Drago Nemec v Republika Slovenija.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2016:954
Docket NumberC-256/15
Celex Number62015CJ0256
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date15 December 2016
62015CJ0256

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

15 décembre 2016 ( *1 )

«Renvoi préjudiciel — Directive 2000/35/CE — Lutte contre le retard de paiement — Compétence de la Cour — Transaction conclue avant l’adhésion de la République de Slovénie à l’Union européenne — Champ d’application — Notion de “transaction commerciale” — Notion d’“entreprise” — Montant maximal des intérêts de retard»

Dans l’affaire C‑256/15,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Vrhovno sodišče (Cour suprême, Slovénie), par décision du 19 mars 2015, parvenue à la Cour le 1er juin 2015, dans la procédure

Drago Nemec

contre

Republika Slovenija,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. J. L. da Cruz Vilaça, président de chambre, M. A. Tizzano (rapporteur), vice-président de la Cour, Mme M. Berger, MM. A. Borg Barthet et E. Levits, juges,

avocat général : M. M. Bobek,

greffier : M. M. Aleksejev, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 4 mai 2016,

considérant les observations présentées :

pour le gouvernement slovène, par Mmes N. Pintar Gosenca et A. Vran, en qualité d’agents,

pour le gouvernement letton, par Mme A. Bogdanova et M. I. Kalniņš, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mme M. Šimerdová et M. M. Žebre, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 28 juillet 2016,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 2000/35/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 juin 2000, concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales (JO 2000, L 200, p. 35).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Drago Nemec à la Republika Slovenija (République de Slovénie), au sujet d’une demande en réparation du préjudice prétendument subi par celui-ci du fait de l’incompatibilité alléguée de la réglementation nationale avec la directive 2000/35.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

L’acte d’adhésion de 2003

3

L’article 2 de l’acte relatif aux conditions d’adhésion à l’Union européenne de la République tchèque, de la République d’Estonie, de la République de Chypre, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la République de Hongrie, de la République de Malte, de la République de Pologne, de la République de Slovénie et de la République Slovaque, et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l’Union européenne (JO 2003, L 236, p. 33, ci-après l’« acte d’adhésion de 2003 »), dispose :

« Dès l’adhésion, les dispositions des traités originaires et les actes pris, avant l’adhésion, par les institutions et la Banque centrale européenne lient les nouveaux États membres et sont applicables dans ces États dans les conditions prévues par ces traités et par le présent acte. »

4

L’article 54 de cet acte prévoit :

« Les nouveaux États membres mettent en vigueur les mesures qui leur sont nécessaires pour se conformer, dès l’adhésion, aux dispositions des directives et des décisions au sens de l’article 249 du traité CE et de l’article 161 du traité CEEA, à moins qu’un autre délai ne soit prévu dans les annexes visées à l’article 24, ou dans d’autres dispositions du présent acte ou de ses annexes. »

La directive 2000/35

5

Les considérants 7, 9, 10, 13 et 16 de la directive 2000/35 énoncent :

« (7)

De lourdes charges administratives et financières pèsent sur les entreprises, en particulier petites et moyennes, en raison des délais de paiement excessifs et des retards de paiement. En outre, ces problèmes constituent l’une des principales causes d’insolvabilité menaçant la survie des entreprises et ils entraînent de nombreuses pertes d’emplois.

[...]

(9)

Les différences existant entre les États membres en ce qui concerne les règles et les pratiques de paiement constituent un obstacle au bon fonctionnement du marché intérieur.

(10)

Cela a pour effet de limiter considérablement les transactions commerciales entre les États membres. C’est en contradiction avec l’article 14 du traité, car il est souhaitable que les entrepreneurs soient en mesure de commercialiser leurs produits dans l’ensemble du marché intérieur dans des conditions qui garantissent que des transactions transfrontières ne présentent pas de risques plus élevés que des ventes à l’intérieur d’un État membre. [...]

[...]

(13)

Il convient de limiter la portée de la présente directive aux paiements effectués en rémunération de transactions commerciales et de ne pas réglementer les transactions effectuées avec les consommateurs ni les intérêts en jeu dans d’autres types de paiements, par exemple les paiements effectués au titre de la législation sur les chèques et les lettres de change, ou les paiements effectués dans le cadre de l’indemnisation de dommages, y compris ceux effectués par les compagnies d’assurance.

[...]

(16)

Les retards de paiement constituent une violation du contrat qui est devenue financièrement intéressante pour les débiteurs dans la plupart des États membres, en raison du faible niveau des intérêts de retard et/ou de la lenteur des procédures de recours. Des aménagements décisifs [...] sont nécessaires pour inverser cette tendance et pour faire en sorte que les conséquences d’un dépassement des délais de paiement soient telles qu’elles découragent cette pratique. »

6

L’article 1er de cette directive, qui définit le champ d’application de celle-ci, dispose :

« Les dispositions de la présente directive s’appliquent à tous les paiements effectués en rémunération de transactions commerciales. »

7

L’article 2, point 1, de ladite directive prévoit :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

1)

“transaction commerciale” : toute transaction entre des entreprises ou entre des entreprises et les pouvoirs publics qui conduit à la fourniture de marchandises ou à la prestation de services contre rémunération ;

[...]

“entreprise” : toute organisation agissant dans l’exercice d’une activité économique ou professionnelle indépendante, même lorsque cette activité n’est exercée que par une seule personne ».

8

L’article 3 de la directive 2000/35, intitulé « Intérêts pour retard de paiement », dispose, à son paragraphe 1 :

« Les États membres veillent à ce que :

a)

des intérêts au sens du point d) soient exigibles le jour suivant la date de paiement ou la fin du délai de paiement fixée dans le contrat ;

[...]

c)

le créancier soit en droit de réclamer des intérêts de retard dans la mesure où :

i)

il a rempli ses obligations contractuelles et légales et

ii)

il n’a pas reçu le montant dû à l’échéance, à moins que le débiteur ne soit pas responsable du retard ;

d)

le taux d’intérêt pour retard de paiement (“taux légal”) que le débiteur est obligé d’acquitter corresponde au taux d’intérêt de la principale facilité de refinancement appliquée par la Banque centrale européenne (BCE) à son opération de refinancement principal la plus récente effectuée avant le premier jour de calendrier du semestre en question (“taux directeur”), majoré d’un minimum de sept points [...], sauf dispositions contraires figurant dans le contrat. Pour un État membre qui ne participe pas à la troisième phase de l’Union économique et monétaire, le taux de référence visé précédemment est le taux directeur équivalent fixé par sa banque centrale. [...]

[...] »

9

L’article 6 de cette directive est libellé comme suit :

« 1. Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive avant le 8 août 2002. [...]

[...]

3. Lors de la transposition de la présente directive, les États membres peuvent exclure :

[...]

b)

les contrats qui ont été conclus avant [le] 8 août 2002 [...]

[...] »

Le droit slovène

Les dispositions relatives au paiement des intérêts de retard

10

Conformément à l’article 277, paragraphe 1, du Zakon o obligacijskih razmerjih (loi relative aux obligations contractuelles), le débiteur d’une créance est tenu de verser au créancier des intérêts de retard en sus du principal s’il n’a pas payé le montant dû au titre de cette créance à l’échéance.

11

Cette loi a été remplacée par l’Obligacijski zakonik (code des obligations, ci-après l’« OZ ») à compter du 1er janvier 2002. Celui-ci avait, en substance, repris la disposition mentionnée au point précédent du présent arrêt et avait introduit, à son article 376, une nouvelle règle selon laquelle les intérêts de retard cessent de courir lorsque le montant des intérêts échus mais non payés atteint le montant du principal (ci-après la « règle ne ultra alterum tantum »).

Les dispositions relatives à l’artisanat

12

Il ressort de la décision de renvoi que l’exercice d’une activité économique indépendante par une personne physique était, à la date des faits pertinents au principal en juin 1993, régi par l’Obrtni Zakon (loi relative à l’artisanat), dans sa version alors en vigueur. En vertu de cette loi, qui a été modifiée par la suite, une personne physique devait, pour pouvoir exercer une activité économique en tant qu’artisan indépendant, être titulaire d’une autorisation délivrée par l’autorité compétente, indiquant le domaine d’activité concerné.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

13

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