X v Belastingdienst/Toeslagen.

JurisdictionEuropean Union
CourtCourt of Justice (European Union)
Date26 September 2018
62017CJ0175

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

26 septembre 2018 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Politique commune en matière d’asile et de protection subsidiaire – Directive 2005/85/CE – Article 39 – Directive 2008/115/CE – Article 13 – Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Article 18, article 19, paragraphe 2, et article 47 – Droit à un recours effectif – Principe de non-refoulement – Décision rejetant une demande de protection internationale et imposant une obligation de retour – Réglementation nationale prévoyant un deuxième degré de juridiction – Effet suspensif de plein droit limité au recours de première instance »

Dans l’affaire C‑175/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Raad van State (Conseil d’État, Pays-Bas), par décision du 29 mars 2017, parvenue à la Cour le 6 avril 2017, dans la procédure

X

contre

Belastingdienst/Toeslagen,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. T. von Danwitz (rapporteur), président de chambre, MM. C. Vajda, E. Juhász, Mme K. Jürimäe et M. C. Lycourgos, juges,

avocat général : M. Y. Bot,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour X, par Mme E. C. Cerezo-Weijsenfeld, advocaat,

pour le gouvernement néerlandais, par M. J. Langer ainsi que par Mmes M. K. Bulterman et M. H. S. Gijzen, en qualité d’agents,

pour le gouvernement belge, par Mmes C. Pochet, M. Jacobs et C. Van Lul, en qualité d’agents,

pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par Mmes M. Condou-Durande et C. Cattabriga ainsi que par M. G. Wils, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 24 janvier 2018,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 39 de la directive 2005/85/CE du Conseil, du 1er décembre 2005, relative à des normes minimales concernant la procédure d’octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres (JO 2005, L 326, p. 13, et rectificatif JO 2006, L 236, p. 36), et de l’article 13 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (JO 2008, L 348, p. 98), lus à la lumière de l’article 18, de l’article 19, paragraphe 2, et de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant X au Belastingdienst/Toeslagen (administration fiscale/service allocations, Pays-Bas) au sujet d’une décision de celle-ci ordonnant à X, ressortissant d’un État tiers, de rembourser des contributions financières de loyer et de soins de santé dont il a bénéficié.

Le cadre juridique

La convention relative au statut des réfugiés

3

L’article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 [Recueil des traités des Nations unies, vol. 189, p. 137, no 2545 (1954)], telle que complétée par le protocole relatif au statut des réfugiés, conclu à New York le 31 janvier 1967, lui-même entré en vigueur le 4 octobre 1967, intitulé « Défense d’expulsion et de refoulement », prévoit, à son paragraphe 1 :

« Aucun des États contractants n’expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques. »

La CEDH

4

La convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »), prévoit, à son article 3, intitulé « Interdiction de la torture » :

« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. »

5

L’article 13 de cette convention est ainsi rédigé :

« Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l’octroi d’un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles. »

Le droit de l’Union

La directive 2005/85

6

Les considérants 5 et 8 de la directive 2005/85 énoncent :

« (5)

L’objectif principal de la présente directive est d’instaurer, dans la Communauté, un cadre minimum pour la procédure d’octroi et de retrait du statut de réfugié.

[...]

(8)

La présente directive respecte les droits fondamentaux et observe les principes reconnus notamment par la [Charte]. »

7

L’article 3 de cette directive, intitulé « Champ d’application », dispose, à son paragraphe 1 :

« La présente directive s’applique à toutes les demandes d’asile introduites sur le territoire des États membres, y compris à la frontière ou dans une zone de transit, ainsi qu’au retrait du statut de réfugié. »

8

Aux termes de l’article 39 de ladite directive, intitulé « Droit à un recours effectif » :

« 1. Les États membres font en sorte que les demandeurs d’asile disposent d’un droit à un recours effectif devant une juridiction contre les actes suivants :

a)

une décision concernant leur demande d’asile [...]

[...]

3. Les États membres prévoient le cas échéant les règles découlant de leurs obligations internationales relatives :

a)

à la question de savoir si le recours prévu en application du paragraphe 1 a pour effet de permettre aux demandeurs de rester dans l’État membre concerné dans l’attente de l’issue du recours ;

b)

à la possibilité d’une voie de droit ou de mesures conservatoires si le recours visé au paragraphe 1 n’a pas pour effet de permettre aux demandeurs de rester dans l’État membre concerné dans l’attente de l’issue de ce recours. Les États membres peuvent aussi prévoir une procédure d’office [...]

[...] »

La directive 2008/115

9

Les considérants 2, 4 et 24 de la directive 2008/115 énoncent :

« (2)

Le Conseil européen de Bruxelles des 4 et 5 novembre 2004 a recommandé la mise en place d’une politique efficace d’éloignement et de rapatriement basée sur des normes communes, afin que les personnes concernées soient rapatriées d’une façon humaine et dans le respect intégral de leurs droits fondamentaux et de leur dignité.

[...]

(4)

Il est nécessaire de fixer des règles claires, transparentes et équitables afin de définir une politique de retour efficace, constituant un élément indispensable d’une politique migratoire bien gérée.

[...]

(24)

La présente directive respecte les droits fondamentaux et observe les principes reconnus, en particulier, par la [C]harte. »

10

L’article 2, paragraphe 1, de cette directive prévoit que celle-ci s’applique aux ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d’un État membre.

11

Aux termes de l’article 3 de ladite directive :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

4)

“décision de retour” : une décision ou un acte de nature administrative ou judiciaire déclarant illégal le séjour d’un ressortissant d’un pays tiers et imposant ou énonçant une obligation de retour ;

[...] »

12

L’article 12, paragraphe 1, de la directive 2008/115 prévoit :

« Les décisions de retour et, le cas échéant, les décisions d’interdiction d’entrée ainsi que les décisions d’éloignement sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles.

[...] »

13

L’article 13 de cette directive, intitulé « Voies de recours », est libellé comme suit :

« 1. Le ressortissant concerné d’un pays tiers dispose d’une voie de recours effective pour attaquer les décisions liées au retour visées à l’article 12, paragraphe 1, devant une autorité judiciaire ou administrative compétente ou une instance compétente composée de membres impartiaux et jouissant de garanties d’indépendance.

2. L’autorité ou l’instance visée au paragraphe 1 est compétente pour réexaminer les décisions liées au retour visées à l’article 12, paragraphe 1, et peut notamment en suspendre temporairement l’exécution, à moins qu’une suspension temporaire ne soit déjà applicable en vertu de la législation nationale.

[...] »

Le droit néerlandais

14

En droit néerlandais, les recours de première instance formés devant le rechtbank (tribunal, Pays-Bas) contre une décision du Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie (secrétaire d’État à la Sécurité et à la Justice, Pays-Bas) en matière de protection internationale ont un effet suspensif de plein droit. S’il est possible d’interjeter appel d’un jugement rendu par le rechtbank (tribunal) qui confirme une décision rejetant une demande de protection internationale et impose une obligation de retour, la procédure d’appel ne revêt pas d’effet suspensif de plein droit. Le requérant peut toutefois demander au voorzieningenrechter (juge des référés) du Raad van State (Conseil d’État, Pays-Bas) de prendre des mesures provisoires, afin d’éviter notamment d’être expulsé, dans l’attente de l’issue de la procédure d’appel au fond. Cette demande de mesures provisoires n’a pas, elle-même, d’effet suspensif de plein droit.

Le litige au...

To continue reading

Request your trial
16 practice notes
  • Opinion of Advocate General Bobek delivered on 4 March 2021.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • March 4, 2021
    ...2017, X e X (C638/16 PPU, EU:C:2017:173, punto 37), del 26 settembre 2018, Belastingdienst/Toeslagen (Effetto sospensivo dell’appello) (C‑175/17, EU:C:2018:776, punto 24), del 19 novembre 2019, A. K. e a. (Indipendenza della Sezione disciplinare della Corte suprema) (C‑585/18, C‑624/18 e C‑......
  • Österreichischer Gewerkschaftsbund, Gewerkschaft Öffentlicher Dienst contra Republik Österreich.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • December 6, 2018
    ...efectividad)» [Véase, en particular, la sentencia de 26 de septiembre de 2018, Belastingdienst/Toeslagen (efecto suspensivo del recurso), (C‑175/17, EU:C:2018:776), apartado 86 Véanse las conclusiones del Abogado General Bobek en el asunto Banger (C‑89/17, EU:C:2018:225), puntos 77 a 80, 91......
  • Conclusiones del Abogado General Sr. M. Szpunar, presentadas el 30 de abril de 2020.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • April 30, 2020
    ...Gnandi (C‑181/16, EU:C:2018:465, point 51), et du 26 septembre 2018, Belastingdienst/Toeslagen (Effet suspensif de l’appel) (C‑175/17, EU:C:2018:776, point 68 Voir, également, article 19, paragraphe 2, de la Charte et points 38 à 46 des présentes conclusions. 69 Sur le principe de non-refou......
  • Conclusiones del Abogado General Sr. J. Richard de la Tour, presentadas el 21 de junio de 2022.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • June 21, 2022
    ... 59 Vgl. u. a. entsprechend Urteile vom 26. September 2018, Belastingdienst/Toeslagen (Aufschiebende Wirkung des Rechtsmittels) (C‑175/17, EU:C:2018:776 , Rn. 38), und vom 26. September 2018, Staatssecretaris van Veiligheid en justitie (Aufschiebende Wirkung des Rechtsmittels) ( C‑180/17 ......
  • Request a trial to view additional results
16 cases
  • Österreichischer Gewerkschaftsbund, Gewerkschaft Öffentlicher Dienst contra Republik Österreich.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • December 6, 2018
    ...efectividad)» [Véase, en particular, la sentencia de 26 de septiembre de 2018, Belastingdienst/Toeslagen (efecto suspensivo del recurso), (C‑175/17, EU:C:2018:776), apartado 86 Véanse las conclusiones del Abogado General Bobek en el asunto Banger (C‑89/17, EU:C:2018:225), puntos 77 a 80, 91......
  • Silver Plastics GmbH & Co. KG and Johannes Reifenhäuser Holding GmbH & Co. KG v European Commission.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • October 22, 2020
    ...[véase, por analogía, la sentencia de 26 de septiembre de 2018, Belastingdienst/Toeslagen (Efecto suspensivo del recurso de apelación), C‑175/17, EU:C:2018:776, apartado 35 y jurisprudencia 26 Recordadas estas consideraciones, debe entenderse que el primer motivo de casación de las recurren......
  • Martin Leitner contra Landespolizeidirektion Tirol.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • December 6, 2018
    ...de efectividad)» [Véase, en particular, la sentencia de 26 de septiembre de 2018, Belastingdienst/Toeslagen (efecto suspensivo del recurso), C‑175/17, EU:C:2018:776, apartado 72 Véanse las conclusiones del Abogado General Bobek en el asunto Banger (C‑89/17, EU:C:2018:225), puntos 77 a 80, 9......
  • Ministerio Fiscal contra VL.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • June 25, 2020
    ...aussetzen (vgl. in diesem Sinne Urteil vom 26. September 2018, Belastingdienst/Toeslagen [Aufschiebende Wirkung des Rechtsmittels], C‑175/17, EU:C:2018:776, Rn. 33 und die dort angeführte 98 Da, wie oben in Rn. 94 festgestellt, einem Drittstaatsangehörigen, der bei einer „anderen Behörde“ i......
  • Request a trial to view additional results

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT