peuvent plus être considérées, à la lumière des articles 6 et 13 de la convention européenne des droits de l'homme et de l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, comme garantissant aux justiciables un droit de recours effectif leur permettant de contester la légalité de dispositions communautaires de portée générale qui affectent directement leur situation juridique.

D'une part, quant au recours devant le juge national avec renvoi préjudiciel devant la Cour conformément à l'article 234 CE, dans certains cas, il n'existe pas de mesures d'exécution susceptibles de constituer le fondement d'une action devant les juridictions nationales. Ainsi, le fait qu'un particulier affecté par une mesure communautaire puisse en contester la validité devant les juridictions nationales, en violant les dispositions prévues par ladite mesure et en se prévalant de l'illégalité de celles-ci dans le cadre de procédures judiciaires ouvertes à son encontre, ne lui offre pas une protection juridictionnelle adéquate. En effet, il ne peut être demandé à des particuliers d'enfreindre la loi afin de pouvoir accéder à la justice.

D'autre part, la voie de l'action en réparation fondée sur la responsabilité non contractuelle de la Communauté prévue aux articles 235 CE et 288, deuxième alinéa, CE n'apporte pas, dans certains cas, de solution satisfaisante aux intérêts du justiciable. Elle ne peut en effet aboutir à faire écarter de l'ordre juridique communautaire un acte pourtant considéré, par hypothèse, comme illégal. Présupposant la réalisation d'un dommage directement causé par l'application de l'acte litigieux, elle est soumise à des conditions de recevabilité et de fond différentes de celles régissant le recours en annulation et elle ne place donc pas le juge communautaire en situation d'exercer, dans toute sa dimension, le contrôle de légalité qu'il a la mission de mener à bien. En particulier, lorsqu'une mesure de portée générale est mise en cause dans le contexte d'une telle action, le contrôle exercé par le juge communautaire ne s'étend pas à tous les éléments susceptibles d'affecter la légalité de cette mesure, mais se borne à sanctionner les violations suffisamment caractérisées de règles de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers.

Toutefois, une telle circonstance ne saurait autoriser une modification du système des voies de recours et des procédures établi par le traité et destiné à confier au juge communautaire le contrôle de la légalité des actes des institutions. En aucun cas, elle ne permet de déclarer recevable un recours en annulation formé par une personne physique ou morale qui ne satisfait pas aux conditions posées par l'article 230, quatrième alinéa, CE.

( voir points 45-48 )

2. Aucun argument impérieux ne permet de soutenir que la notion de personne individuellement concernée au sens de l'article 230, quatrième alinéa, CE comporte l'obligation pour un particulier désireux de contester une mesure de portée générale d'être individualisé d'une manière analogue à celle dont le serait un destinataire. Dans ces conditions, et en tenant compte du fait que le traité a institué un système complet de voies de recours et de procédures destiné à confier au juge communautaire le contrôle de la légalité des actes des institutions, il y a lieu de reconsidérer l'interprétation stricte, jusqu'à présent retenue, de la notion de personne individuellement concernée au sens de l'article 230, quatrième alinéa, CE. En conséquence, afin d'assurer une protection juridictionnelle effective des particuliers, une personne physique ou morale doit être considérée comme individuellement concernée par une disposition communautaire de portée générale qui la concerne directement, si la disposition en question affecte, d'une manière certaine et actuelle, sa situation juridique en restreignant ses droits ou en lui imposant des obligations. Le nombre et la situation d'autres personnes également affectées par la disposition ou susceptibles de l'être ne sont pas, à cet égard, des considérations pertinentes.

( voir points 49-51 )

Parties

Dans l'affaire T-177/01,

Jégo-Quéré et Cie SA, établie à Lorient (France), représentée par Mes A. Creus Carreras, B. Uriarte Valiente et A. Agustinoy Guilayn, avocats,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. T. van Rijn et A. Bordes, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation des articles 3, sous d), et 5 du règlement (CE) n_ 1162/2001 de la Commission, du 14 juin 2001, instituant des mesures visant à reconstituer le stock de merlu dans les sous-zones CIEM III, IV, V, VI et VII et les divisions CIEM VIII a, b, d et e ainsi que les conditions associées pour le contrôle des activités des navires de pêche (JO L 159, p. 4),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

(première chambre élargie),

composé de MM. B. Vesterdorf, président, K. Lenaerts, J. Azizi, N. J. Forwood et H. Legal, juges,

greffier: Mme D. Christensen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 16 avril 2002,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

Cadre juridique et factuel

1 Le règlement (CEE) n_ 3760/92 du Conseil, du 20 décembre 1992, instituant un régime communautaire de la pêche et de l'aquaculture (JO L 389, p. 1), modifié, prévoit, en son article 15, la possibilité pour la Commission de prendre des mesures d'urgence lorsque la conservation des ressources halieutiques est menacée par des perturbations graves et imprévues.

2 Au mois de décembre 2000, la Commission et le Conseil, alertés par le Conseil international pour l'exploitation de la mer (CIEM), ont estimé urgent de mettre en place un plan de reconstitution du stock de merlu.

3 Le règlement (CE) n_ 1162/2001 de la Commission, du 14 juin 2001, instituant des mesures visant à reconstituer le stock de merlu dans les sous-zones CIEM III, IV, V, VI et VII et les divisions CIEM VIII a, b, d et e ainsi que les conditions associées pour le contrôle des activités des navires de pêche (JO L 159, p. 4, ci-après le «règlement»), adopté en conséquence, a pour finalité principale de réduire immédiatement les prises de merlu juvénile. Il s'applique aux navires de pêche opérant dans les zones qu'il définit et leur impose un...

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