Ministero dell'Economia e delle Finanze v Cassa di Risparmio di Firenze SpA, Fondazione Cassa di Risparmio di San Miniato and Cassa di Risparmio di San Miniato SpA.
Jurisdiction | European Union |
Date | 10 January 2006 |
Court | Court of Justice (European Union) |
Affaire C-222/04
Ministero dell'Economia e delle Finanze
contre
Cassa di Risparmio di Firenze SpA e.a.
(demande de décision préjudicielle, introduite par la Corte suprema di cassazione)
«Aides d'État — Articles 87 CE et 88 CE — Banques — Fondations bancaires — Notion d'entreprise — Allègement de l'impôt direct sur les dividendes perçus par les fondations bancaires — Qualification d'aide d'État — Compatibilité avec le marché commun — Décision 2003/146/CE de la Commission — Appréciation de validité — Irrecevabilité — Articles 12 CE, 43 CE et 56 CE — Principe de non-discrimination — Liberté d'établissement — Libre circulation des capitaux»
Conclusions de l'avocat général M. F. G. Jacobs, présentées le 27 octobre 2005
Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 10 janvier 2006
Sommaire de l'arrêt
1. Questions préjudicielles — Appréciation de validité — Question portant sur la validité d'une décision n'ayant pas été attaquée sur le fondement de l'article 230 CE
2. Questions préjudicielles — Compétence de la Cour — Limites — Question manifestement dénuée de pertinence
3. Concurrence — Règles communautaires — Destinataires — Entreprises — Notion
(Art. 87, § 1, CE)
4. Concurrence — Règles communautaires — Destinataires — Entreprises — Notion
(Art. 87, § 1, CE)
5. Aides accordées par les États — Notion
(Art. 87, § 1, CE)
6. Aides accordées par les États — Notion — Caractère sélectif de la mesure
(Art. 87, § 1, CE)
7. Aides accordées par les États — Affectation des échanges entre États membres — Atteinte à la concurrence — Critères d'appréciation
(Art. 87, § 1, CE)
8. Aides accordées par les États — Notion
(Art. 87, § 1, CE)
1. Dès lors qu'une question préjudicielle en appréciation de validité d'une décision de la Commission a été posée d'office par la juridiction de renvoi, et non pas à la demande d'un sujet de droit qui, ayant eu la possibilité d'introduire un recours en annulation contre cette décision, ne l'a pas utilisée dans le délai imparti par l'article 230 CE, ladite question préjudicielle ne peut être déclarée irrecevable en raison de cette dernière circonstance.
(cf. points 72-74)
2. La Cour peut décider de ne pas statuer sur une question préjudicielle en appréciation de validité d'un acte communautaire, lorsqu'il apparaît de manière manifeste que cette appréciation, demandée par la juridiction nationale, n'a aucun rapport avec la réalité ou l'objet du litige au principal.
(cf. point 75)
3. Dans le contexte du droit de la concurrence, la notion d'«entreprise» comprend toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement.
Constitue une activité économique toute activité consistant à offrir des biens ou des services sur un marché donné. Si, le plus souvent, l'activité économique est exercée directement sur le marché, il n'est cependant pas exclu qu'elle soit le fait à la fois d'un opérateur en contact direct avec le marché et, indirectement, d'une autre entité contrôlant cet opérateur dans le cadre d'une unité économique qu'ils forment ensemble.
À cet égard, la simple détention de participations, même de contrôle, ne suffit pas à caractériser une activité économique de l'entité détentrice de ces participations, lorsqu'elle ne donne lieu qu'à l'exercice des droits attachés à la qualité d'actionnaire ou d'associé, ainsi que, le cas échéant, à la perception de dividendes, simples fruits de la propriété d'un bien. En revanche, une entité qui, détenant des participations de contrôle dans une société, exerce effectivement ce contrôle en s'immisçant directement ou indirectement dans la gestion de celle-ci doit être considérée comme prenant part à l'activité économique exercée par l'entreprise contrôlée et doit donc elle-même, à ce titre, être qualifiée d'entreprise au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE.
À défaut, un simple démembrement d'une entreprise en deux entités distinctes, dont la première poursuivrait directement l'activité économique antérieure et la seconde contrôlerait la première tout en s'ingérant dans sa gestion, suffirait à priver de leur effet utile les règles communautaires relatives aux aides d'État. Il permettrait à la seconde entité de bénéficier de subventions ou d'autres avantages accordés par l'État ou au moyen de ressources d'État et de les utiliser en tout ou partie au profit de la première, dans l'intérêt, également, de l'unité économique formée par les deux entités.
Est dès lors susceptible d'être qualifiée d'«entreprise» au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE et être ainsi soumise aux règles communautaires relatives aux aides d'État une personne morale telle qu'une fondation bancaire contrôlant le capital d'une société bancaire, dont le régime comporte des règles qui traduisent une mission s'étendant au-delà d'un simple placement de capitaux par un investisseur, rendent possible l'exercice de fonctions de contrôle, mais également d'impulsion et de soutien financier, et illustrent ainsi l'existence de liens organiques et fonctionnels entre les fondations bancaires et les sociétés bancaires.
(cf. points 107-118, 125, disp. 1)
4. Une personne morale, telle une fondation bancaire, dont l'activité se limite au versement de contributions à des organismes sans but lucratif, ne saurait être qualifiée d'«entreprise» au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE. En effet, une telle activité a un caractère exclusivement social et n'est pas exercée sur un marché en concurrence avec d'autres opérateurs. Au titre de ladite activité, une fondation bancaire agit comme un organisme de bienfaisance ou une organisation caritative et non comme une entreprise.
En revanche, lorsqu'une fondation bancaire, agissant elle-même dans les domaines d'intérêt public et d'utilité sociale, utilise l'habilitation qui lui est donnée par le législateur national d'effectuer des opérations financières, commerciales, immobilières et mobilières nécessaires ou opportunes en vue de la réalisation des buts qui lui sont fixés, elle est susceptible d'offrir des biens ou des services sur le marché en concurrence avec d'autres opérateurs, par exemple dans des domaines comme la recherche scientifique, l'éducation, l'art ou la santé.
Dans cette hypothèse, une telle fondation bancaire doit être considérée comme une entreprise, en tant qu'elle exerce une activité économique, nonobstant la circonstance que l'offre de biens ou de services est faite sans but lucratif, dès lors que cette offre se trouve en concurrence avec celle d'opérateurs poursuivant un tel but, et doit se voir ainsi appliquer les règles communautaires relatives aux aides d'État.
(cf. points 119-125, disp. 1)
5. La notion d'aide est plus générale que celle de subvention, parce qu'elle comprend non seulement des prestations positives, telles que les subventions elles-mêmes, mais également des interventions qui, sous des formes diverses, allègent les charges qui normalement grèvent le budget d'une entreprise et qui, par là, sans être des subventions au sens strict du mot, sont de même nature et ont des effets identiques.
Il en découle qu'une mesure par laquelle les autorités publiques accordent à certaines entreprises une exonération fiscale qui, bien que ne comportant pas un transfert de ressources d'État, place les bénéficiaires dans une situation financière plus favorable que les autres contribuables constitue une aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE. De même, peut constituer une aide d'État une mesure accordant à certaines entreprises une réduction d'impôt ou un report du paiement de l'impôt normalement dû.
(cf. points 131-132)
6. Un avantage fiscal, accordé à certaines entreprises en considération de leur forme juridique, personne morale de droit public ou fondation, et des secteurs dans lesquels elles exercent leur activité, ne s'applique pas à tous les opérateurs économiques et ne peut donc être considéré comme une mesure générale de politique fiscale ou économique, de sorte qu'il est sélectif.
(cf. points 135-136, 138)
7. L'article 87, paragraphe 1, CE prohibe les aides qui affectent les échanges entre États membres et faussent ou menacent de fausser la concurrence. Aux fins de la qualification d'une mesure nationale en tant qu'aide d'État prohibée, il y a lieu, non pas d'établir une incidence réelle de l'aide sur les échanges entre États membres et une distorsion effective de la concurrence, mais seulement d'examiner si l'aide est susceptible d'affecter ces échanges et de fausser la concurrence. En particulier, lorsqu'une aide accordée par un État membre renforce la position d'une entreprise par rapport à d'autres entreprises concurrentes dans les échanges intracommunautaires, ces derniers doivent être considérés comme influencés par l'aide. À cet égard, la circonstance qu'un secteur économique a fait l'objet d'une libéralisation au niveau communautaire est de nature à caractériser une incidence réelle ou potentielle des aides sur la concurrence, ainsi que leur effet sur les échanges entre États membres.
Par ailleurs, il n'est pas nécessaire que l'entreprise bénéficiaire participe elle-même aux échanges intracommunautaires. En effet, lorsqu'un État membre octroie une aide à une entreprise, l'activité intérieure peut s'en trouver maintenue ou augmentée, avec cette conséquence que les chances des entreprises établies dans d'autres États membres de pénétrer le marché de cet État membre en sont diminuées. En outre, un renforcement d'une entreprise qui, jusqu'alors, ne participait pas à des échanges intracommunautaires peut la placer dans une situation lui permettant de pénétrer le marché d'un autre État membre.
(cf. points 139-143)
8. Une exonération de retenue sur des dividendes revenant à des fondations bancaires, titulaires de participations dans des sociétés bancaires et qui poursuivent exclusivement des buts de bienfaisance, d'éducation, d'enseignement...
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