Industrie Aeronautiche e Meccaniche Rinaldo Piaggio SpA v International Factors Italia SpA (Ifitalia), Dornier Luftfahrt GmbH and Ministero della Difesa.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1999:119
Docket NumberC-295/97
Celex Number61997CC0295
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date04 March 1999
EUR-Lex - 61997C0295 - FR 61997C0295

Conclusions de l'avocat général Ruiz-Jarabo Colomer présentées le 4 mars 1999. - Industrie Aeronautiche e Meccaniche Rinaldo Piaggio SpA contre International Factors Italia SpA (Ifitalia), Dornier Luftfahrt GmbH et Ministero della Difesa. - Demande de décision préjudicielle: Tribunale di Genova - Italie. - Aides d'Etat - Article 92 du traité CE (devenu, après modification, article 87 CE) - Aide nouvelle - Notification préalable. - Affaire C-295/97.

Recueil de jurisprudence 1999 page I-03735


Conclusions de l'avocat général

1. Par les questions qu'il pose à la Cour, le Tribunale di Genova (Italie) veut savoir, en premier lieu, s'il est possible d'utiliser le renvoi préjudiciel en vue d'obtenir une décision de la Cour sur la compatibilité d'une loi nationale avec les dispositions de l'article 92 du traité et, en second lieu, si certaines dispositions de cette loi peuvent être considérées comme des aides publiques en faveur des grandes entreprises auxquelles elle s'adresse.

Les faits, la procédure et les questions préjudicielles

2. Les faits les plus pertinents pour le présent litige, tels qu'ils sont décrits dans l'ordonnance de renvoi, sont les suivants:

- Industrie Aeronautiche e Meccaniche Rinaldo Piaggio SpA (ci-après «Piaggio») a acheté à la société allemande Dornier Luftfahrt GmbH (ci-après «Dornier») trois aéronefs militaires destinés aux forces armées italiennes, dont Piaggio a pris possession.

- Durant les années 1992 à 1994, pour assurer le paiement des avions, Piaggio a remis à Dornier diverses sommes d'argent et lui a cédé, délégué ou transféré des créances qu'elle détenait sur le ministère de la Défense italien et la société International Factors Italia SpA.

- Par décision du 29 octobre 1994, le Tribunale di Genova a constaté l'insolvabilité de Piaggio et a admis qu'elle pouvait bénéficier des dispositions de la loi n° 95/79, du 3 avril 1979 (ci-après la «loi n° 95/79») .

- Par décret du 28 novembre 1994 des ministères de l'Industrie et du Trésor, Piaggio a été placée sous le régime d'administration extraordinaire.

- Le 14 février 1996, Piaggio a saisi le Tribunale di Genova d'une action en révocation tendant à ce que ce dernier annule les paiements et cessions de créances effectués en faveur de Dornier au cours des deux années précédant la date du décret («période suspecte»), et dont le montant s'élevait à 30 028 894 382 LIT. Dornier a contesté cette demande en faisant valoir, entre autres arguments, l'incompatibilité de la loi n° 95/79 avec le droit communautaire.

- En raison des doutes existant à cet égard, le Tribunale di Genova pose à la Cour les deux questions préjudicielles suivantes:

«1) Un juge national peut-il demander à la Cour de justice des Communautés européennes de se prononcer directement sur la compatibilité d'une disposition de la législation d'un État membre avec les règles de l'article 92 du traité (aides accordées par les États)?

2) En cas de réponse affirmative, peut-on estimer que, en adoptant la loi n° 95 du 3 avril 1979 instituant la procédure d'administration extraordinaire des grandes entreprises en crise - et en particulier les mesures contenues dans cette loi qui sont énumérées dans les motifs de la présente ordonnance -, l'État italien a accordé à certaines entreprises désignées par ce texte (à savoir les grandes entreprises) des aides contraires à l'article 92 du traité?»

Observation préliminaire

3. La Cour s'est prononcée récemment, dans l'arrêt du 1er décembre 1998, Ecotrade , sur l'aide d'État que peut constituer l'application de la loi n° 95/79, eu égard aux dispositions de l'article 4 du traité CECA. Répondant à une question préjudicielle posée par la Corte suprema di cassazione, elle a jugé que «L'application à une entreprise ... d'un régime, tel que celui instauré par la loi n° 95/79, du 3 avril 1979, et dérogatoire aux règles de droit commun en matière de faillite, doit être considérée comme donnant lieu à l'octroi d'une aide d'État, interdite par l'article 4, sous c), du traité CECA, lorsqu'il est établi que cette entreprise

- a été autorisée à poursuivre son activité économique dans des circonstances où une telle éventualité aurait été exclue dans le cadre de l'application des règles de droit commun en matière de faillite, ou

- a bénéficié d'un ou plusieurs avantages, tels qu'une garantie d'État, un taux réduit d'impôt, une exonération de l'obligation de paiement d'amendes et autres sanctions pécuniaires ou un renoncement effectif, total ou partiel, aux créances publiques, auxquels n'aurait pas pu prétendre une autre entreprise insolvable dans le cadre de l'application des règles de droit commun en matière de faillite».

4. S'il est vrai que le régime juridique des aides d'État instauré par le traité CECA diffère de celui applicable en vertu du traité CE, il est tout aussi vrai que la notion «d'aide d'État» doit s'interpréter de manière identique dans l'un et l'autre contexte; partant, la jurisprudence élaborée par la Cour dans l'arrêt Ecotrade serait applicable, en principe, à la présente question préjudicielle. Toutefois, les particularités des articles 91 à 93 du traité CE exigent que l'on examine certains traits distinctifs par rapport au régime CECA, ce qui interdit de parler de questions «manifestement identiques» aux fins de l'application de l'article 104, paragraphe 3, du règlement de procédure.

5. En tout état de cause, avant d'aborder le fond, j'estime nécessaire d'examiner les problèmes de recevabilité que posent les questions préjudicielles soulevées par le juge italien.

La recevabilité des questions

i) Sur les «références imprécises aux situations de fait et de droit visées par le juge national»

6. La Cour a déjà indiqué que la nécessité de parvenir à une interprétation utile du droit communautaire exige que soit défini le cadre juridique et factuel dans lequel doit se placer l'interprétation demandée et, dans un cas, n'a répondu que partiellement faute de disposer des informations nécessaires . L'arrêt Telemarsicabruzzo e.a. a renforcé cette exigence au point d'en faire la condition la plus significative et la plus importante qui s'impose au juge interne lorsqu'il recourt à la technique de la question préjudicielle.

7. Dans cette affaire, après avoir rappelé que «la nécessité de parvenir à une interprétation du droit communautaire qui soit utile pour le juge national exige que celui-ci définisse le cadre factuel et réglementaire dans lequel s'insèrent les questions qu'il pose ou qu'à tout le moins il explique les hypothèses factuelles sur lesquelles ces questions sont fondées», la Cour a refusé de répondre aux questions posées parce que les informations fournies par le juge italien étaient insuffisantes. Elle a ajouté par ailleurs que ces exigences «valent tout particulièrement dans le domaine de la concurrence, qui est caractérisé par des situations de fait et de droit complexes» .

8. La jurisprudence Telemarsicabruzzo e.a. a été appliquée et développée par la Cour...

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