Roquette Frères SA v Directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, and Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2002:603
Docket NumberC-94/00
Celex Number62000CJ0094
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date22 October 2002
EUR-Lex - 62000J0094 - FR 62000J0094

Arrêt de la Cour du 22 octobre 2002. - Roquette Frères SA contre Directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, en présence de la Commission des Communautés européennes. - Demande de décision préjudicielle: Cour de cassation - France. - Droit de la concurrence - Article 14, paragraphes 3 et 6, du règlement nº 17 - Décision de la Commission ordonnant une vérification - Assistance des autorités nationales - Interprétation de l'arrêt du 21 septembre 1989, Hoechst/Commission - Principes généraux - Protection contre les interventions arbitraires ou disproportionnées de la puissance publique dans la sphère d'activité privée d'une personne morale - Portée du contrôle incombant à la juridiction nationale compétente pour autoriser des mesures de contrainte à l'encontre des entreprises - Devoir d'information de la Commission - Coopération loyale. - Affaire C-94/00.

Recueil de jurisprudence 2002 page I-09011


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

1. Concurrence Procédure administrative Pouvoirs de vérification de la Commission Assistance des autorités nationales Définition des modalités procédurales par le droit national Contrôle des instances nationales Portée Respect du principe général prescrivant une protection contre les interventions arbitraires ou disproportionnées de la puissance publique

(Règlement du Conseil n° 17, art. 14, § 6)

2. Concurrence Procédure administrative Pouvoirs de vérification de la Commission Assistance des autorités nationales Obligation de la Commission Indication de l'objet et du but de la vérification Portée

(Traité CE, art. 5 (devenu art. 10 CE); règlement du Conseil n° 17, art. 14, § 6)

Sommaire

1. En vertu du principe général du droit communautaire prescrivant une protection contre les interventions de la puissance publique dans la sphère d'activité privée d'une personne physique ou morale qui seraient arbitraires ou disproportionnées, il incombe à une juridiction nationale, compétente en vertu du droit interne pour autoriser des visites et des saisies dans les locaux d'entreprises suspectées d'infractions aux règles de concurrence, d'examiner si les mesures de contrainte sollicitées à la suite d'une demande d'assistance formulée par la Commission sur le fondement de l'article 14, paragraphe 6, du règlement nº 17 ne sont pas arbitraires ou disproportionnées par rapport à l'objet de la vérification ordonnée. Sans préjudice de l'application des dispositions de droit interne gouvernant le déroulement des mesures de contrainte, le droit communautaire s'oppose à ce que le contrôle exercé par cette juridiction nationale en ce qui concerne le bien-fondé desdites mesures aille au-delà de ce qui est ainsi requis par le principe général susmentionné.

( voir point 99, disp. 1 )

2. Le droit communautaire fait obligation à la Commission de veiller à ce que la juridiction nationale compétente en vertu du droit interne pour autoriser des visites et des saisies dans les locaux d'entreprises suspectées d'infractions aux règles de concurrence dispose de tous les éléments nécessaires pour lui permettre d'exercer le contrôle qui lui incombe. À cet égard, les informations fournies par la Commission doivent, en principe, comporter:

une description des caractéristiques essentielles de l'infraction suspectée, à savoir, au minimum, l'indication du marché présumé en cause et de la nature des restrictions de concurrence suspectées;

des explications quant à la manière dont l'entreprise visée par les mesures de contrainte est présumée être impliquée dans l'infraction susdite;

des explications faisant ressortir de manière circonstanciée que la Commission dispose d'éléments et d'indices matériels sérieux l'amenant à suspecter une telle infraction à charge de l'entreprise concernée;

l'indication aussi précise que possible de ce qui est recherché et des éléments sur lesquels doit porter la vérification, ainsi que l'indication des pouvoirs conférés aux enquêteurs communautaires, et,

dans l'hypothèse où l'assistance des autorités nationales est sollicitée par la Commission à titre préventif, en vue de surmonter l'opposition éventuelle de l'entreprise concernée, des explications permettant à ladite juridiction nationale de s'assurer que, à défaut d'autoriser préventivement les mesures de contrainte, l'établissement des faits infractionnels serait voué à l'échec ou considérablement entravé.

En revanche, la juridiction nationale ne saurait exiger la transmission des éléments et des indices figurant au dossier de la Commission et sur lesquels reposent les soupçons de cette dernière.

Lorsque ladite juridiction considère que les informations communiquées par la Commission ne satisfont pas aux exigences mentionnées ci-dessus, elle ne saurait, sans méconnaître les articles 14, paragraphe 6, du règlement n° 17 et 5 du traité (devenu article 10 CE), se contenter de rejeter la demande dont elle est saisie. En pareil cas, cette juridiction est tenue d'informer la Commission ou l'autorité nationale l'ayant saisie à la demande de cette dernière, dans les délais les plus brefs possible, des difficultés rencontrées, en sollicitant, le cas échéant, les éclaircissements qui lui permettraient d'exercer le contrôle dont elle a la charge. Ce n'est qu'une fois mise en possession de tels éclaircissements éventuels, ou en l'absence de suites utiles réservées par la Commission à sa demande, que la juridiction nationale est fondée à refuser l'octroi de l'autorisation sollicitée, s'il ne peut, au vu des informations dont elle dispose, être conclu à l'absence de caractère arbitraire et au caractère proportionné par rapport à l'objet de la vérification des mesures de contrainte envisagées.

Les informations à fournir par la Commission à ladite juridiction nationale peuvent ressortir aussi bien de la décision ordonnant la vérification elle-même que de la demande adressée aux autorités nationales sur le fondement de l'article 14, paragraphe 6, du règlement n° 17, ou encore d'une réponse, même formulée de manière verbale, à une question qui aurait été posée par cette juridiction.

( voir point 99, disp. 2-5 )

Parties

Dans l'affaire C-94/00,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 234 CE, par la Cour de cassation (France) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Roquette Frères SA

et

Directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes,

en présence de:

Commission des Communautés européennes,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de l'article 14 du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (JO 1962, 13, p. 204), et de l'arrêt du 21 septembre 1989, Hoechst/Commission (46/87 et 227/88, Rec. p. 2859),

LA COUR,

composée de M. G. C. Rodríguez Iglesias, président, MM. J.-P. Puissochet, M. Wathelet et R. Schintgen, présidents de chambre, MM. C. Gulmann, D. A. O. Edward, A. La Pergola (rapporteur), P. Jann et V. Skouris, Mmes F. Macken et N. Colneric, et MM. S. von Bahr et J. N. Cunha Rodrigues, juges,

avocat général: M. J. Mischo,

greffier: Mme L. Hewlett, administrateur,

considérant les observations écrites présentées:

pour Roquette Frères SA, par Mes O. Prost et A. Choffel, avocats,

pour la Commission des Communautés européennes, par M. G. Marenco et Mme F. Siredey-Garnier, en qualité d'agents,

pour le gouvernement français, par Mme K. Rispal-Bellanger et M. F. Million, en qualité d'agents,

pour le gouvernement allemand, par M. W.-D. Plessing et Mme B. Muttelsee-Schön, en qualité d'agents,

pour le gouvernement hellénique, par Mme A. Samoni-Rantou et M. G. Karipsiadis, en qualité d'agents,

pour le gouvernement italien, par M. U. Leanza, en qualité d'agent, assisté de Mme F. Quadri, avvocato dello Stato,

pour le gouvernement du Royaume-Uni, par M. J. E. Collins, en qualité d'agent, assisté de M. J. Turner, barrister,

pour le gouvernement norvégien, par M. H. Seland, en qualité d'agent,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de Roquette Frères SA, représentée par Mes O. Prost et A. Choffel, de la Commission, représentée par M. G. Marenco et Mme F. Siredey-Garnier, du gouvernement français, représenté par M. R. Abraham, en qualité d'agent, du gouvernement hellénique, représenté par Mme A. Samoni-Rantou et M. G. Karipsiadis, du gouvernement italien, représenté par M. M. Greco, en qualité d'agent, et du gouvernement du Royaume-Uni, représenté par MM. J. E. Collins et J. Turner, à l'audience du 10 juillet 2001,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 20 septembre 2001,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1 Par arrêt du 7 mars 2000, parvenu à la Cour le 13 mars suivant, la Cour de cassation a posé, en vertu de l'article 234 CE, deux questions préjudicielles relatives à l'interprétation de l'article 14 du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (JO 1962, 13, p. 204), et de l'arrêt du 21 septembre 1989, Hoechst/Commission (46/87 et 227/88, Rec. p. 2859).

2 Ces questions ont été soulevées à l'occasion de l'examen d'un pourvoi introduit par Roquette Frères SA (ci-après «Roquette Frères») contre une ordonnance du président du tribunal de grande instance de Lille (France) autorisant des opérations de visite et de saisie dans les locaux de cette société en vue de recueillir des preuves de sa participation éventuelle à des accords et/ou à des pratiques concertées susceptibles de constituer une infraction à l'article 85 du traité CE (devenu article 81 CE).

Le cadre juridique

Le règlement n° 17

3 L'article 14 du règlement n° 17 confère à la Commission des pouvoirs de vérification en vue d'enquêter sur d'éventuelles infractions aux règles de concurrence applicables aux entreprises...

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