M v Minister for Justice and Equality Ireland and the Attorney General.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2017:101
Date09 February 2017
Celex Number62014CJ0560
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-560/14
62014CJ0560

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

9 février 2017 ( *1 )

«Renvoi préjudiciel — Espace de liberté, de sécurité et de justice — Directive 2004/83/CE — Normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié — Demande de protection subsidiaire — Régularité de la procédure nationale d’examen d’une demande de protection subsidiaire présentée à la suite du rejet d’une demande d’octroi du statut de réfugié — Droit d’être entendu — Portée — Droit à un entretien oral — Droit d’appeler et de mener un contre-interrogatoire des témoins»

Dans l’affaire C‑560/14,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Supreme Court (Cour suprême, Irlande), par décision du 24 novembre 2014, parvenue à la Cour le 5 décembre 2014, dans la procédure

M

contre

Minister for Justice and Equality,

Ireland,

Attorney General,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen (rapporteur), président de chambre, MM. M. Vilaras, J. Malenovský, M. Safjan et D. Šváby, juges,

avocat général : M. P. Mengozzi,

greffier: Mme L. Hewlett, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 18 février 2016,

considérant les observations présentées :

pour M, par M. B. Burns et Mme S. Man, solicitors, ainsi que par MM. I. Whelan et P. O’Shea, BL,

pour l’Irlande, par Mme E. Creedon ainsi que par MM. J. Davis et J. Stanley, en qualité d’agents, assistés de Mme N. Butler, SC, et de Mme K. Mooney, BL,

pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek et J. Vláčil, en qualité d’agents,

pour le gouvernement français, par MM. D. Colas et F.‑X. Bréchot, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par M. M. Wilderspin et Mme M. Condou-Durande, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 3 mai 2016,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation du droit d’être entendu dans le cadre de la procédure d’octroi du statut conféré par la protection subsidiaire, prévu par la directive 2004/83/CE du Conseil, du 29 avril 2004, concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou les personnes qui, pour d’autres raisons, ont besoin d’une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts (JO 2004, L 304, p. 12).

2

Cette demande a été présentée dans une procédure opposant M, ressortissant rwandais, au Minister for Justice and Equality (ministre de la Justice et de l’Égalité, Irlande) (ci-après le « ministre »), à l’Irlande et à l’Attorney General, au sujet de la régularité de la procédure d’examen de la demande de protection subsidiaire introduite par M auprès des autorités irlandaises.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 2004/83

3

L’article 2 de la directive 2004/83, intitulé « Définitions », énonçait :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

e)

“personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire”, tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 15, l’article 17, paragraphes 1 et 2, n’étant pas applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays ;

[...] »

4

L’article 4 de ladite directive, intitulé « Évaluation des faits et circonstances », était libellé comme suit :

« 1. Les États membres peuvent considérer qu’il appartient au demandeur de présenter, aussi rapidement que possible, tous les éléments nécessaires pour étayer sa demande de protection internationale. Il appartient à l’État membre d’évaluer, en coopération avec le demandeur, les éléments pertinents de la demande.

2. Les éléments visés au paragraphe 1 correspondent aux informations du demandeur et à tous les documents dont le demandeur dispose concernant son âge, son passé, y compris celui des parents à prendre en compte, son identité, sa ou ses nationalité(s), le ou les pays ainsi que le ou les lieux où il a résidé auparavant, ses demandes d’asile antérieures, son itinéraire, ses pièces d’identité et ses titres de voyage, ainsi que les raisons justifiant la demande de protection internationale.

3. Il convient de procéder à l’évaluation individuelle d’une demande de protection internationale en tenant compte des éléments suivants :

a)

tous les faits pertinents concernant le pays d’origine au moment de statuer sur la demande, y compris les lois et règlements du pays d’origine et la manière dont ils sont appliqués ;

b)

les informations et documents pertinents présentés par le demandeur, y compris les informations permettant de déterminer si le demandeur a fait ou pourrait faire l’objet de persécution ou d’atteintes graves ;

c)

le statut individuel et la situation personnelle du demandeur, y compris des facteurs comme son passé, son sexe et son âge, pour déterminer si, compte tenu de la situation personnelle du demandeur, les actes auxquels le demandeur a été ou risque d’être exposé pourraient être considérés comme une persécution ou une atteinte grave ;

d)

le fait que, depuis qu’il a quitté son pays d’origine, le demandeur a ou non exercé des activités dont le seul but ou le but principal était de créer les conditions nécessaires pour présenter une demande de protection internationale, pour déterminer si ces activités l’exposeraient à une persécution ou à une atteinte grave s’il retournait dans ce pays ;

e)

le fait qu’il est raisonnable de penser que le demandeur pourrait se prévaloir de la protection d’un autre pays dont il pourrait revendiquer la citoyenneté.

4. Le fait qu’un demandeur a déjà été persécuté ou a déjà subi des atteintes graves ou a déjà fait l’objet de menaces directes d’une telle persécution ou de telles atteintes est un indice sérieux de la crainte fondée du demandeur d’être persécuté ou du risque réel de subir des atteintes graves, sauf s’il existe de bonnes raisons de penser que cette persécution ou ces atteintes graves ne se reproduiront pas.

5. Lorsque les États membres appliquent le principe selon lequel il appartient au demandeur d’étayer sa demande, et lorsque certains aspects des déclarations du demandeur ne sont pas étayés par des preuves documentaires ou autres, ces aspects ne nécessitent pas confirmation lorsque les conditions suivantes sont remplies :

a)

le demandeur s’est réellement efforcé d’étayer sa demande ;

b)

tous les éléments pertinents à la disposition du demandeur ont été présentés et une explication satisfaisante a été fournie quant à l’absence d’autres éléments probants ;

c)

les déclarations du demandeur sont jugées cohérentes et plausibles et elles ne sont pas contredites par les informations générales et particulières connues et pertinentes pour sa demande ;

d)

le demandeur a présenté sa demande de protection internationale dès que possible, à moins qu’il puisse avancer de bonnes raisons pour ne pas l’avoir fait, et

e)

la crédibilité générale du demandeur a pu être établie. »

5

L’article 15 de cette même directive, intitulé « Atteintes graves », disposait :

« Les atteintes graves sont :

a)

la peine de mort ou l’exécution, ou

b)

la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine, ou

c)

des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international. »

La directive 2005/85/CE

6

Sous l’intitulé « Champ d’application », l’article 3 de la directive 2005/85/CE du Conseil, du 1er décembre 2005, relative à des normes minimales concernant la procédure d’octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres (JO 2005, L 326, p. 13), énonçait :

« 1. La présente directive s’applique à toutes les demandes d’asile introduites sur le territoire des États membres, y compris à la frontière ou dans une zone de transit, ainsi qu’au retrait du statut de réfugié.

[...]

3. Lorsque les États membres utilisent ou instaurent une procédure dans le cadre de laquelle les demandes d’asile sont examinées en tant que demandes fondées sur la convention de Genève, et en tant que demandes des autres types de protection internationale accordée dans les circonstances précisées à l’article 15 de la directive 2004/83 [...], ils appliquent la présente directive pendant toute leur procédure.

[...] »

Le droit irlandais

7

Le droit irlandais distingue deux types de demandes aux fins de l’obtention d’une protection internationale, à savoir :

la demande d’asile, et

la demande de protection subsidiaire.

8

Chacune de ces deux demandes fait l’objet d’une procédure spécifique, la procédure relative à une demande de protection subsidiaire, qui n’est ouverte qu’en cas de rejet de la demande d’asile, se déroulant à la suite de la procédure ayant porté...

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