Commission of the European Communities v Federal Republic of Germany.
Jurisdiction | European Union |
ECLI | ECLI:EU:C:2005:462 |
Court | Court of Justice (European Union) |
Docket Number | C-433/03 |
Date | 14 July 2005 |
Procedure Type | Recours en constatation de manquement - non fondé |
Celex Number | 62003CJ0433 |
Affaire C-433/03
Commission des Communautés européennes
contre
République fédérale d'Allemagne
«Manquement d'État — Négociation, conclusion, ratification et mise en œuvre d'accords bilatéraux par un État membre — Transports de marchandises ou de personnes par voie navigable — Compétence externe de la Communauté — Article 10 CE — Règlements (CEE) nº 3921/91 et (CE) nº 1356/96»
Conclusions de l'avocat général M. A. Tizzano, présentées le 10 mars 2005
Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 14 juillet 2005
Sommaire de l'arrêt
1. Recours en manquement — Objet du litige — Détermination au cours de la procédure précontentieuse — Modification ultérieure dans un sens restrictif — Admissibilité
2. Recours en manquement — Examen du bien-fondé par la Cour — Situation à prendre en considération — Situation à l'expiration du délai fixé par l'avis motivé
3. Accords internationaux — Compétence de la Communauté — Création d'une compétence externe exclusive de la Communauté du fait de l'exercice de sa compétence interne — Conditions — Transport par voie navigable — Règlement nº 3921/91 — Insuffisance de la réglementation communautaire pour opérer le transfert de la compétence externe exclusive à la Communauté
(Art. 71, § 1, CE et 80, § 1, CE; règlement du Conseil nº 3921/91)
4. Procédure — Requête introductive d'instance — Objet du litige — Définition — Modification en cours d'instance — Interdiction
5. États membres — Obligations — Obligation de coopération — Décision autorisant la Commission à négocier un accord multilatéral au nom de la Communauté — Devoirs des États membres — Devoirs d'action et d'abstention — Portée
1. S'il est vrai que l'objet du recours introduit en vertu de l'article 226 CE est circonscrit par la procédure précontentieuse prévue par cette disposition et que, par conséquent, l'avis motivé de la Commission et le recours doivent être fondés sur des griefs identiques, cette exigence ne saurait toutefois aller jusqu'à imposer en toute hypothèse une coïncidence parfaite dans leur formulation, dès lors que l'objet du litige n'a pas été étendu ou modifié mais a été, au contraire, simplement restreint.
(cf. point 28)
2. L'existence d'un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l'État membre telle qu'elle se présentait au terme du délai fixé dans l'avis motivé et les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour.
(cf. point 32)
3. La Communauté acquiert une compétence externe exclusive du fait de l'exercice de sa compétence interne, lorsque les engagements internationaux relèvent du domaine d'application des règles communes ou, en tout cas, d'un domaine déjà couvert en grande partie par de telles règles, et ce même s'il n'existe aucune contradiction entre celles-ci et lesdits engagements.
Ainsi, lorsque la Communauté a inclus dans ses actes législatifs internes des clauses relatives au traitement à réserver aux ressortissants de pays tiers ou qu'elle a conféré expressément à ses institutions une compétence pour négocier avec les pays tiers, elle acquiert une compétence externe exclusive dans la mesure couverte par ces actes.
Il en va également ainsi, même en l'absence de clause expresse habilitant ses institutions à négocier avec des pays tiers, lorsque la Communauté a réalisé une harmonisation complète dans un domaine déterminé, car les règles communes ainsi adoptées pourraient être affectées si les États membres conservaient une liberté de négociation avec les pays tiers.
Pour ce qui concerne la détermination des conditions d'admission des transporteurs non communautaires aux transports nationaux par voie navigable, la Communauté n'a pas acquis une compétence externe exclusive. En effet, le règlement nº 3921/91, fixant les conditions de l'admission de transporteurs non-résidents aux transports nationaux de marchandises ou de personnes par voie navigable dans un État membre, ne régit pas la situation desdits transporteurs dans la mesure où il ne vise que les transporteurs établis dans un État membre et où l'harmonisation réalisée par celui-ci n'a pas de ce fait un caractère complet.
(cf. points 44-48, 50, 52-53)
4. Une partie ne peut, en cours d'instance, modifier l'objet même du litige, de sorte que le bien-fondé du recours doit être examiné uniquement au regard des conclusions contenues dans la requête introductive d'instance.
(cf. point 61)
5. Le devoir de coopération loyale, imposé par l'article 10 CE, est d'application générale et ne dépend ni du caractère exclusif ou non de la compétence communautaire concernée ni du droit éventuel, pour les États membres, de contracter des obligations envers des États tiers.
En particulier, les États membres sont tenus à des devoirs particuliers d'action et d'abstention dans une situation où la Commission a soumis au Conseil des propositions qui, bien qu'elles n'aient pas été adoptées par celui-ci, constituent le point de départ d'une action communautaire concertée.
Il s'ensuit que l'adoption par le Conseil d'une décision autorisant la Commission à négocier un accord multilatéral au nom de la Communauté, laquelle marque le début d'une action communautaire concertée sur le plan international, implique, à ce titre, sinon un devoir d'abstention dans le chef des États membres, à tout le moins une obligation de coopération étroite entre ces derniers et les institutions communautaires de manière à faciliter l'accomplissement de la mission de la Communauté ainsi qu'à garantir l'unité et la cohérence de l'action et de la représentation internationales de cette dernière.
(cf. points 64-66)
ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)
14 juillet 2005 (*)
«Manquement d’État – Négociation, conclusion, ratification et mise en œuvre d’accords bilatéraux par un État membre – Transports de marchandises ou de personnes par voie navigable – Compétence externe de la Communauté – Article 10 CE – Règlements (CEE) nº 3921/91 et (CE) nº 1356/96»
Dans l’affaire C-433/03,
ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 226 CE, introduit le 10 octobre 2003,
Commission des Communautés européennes, représentée par Mme C. Schmidt ainsi que par MM. W. Wils et A. Manville, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie requérante,
contre
République fédérale d’Allemagne, représentée par M. W.-D. Plessing, en qualité d’agent, assisté de Me G. Schohe, Rechtsanwalt,
partie défenderesse,
LA COUR (deuxième chambre),
composée de M. C. W. A. Timmermans, président de chambre, Mme R. Silva de Lapuerta (rapporteur), MM. C. Gulmann, J. Makarczyk et P. Kūris, juges,
avocat général: M. A. Tizzano,
greffier: M. R. Grass,
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 10 mars 2005,
rend le présent
Arrêt
1 Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que:
a) en ayant individuellement négocié, conclu, ratifié et mis en œuvre:
– l’accord entre le gouvernement de la République fédérale d’Allemagne et le gouvernement de la Roumanie sur la navigation intérieure, signé à Bonn le 22 octobre 1991 (BGBl. 1993 II, p. 770, ci-après l’«accord conclu avec la Roumanie»),
– l’accord entre le gouvernement de la République fédérale d’Allemagne et le gouvernement de la République de Pologne sur la navigation intérieure, signé à Varsovie le 8 novembre 1991 (BGBl. 1993 II, p. 779, ci-après l’«accord conclu avec la Pologne»), et
– l’accord entre le gouvernement de la République fédérale d’Allemagne et le gouvernement de l’Ukraine sur la navigation intérieure, signé à Bonn le 14 juillet 1992 (BGBl. 1994 II, p. 258, ci-après l’«accord conclu avec l’Ukraine»), et
b) en refusant de dénoncer les accords conclus avec la Roumanie, la Pologne et l’Ukraine ainsi que:
– l’accord entre le gouvernement de la République fédérale d’Allemagne et le gouvernement de la République socialiste tchécoslovaque
sur la navigation intérieure, signé à Prague le 26 janvier 1988
(BGBl. 1989 II, p. 1035, ci-après l’«accord conclu avec la Tchécoslovaquie»), et
– l’accord entre le gouvernement de la République fédérale d’Allemagne et le gouvernement de la République populaire de Hongrie sur
la navigation intérieure, signé à Budapest le 15 janvier 1988
(BGBl. 1989 II, p. 1026, ci-après l’«accord conclu avec la Hongrie»),
la République fédérale d’Allemagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 10 CE et du règlement (CEE) nº 3921/91 du Conseil, du 16 décembre 1991, fixant les conditions de l’admission de transporteurs non résidents aux transports nationaux de marchandises ou de personnes par voie navigable dans un État membre (JO L 373, p. 1), en ce qui concerne les accords mentionnés sous a), ainsi que du règlement (CE) nº 1356/96 du Conseil, du 8 juillet 1996, concernant des règles communes applicables aux transports de marchandises ou de personnes par voie navigable entre États membres, en vue de réaliser dans ces transports la libre prestation de services (JO L 175, p. 7), en ce qui concerne les accords mentionnés sous b).
Le cadre juridique
La réglementation communautaire
Les dispositions du traité CE
2 L’article 10 CE est libellé comme suit:
«Les États membres prennent toutes mesures générales ou particulières propres à assurer l’exécution des obligations découlant du présent traité ou résultant des actes des institutions de la Communauté. Ils facilitent à celle-ci l’accomplissement de sa mission.
Ils s’abstiennent de toutes mesures susceptibles de mettre en péril la réalisation des buts du présent traité.»
3 En ce qui concerne la matière des transports, l’article 70 CE prévoit que les objectifs du traité sont poursuivis par les États membres dans le cadre d’une politique commune.
4 L’article 71, paragraphe 1, CE dispose:
«En vue de réaliser la mise en œuvre de l’article 70 et compte tenu des aspects spéciaux des transports, le Conseil, statuant...
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