Deutsche Bahn AG v Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:T:2006:104
CourtGeneral Court (European Union)
Docket NumberT-351/02
Date05 April 2006
Celex Number62002TJ0351
Procedure TypeRecurso de anulación - infundado

Affaire T-351/02

Deutsche Bahn AG

contre

Commission des Communautés européennes

« Aides d'État — Plainte d'un concurrent — Directive 92/81/CEE — Droits d'accises sur les huiles minérales — Huiles minérales utilisées comme carburant pour la navigation aérienne — Exonération de l'accise — Lettre de la Commission à un plaignant — Recours en annulation — Recevabilité — Acte attaquable — Règlement (CE) nº 659/1999 — Notion d'aide — Imputabilité à l'État — Égalité de traitement »

Arrêt du Tribunal (première chambre élargie) du 5 avril 2006

Sommaire de l'arrêt

1. Recours en annulation — Actes susceptibles de recours — Notion — Actes produisant des effets juridiques obligatoires

(Art. 230, al. 4, CE; règlement du Conseil nº 659/1999, art. 4, § 2, 10, § 1, 20 et 25)

2. Aides accordées par les États — Notion — Octroi d'avantages imputable à l'État

(Art. 87, § 1, CE; directive du Conseil 92/81, art. 8, § 1, b))

3. Aides accordées par les États — Examen des plaintes

(Art. 253 CE; directive du Conseil 92/81)

4. Transports — Transports aériens — Directive 92/81

(Directive du Conseil 92/81, art. 8, § 1, b))

1. Seules les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de celui-ci, constituent des actes susceptibles de faire l'objet d'un recours en annulation au sens de l'article 230 CE. Ainsi, sont susceptibles d'un recours en annulation toutes les dispositions prises par les institutions, quelles qu'en soient la nature ou la forme, qui visent à produire des effets de droit.

Tel est le cas d'une lettre adressée à une entreprise plaignante par la Commission, lorsque celle-ci, ayant reçu des informations concernant une prétendue aide illégale, et de ce fait obligée de les examiner sans délai en application de l'article 10, paragraphe 1, du règlement nº 659/1999, ne se contente pas, comme lui en ouvre la possibilité l'article 20 dudit règlement, d'informer la plaignante qu'il n'y a pas de motifs suffisants pour se prononcer sur le cas, mais prend une position claire, motivée et définitive en indiquant que la mesure en cause ne constitue pas une aide, car, ce faisant, la Commission ne peut, en effet, qu'adopter une décision au titre de l'article 4, paragraphe 2, dudit règlement. La Commission n'est dès lors pas en droit de l'exclure du contrôle du juge communautaire en déclarant n'avoir pas pris une telle décision, en essayant de la retirer, ou en décidant de ne pas adresser la décision à l'État membre concerné, en violation de l'article 25 du règlement nº 659/1999.

Le motif pour lequel la Commission est parvenue à la conclusion selon laquelle il n'y a pas d'aide d'État, ainsi que la circonstance que l'examen préliminaire n'a pas nécessité de sa part une analyse approfondie et prolongée des informations qui faisaient l'objet de la plainte, sont indifférents à cet égard.

Il est également indifférent que la lettre litigieuse ne résulte pas de l'adoption d'une décision définitive sur la plainte par le collège des commissaires, une telle décision ne pouvant être adoptée que si une proposition à cette fin a été présentée par le membre de la Commission responsable.

Peu importe enfin que la lettre de la Commission n'ait pas été publiée; il n'est, en effet, pas nécessaire qu'un acte soit publié pour qu'il puisse faire l'objet d'un recours en annulation.

(cf. points 35, 41, 43, 49, 51-52, 58-59)

2. L'article 87, paragraphe 1, CE vise les décisions des États membres par lesquelles ces derniers, en vue de la poursuite d'objectifs économiques et sociaux qui leur sont propres, mettent, par des décisions unilatérales et autonomes, à la disposition des entreprises ou d'autres sujets de droit des ressources ou leur procurent des avantages destinés à favoriser la réalisation des objectifs économiques ou sociaux recherchés. Il s'ensuit que, pour que des avantages puissent être qualifiés d'aides au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE, ils doivent, notamment, être imputables à l'État.

Tel n'est pas le cas de l'exonération fiscale prévue par une réglementation nationale qui ne fait que mettre en oeuvre l'article 8, paragraphe 1, sous b), de la directive 92/81, concernant l'harmonisation des structures des droits d'accises sur les huiles minérales, cette dernière disposition imposant aux États membres une obligation claire et précise de ne pas soumettre à l'accise harmonisée le carburant utilisé pour la navigation aérienne commerciale. En transposant l'exonération en droit national, les États membres ne font, en effet, qu'exécuter des dispositions communautaires conformément à leurs obligations issues du traité. Il s'ensuit que la disposition nationale en cause n'est pas imputable à l'État membre, mais découle, en réalité, d'un acte du législateur communautaire. Peu importe à cet égard que l'exonération ait été accordée au moyen de ressources d'État, l'imputabilité d'une aide à un État étant distincte de la question de savoir si l'aide a été octroyée au moyen de ressources d'État. Il s'agit, en effet, de conditions distinctes et cumulatives. Certaines des conditions essentielles à l'application de l'article 87 CE n'étant ainsi pas satisfaites, une telle exonération ne relève donc pas du champ d'application de cet article.

(cf. points 99-104)

3. La motivation exigée par l'article 253 CE doit être adaptée à la nature de l'acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l'institution, auteur de l'acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d'exercer son contrôle. L'exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l'espèce, notamment du contenu de l'acte, de la nature des motifs invoqués et de l'intérêt que les destinataires ou d'autres personnes concernées directement et individuellement par l'acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n'est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d'un acte satisfait aux exigences de l'article 253 CE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l'ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée.

Satisfait à une telle exigence la décision de la Commission rejetant une plainte au motif que l'exonération fiscale dénoncée constitue la mise en oeuvre de la directive 92/81, concernant l'harmonisation des structures des droits d'accises sur les huiles minérales, et non une tentative d'octroyer une aide, une telle motivation, bien que sommaire, étant suffisamment claire et compréhensible.

(cf. points 119-120)

4. Le principe d'égalité de traitement interdit de traiter d'une façon différente des situations comparables, entraînant un désavantage pour certains opérateurs par rapport à d'autres, à moins qu'un tel traitement ne soit objectivement justifié.

L'exonération fiscale du carburant pour avions fondée sur l'article 8, paragraphe 1, sous b), de la directive 92/81, concernant l'harmonisation des structures des droits d'accises sur les huiles minérales, et sur la norme de transposition en droit interne de cette disposition ne viole pas le principe d'égalité de traitement, dès lors que la situation des entreprises de transport aérien est manifestement distincte de celle des entreprises de transport ferroviaire. En ce qui concerne leurs caractéristiques opérationnelles, la structure de leurs coûts et les dispositions réglementaires auxquelles ils sont soumis, les services de transport aérien et ferroviaire sont, en effet, très différents et ne sont pas comparables au sens du principe d'égalité de traitement. En outre, et en tout état de cause, cette différence de traitement est objectivement justifiée, eu égard au large pouvoir d'appréciation du Conseil quant à la justification objective d'un éventuel traitement différent. En effet, au vu de la pratique internationale de l'exonération d'accises au profit du carburant pour avions, qui est consacrée par la convention de Chicago relative à l'aviation civile internationale du 7 décembre 1944, ainsi que par des accords bilatéraux conclus entre États, la concurrence entre les opérateurs communautaires de transport aérien et les opérateurs des États tiers serait faussée si le législateur communautaire imposait unilatéralement des droits d'accises sur ce carburant.

(cf. points 137-139)




ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre élargie)

5 avril 2006 (*)

« Aides d’État – Plainte d’un concurrent – Directive 92/81/CEE – Droits d’accises sur les huiles minérales – Huiles minérales utilisées comme carburant pour la navigation aérienne – Exonération de l’accise – Lettre de la Commission à un plaignant – Recours en annulation – Recevabilité – Acte attaquable – Règlement (CE) n° 659/1999 – Notion d’aide – Imputabilité à l’État – Égalité de traitement »

Dans l’affaire T-351/02,

Deutsche Bahn AG, établie à Berlin (Allemagne), représentée initialement par Mes M. Schütte, M. Reysen et W. Kirchhoff, puis par Mes Schütte et Reysen, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. V. Kreuschitz et J. Flett, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

soutenue par

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme A.-M. Colaert, MM. F. Florindo Gijón et C. Saile, en qualité d’agents,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision de la Commission du 12 septembre 2002 portant rejet d’une plainte déposée par la requérante le 5 juillet 2002,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (première chambre élargie),

composé de MM. B. Vesterdorf, président, J. D. Cooke, R. García-Valdecasas, Mmes I. Labucka et V. Trstenjak, juges,

greffier...

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