Alexandre Achughbabian v Préfet du Val-de-Marne.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2011:807
Date06 December 2011
Celex Number62011CJ0329
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-329/11

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

6 décembre 2011 (*)

«Espace de liberté, de sécurité et de justice – Directive 2008/115/CE – Normes et procédures communes en matière de retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier – Réglementation nationale prévoyant, en cas de séjour irrégulier, une peine d’emprisonnement et une amende»

Dans l’affaire C‑329/11,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la cour d’appel de Paris (France), par décision du 29 juin 2011, parvenue à la Cour le 5 juillet 2011, dans la procédure

Alexandre Achughbabian

contre

Préfet du Val-de-Marne,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, MM. A. Tizzano, J. N. Cunha Rodrigues, K. Lenaerts, J.-C. Bonichot, J. Malenovský, U. Lõhmus et M. Safjan, présidents de chambre, MM. A. Borg Barthet, M. Ilešič (rapporteur), A. Arabadjiev, Mme C. Toader et M. J.-J. Kasel, juges

avocat général: M. J. Mazák,

greffier: Mme R. Şereş, administrateur,

vu l’ordonnance du président de la Cour du 30 septembre 2011 décidant de soumettre le renvoi préjudiciel à une procédure accélérée conformément aux articles 23 bis du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et 104 bis, premier alinéa, du règlement de procédure de la Cour,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 25 octobre 2011,

considérant les observations présentées:

– pour M. Achughbabian, par Mes C. Papazian et P. Spinosi, avocats,

– pour le gouvernement français, par Mme E. Belliard, M. G. de Bergues et Mme B. Beaupère-Manokha, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement danois, par M. C. Vang, en qualité d’agent,

– pour le gouvernement allemand, par MM. T. Henze et N. Graf Vitzthum, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement estonien, par Mme M. Linntam, en qualité d’agent,

– pour la Commission européenne, par Mme M. Condou-Durande, en qualité d’agent,

l’avocat général entendu,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (JO L 348, p. 98).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Achughbabian au préfet du Val-de-Marne au sujet du séjour irrégulier de M. Achughbabian sur le territoire français.

Le cadre juridique

La directive 2008/115

3 Les quatrième, cinquième et dix-septième considérants de la directive 2008/115 énoncent:

«(4) Il est nécessaire de fixer des règles claires, transparentes et équitables afin de définir une politique de retour efficace, constituant un élément indispensable d’une politique migratoire bien gérée.

(5) La présente directive devrait arrêter un ensemble horizontal de règles, applicables à tous les ressortissants de pays tiers qui ne remplissent pas ou ne remplissent plus les conditions d’entrée, de séjour ou de résidence dans un État membre.

[...]

(17) [...] Sans préjudice de l’arrestation initiale opérée par les autorités chargées de l’application de la loi, régie par la législation nationale, la rétention devrait s’effectuer en règle générale dans des centres de rétention spécialisés.»

4 L’article 1er de la directive 2008/115, intitulé «Objet», prévoit:

«La présente directive fixe les normes et procédures communes à appliquer dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, conformément aux droits fondamentaux en tant que principes généraux du droit communautaire ainsi qu’au droit international, y compris aux obligations en matière de protection des réfugiés et de droits de l’homme.»

5 L’article 2 de cette directive, intitulé «Champ d’application», dispose:

«1. La présente directive s’applique aux ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d’un État membre.

2. Les États membres peuvent décider de ne pas appliquer la présente directive aux ressortissants de pays tiers:

a) faisant l’objet d’une décision de refus d’entrée [...], ou arrêtés ou interceptés par les autorités compétentes à l’occasion du franchissement irrégulier par voie terrestre, maritime ou aérienne de la frontière extérieure d’un État membre [...];

b) faisant l’objet d’une sanction pénale prévoyant ou ayant pour conséquence leur retour, conformément au droit national, ou faisant l’objet de procédures d’extradition.

[...]»

6 L’article 3 de ladite directive, intitulé «Définitions», énonce:

«Aux fins de la présente directive, on entend par:

[...]

2) ‘séjour irrégulier’: la présence sur le territoire d’un État membre d’un ressortissant d’un pays tiers qui ne remplit pas, ou ne remplit plus, les conditions [...] d’entrée, de séjour ou de résidence dans cet État membre;

3) ‘retour’: le fait, pour le ressortissant d’un pays tiers, de rentrer – que ce soit par obtempération volontaire à une obligation de retour ou en y étant forcé – dans:

– son pays d’origine, ou

– un pays de transit conformément à des accords ou autres arrangements de réadmission communautaires ou bilatéraux, ou

– un autre pays tiers dans lequel le ressortissant concerné d’un pays tiers décide de retourner volontairement et sur le territoire duquel il sera admis;

4) ‘décision de retour’: une décision ou un acte de nature administrative ou judiciaire déclarant illégal le séjour d’un ressortissant d’un pays tiers et imposant ou énonçant une obligation de retour;

5) ‘éloignement’: l’exécution de l’obligation de retour, à savoir le transfert physique hors de l’État membre;

[...]»

7 Les articles 6 à 9 de la directive 2008/115 énoncent:

«Article 6

Décision de retour

1. Les États membres prennent une décision de retour à l’encontre de tout ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 à 5.

2. Les ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d’un État membre et titulaires d’un titre de séjour valable ou d’une autre autorisation conférant un droit de séjour délivrés par un autre État membre sont tenus de se rendre immédiatement sur le territoire de cet autre État membre. [...]

3. Les États membres peuvent s’abstenir de prendre une décision de retour à l’encontre d’un ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire si le ressortissant concerné d’un pays tiers est repris par un autre État membre [...]

4. À tout moment, les États membres peuvent décider d’accorder un titre de séjour autonome ou une autre autorisation conférant un droit de séjour pour des motifs charitables, humanitaires ou autres à un ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire. Dans ce cas, aucune décision de retour n’est prise. [...]

5. Si un ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d’un État membre fait l’objet d’une procédure en cours portant sur le renouvellement de son titre de séjour ou d’une autre autorisation lui conférant un droit de séjour, cet État membre examine s’il y a lieu de s’abstenir de prendre une décision de retour jusqu’à l’achèvement de la procédure en cours [...]

[...]

Article 7

Départ volontaire

1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. [...]

[...]

2. Si nécessaire, les États membres prolongent le délai de départ volontaire d’une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée du séjour, l’existence d’enfants scolarisés et d’autres liens familiaux et sociaux.

3. Certaines obligations visant à éviter le risque de fuite, comme les obligations de se présenter régulièrement aux autorités, de déposer une garantie financière adéquate, de remettre des documents ou de demeurer en un lieu déterminé, peuvent être imposées pendant le délai de départ volontaire.

4. S’il existe un risque de fuite, ou si une demande de séjour régulier a été rejetée comme étant manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l’ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, les États membres peuvent s’abstenir d’accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours.

Article 8

Éloignement

1. Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour exécuter la décision de retour si aucun délai n’a été accordé pour un départ volontaire conformément à l’article 7, paragraphe 4, ou si l’obligation de retour n’a pas été respectée dans le délai accordé pour le départ volontaire conformément à l’article 7.

[...]

4. Lorsque les États membres utilisent – en dernier ressort – des mesures coercitives pour procéder à l’éloignement d’un ressortissant d’un pays tiers qui s’oppose à son éloignement, ces mesures sont proportionnées et ne comportent pas d’usage de la force allant au-delà du raisonnable. Ces mesures sont mises en œuvre comme il est prévu par la législation nationale, conformément aux droits fondamentaux et dans le respect de la dignité et de l’intégrité physique du ressortissant concerné d’un pays tiers.

[...]

Article 9

Report de l’éloignement

1. Les États membres reportent l’éloignement:

a) dans le cas où il se ferait en violation du principe de non-refoulement, ou

b) tant que dure l’effet suspensif accordé [à l’issue d’un recours introduit contre une décision liée au retour].

2. Les États membres...

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