Centre public d’action sociale d’Ottignies-Louvain-La-Neuve v Moussa Abdida.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2014:2453
Date18 December 2014
Celex Number62013CJ0562
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC‑562/13
62013CJ0562

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

18 décembre 2014 ( *1 )

«Renvoi préjudiciel – Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Articles 19, paragraphe 2, et 47 – Directive 2004/83/CE – Normes minimales relatives aux conditions d’octroi du statut de réfugié ou du statut conféré par la protection subsidiaire – Personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire – Article 15, sous b) – Torture ou traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine – Article 3 – Normes plus favorables – Demandeur atteint d’une grave maladie – Absence de traitement adéquat disponible dans le pays d’origine – Directive 2008/115/CE – Retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier – Article 13 – Recours juridictionnel avec effet suspensif – Article 14 – Garanties dans l’attente du retour – Besoins de base»

Dans l’affaire C‑562/13,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la cour du travail de Bruxelles (Belgique), par décision du 25 octobre 2013, parvenue à la Cour le 31 octobre 2013, dans la procédure

Centre public d’action sociale d’Ottignies-Louvain-la-Neuve

contre

Moussa Abdida,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, M. K. Lenaerts, vice-président, MM. M. Ilešič, L. Bay Larsen (rapporteur), T. von Danwitz, J.-C. Bonichot et Mme K. Jürimäe, présidents de chambre, MM. A. Rosas, E. Juhász, A. Arabadjiev, Mme C. Toader, MM. M. Safjan, D. Šváby, Mmes M. Berger et A. Prechal, juges,

avocat général: M. Y. Bot,

greffier: M. V. Tourrès, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 24 juin 2014,

considérant les observations présentées:

pour le centre public d’action sociale d’Ottignies-Louvain-la-Neuve, par Me V. Vander Geeten, avocat,

pour M. Abdida, par Me O. Stein, avocat,

pour le gouvernement belge, par Mme C. Pochet et M. T. Materne, en qualité d’agents, assistés de Mes J.-J. Masquelin, D. Matray, J. Matray, C. Piront et N. Schynts, avocats,

pour le gouvernement français, par MM. F.-X. Bréchot et D. Colas, en qualité d’agents,

pour le gouvernement du Royaume-Uni, par M. C. Banner, barrister,

pour la Commission européenne, par Mme M. Condou-Durande et M. R. Troosters, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 4 septembre 2014,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 2003/9/CE du Conseil, du 27 janvier 2003, relative à des normes minimales pour l’accueil des demandeurs d’asile dans les États membres (JO L 31, p. 18), de la directive 2004/83/CE du Conseil, du 29 avril 2004, concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou les personnes qui, pour d’autres raisons, ont besoin d’une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts (JO L 304, p. 12, et rectificatifs JO 2005, L 204, p. 24, et JO 2011, L 278, p. 13), de la directive 2005/85/CE du Conseil, du 1er décembre 2005, relative à des normes minimales concernant la procédure d’octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres (JO L 326, p. 13, et rectificatif JO 2006, L 236, p. 36), ainsi que des articles 1er à 4, 19, paragraphe 2, 20, 21 et 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la «Charte»).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant le centre public d’action sociale d’Ottignies-Louvain-la-Neuve (ci-après le «CPAS») à M. Abdida, ressortissant nigérien, au sujet de la décision de retrait de l’aide sociale que cet organisme a prise à son encontre.

Le cadre juridique

La convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales

3

La convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la «CEDH»), prévoit à son article 3, intitulé «Interdiction de la torture»:

«Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants.»

4

L’article 13 de cette convention est ainsi rédigé:

«Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l’octroi d’un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles.»

Le droit de l’Union

La directive 2003/9

5

L’article 3 de la directive 2003/9, intitulé «Champ d’application», dispose:

«1. La présente directive s’applique à tous les ressortissants de pays tiers et apatrides qui déposent une demande d’asile à la frontière ou sur le territoire d’un État membre tant qu’ils sont autorisés à demeurer sur le territoire en qualité de demandeurs d’asile [...]

[...]

4. Les États membres peuvent décider d’appliquer la présente directive aux procédures de traitement des demandes de formes de protection autres que celle qui découle de la convention (relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 [Recueil des traités des Nations unies, vol. 189, p. 150, no 2545 (1954)]) pour les ressortissants de pays tiers ou les apatrides pour lesquels il est établi qu’ils ne sont pas des réfugiés.»

La directive 2004/83

6

L’article 1er de la directive 2004/83, intitulé «Objet et champ d’application», énonce:

«La présente directive a pour objet d’établir des normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants de pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou les personnes qui, pour d’autres raisons, ont besoin d’une protection internationale, et relatives au contenu de la protection accordée.»

7

L’article 2, sous c), e) et g), de cette directive dispose:

«Aux fins de la présente directive, on entend par:

[...]

c)

‘réfugié’, tout ressortissant d’un pays tiers qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays [...]

[...]

e)

‘personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire’, tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 15 [...] et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays;

[...]

g)

‘demande de protection internationale’, la demande de protection présentée à un État membre par un ressortissant d’un pays tiers ou un apatride, qui peut être comprise comme visant à obtenir le statut de réfugié ou le statut conféré par la protection subsidiaire, le demandeur ne sollicitant pas explicitement un autre type de protection hors du champ d’application de la présente directive et pouvant faire l’objet d’une demande séparée».

8

L’article 3 de ladite directive précise:

«Les États membres peuvent adopter ou maintenir des normes plus favorables pour décider quelles sont les personnes qui remplissent les conditions d’octroi du statut de réfugié ou de personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et pour déterminer le contenu de la protection internationale, dans la mesure où ces normes sont compatibles avec la présente directive.»

9

L’article 15 de la directive 2004/83, figurant au chapitre V de celle-ci, intitulé «Conditions à remplir pour être considéré comme personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire», dispose sous le titre «Atteintes graves»:

«Les atteintes graves sont:

a)

la peine de mort ou l’exécution, ou

b)

la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine, ou

c)

des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international.»

La directive 2005/85

10

L’article 3 de la directive 2005/85, intitulé «champ d’application», est libellé comme suit:

«1. La présente directive s’applique à toutes les demandes d’asile introduites sur le territoire des États membres, y compris à la frontière ou dans une zone de transit, ainsi qu’au retrait du statut de réfugié.

[...]

3. Lorsque les États membres utilisent ou instaurent une procédure dans le cadre de laquelle les demandes d’asile sont examinées en tant que demandes fondées sur la convention [relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951], et en tant que demandes des autres types de protection internationale accordée dans les circonstances précisées à l’article 15 de la directive 2004/83/CE, ils appliquent la présente directive pendant toute leur procédure.

4. En outre, les États membres peuvent décider d’appliquer la présente directive aux procédures de traitement des demandes visant tout type de protection internationale.»

La directive 2008/115/CE

11

Les considérants 2 et 12 de la directive...

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