French Republic v Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1998:572
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-251/97
Date26 November 1998
Celex Number61997CC0251
Procedure TypeRecurso de anulación - infundado
EUR-Lex - 61997C0251 - FR 61997C0251

Conclusions de l'avocat général Fennelly présentées le 26 novembre 1998. - République française contre Commission des Communautés européennes. - Article 92 du traité CE (devenu, après modification, article 87 CE) - Notion d'aide - Allégement des charges sociales en contrepartie des coûts résultant pour des entreprises d'accords collectifs en matière d'aménagement et de réduction du temps de travail. - Affaire C-251/97.

Recueil de jurisprudence 1999 page I-06639


Conclusions de l'avocat général

I - Introduction

1 Dans la présente affaire, la République française vise à obtenir l'annulation de la décision 97/811/CE de la Commission, du 9 avril 1997, concernant les aides accordées par la France aux secteurs du textile, de l'habillement, du cuir et de la chaussure (1). Cette affaire soulève en particulier la question de savoir si l'assistance financière fournie par les autorités publiques aux entreprises de certains secteurs, en contrepartie d'engagements de ces dernières envers les mêmes autorités et les représentants des salariés, concernant le maintien de l'emploi et le réaménagement du temps de travail, engagements qui dépassent les exigences du droit commun, constitue une aide d'État au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité CE.

II - Contexte juridique et factuel

2 Les secteurs du textile, de l'habillement, du cuir et de la chaussure sont dominés, en France comme ailleurs dans la Communauté, par les petites et moyennes entreprises. Une concurrence acharnée, tant au sein de la Communauté que de la part des entreprises de pays tiers ayant de faibles coûts salariaux, a entraîné une réduction massive des effectifs employés dans ces secteurs au niveau communautaire. La France n'est pas le seul pays à constater un déclin de l'ensemble de ses effectifs, soit, dans son cas, de 600 000 personnes environ au début des années 80 à 352 000 en 1995 puis à 315 000 en 1997.

3 En France, au milieu des années 90, une série de mesures générales destinées à lutter contre le chômage en accordant aux employeurs des allègements sur certaines cotisations de sécurité sociale sur les bas salaires (2) a abouti à la mise en place d'une réduction dégressive des cotisations patronales pour les salariés dont la rémunération se situait entre 100 et 133 % du salaire minimal garanti (3) (ci-après le «SMIC»). Le 26 mars 1996, la République française a notifié à la Commission certaines propositions supplémentaires spécifiques aux secteurs du textile, de l'habillement, du cuir et de la chaussure. Ces mesures ont été mises en oeuvre par l'article 99 de la loi n_ 96-314, du 12 avril 1996, portant diverses dispositions d'ordre économique et financier (ci-après la «loi n_ 314»), qui autorisait l'État, sur une base expérimentale et temporaire (jusqu'au 31 décembre 1997), à accorder aux employeurs des secteurs en question des allègements supplémentaires de charges sociales sur les bas salaires en contrepartie de l'adoption, par ces mêmes employeurs, d'accords-cadres relatifs au maintien et au développement de l'emploi qui tiendraient compte des négociations entre les partenaires sociaux de ces secteurs sur le réaménagement et la réduction du temps de travail. Ces allègements devaient prendre la forme d'une réduction dégressive des cotisations patronales de sécurité sociale sur les salaires situés entre 100 et 150 % du SMIC, conformément à un coefficient devant être fixé par décret ministériel. Les employeurs de plus de 50 salariés étaient tenus de signer des conventions spécifiques avec l'État, en plus de la convention-cadre, précisant leurs engagements en matière d'emploi et de temps de travail. En cas de non-respect, par une entreprise participante, de ces engagements, les cotisations normalement dues devaient être appliquées intégralement, tant pour le passé que pour l'avenir.

4 L'adoption de la loi n_ 314 a permis aux autorités françaises de faire pression, avec succès, sur la reprise des négociations jusqu'ici au point mort entre les partenaires sociaux des secteurs concernés s'agissant du réaménagement et de la réduction du temps de travail. Des accords de branche sur ces questions ont été signés entre le 7 mai et le 5 juin 1996. Ces accords prévoyaient une limite annuelle pour les heures supplémentaires, variable en fonction du nombre d'heures maximales de travail supplémentaire qu'un salarié pouvait effectuer sur une semaine (4). Selon la durée de l'horaire hebdomadaire maximal et des heures effectivement travaillées, les employeurs étaient tenus d'accorder à leurs salariés un certain pourcentage soit de congé soit de majoration de la rémunération, ou bien une combinaison de ces deux possibilités (5).

5 Peu après, entre le 14 mai et le 28 juin 1996, l'État a conclu des conventions-cadres avec les instances représentatives des employeurs des secteurs concernés. Ces conventions-cadres contenaient des engagements de chaque branche en matière de sauvegarde de l'emploi et d'emploi des jeunes. Chaque convention-cadre visait également expressément l'accord relatif au réaménagement et à la réduction du temps de travail conclu par les partenaires sociaux dans le secteur concerné en tant que mesure destinée à promouvoir les objectifs de l'emploi et de la compétitivité et définissait les engagements des employeurs de la branche considérée au niveau du maintien de l'emploi et de la création d'emplois, se conformant ainsi aux exigences de l'article 99 de la loi n_ 314.

6 Presqu'en même temps, les autorités françaises ont adopté le décret n_ 96-572, du 27 juin 1996 (ci-après le «décret»), mettant en oeuvre l'article 99 de la loi n_ 314. Ce décret a fixé un coefficient dégressif de réduction des cotisations patronales à la sécurité sociale dans les secteurs concernés, avec un maximum de 734 FF (en plus des réductions accordées par le droit commun) pour tout salarié rémunéré au SMIC dans ces secteurs. Le coût de ce dispositif a été évalué à 2,1 milliards de FF, bien qu'il s'avère finalement qu'il n'a coûté que 1,8 à 1,9 milliard de FF. Les autorités estimaient que 35 000 des 60 000 pertes d'emplois prévues sur les deux années à venir seraient évitées et que 7 000 postes supplémentaires seraient créés au profit des jeunes chômeurs.

7 Le décret est entré en vigueur le 1er juin 1996 pour les secteurs du textile et de l'habillement, et le 1er juillet 1996 pour les secteurs du cuir et de la chaussure, et ce en dépit de la décision de la Commission, le 31 mai 1996, d'ouvrir une procédure au titre de l'article 93, paragraphe 2, du traité CE sur les mesures figurant dans le décret et dans la loi n_ 314 (6). Dans deux lettres datées des 4 et 9 juillet 1996, la Commission a demandé des renseignements sur le point de savoir si le dispositif français dépassait le seuil de minimis de 100 000 écus au total par entreprise sur une période de trois ans (7), a rappelé aux autorités françaises l'effet suspensif de la procédure de l'article 93, paragraphe 2, et leur a demandé d'informer les entreprises bénéficiaires de l'ouverture de cette procédure et du fait qu'elles étaient susceptibles d'avoir à rembourser toute aide indûment accordée. Sur la base des renseignements supplémentaires fournis par la République française s'agissant des engagements conclus par les employeurs concernés en contrepartie des réductions de leurs cotisations de sécurité sociale, la Commission a élargi le champ de son enquête par une décision du 2 octobre 1996 (8). Un important échange de correspondances et un certain nombre de réunions bilatérales entre la Commission et les autorités françaises ont eu lieu. En outre, les gouvernements allemand, néerlandais, du Royaume-Uni et autrichien, le gouvernement régional de Flandre en Belgique, ainsi que neuf associations professionnelles et industrielles ont soumis à la Commission des observations défavorables au dispositif français.

8 A titre principal, la République française a soutenu que ce dispositif en faveur du maintien et de la création d'emplois et du réaménagement du temps de travail imposait aux entreprises des charges supplémentaires supérieures à ce qu'elles auraient eu à supporter si elles s'étaient contentées simplement de respecter strictement les exigences légales. Le soutien accordé ne pouvait par conséquent être considéré comme une aide d'État. L'impact net de ce dispositif (allègement des charges contre surcoûts liés à l'aménagement du temps de travail) était dès lors neutre: les grandes entreprises ne bénéficiaient pas, en définitive, d'allègement des charges, car les coûts du réaménagement du temps de travail y étaient plus importants; les autres entreprises ayant entre 50 et 500 travailleurs bénéficiaient d'un allègement net des coûts qui restait sous le seuil de minimis. Un éventuel gain corollaire de compétitivité n'apparaîtrait qu'à moyen ou à long terme. La circonstance que ce dispositif n'était pas nécessairement intéressant pour les entreprises était démontrée par le fait que n'y participait pas environ un tiers des entreprises éligibles, dont, en particulier, certaines des plus importantes dans les secteurs concernés.

9 Par lettre du 5 mai 1997, la Commission a notifié à la République française la décision contestée (9). Elle a estimé que les mesures adoptées par la République française étaient destinées à exempter partiellement les entreprises de quatre secteurs industriels spécifiques des charges pécuniaires découlant de l'application normale du système de prévoyance sociale. Les charges résultant des accords de réaménagement du temps de travail et se traduisant par des majorations salariales ou des congés...

To continue reading

Request your trial
12 practice notes
2 cases
  • Cellnex Telecom, S.A., y Telecom Castilla-La Mancha, S.A., contra Comisión Europea.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 26 Abril 2018
    ...relativas a la pertinencia de las conclusiones del Abogado General Fennelly presentadas en el asunto Francia/Comisión (C‑251/97, EU:C:1998:572) y de las conclusiones del Abogado General Jacobs presentadas en el asunto GEMO (C‑126/01, EU:C:2002:273). Por otro lado, las recurrentes alegan que......
  • República Francesa contra Comisión de las Comunidades Europeas.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 5 Octubre 1999
    ...de los costes resultantes para las empresas de convenios colectivos en materia de reorganización y reducción del tiempo de trabajo. - Asunto C-251/97. Recopilación de Jurisprudencia 1999 página I-06639 Índice Partes Motivación de la sentencia Decisión sobre las costas Parte dispositiva Pala......
3 provisions

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT