Messer France SAS v Premier ministre and Others.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:587
Date25 July 2018
Celex Number62017CJ0103
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-103/17
62017CJ0103

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

25 juillet 2018 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Harmonisation des législations fiscales – Directive 92/12/CEEArticle 3, paragraphe 2 – Directive 2003/96/CE – Articles 3 et 18 – Taxation des produits énergétiques et de l’électricité – Droits d’accise – Existence d’une autre imposition indirecte – Conditions – Réglementation nationale prévoyant une contribution au service public de l’électricité – Notion de “finalités spécifiques” – Respect des taux minima de taxation »

Dans l’affaire C‑103/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Conseil d’État (France), par décision du 22 février 2017, parvenue à la Cour le 27 février 2017, dans la procédure

Messer France SAS, anciennement Praxair,

contre

Premier ministre,

Commission de régulation de l’énergie,

Ministre de l’Économie et des Finances,

Ministre de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer,

LA COUR (première chambre),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta, président de chambre, MM. C. G. Fernlund, A. Arabadjiev, S. Rodin et E. Regan (rapporteur), juges,

avocat général : M. M. Campos Sánchez-Bordona,

greffier : M R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 13 décembre 2017,

considérant les observations présentées :

pour Messer France SAS, par Mes S. Espasa-Mattei, C. Smits et B. Boutemy, avocats,

pour le gouvernement français, par M. D. Colas ainsi que par Mmes E. de Moustier, A. Alidière et S. Ghiandoni, en qualité d’agents,

pour le gouvernement belge, par Mme M. Jacobs et M. P. Cottin, en qualité d’agents, assistés de Mes J. Bourtembourg, V. Feyens et L. Ernoux-Neufcoeur, avocats,

pour le gouvernement espagnol, par Mme V. Ester Casas, en qualité d’agent,

pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. P. Gentili, avvocato dello Stato,

pour la Commission européenne, par Mmes C. Perrin, D. Recchia et F. Tomat, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 7 mars 2018,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 3, paragraphe 2, de la directive 92/12/CEE du Conseil, du 25 février 1992, relative au régime général, à la détention, à la circulation et aux contrôles des produits soumis à accise (JO 1992, L 76, p. 1), ainsi que des articles 3 et 18 de la directive 2003/96/CE du Conseil, du 27 octobre 2003, restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l’électricité (JO 2003, L 283, p. 51).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre du litige opposant Messer France SAS, anciennement Praxair, au Premier ministre, à la Commission de régulation de l’énergie, au ministre de l’Économie et des Finances et au ministre de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer (France) au sujet de la restitution de la contribution au service public de l’électricité (ci-après la « CSPE ») que cette société a acquittée au titre des années 2005 à 2009.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 92/12

3

Le troisième considérant de la directive 92/12 énonçait :

« [C]onsidérant que la notion de produits soumis à accise doit être définie ; que seules les marchandises qui sont traitées comme tels dans tous les États membres peuvent faire l’objet de dispositions communautaires ; que ces produits peuvent faire l’objet d’autres impositions indirectes poursuivant des finalités spécifiques ; que le maintien ou l’introduction d’autres impositions indirectes ne doivent pas donner lieu à des formalités liées au passage d’une frontière ».

4

L’article 3 de cette directive disposait :

« 1. La présente directive est applicable, au niveau communautaire, aux produits suivants tels que définis dans les directives y afférentes :

les huiles minérales,

l’alcool et les boissons alcooliques,

les tabacs manufacturés.

2. Les produits mentionnés au paragraphe 1 peuvent faire l’objet d’autres impositions indirectes poursuivant des finalités spécifiques, à condition que ces impositions respectent les règles de taxation applicables pour les besoins des accises ou de la taxe sur la valeur ajoutée [(TVA)] pour la détermination de la base d’imposition, le calcul, l’exigibilité et le contrôle de l’impôt.

[...] »

5

Aux termes de l’article 6 de ladite directive :

« 1. L’accise devient exigible lors de la mise à la consommation ou lors de la constatation des manquants qui devront être soumis à accise conformément à l’article 14, paragraphe 3.

[...] »

6

La directive 92/12 a été abrogée, avec effet au 1er avril 2010, et remplacée par la directive 2008/118/CE du Conseil, du 16 décembre 2008, relative au régime général d’accise et abrogeant la directive 92/12 (JO 2009, L 9, p. 12).

La directive 2003/96

7

L’article 1er de la directive 2003/96 prévoit :

« Les États membres taxent les produits énergétiques et l’électricité conformément à la présente directive. »

8

L’article 3 de cette directive dispose :

« Dans la directive [92/12], les termes “huiles minérales” et “droits d’accises”, dans la mesure où ils se rapportent à des huiles minérales, couvrent tous les produits énergétiques, l’électricité et tous les impôts indirects nationaux visés respectivement à l’article 2 et à l’article 4, paragraphe 2, de la présente directive. »

9

L’article 4 de ladite directive énonce :

« 1. Les niveaux de taxation que les États membres appliquent aux produits énergétiques et à l’électricité visés à l’article 2 ne peuvent être inférieurs aux niveaux minima prévus par la présente directive.

2. Aux fins de la présente directive, on entend par “niveau de taxation” le montant total d’impôts indirects (à l’exception de la TVA) perçu, calculé directement ou indirectement sur la quantité de produits énergétiques et d’électricité au moment de la mise à la consommation. »

10

Aux termes de l’article 18, paragraphe 10, de la même directive :

« La République française peut appliquer des exonérations totales ou partielles ou des réductions pour les produits énergétiques et l’électricité utilisés par l’État, les autorités régionales et locales ou les autres organismes de droit public pour les activités ou opérations qu’ils accomplissent en tant qu’autorités publiques jusqu’au 1er janvier 2009.

La République française peut appliquer une période transitoire allant jusqu’au 1er janvier 2009 pour adapter son système actuel de taxation de l’électricité aux dispositions prévues dans la présente directive. Jusqu’à cette date, la moyenne du niveau global de la taxation locale actuelle de l’électricité est prise en compte pour évaluer le respect des taux minima fixés dans la présente directive. »

11

L’article 28, paragraphes 1 et 2, de la directive 2003/96 prévoit :

« 1. Les États membres adoptent et publient les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le 31 décembre 2003. Ils en informent immédiatement la Commission.

2. Ils appliquent les présentes dispositions à partir du 1er janvier 2004, à l’exception des dispositions de l’article 16 et de l’article 18, paragraphe 1, que les États membres peuvent appliquer à partir du 1er janvier 2003. »

Le droit national

12

L’article 1er de la loi no 2000-108, du 10 février 2000, relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité (JORF du 11 février 2000, p. 2143), prévoyait :

« Le service public de l’électricité a pour objet de garantir l’approvisionnement en électricité sur l’ensemble du territoire national, dans le respect de l’intérêt général.

Dans le cadre de la politique énergétique, il contribue à l’indépendance et à la sécurité d’approvisionnement, à la qualité de l’air et à la lutte contre l’effet de serre, à la gestion optimale et au développement des ressources nationales, à la maîtrise de la demande d’énergie, à la compétitivité de l’activité économique et à la maîtrise des choix technologiques d’avenir, comme à l’utilisation rationnelle de l’énergie.

Il concourt à la cohésion sociale, en assurant le droit à l’électricité pour tous, à la lutte contre les exclusions, au développement équilibré du territoire, dans le respect de l’environnement, à la recherche et au progrès technologique, ainsi qu’à la défense et à la sécurité publique.

[...] »

13

L’article 37 de la loi no 2003-8, du 3 janvier 2003, relative aux marchés du gaz et de l’électricité et au service public de l’énergie (JORF du 4 janvier 2003, p. 265), qui a modifié la loi no 2000-108, disposait :

« I. – Le I de l’article 5 de la loi no 2000-108 [...] est ainsi rédigé :

“I. –

Les charges imputables aux missions de service public assignées aux opérateurs électriques sont intégralement compensées. Elles comprennent :

a)

En matière de production d’électricité :

Les surcoûts qui résultent, le cas échéant, de la mise en œuvre des dispositions des articles 8 et 10 par rapport aux coûts d’investissement et d’exploitation évités à Électricité de France ou, le cas échéant, à ceux évités aux distributeurs non nationalisés mentionnés à l’article 23 de la loi no 46-628 du 8 avril 1946 [sur la nationalisation de l’électricité et du gaz] qui seraient concernés. Les mêmes valeurs de coûts évités servent de référence pour déterminer les surcoûts compensés lorsque les installations concernées sont exploitées par...

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