sentencia de 13 de enero de 2021

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2021:4
Docket NumberC-414/20
Date13 January 2021
Celex Number62020CJ0414
CourtCourt of Justice (European Union)
62020CJ0414

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

13 janvier 2021 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Procédure préjudicielle d’urgence – Coopération judiciaire en matière pénale – Mandat d’arrêt européen – Décision-cadre 2002/584/JAI – Procédures de remise entre États membres – Article 6, paragraphe 1, et article 8, paragraphe 1, sous c) – Mandat d’arrêt européen émis sur la base d’un acte national de mise en examen – Notion de “mandat d’arrêt ou de toute autre décision judiciaire exécutoire ayant la même force” – Absence de mandat d’arrêt national – Conséquences – Protection juridictionnelle effective – Article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne »

Dans l’affaire C‑414/20 PPU,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Spetsializiran nakazatelen sad (tribunal pénal spécialisé, Bulgarie), par décision du 3 septembre 2020, parvenue à la Cour le 4 septembre 2020, dans la procédure pénale contre

MM,

en présence de :

Spetsializirana prokuratura,

LA COUR (troisième chambre),

composée de Mme A. Prechal, présidente de chambre, MM. N. Wahl (rapporteur), F. Biltgen, Mme L. S. Rossi et M. J. Passer, juges,

avocat général : M. J. Richard de la Tour,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la demande de la juridiction de renvoi du 3 septembre 2020, parvenue à la Cour le 4 septembre 2020, de soumettre le renvoi préjudiciel à la procédure d’urgence, conformément à l’article 107 du règlement de procédure de la Cour,

vu la décision du 21 septembre 2020 de la troisième chambre de faire droit à cette demande,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 11 novembre 2020,

considérant les observations présentées :

pour MM, par Mes V. T. Bratoevska et T. Gincheva, advokati,

pour le gouvernement bulgare, par Mmes T. Tsingileva et L. Zaharieva, en qualité d’agents,

pour le gouvernement espagnol, par Mme M. J. Ruiz Sánchez, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par MM. C. Ladenburger et I. Zaloguin ainsi que par Mme S. Grünheid, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 9 décembre 2020,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 6, paragraphe 1, et de l’article 8, paragraphe 1, sous c), de la décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil, du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres (JO 2002, L 190, p. 1), telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil, du 26 février 2009 (JO 2009, L 81, p. 24) (ci-après la « décision-cadre 2002/584 »), ainsi que de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’une procédure pénale engagée contre MM à l’occasion de laquelle est mise en cause la validité du mandat d’arrêt européen émis à l’encontre de celui-ci à l’appui d’une demande de réexamen de la mesure de placement en détention provisoire dont il a fait l’objet.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

L’article 1er de la décision-cadre 2002/584, intitulé « Définition du mandat d’arrêt européen et obligation de l’exécuter », dispose :

« 1. Le mandat d’arrêt européen est une décision judiciaire émise par un État membre en vue de l’arrestation et de la remise par un autre État membre d’une personne recherchée pour l’exercice de poursuites pénales ou pour l’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté.

2. Les États membres exécutent tout mandat d’arrêt européen, sur la base du principe de reconnaissance mutuelle et conformément aux dispositions de la présente décision-cadre.

3. La présente décision-cadre ne saurait avoir pour effet de modifier l’obligation de respecter les droits fondamentaux et les principes juridiques fondamentaux tels qu’ils sont consacrés par l’article 6 [TUE]. »

4

L’article 6 de cette décision-cadre, intitulé « Détermination des autorités judiciaires compétentes », prévoit :

« 1. L’autorité judiciaire d’émission est l’autorité judiciaire de l’État membre d’émission qui est compétente pour délivrer un mandat d’arrêt européen en vertu du droit de cet État.

2. L’autorité judiciaire d’exécution est l’autorité judiciaire de l’État membre d’exécution qui est compétente pour exécuter le mandat d’arrêt européen en vertu du droit de cet État.

3. Chaque État membre informe le secrétariat général du Conseil de l’autorité judiciaire compétente selon son droit interne. »

5

L’article 8 de ladite décision-cadre, intitulé « Contenu et forme du mandat d’arrêt européen », énonce, à son paragraphe 1, sous c) :

« Le mandat d’arrêt européen contient les informations suivantes, présentées conformément au formulaire figurant en annexe :

[...]

c)

l’indication de l’existence d’un jugement exécutoire, d’un mandat d’arrêt ou de toute autre décision judiciaire exécutoire ayant la même force entrant dans le champ d’application des articles 1er et 2 ;

[...] »

6

La décision-cadre 2002/584 prévoit, à son annexe, un formulaire portant modèle uniforme de mandat d’arrêt européen. La rubrique b) de ce formulaire, relative à la « [d]écision sur laquelle se fonde le mandat d’arrêt », fait référence, à son point 1, à un « [m]andat d’arrêt ou [à une] décision judiciaire ayant la même force ».

Le droit bulgare

7

La décision-cadre 2002/584 a été transposée en droit bulgare par le Zakon za ekstraditsiata i evropeiskata zapoved za arest (loi relative à l’extradition et au mandat d’arrêt européen, DV no 46/05, du 3 juin 2005, ci-après le « ZEEZA »). L’article 37 du ZEEZA énonce les dispositions relatives à la délivrance d’un mandat d’arrêt européen dans des termes presque identiques à ceux de l’article 8 de cette décision-cadre.

8

En vertu de l’article 56, paragraphe 1, point 1, du ZEEZA, le procureur est compétent, dans la phase préliminaire de la procédure pénale, pour émettre un mandat d’arrêt européen à l’encontre de la personne poursuivie. Durant cette phase de la procédure pénale, la législation bulgare ne prévoit pas la possibilité pour une juridiction de participer à l’émission du mandat d’arrêt européen ou d’exercer un contrôle de validité de ce mandat d’arrêt, ni avant ni après la délivrance de celui-ci.

9

En vertu de l’article 200 du nakazatelno protsesualen kodeks (code de procédure pénale, ci-après le « NPK »), lu en combinaison avec l’article 66 du ZEEZA, le mandat d’arrêt européen n’est susceptible de recours que devant le parquet de l’instance supérieure.

10

Le mandat d’amener, qui vise à conduire une personne soupçonnée d’avoir commis une infraction devant les organes d’enquête de la police, est régi par l’article 71 du NPK. Ce mandat d’amener ne peut faire l’objet d’un recours que devant le procureur.

11

La mise en examen d’une personne soupçonnée d’avoir commis une infraction est régie notamment par l’article 219 du NPK.

12

L’article 219, paragraphe 1, du NPK énonce que, « [l]orsque sont réunis suffisamment d’éléments de preuve de la culpabilité d’une personne déterminée [...], l’organe d’enquête fait un rapport au procureur et met la personne en examen en établissant un arrêté à cet effet ». Il s’agit d’un acte émis par l’organe d’enquête sous le contrôle du procureur. Ainsi qu’il résulte de l’article 219, paragraphes 4 à 8, et de l’article 221 du NPK, cet arrêté vise à notifier à la personne soupçonnée d’avoir commis une infraction sa mise en examen et à lui donner la possibilité de se défendre. Ledit arrêté n’a pas pour effet juridique le placement en détention de la personne poursuivie.

13

L’arrêté de mise en examen émis par l’organe d’enquête n’est pas susceptible de faire l’objet d’un recours devant une juridiction. Il ne peut faire l’objet d’un recours que devant le procureur. L’article 200 du NPK dispose en effet que « [l]’arrêté de l’organe d’enquête fait l’objet d’un recours devant le procureur. La décision du procureur, qui n’est pas soumise au contrôle judiciaire, fait l’objet d’un recours devant le parquet de l’instance supérieure dont la décision est définitive ».

14

Le placement en détention provisoire d’une personne faisant l’objet de poursuites pénales est régi, lors de la phase préliminaire de la procédure pénale, par l’article 64 du NPK.

15

Aux termes de l’article 64, paragraphe 1, du NPK, « [l]a mesure de placement en détention provisoire est adoptée pendant la procédure préliminaire par le tribunal de première instance compétent à la demande du procureur ».

16

En vue d’introduire une telle demande, le procureur doit apprécier si les conditions requises à l’article 63, paragraphe 1, du NPK sont réunies pour réclamer à ce tribunal qu’il impose à la personne poursuivie, après sa mise en examen, la mesure la plus sévère de placement en détention provisoire dans le cadre de la procédure préliminaire.

17

Conformément à l’article 64, paragraphe 2, du NPK, le procureur peut adopter une mesure ordonnant le placement en détention de la personne poursuivie pour une durée maximale de 72 heures en vue de permettre la comparution de cette personne devant la juridiction qui est compétente pour adopter, le cas échéant, une mesure de placement en détention provisoire.

18

L’article 64, paragraphe 3, du NPK dispose que « le tribunal examine immédiatement l’affaire [...] avec la participation de la personne poursuivie ».

19

Conformément à l’article 64, paragraphe 4, du NPK, le tribunal est...

To continue reading

Request your trial
11 practice notes
  • Opinion of Advocate General Ćapeta delivered on 22 June 2023.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 22 June 2023
    ...request the EPPO to obtain such measures on behalf of the defence. 76 See, by analogy, Opinion of Advocate General Richard de la Tour in MM (C‑414/20 PPU, EU:C:2020:1009, point 133) (where he explained that effective judicial protection demands that the conditions under which a European arr......
  • Opinion of Advocate General Richard de la Tour delivered on 11 February 2021.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 11 February 2021
    ...PPU, EU:C:2019:456, point 60). 14 Je renvoie sur cet aspect aux points 59 à 62 des conclusions que j’ai présentées dans l’affaire MM (C‑414/20 PPU, 15 Voir, notamment, arrêt du 13 janvier 2021, MM (C‑414/20 PPU, ci-après l’« arrêt MM », EU:C:2021:4, point 44 et jurisprudence citée). 16 Voir......
  • Opinion of Advocate General Ćapeta delivered on 13 July 2023.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 13 July 2023
    ...Consiglio, del 3 aprile 2014, relativa all’ordine europeo di indagine penale (GU 2014, L 130, pag. 1). 18 Sentenza del 13 gennaio 2021, MM (C‑414/20 PPU, EU:C:2021:4, punto 19 V., ad esempio, sentenza del 17 dicembre 2020, Generalstaatsanwaltschaft Hamburg (C‑416/20 PPU, EU:C:2020:1042, pun......
  • Minister for Justice and Equality v JR.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 17 March 2021
    ...zum Zweck der Vollstreckung einer Verurteilung zu einer Freiheitsstrafe erlassen wurden (vgl. entsprechend Urteil vom 13. Januar 2021, MM, C‑414/20 PPU, EU:C:2021:4, Rn. 53 und 49 Zweitens sind diese Handlungen, soweit sie die Vollstreckung eines Urteils in diesem Mitgliedstaat ermöglichen,......
  • Request a trial to view additional results
12 cases
  • Conclusiones del Abogado General Sr. J. Richard de la Tour, presentadas el 14 de julio de 2022.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 14 July 2022
    ...sentencias de 23 de enero de 2018, Piotrowski (C‑367/16, EU:C:2018:27), apartado 50 y jurisprudencia citada, y de 13 de enero de 2021, MM (C‑414/20 PPU, EU:C:2021:4), apartado 61 y jurisprudencia citada. Véase asimismo la sentencia Spetsializirana prokuratura (Declaración de derechos), apar......
  • Opinion of Advocate General Ćapeta delivered on 22 June 2023.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 22 June 2023
    ...de telles mesures au nom de la défense. 76 Voir, par analogie, conclusions de l’avocat général Richard de la Tour dans l’affaire MM (C‑414/20 PPU, EU:C:2020:1009, point 133) (dans lesquelles il indique que le principe de protection juridictionnelle effective requiert que les conditions d’ém......
  • Opinion of Advocate General Kokott delivered on 17 June 2021.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 17 June 2021
    ...PPU, EU:C:2021:339, punto 95). 9 Sentenze del 1° giugno 2016, Bob-Dogi (C‑241/15, EU:C:2016:385, punto 64), e del 13 gennaio 2021, MM (C‑414/20 PPU, EU:C:2021:4, punto 10 Sentenze dell'11 febbraio 2003, Gözütok e Brügge (C‑187/01 e C‑385/01, EU:C:2003:87, punti 27 e 30); del 22 dicembre 200......
  • Opinion of Advocate General Richard de la Tour delivered on 11 February 2021.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 11 February 2021
    ...PPU, EU:C:2019:456), apartado 60. 14 Sobre este aspecto me remito a los puntos 59 a 62 de mis conclusiones presentadas en el asunto MM (C‑414/20 PPU, 15 Véase, en particular, la sentencia de 13 de enero de 2021, MM (C‑414/20 PPU, en lo sucesivo, «MM» EU:C:2021:4), apartado 44 y jurisprudenc......
  • Request a trial to view additional results

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT