Mehmet Arslan v Policie ČR, Krajské ředitelství policie Ústeckého kraje, odbor cizinecké policie.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2013:343
Date30 May 2013
Celex Number62011CJ0534
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC‑534/11
62011CJ0534

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

30 mai 2013 ( *1 )

«Espace de liberté, de sécurité et de justice — Directive 2008/115/CE — Normes et procédures communes en matière de retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier — Applicabilité aux demandeurs d’asile — Possibilité de garder en rétention un ressortissant de pays tiers après l’introduction d’une demande d’asile»

Dans l’affaire C‑534/11,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Nejvyšší správní soud (République tchèque), par décision du 22 septembre 2011, parvenue à la Cour le 20 octobre 2011, dans la procédure

Mehmet Arslan

contre

Policie ČR, Krajské ředitelství policie Ústeckého kraje, odbor cizinecké policie,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. M. Ilešič (rapporteur), président de chambre, MM. E. Jarašiūnas, A. Ó Caoimh, Mme C. Toader et M. C. G. Fernlund, juges,

avocat général: M. M. Wathelet,

greffier: M. M. Aleksejev, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 7 novembre 2012,

considérant les observations présentées:

pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek et J. Vláčil, en qualité d’agents,

pour le gouvernement allemand, par M. N. Graf Vitzthum, en qualité d’agent,

pour le gouvernement français, par MM. G. de Bergues et S. Menez, en qualité d’agents,

pour le gouvernement slovaque, par Mme B. Ricziová, en qualité d’agent,

pour le gouvernement suisse, par M. D. Klingele, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par Mmes M. Condou-Durande et M. Šimerdová, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 31 janvier 2013,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 2, paragraphe 1, de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (JO L 348, p. 98), lu en combinaison avec le considérant 9 de celle-ci.

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Arslan, ressortissant turc arrêté et placé en rétention en République tchèque en vue de son éloignement administratif et ayant, lors de cette rétention, introduit une demande de protection internationale en application de la législation nationale relative à l’asile, à la Policie ČR, Krajské ředitelství policie Ústeckého kraje, odbor cizinecké policie (police de la République tchèque, direction régionale de la région d’Ústí, section «police des étrangers»), au sujet de la décision de cette dernière, du 25 mars 2011, de prolonger la rétention initiale de 60 jours pour une période supplémentaire de 120 jours.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 2008/115

3

Les considérants 2, 4, 8, 9 et 16 de la directive 2008/115 énoncent:

«(2)

Le Conseil européen [...] a recommandé la mise en place d’une politique efficace d’éloignement et de rapatriement basée sur des normes communes, afin que les personnes concernées soient rapatriées d’une façon humaine et dans le respect intégral de leurs droits fondamentaux et de leur dignité.

[...]

(4)

Il est nécessaire de fixer des règles claires, transparentes et équitables afin de définir une politique de retour efficace, constituant un élément indispensable d’une politique migratoire bien gérée.

[...]

(8)

La légitimité de la pratique du retour par les États membres des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier est reconnue, à condition que soient en place des régimes d’asiles justes et efficaces qui respectent pleinement le principe de non-refoulement.

(9)

Conformément à la [directive 2005/85/CE du Conseil, du 1er décembre 2005, relative à des normes minimales concernant la procédure d’octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres (JO L 326, p. 13)], le ressortissant d’un pays tiers qui a demandé l’asile dans un État membre ne devrait pas être considéré comme étant en séjour irrégulier sur le territoire de cet État membre avant qu’une décision négative sur sa demande ou une décision mettant fin à son droit de séjour en tant que demandeur d’asile soit entrée en vigueur.

[...]

(16)

Le recours à la rétention aux fins d’éloignement devrait être limité et subordonné au respect du principe de proportionnalité en ce qui concerne les moyens utilisés et les objectifs poursuivis. La rétention n’est justifiée que pour préparer le retour ou procéder à l’éloignement et si l’application de mesures moins coercitives ne suffirait pas.»

4

L’article 1er de la directive 2008/115, intitulé «Objet», prévoit:

«La présente directive fixe les normes et procédures communes à appliquer dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, conformément aux droits fondamentaux en tant que principes généraux du droit communautaire ainsi qu’au droit international, y compris aux obligations en matière de protection des réfugiés et de droits de l’homme.»

5

L’article 2, paragraphe 1, de cette directive, intitulé «Champ d’application», dispose:

«La présente directive s’applique aux ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d’un État membre.»

6

L’article 3, point 2, de ladite directive définit la notion de «séjour irrégulier» comme étant «la présence sur le territoire d’un État membre d’un ressortissant d’un pays tiers qui ne remplit pas, ou ne remplit plus, les conditions [...] d’entrée, de séjour ou de résidence dans cet État membre».

7

L’article 6, paragraphe 1, de la directive 2008/115 prévoit que «[l]es États membres prennent une décision de retour à l’encontre de tout ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire [...]».

8

Aux termes de l’article 15 de ladite directive:

«1. À moins que d’autres mesures suffisantes, mais moins coercitives, puissent être appliquées efficacement dans un cas particulier, les États membres peuvent uniquement placer en rétention le ressortissant d’un pays tiers qui fait l’objet de procédures de retour afin de préparer le retour et/ou de procéder à l’éloignement, en particulier lorsque:

a)

il existe un risque de fuite, ou

b)

le ressortissant concerné d’un pays tiers évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement.

Toute rétention est aussi brève que possible et n’est maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise.

[...]

4. Lorsqu’il apparaît qu’il n’existe plus de perspective raisonnable d’éloignement pour des considérations d’ordre juridique ou autres ou que les conditions énoncées au paragraphe 1 ne sont plus réunies, la rétention ne se justifie plus et la personne concernée est immédiatement remise en liberté.

5. La rétention est maintenue aussi longtemps que les conditions énoncées au paragraphe 1 sont réunies et qu’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien. Chaque État membre fixe une durée déterminée de rétention, qui ne peut pas dépasser six mois.

6. Les États membres ne peuvent pas prolonger la période visée au paragraphe 5, sauf pour une période déterminée n’excédant pas douze mois supplémentaires, conformément au droit national, lorsque, malgré tous leurs efforts raisonnables, il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison:

a)

du manque de coopération du ressortissant concerné d’un pays tiers, ou

b)

des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires.»

La directive 2005/85

9

La directive 2005/85 a, en vertu de son article 1er, pour objet d’établir des normes minimales concernant la procédure d’octroi et de retrait du statut de réfugié. Elle régit essentiellement le dépôt des demandes d’asile, la procédure de traitement de ces demandes et les droits et obligations des demandeurs d’asile.

10

L’article 2 de cette directive prévoit notamment que, aux fins de celle-ci, on entend par:

«[...]

b)

‘demande’ ou ‘demande d’asile’, la demande introduite par un ressortissant d’un pays tiers ou un apatride et pouvant être considérée comme une demande de protection internationale de la part d’un État membre en vertu de la [convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 [Recueil des traités des Nations unies, vol. 189, p. 150, no 2545 (1954)], entrée en vigueur le 22 avril 1954]. Toute demande de protection internationale est présumée être une demande d’asile, à moins que la personne concernée ne sollicite explicitement un autre type de protection pouvant faire l’objet d’une demande séparée;

c)

‘demandeur’ ou ‘demandeur d’asile’, le ressortissant d’un pays tiers ou l’apatride ayant présenté une demande d’asile sur laquelle aucune décision finale n’a encore été prise;

d)

‘décision finale’, toute décision établissant si le ressortissant d’un pays tiers ou l’apatride se voit accorder le statut de réfugié [...] et qui n’est plus susceptible d’un recours formé dans le cadre du chapitre V de la présente directive, que ce recours ait ou n’ait pas pour effet de permettre à un demandeur de demeurer sur le territoire de l’État membre concerné en attendant son aboutissement, sous réserve de l’annexe III de la présente directive;

e)

‘autorité responsable de la...

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