Colegio de Oficiales de la Marina Mercante Española v Administración del Estado.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2003:515
Date30 September 2003
Celex Number62001CJ0405
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-405/01
EUR-Lex - 62001J0405 - FR 62001J0405

Arrêt de la Cour du 30 septembre 2003. - Colegio de Oficiales de la Marina Mercante Española contre Administración del Estado. - Demande de décision préjudicielle: Tribunal Supremo - Espagne. - Libre circulation des travailleurs - Article 39, paragraphe 4, CE - Emplois dans l'administration publique - Capitaines et seconds de navires de la marine marchande - Attribution de prérogatives de puissance publique à bord - Emplois réservés aux ressortissants de l'État du pavillon - Emplois ouverts aux ressortissants d'autres États membres sous condition de réciprocité. - Affaire C-405/01.

Recueil de jurisprudence 2003 page I-10391


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

1. Libre circulation des personnes - Dérogations - Emplois dans l'administration publique - Notion - Capitaine et second de navires dans la marine marchande - Inclusion - Conditions

(Art. 39, § 4, CE)

2. Libre circulation des personnes - Dérogations - Protection de l'ordre public, de la sécurité publique et de la santé publique - Exclusion générale des ressortissants d'autres États membres de l'accès aux emplois de capitaine et de second dans la marine marchande - Inadmissibilité

(Art. 39, § 3, CE)

3. États membres - Obligations - Exécution du droit communautaire - Condition de réciprocité - Inadmissibilité

4. Libre circulation des personnes - Travailleurs - Accès des ressortissants d'autres États membres aux emplois de capitaine et de second dans la marine marchande subordonné à une condition de réciprocité - Inadmissibilité

(Art. 39 CE)

Sommaire

1. L'article 39, paragraphe 4, CE doit être interprété en ce sens qu'il n'autorise un État membre à réserver à ses ressortissants les emplois de capitaine et de second des navires marchands battant son pavillon qu'à la condition que les prérogatives de puissance publique attribuées aux capitaines et aux seconds de ces navires soient effectivement exercées de façon habituelle et ne représentent pas une part très réduite de leurs activités.

En effet, la portée de cette dérogation à la libre circulation des travailleurs concernant les emplois dans l'administration publique doit être limitée à ce qui est strictement nécessaire à la sauvegarde des intérêts généraux de l'État membre concerné, laquelle ne saurait être mise en péril si des prérogatives de puissance publique n'étaient exercées que de façon sporadique, voire exceptionnelle, par des ressortissants d'autres États membres.

( voir points 44, 50, disp. 1 )

2. Une exclusion générale, par un État membre, des ressortissants d'autres États membres de l'accès aux emplois de capitaine et de second de la marine marchande ne saurait être justifiée par les raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique visées à l'article 39, paragraphe 3, CE, dès lors que la faculté pour les États membres de limiter la libre circulation des personnes pour ces raisons n'a pas pour objet de mettre des secteurs économiques, tel celui de la marine marchande, ou des professions, telle celle de capitaine ou de second de navires marchands, à l'abri de l'application de ce principe, du point de vue de l'accès à l'emploi, mais vise à permettre aux États membres de refuser l'accès ou le séjour sur leur territoire à des personnes dont l'accès ou le séjour sur ces territoires constituerait, en tant que tel, un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la santé publique.

( voir points 48-49 )

3. L'exécution des obligations que le traité ou le droit dérivé imposent aux États membres ne saurait être soumise à une condition de réciprocité.

( voir point 61 )

4. L'article 39 CE doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à ce qu'un État membre subordonne à une condition de réciprocité l'accès des ressortissants des autres États membres aux emplois de capitaine et de second de navires marchands battant son pavillon.

( voir point 62, disp. 2 )

Parties

Dans l'affaire C-405/01,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 234 CE, par le Tribunal Supremo (Espagne) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Colegio de Oficiales de la Marina Mercante Española

et

Administración del Estado,

en présence de:

Asociación de Navieros Españoles (ANAVE),

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de l'article 39 CE ainsi que des articles 1er et 4 du règlement (CEE) n° 1612/68 du Conseil, du 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de la Communauté (JO L 257, p. 2),

LA COUR,

composée de M. G. C. Rodríguez Iglesias, président, MM. J.-P. Puissochet, M. Wathelet (rapporteur), R. Schintgen et C. W. A. Timmermans, présidents de chambre, MM. C. Gulmann, D. A. O. Edward, A. La Pergola, P. Jann et V. Skouris, Mmes F. Macken et N. Colneric, MM. S. von Bahr, J. N. Cunha Rodrigues et A. Rosas, juges,

avocat général: Mme C. Stix-Hackl,

greffier: Mme M.-F. Contet, administrateur principal,

considérant les observations écrites présentées:

- pour le gouvernement espagnol, par Mme N. Díaz Abad, en qualité d'agent,

- pour le gouvernement danois, par MM. J. Molde et J. Bering Liisberg, en qualité d'agents,

- pour le gouvernement allemand, par MM. W.-D. Plessing et R. Stüwe, en qualité d'agents,

- pour le gouvernement hellénique, par Mmes E.-M. Mamouna et S. Chala, en qualité d'agents,

- pour le gouvernement français, par M. G. de Bergues et Mmes A. Colomb et C. Bergeot-Nunes, en qualité d'agents,

- pour le gouvernement italien, par M. U. Leanza, en qualité d'agent, assisté de M. G. Fiengo, avvocato dello Stato,

- pour le gouvernement norvégien, par M. H. Seland, en qualité d'agent,

- pour la Commission des Communautés européennes, par Mme I. Martínez del Peral et M. D. Martin, en qualité d'agents,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de la défenderesse au principal et du gouvernement espagnol, représentés par Mme N. Díaz Abad, du gouvernement allemand, représenté par M. M. Lumma, en qualité d'agent, du gouvernement hellénique, représenté par Mme E.-M. Mamouna, du gouvernement français, représenté par M. G. de Bergues et Mme C. Bergeot-Nunes, et de la Commission, représentée par Mme I. Martínez del Peral et M. H. Kreppel, en qualité d'agent, à l'audience du 21 janvier 2003,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 12 juin 2003,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1 Par ordonnance du 4 octobre 2001, parvenue à la Cour le 15 octobre suivant, le Tribunal Supremo a posé, en vertu de l'article 234 CE, deux questions préjudicielles sur l'interprétation de l'article 39 CE ainsi que des articles 1er et 4 du règlement (CEE) n° 1612/68 du Conseil, du 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de la Communauté (JO L 257, p. 2).

2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un recours en annulation introduit par le Colegio de Oficiales de la Marina Mercante Española (collège des officiers de la marine marchande espagnole, ci-après le «collège des officiers») à l'encontre du Real Decreto 2062/1999, por el que se regula el nivel mínimo de formación en profesiones marítimas (décret royal n° 2062/1999, réglementant le niveau minimal de formation des gens de mer), du 30 décembre 1999 (BOE du 21 janvier 2000, ci-après le «décret royal n° 2062/1999»).

Le cadre juridique

Les dispositions communautaires

3 Aux termes de l'article 39 CE:

«1. La libre circulation des travailleurs est assurée à l'intérieur de la Communauté.

2. Elle implique l'abolition de toute discrimination, fondée sur la nationalité, entre les travailleurs des États membres, en ce qui concerne l'emploi, la rémunération et les autres conditions de travail.

3. Elle comporte le droit, sous réserve des limitations justifiées par des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique:

a) de répondre à des emplois effectivement offerts,

b) de se déplacer à cet effet librement sur le territoire des États membres,

c) de séjourner dans un des États membres afin d'y exercer un emploi conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives régissant l'emploi des travailleurs nationaux,

d) de demeurer, dans des conditions qui feront l'objet de règlements d'application établis par la Commission, sur le territoire d'un État membre, après y avoir occupé un emploi.

4. Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux emplois dans l'administration publique.»

4 Par ailleurs, l'article 1er du règlement n° 1612/68 dispose:

«1. Tout ressortissant d'un État membre, quel que soit le lieu de sa résidence, a le droit d'accéder à une activité salariée et de l'exercer sur le territoire d'un autre État membre, conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives régissant l'emploi des travailleurs nationaux de cet État.

2. Il bénéficie notamment sur le territoire d'un autre État membre de la même priorité que les ressortissants de cet État dans l'accès aux emplois disponibles.»

5 L'article 4 du même règlement prévoit:

«1. Les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres limitant, en nombre ou en pourcentage, par entreprise, par branche d'activité, par région ou à l'échelon national, l'emploi des étrangers, ne sont pas applicables aux ressortissants des autres États membres.

2. Lorsque dans un État membre, l'octroi d'avantages quelconques à des entreprises est subordonné à l'emploi d'un pourcentage minimum de travailleurs nationaux, les ressortissants des autres États membres sont comptés comme travailleurs nationaux, sous réserve des dispositions de la directive du Conseil du 15 octobre 1963 [¼ ].»

Les dispositions internationales

6 La convention des Nations unies sur le droit de la mer, signée à Montego Bay le 10 décembre 1982, contient, dans sa partie VII, intitulée «Haute mer», section I, intitulée «Dispositions générales», qui regroupe les...

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