Elisabeth Schulte and Wolfgang Schulte v Deutsche Bausparkasse Badenia AG.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2005:637
Docket NumberC-350/03
Celex Number62003CJ0350
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date25 October 2005

Affaire C-350/03

Elisabeth Schulte et Wolfgang Schulte

contre

Deutsche Bausparkasse Badenia AG

(demande de décision préjudicielle, introduite par le Landgericht Bochum)

«Protection des consommateurs — Démarchage à domicile — Achat d'un bien immobilier — Opération d'investissement financée par un prêt hypothécaire — Droit de révocation — Conséquences d'une révocation»

Conclusions de l'avocat général M. P. Léger, présentées le 28 septembre 2004

Arrêt de la Cour (grande chambre) du 25 octobre 2005

Sommaire de l'arrêt

1. Rapprochement des législations — Protection des consommateurs — Article 95, paragraphe 3, CE — Disposition ne pouvant être invoquée comme fondement direct des obligations liant un État membre

(Art. 95, § 3, CE)

2. Rapprochement des législations — Protection des consommateurs dans le cas de contrats négociés en dehors des établissements commerciaux — Directive 85/577 — Champ d'application — Contrats de vente de biens immobiliers faisant partie d'un investissement financé par un crédit — Exclusion

(Directive du Conseil 85/577, art. 3, § 2, a))

3. Rapprochement des législations — Protection des consommateurs dans le cas de contrats négociés en dehors des établissements commerciaux — Directive 85/577 — Contrat de prêt servant à une acquisition immobilière — Révocation — Effets — Obligation de remboursement immédiat du prêt assorti d'intérêts — Admissibilité

(Directive du Conseil 85/577, art. 4, 5 et 7)

1. L'article 95, paragraphe 3, CE, qui prévoit que la Commission, dans ses propositions prévues au paragraphe 1 dudit article en matière de protection des consommateurs, prend pour base un niveau de protection élevé et que, dans le cadre de leurs compétences respectives, le Parlement européen et le Conseil s'efforcent également d'atteindre cet objectif, s'adresse aux différentes institutions ayant chacune leur rôle dans le processus législatif communautaire. Cette disposition ne saurait, dès lors, être invoquée comme fondement direct des obligations liant un État membre. Tout au plus, elle pourrait être utilisée en tant qu'élément d'interprétation d'un acte adopté sur la base dudit article 95 CE.

(cf. points 59, 61)

2. L'article 3, paragraphe 2, sous a), de la directive 85/577, concernant la protection des consommateurs dans le cas de contrats négociés en dehors des établissements commerciaux, doit être interprété comme excluant du champ d'application de cette directive les contrats de vente portant sur des biens immobiliers, même s'ils font simplement partie d'un placement financier dont le financement est assuré par un crédit et dont les négociations précontractuelles ont lieu, tant en ce qui concerne le contrat de vente immobilière que le contrat de prêt servant exclusivement au financement, dans le cadre d'une situation de démarchage à domicile.

(cf. point 81, disp. 1)

3. Bien que, au sens de l'article 7 de la directive 85/577, concernant la protection des consommateurs dans le cas de contrats négociés en dehors des établissements commerciaux, il incombe aux États membres de régler les effets juridiques de la révocation du contrat par le consommateur, cette compétence doit être exercée dans le respect du droit communautaire, et plus particulièrement des règles de la directive interprétées à la lumière de son objectif et de façon à ce que ses effets utiles soient assurés.

À cet égard, s'agissant d'un contrat de prêt servant à une acquisition immobilière, ladite directive ne s'oppose pas à ce que:

- des règles nationales prévoient comme seule conséquence de la révocation d'un contrat de prêt l'annulation de celui-ci, même lorsqu'il s'agit de placements financiers pour lesquels le prêt n'aurait pas été accordé en l'absence d'acquisition du bien immobilier;

- le consommateur ayant fait usage de son droit de révocation conformément à cette directive doive rembourser au prêteur le montant du prêt bien que, selon le dispositif élaboré pour le placement financier, le prêt serve exclusivement au financement de l'acquisition du bien immobilier et soit versé directement au vendeur de ce bien;

- il soit exigé que le montant du prêt soit remboursé immédiatement;

- une législation nationale prévoie l'obligation pour le consommateur, en cas de révocation d'un contrat de crédit foncier, non seulement de rembourser les montants perçus en vertu de ce contrat, mais encore de verser au prêteur les intérêts pratiqués sur le marché. Toutefois, dans une situation où, si la banque en cause avait respecté l'obligation d'informer le consommateur de son droit de révocation, celui-ci aurait pu éviter de s'exposer aux risques inhérents à des investissements, l'article 4 de la directive impose aux États membres de veiller à ce que leur législation protège les consommateurs qui n'ont pu éviter de s'exposer à de tels risques, par l'adoption de mesures de nature à leur éviter de supporter les conséquences de la réalisation de ces risques.

(cf. points 69, 81, 88-89, 93, 103, disp. 2-3)




ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

25 octobre 2005 (*)

«Protection des consommateurs – Démarchage à domicile – Achat d’un bien immobilier – Opération d’investissement financée par un prêt hypothécaire – Droit de révocation – Conséquences d’une révocation»

Dans l’affaire C-350/03,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Landgericht Bochum (Allemagne), par décision du 29 juillet 2003, parvenue à la Cour le 8 août 2003, dans la procédure

Elisabeth Schulte,

Wolfgang Schulte

contre

Deutsche Bausparkasse Badenia AG,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, MM. P. Jann et A. Rosas, présidents de chambre, MM. C. Gulmann (rapporteur), R. Schintgen, Mme N. Colneric, M. S. von Bahr, Mme R. Silva de Lapuerta et M. K. Lenaerts, juges,

avocat général: M. P. Léger,

greffier: Mme M.-F. Contet, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 15 juin 2004,

considérant les observations présentées:

– pour M. et Mme Schulte, par Mes M. Koch et M. Beckmann, Rechtsanwälte,

– pour la Deutsche Bausparkasse Badenia AG, par Mes M. Pap et N. Gross, Rechtsanwälte,

– pour le gouvernement allemand, par MM. W.-D. Plessing, A. Dittrich et P.‑C. Müller-Graff, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement français, par Mme R. Loosli-Surrans, en qualité d’agent,

– pour le gouvernement italien, par M. I. M. Braguglia, en qualité d’agent, assisté de M. A. Cingolo, avvocato dello Stato,

– pour la Commission des Communautés européennes, par MM. J. Sack et J.‑P. Keppenne, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 28 septembre 2004,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 95, paragraphe 3, CE ainsi que de la directive 85/577/CEE du Conseil, du 20 décembre 1985, concernant la protection des consommateurs dans le cas de contrats négociés en dehors des établissements commerciaux (JO L 372, p. 31, ci‑après la «directive»), et notamment ses articles 3, paragraphe 2, 4, 5 et 7.

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. et Mme Schulte à la Deutsche Bausparkasse Badenia AG (ci-après la «banque»), concernant les conséquences de la révocation, en vertu du droit national applicable en matière de démarchage à domicile, du contrat de crédit foncier souscrit auprès de la banque par ce couple.

Le cadre juridique

La réglementation communautaire

3 La directive vise à offrir aux consommateurs des États membres une protection minimale dans le domaine du démarchage à domicile, afin de les protéger contre le risque découlant des circonstances propres à la conclusion d’un contrat en dehors des établissements du commerçant. Les quatrième et cinquième considérants de la directive énoncent:

«[...] les contrats conclus en dehors des établissements commerciaux du commerçant se caractérisent par le fait que l’initiative des négociations émane normalement du commerçant et que le consommateur ne s’est, en aucune façon, préparé à ces négociations et se trouve pris au dépourvu; [...] souvent, il n’est pas à même de comparer la qualité et le prix de l’offre avec d’autres offres; […]

[...] il y a lieu d’accorder au consommateur un droit de résiliation pendant une durée de sept jours au moins, afin de lui donner la possibilité d’apprécier les obligations qui découlent du contrat».

4 L’article 1er, paragraphe 1, de la directive dispose:

«La présente directive s’applique aux contrats conclus entre un commerçant fournissant des biens ou des services et un consommateur:

[…]

– pendant une visite du commerçant:

i) chez le consommateur ou chez un autre consommateur;

[…]

lorsque la visite n’a pas lieu à la demande expresse du consommateur.»

5 L’article 3, paragraphe 2, sous a), de la directive prévoit:

«La présente directive ne s’applique pas:

a) aux contrats relatifs à la construction, à la vente et à la location des biens immobiliers ainsi qu’aux contrats portant sur d’autres droits relatifs à des biens immobiliers.

[…]»

6 L’article 4 de la directive dispose:

«Le commerçant est tenu d’informer par écrit le consommateur, dans le cas de transactions visées à l’article 1er, de son droit de résilier le contrat au cours des délais définis à l’article 5 ainsi que des nom et adresse d’une personne à l’égard de laquelle il peut exercer ce droit.

Cette information est datée et mentionne les éléments permettant d’identifier le contrat. Elle est donnée au consommateur:

a) dans le cas de l’article 1er paragraphe 1, au moment de la conclusion du contrat;

[…]

Les États membres veillent à ce que leur législation nationale prévoie des mesures appropriées visant à protéger le consommateur lorsque l’information visée au présent article n’est pas fournie.»

7 Aux termes de l’article 5 de la directive:

«1. Le consommateur a le droit de renoncer aux effets de son engagement en...

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