Herbert Schwarz and Marga Gootjes-Schwarz v Finanzamt Bergisch Gladbach.

JurisdictionEuropean Union
Celex Number62005CJ0076
ECLIECLI:EU:C:2007:492
Docket NumberC-76/05
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date11 September 2007

Affaire C-76/05

Herbert Schwarz
et
Marga Gootjes-Schwarz

contre

Finanzamt Bergisch Gladbach

(demande de décision préjudicielle, introduite par le Finanzgericht Köln)

«Article 8 A du traité CE (devenu, après modification, article 18 CE) — Citoyenneté européenne — Article 59 du traité CE (devenu, après modification, article 49 CE) — Libre prestation des services — Législation en matière d'impôt sur le revenu — Frais de scolarité — Droit à déduction limité aux frais de scolarité versés à des établissements privés nationaux»

Sommaire de l'arrêt

1. Libre prestation des services — Services — Notion

(Art. 50 CE)

2. Libre prestation des services — Restrictions — Législation fiscale

(Art. 49 CE)

3. Citoyenneté de l'Union européenne — Droit de libre circulation et de libre séjour sur le territoire des États membres — Législation fiscale

(Art. 18 CE)

1. Les cours dispensés par des établissements faisant partie d'un système d'enseignement public et qui sont financés, entièrement ou principalement, par des fonds publics sont exclus de la notion de services au sens de l'article 50 CE. En effet, en établissant et en maintenant un tel système d'enseignement public, financé en règle générale par le budget public et non par les élèves ou leurs parents, l'État n'entend pas s'engager dans des activités rémunérées, mais accomplit sa mission dans les domaines social, culturel et éducatif envers sa population.

En revanche, les cours dispensés par des établissements d'enseignement financés, pour l'essentiel, par des fonds privés, notamment par les étudiants et leurs parents, constituent des services au sens de l'article 50 CE, le but poursuivi par ces établissements consistant, en effet, à offrir un service contre rémunération. Il n'est pas nécessaire à cet égard que ce financement privé soit assuré principalement par les élèves ou leurs parents. En effet, l'article 50 CE n'exige pas que le service soit payé par ceux qui en bénéficient.

(cf. points 39-41)

2. Lorsque les contribuables d'un État membre scolarisent leurs enfants dans une école située dans un autre État membre et dont le financement est assuré essentiellement par des fonds privés, l'article 49 CE doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une réglementation d'un État membre qui prévoit la possibilité, pour les contribuables, de faire valoir, au titre des dépenses spéciales ouvrant droit à une réduction de l'impôt sur le revenu, le versement de frais de scolarité à certaines écoles privées établies sur le territoire national, mais exclut de manière générale cette possibilité s'agissant de frais de scolarité versés à une école privée établie dans un autre État membre.

Une telle réglementation est constitutive d'une entrave à la libre prestation des services garantie par l'article 49 CE en ce qu'elle a pour effet de dissuader les contribuables résidant dans l'État membre concerné de scolariser leurs enfants dans des écoles établies dans un autre État membre. Par ailleurs, elle entrave également l'offre de formation émanant d'établissements d'enseignement privés établis dans d'autres États membres, destinée aux enfants de contribuables résidant dans le premier État membre.

Le refus d'accorder l'abattement fiscal en cause au titre des frais de scolarité versés à des écoles établies dans un autre État membre ne saurait être justifié par l'objectif d'assurer une couverture des frais de fonctionnement des écoles privées sans qu'il en résulte une charge déraisonnable pour l'État, dès lors que cet objectif pourrait être atteint par des moyens moins contraignants. En effet, pour éviter une charge financière excessive, il est loisible à un État membre de limiter le montant déductible au titre des frais de scolarité à un montant déterminé, correspondant à l'abattement fiscal accordé par cet État, compte tenu de certaines valeurs qui lui sont propres, pour la fréquentation d'écoles situées sur son territoire, ce qui constituerait un moyen moins contraignant que le refus d'octroi de l'abattement fiscal en cause. Il apparaît en tout état de cause disproportionné d'exclure totalement de cet abattement les frais de scolarité versés à des écoles établies dans un autre État membre indépendamment du point de savoir si ces écoles remplissent des critères objectifs fixés sur la base de principes propres à chaque État membre et permettant de déterminer quels types de frais de scolarité ouvrent droit audit abattement fiscal.

(cf. points 66-67, 79-82, disp. 1)

3. Lorsque les contribuables d'un État membre envoient leurs enfants suivre leur scolarité dans une école établie dans un autre État membre dont les prestations ne sont pas couvertes par l'article 49 CE, l'article 18 CE s'oppose à une réglementation d'un État membre qui prévoit la possibilité, pour les contribuables, de faire valoir, au titre des dépenses spéciales ouvrant droit à une réduction de l'impôt sur le revenu, le versement de frais de scolarité à certaines écoles établies sur le territoire national, mais exclut de manière générale cette possibilité s'agissant de frais de scolarité versés à une école établie dans un autre État membre.

Une telle réglementation a pour effet de désavantager de manière injustifiée ces enfants par rapport à ceux qui n'ont pas fait usage de leur liberté de circulation en allant suivre leur scolarité dans une école établie dans un autre État membre et porte atteinte aux droits qui leur sont conférés par l'article 18, paragraphe 1, CE.

(cf. points 98-99, disp. 2)







ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

11 septembre 2007 (*)

«Article 8 A du traité CE (devenu, après modification, article 18 CE) – Citoyenneté européenne – Article 59 du traité CE (devenu, après modification, article 49 CE) – Libre prestation des services – Législation en matière d’impôt sur le revenu – Frais de scolarité – Droit à déduction limité aux frais de scolarité versés à des établissements privés nationaux»

Dans l’affaire C-76/05,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Finanzgericht Köln (Allemagne), par décision du 27 janvier 2005, parvenue à la Cour le 16 février 2005, dans la procédure

Herbert Schwarz,

Marga Gootjes-Schwarz

contre

Finanzamt Bergisch Gladbach,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, MM. P. Jann, C. W. A. Timmermans, A. Rosas (rapporteur) et K. Lenaerts, présidents de chambre, M. J. N. Cunha Rodrigues, Mme R. Silva de Lapuerta, MM. K. Schiemann, J. Makarczyk, G. Arestis, A. Borg Barthet, M. Ilešič et J. Malenovský, juges,

avocat général: Mme C. Stix-Hackl,

greffier: M. B. Fülöp, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 2 mai 2006,

considérant les observations présentées:

– pour M. Schwarz et Mme Gootjes-Schwarz, par Me W. Meilicke, Rechtsanwalt,

– pour le gouvernement allemand, par MM. M. Lumma et U. Forsthoff, en qualité d’agents,

– pour la Commission des Communautés européennes, par MM. K. Gross et R. Lyal, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 21 septembre 2006,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 8 A, paragraphe 1, 48, 52 et 59 du traité CE (devenus respectivement, après modification, articles 18, paragraphe 1, CE, 39 CE, 43 CE et 49 CE).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un recours opposant M. Schwarz et Mme Gootjes-Schwarz (ci-après les «époux Schwarz»), ressortissants allemands résidant en Allemagne, au Finanzamt Bergisch Gladbach (ci-après le «Finanzamt»), à propos du refus de ce dernier de leur accorder un abattement fiscal au titre des frais de scolarité engagés pour leurs enfants fréquentant des écoles établies dans d’autres États membres, la législation nationale en matière d’impôt sur le revenu réservant l’octroi de cet abattement aux contribuables ayant versé des frais de scolarité à certaines écoles privées allemandes.

Le cadre juridique national

3 L’article 7, paragraphe 4, de la loi fondamentale de la République fédérale d’Allemagne, du 23 mai 1949 (Grundgesetz für die Bundesrepublik Deutschland, ci-après la «loi fondamentale»), dispose:

«(4) Le droit de fonder des écoles privées est garanti. Les écoles privées qui se substituent aux écoles publiques doivent être agréées par l’État et sont soumises aux lois des Länder. L’agrément doit être délivré lorsque les écoles privées ne sont pas d’un niveau inférieur aux écoles publiques quant à leurs programmes, leurs installations et la formation scientifique de leur personnel enseignant, ni ne favorisent une sélection des élèves fondée sur la fortune des parents. L’agrément doit être refusé si la situation économique et juridique du personnel enseignant n’est pas suffisamment assurée.»

4 L’article 10, paragraphe 1, point 9, de la loi relative à l’impôt sur le revenu, dans sa version applicable à la date des faits au principal (Einkommensteuergesetz, BGBl. 1997 I, p. 821, ci-après l’«EStG»), énonce:

«Les dépenses spéciales [‘Sonderausgaben’] [donnant droit à une déduction au titre de l’impôt sur le revenu] correspondent aux dépenses suivantes, dès lors qu’il ne s’agit ni de charges d’exploitation ni de charges professionnelles:

1. […]

9. 30 % du montant acquitté par le contribuable pour la fréquentation, par un enfant pour lequel il bénéficie d’un abattement pour enfant à charge ou d’allocations familiales, d’une école de substitution agréée par l’État ou autorisée par le droit du Land, conformément à l’article 7, paragraphe 4, de la [l]oi fondamentale, ou d’une école complémentaire d’enseignement général reconnue par le droit du Land, à l’exception du prix de l’hébergement, de la surveillance et des repas.»

5 Par ailleurs, conformément à l’article 33, paragraphe 1, de l’EStG, le contribuable peut, à sa demande, bénéficier d’une réduction de l’impôt sur le revenu s’il est contraint de supporter des dépenses plus...

To continue reading

Request your trial
39 practice notes
  • Presidente del Consiglio dei Ministri v Regione Sardegna.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 2 July 2009
    ...apartado 22, y Bacardi France (C‑429/02, Rec. p. I‑6613), apartado 31, así como de 11 de septiembre de 2007, Schwarz y Gootjes-Schwarz (C‑76/05, Rec. p. I‑6849), apartado 36. 20 – Según jurisprudencia reiterada, los turistas están comprendidos dentro del ámbito de aplicación de la libre pre......
  • James Wood v Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 28 February 2008
    ...19, and Cowan (cited in footnote 2), paragraph 19. 7 – See Case C‑318/05 Commission v Germany [2007] ECR I-6957, paragraph 126; Case C‑76/05 Schwarz and Gootjes-Schwarz [2007] ECR I-6849, paragraph 87; Joined Cases C‑11/06 and C-12/06 Morganand Bucher [2007] ECR I-9161, paragraph 23; Case C......
  • Nicolas Bressol and Others and Céline Chaverot and Others v Gouvernement de la Communauté française.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 13 April 2010
    ...law, in particular the provisions on the freedom to move and reside within the territory of the Member States (see, to that effect, Case C-76/05 Schwarz and Gootjes-Schwarz [2007] ECR I‑6849, paragraph 70, and Joined Cases C-11/06 and C-12/06 Morgan and Bucher [2007] ECR I‑9161, paragraph 2......
  • Opinion of Advocate General Bobek delivered on 10 April 2018.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 10 April 2018
    ...EU:C:2006:491, paragraph 39); or of 11 September 2007, Schwarz and Gootjes-SchwarzSchwarz and Gootjes-SchwarzSchwarz and Gootjes-Schwarz (C‑76/05, EU:C:2007:492, paragraph 88). 23 Indeed, the reality of free movement gives rise to different situations than those of ‘static citizens’, which ......
  • Request a trial to view additional results
25 cases
5 books & journal articles
2 provisions

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT