Commissioners of Customs & Excise and Attorney General v Federation of Technological Industries and Others

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2006:309
Docket NumberC-384/04
Celex Number62004CJ0384
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date11 May 2006

Affaire C-384/04

Commissioners of Customs & Excise et Attorney General

contre

Federation of Technological Industries e.a.

(demande de décision préjudicielle, introduite par la Court of Appeal

(England & Wales) (Civil Division))

«Sixième directive TVA — Articles 21, paragraphe 3, et 22, paragraphe 8 — Mesures nationales en vue de lutter contre la fraude — Responsabilité solidaire d'acquittement de la TVA — Constitution d'une garantie pour la TVA due par un autre opérateur»

Conclusions de l'avocat général M. M. Poiares Maduro, présentées le 7 décembre 2005

Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 11 mai 2006

Sommaire de l'arrêt

1. Dispositions fiscales — Harmonisation des législations — Taxes sur le chiffre d'affaires — Système commun de taxe sur la valeur ajoutée — Redevables de la taxe

(Directive du Conseil 77/388, art. 21, § 3)

2. Dispositions fiscales — Harmonisation des législations — Taxes sur le chiffre d'affaires — Système commun de taxe sur la valeur ajoutée — Obligations des redevables

(Directive du Conseil 77/388, art. 21, § 3, et 22, § 8)

1. L'article 21, paragraphe 3, de la sixième directive 77/388, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires, telle que modifiée par les directives 2000/65 et 2001/115, permet aux États membres d'adopter des mesures en vertu desquelles une personne est solidairement tenue d'acquitter une somme au titre de la taxe sur la valeur ajoutée due par une autre personne désignée comme redevable par une des dispositions des paragraphes 1 et 2 dudit article.

Cette disposition doit être interprétée en ce sens qu'elle permet à un État membre d'adopter une réglementation qui prévoit qu'un assujetti, en faveur duquel a été effectuée une livraison de biens ou une prestation de services et qui savait, ou avait de bonnes raisons de soupçonner, que tout ou partie de la taxe due sur cette livraison ou cette prestation, ou sur toute livraison ou toute prestation antérieure ou postérieure, resterait impayée, peut être solidairement tenu, avec la personne redevable, d'acquitter cette taxe.

Toutefois, une telle réglementation doit respecter les principes généraux du droit qui font partie de l'ordre juridique communautaire, dont notamment les principes de sécurité juridique et de proportionnalité. En particulier, si l'article 21, paragraphe 3, de la sixième directive permet de se fonder sur des présomptions quant au fait que la personne concernée savait ou aurait dû savoir que la taxe resterait impayée, de telles présomptions ne peuvent pas être formulées d'une manière telle qu'il devient pratiquement impossible ou excessivement difficile pour celle-ci de les combattre par la preuve contraire.

(cf. points 28, 32, 35, disp. 1)

2. L'article 22, paragraphe 8, de la sixième directive 77/388, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires, telle que modifiée par les directives 2000/65 et 2001/115, doit être interprété en ce sens qu'il ne permet pas à un État membre d'adopter ni une réglementation qui prévoit qu'un assujetti, en faveur duquel a été effectuée une livraison de biens ou une prestation de services et qui savait, ou avait de bonnes raisons de soupçonner, que tout ou partie de la taxe sur la valeur ajoutée due sur cette livraison ou cette prestation, ou sur toute livraison ou toute prestation antérieure ou postérieure, resterait impayée, peut être solidairement tenu, avec la personne redevable, d'acquitter cette taxe, ni une réglementation qui prévoit qu'un assujetti peut être contraint de constituer une garantie pour le paiement de ladite taxe qui est ou pourrait devenir exigible de l'assujetti à qui il livre lesdits biens ou services ou par qui ils lui sont livrés.

En revanche, cette disposition ne s'oppose pas à une réglementation nationale qui impose à toute personne solidairement tenue d'acquitter la taxe, conformément à une mesure nationale adoptée sur le fondement de l'article 21, paragraphe 3, de la sixième directive, l'obligation de constituer une garantie pour le paiement de la taxe due.

(cf. points 47-48, disp. 2)




ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

11 mai 2006 (*)

«Sixième directive TVA – Articles 21, paragraphe 3, et 22, paragraphe 8 – Mesures nationales en vue de lutter contre la fraude – Responsabilité solidaire d’acquittement de la TVA – Constitution d’une garantie pour la TVA due par un autre opérateur»

Dans l’affaire C-384/04,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par la Court of Appeal (England & Wales) (Civil Division) (Royaume‑Uni), par décision du 30 juillet 2004, parvenue à la Cour le 4 septembre 2004, dans la procédure

Commissioners of Customs & Excise,

Attorney General

contre

Federation of Technological Industries e.a.,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. A. Rosas, président de chambre, MM. J.-P. Puissochet, S. von Bahr (rapporteur), U. Lõhmus et A. Ó Caoimh, juges,

avocat général: M. M. Poiares Maduro,

greffier: Mme C. Strömholm, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 5 octobre 2005,

considérant les observations présentées:

– pour la Federation of Technological Industries e.a., par M. A. Young, barrister, et Me D. Waelbroeck, avocat,

– pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mme C. Jackson, en qualité d’agent, assistée de M. J. Peacock, QC, et de M. T. Ward, barrister,

– pour le gouvernement allemand, par Mme C. Schulze-Bahr, en qualité d’agent,

– pour l’Irlande, par M. D. J. O’Hagan, en qualité d’agent, assisté de Mme G. Clohessy, SC, et M. B. Conway, barrister-at-law,

– pour le gouvernement chypriote, par Mme N. Charalampidou, en qualité d’agent,

– pour le gouvernement néerlandais, par Mmes H. G. Sevenster et C. A. H. M. ten Dam, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement portugais, par M. L. I. Fernandes, en qualité d’agent,

– pour la Commission des Communautés européennes, par M. R. Lyal, en qualité d’agent,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 7 décembre 2005,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 21, paragraphe 3, et 22, paragraphe 8, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1), telle que modifiée par les directives 2000/65/CE du Conseil, du 17 octobre 2000 (JO L 269, p. 44), et 2001/115/CE du Conseil, du 20 décembre 2001 (JO 2002, L 15, p. 24, ci‑après la «sixième directive»).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un recours en «judicial review» opposant 53 négociants du secteur des téléphones mobiles et des unités de traitement informatique ainsi que leur organisme professionnel, la Federation of Technological Industries (ci‑après la «Federation»), aux Commissioners of Customs & Excise et à l’Attorney General (ci‑après les «Commissioners») au sujet de la compatibilité avec le droit communautaire des dispositions des articles 17 et 18 de la loi de finances de 2003 (Finance Act 2003), qui ont été adoptés pour faire face à l’abus frauduleux du système de la taxe sur la valeur ajoutée (ci‑après la «TVA»).

Le cadre juridique

La réglementation communautaire

3 L’article 21 de la sixième directive dispose:

«1. En régime intérieur, la taxe sur la valeur ajoutée est due:

a) par l’assujetti effectuant une livraison de biens ou une prestation de services imposable, à l’exception des cas visés aux points b) et c).

Lorsque la livraison de biens ou la prestation de services imposable est effectuée par un assujetti qui n’est pas établi à l’intérieur du pays, les États membres peuvent, dans les conditions qu’ils fixent, prévoir que le redevable de la taxe est le destinataire de la livraison de biens ou de la prestation de services imposable;

b) par le preneur assujetti de services visés à l’article 9, paragraphe 2, point e), ou par le preneur, qui est identifié à la taxe sur la valeur ajoutée à l’intérieur du pays, de services couverts par l’article 28 ter, titres C, D, E et F, si les services sont effectués par un assujetti non établi à l’intérieur du pays;

c) par le destinataire de la livraison de biens, lorsque les conditions suivantes sont réunies:

– l’opération imposable est une livraison de biens effectuée dans les conditions prévues à l’article 28 quater, titre E, paragraphe 3,

– le destinataire de cette livraison de biens est un autre assujetti ou une personne morale non assujettie identifié(e) à la taxe sur la valeur ajoutée à l’intérieur du pays,

– la facture délivrée par l’assujetti non établi à l’intérieur du pays est conforme à l’article 22, paragraphe 3.

Toutefois, les États membres peuvent prévoir une dérogation à cette obligation, lorsque l’assujetti non établi à l’intérieur du pays a désigné un représentant fiscal dans ce pays;

d) par toute personne qui mentionne la taxe sur la valeur ajoutée sur une facture;

e) par la personne effectuant une acquisition intracommunautaire de biens imposable.

2. Par dérogation aux dispositions du paragraphe 1:

a) lorsque, en application des dispositions du paragraphe 1, le redevable de la taxe est un assujetti non établi à l’intérieur du pays, les États membres peuvent lui permettre de désigner un représentant fiscal en tant que redevable. Cette option est soumise aux conditions et aux modalités fixées par chaque État membre;

b) lorsque l’opération imposable est effectuée par un assujetti non établi à l’intérieur du pays et qu’il n’existe, avec le pays du siège ou d’établissement de cet assujetti, aucun instrument juridique relatif à l’assistance mutuelle ayant une portée similaire à celle prévue par les directives 76/308/...

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