Mory SA and Others v European Commission.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2015:609
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-33/14
Date17 September 2015
Procedure TypeRecurso de casación - fundado
Celex Number62014CJ0033
62014CJ0033

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

17 septembre 2015 ( *1 )

«Pourvoi — Aides d’État — Recours en annulation — Article 263 TFUE — Recevabilité — Aides illégales et incompatibles — Obligation de récupération — Décision de la Commission européenne de ne pas étendre l’obligation de récupération au repreneur du bénéficiaire de l’aide — Intérêt à agir — Recours en indemnité et en récupération des aides devant les juridictions nationales — Qualité pour agir — Requérant non individuellement concerné»

Dans l’affaire C‑33/14 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 22 janvier 2014,

Mory SA, en liquidation, établie à Pantin (France),

Mory Team, en liquidation, établie à Pantin,

Superga Invest, anciennement Compagnie française superga d’investissement dans le service (CFSIS), établie à Miraumont (France),

représentées par Mes B. Vatier et F. Loubières, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

parties requérantes,

l’autre partie à la procédure étant:

Commission européenne, représentée par MM. T. Maxian Rusche et B. Stromsky, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. M. Ilešič, président de chambre, M. A. Ó Caoimh (rapporteur), Mme C. Toader, MM. E. Jarašiūnas et C. G. Fernlund, juges,

avocat général: M. P. Mengozzi,

greffier: Mme L. Carrasco Marco, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 27 avril 2015,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 18 juin 2015,

rend le présent

Arrêt

1

Par leur pourvoi, Mory SA, Mory Team et Superga Invest demandent l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne Mory e.a./Commission (T‑545/12, EU:T:2013:607, ci‑après l’«ordonnance attaquée»), par laquelle celui‑ci a rejeté leur recours visant à l’annulation de la décision C (2012) 2401 final de la Commission, du 4 avril 2012, concernant la reprise des actifs du groupe Sernam dans le cadre de son redressement judiciaire (ci‑après la «décision litigieuse»).

Les antécédents du litige

2

Les requérantes se présentent comme ayant été des concurrentes directes de la Financière Sernam ainsi que de ses filiales, Sernam Services et Aster (ci‑après, ensemble, le «groupe Sernam»). Mory SA et Mory Team (ci‑après, ensemble, les «sociétés Mory») étaient actives dans le secteur de la messagerie traditionnelle et de la messagerie express avant leur mise en liquidation judiciaire. Superga Invest, anciennement Compagnie française superga d’investissement dans le service (CFSIS), était l’actionnaire principal des sociétés Mory.

3

Par la décision du 23 mai 2001, concernant l’aide d’État NN 122/2000 (ex NJ 140/2000) (JO C 199, p. 15), la Commission a approuvé une aide à la restructuration du groupe Sernam (ci‑après la «décision Sernam 1»).

4

Par la décision 2006/367/CE, du 20 octobre 2004, concernant l’aide d’État partiellement mise à exécution par la France en faveur de l’entreprise Sernam (JO 2006, L 140, p. 1, ci‑après la «décision Sernam 2»), la Commission a confirmé que l’aide approuvée par la décision Sernam 1 était compatible avec le marché intérieur sous certaines conditions. Elle a également relevé la présence d’une aide supplémentaire incompatible avec le marché intérieur et devant, par conséquent, être récupérée par la République française.

5

Par lettre du 16 juillet 2008, la Commission a informé la République française de sa décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE à l’égard de l’application par cette dernière de la décision Sernam 2. Cette décision a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne du 9 janvier 2009 (JO C 4, p. 5).

6

Le 27 juin 2011, les sociétés Mory ont été placées en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Bobigny (France).

7

Le 31 janvier 2012, la Financière Sernam et Sernam Services ont été placées en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Nanterre (France).

8

Le 3 février 2012, Aster a été mise en liquidation judiciaire avec poursuite d’activité par le tribunal de commerce de Pontoise (France).

9

Le 9 mars 2012, la Commission a adopté la décision 2012/398/UE, concernant l’aide d’État no SA.12522 (C 37/08) – France – Application de la décision «Sernam 2» (JO L 195, p. 19, ci‑après la «décision Sernam 3»). L’article 1er du dispositif de cette décision indique que le groupe Sernam a bénéficié d’aides d’État illégales et incompatibles avec le marché intérieur (ci‑après les «aides en cause»). Aux termes de l’article 2 de ce dispositif, la République française est tenue de récupérer les aides en cause auprès de ce groupe.

10

Le même jour, deux offres de reprise ont été transmises à l’administrateur judiciaire du groupe Sernam, la première émanant de Geodis Calberson (ci‑après «Calberson»), la filiale du groupe Geodis (ci‑après «Geodis»), active dans le secteur de la messagerie, et la seconde de BMV. L’offre de reprise de Calberson était soumise à la condition selon laquelle «aucune obligation de quelque nature que ce soit et notamment aucune charge de restitution de tout ou partie des aides [en cause] versées [au groupe Sernam] ne puisse être transférée avec les actifs repris ou du fait de la reprise, ou être mise à la charge du repreneur». L’offre présentée par BMV n’était pas assortie d’une telle condition, mais était présentée comme étant indissociable de l’offre présentée par Calberson et devenait caduque si l’offre de cette dernière était refusée.

11

Le 23 mars 2012, la République française a demandé à la Commission de confirmer que l’obligation de remboursement des aides en cause ne serait pas étendue à Geodis et à BMV, en cas de reprise par celles‑ci d’une partie des actifs du groupe Sernam.

12

Par la décision litigieuse, la Commission a indiqué à la République française qu’il n’y avait pas lieu d’étendre à Geodis et à BMV l’obligation de remboursement imposée au groupe Sernam aux termes de l’article 2 de la décision Sernam 3, en raison de l’absence de continuité économique entre le groupe Sernam et ces deux repreneurs potentiels. La Commission a précisé, au point 54 de la décision litigieuse, que celle‑ci ne portait pas sur le caractère avisé ou non de l’investissement des repreneurs consistant dans la reprise de certains actifs du groupe Sernam et que, par conséquent, elle ne préjugeait pas de l’appréciation de cet investissement au regard de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

13

Le 10 avril 2012, Calberson a déposé une nouvelle offre de reprise auprès de l’administrateur judiciaire du groupe Sernam ne comportant pas la condition qui affectait son offre de reprise initiale.

14

Le 13 avril 2012, le tribunal de commerce de Nanterre a retenu les offres de reprise déposées par Calberson ainsi que par BMV et ordonné le transfert à leur profit de certains actifs de Sernam Services avec une entrée en jouissance le 7 mai 2012.

15

Le 10 juillet 2012, les sociétés Mory ont été mises en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Bobigny.

La procédure devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

16

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 17 décembre 2012, les requérantes ont introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse.

17

Par acte déposé au greffe du Tribunal le 25 mars 2013, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, au motif, d’une part, que les requérantes n’établissaient pas qu’elles avaient un intérêt à agir contre la décision litigieuse et, d’autre part, qu’elles n’étaient pas individuellement concernées par cette décision, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.

18

Aux termes de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a décidé que les requérantes n’avaient pas justifié de leur intérêt à agir contre la décision litigieuse et que, partant, leur recours devait être déclaré irrecevable pour ce seul motif, sans qu’il soit besoin d’examiner la fin de non‑recevoir opposée par la Commission tirée du fait, pour celles‑ci, de ne pas être individuellement concernées par la décision litigieuse. En particulier, le Tribunal a considéré que ni le recours introduit par les sociétés Mory, le 25 avril 2007, devant le tribunal administratif de Paris (France), visant à obtenir la récupération des aides en cause, ni le recours introduit par celles‑ci, le 7 mai 2013, devant le tribunal de commerce de Paris, visant à obtenir la condamnation solidaire, notamment, du groupe Sernam et de Geodis à réparer les préjudices que ces sociétés leur auraient causés, n’étaient susceptibles de leur conférer un tel intérêt.

Les conclusions des parties et la procédure devant la Cour

19

Par leur pourvoi, les requérantes demandent à la Cour:

d’annuler l’ordonnance attaquée;

de renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour y être examinée sur le fond, et

de réserver les dépens.

20

La Commission conclut au rejet du pourvoi et à la condamnation des requérantes aux dépens.

21

Par acte déposé au greffe de la Cour le 19 mai 2014, Calberson a demandé, sur le fondement de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions de la Commission.

22

Par ordonnance du président de la Cour du 27 février 2015, cette demande a été...

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